Updated: Dec. 31, 2024 (Initial publication: Jan. 1, 2024)
Organization of scientific events
► Full Reference: M.-A. Frison-Roche, Coordination of the cycle of conference-debates Contentieux Systémique Émergent (Emerging Systemic Litigation), organised on the initiative of the Cour d'appel de Paris (Paris Cour of Appeal), with the Cour de cassation (French Court of cassation), the Cour d'appel de Versailles (Versailles Court of Appeal), the École nationale de la magistrature - ENM (French National School for the Judiciary) and the École de formation des barreaux du ressort de la Cour d'appel de Paris - EFB (Paris Bar School), under the scientific direction of Marie-Anne Frison-Roche
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► This Cycle in few words: Duty of vigilance, supervision of platforms, non-financial information (CSRD), etc.: as many new texts that bring new types of disputes before the courts.
Despite their diversity, the cases brought before the most diverse judges present a unity: through the dispute that pits the parties against each other, it is a system that is at stake, for example the climate system, digital system, energy system, financial system, etc.
New regulations are just the illustration of this "Emerging Systemic Litigation"; the conference-debates aiming at showing the new fields, new techniques, new standards, etc., in relation to the scale and diversity of stakeholders' expectations. This cycle is designed to encourage cross-fertilisation, so as to provide judges with food for thought ahead of the litigation they will be called upon to deal with.
Les réglementations nouvelles ne sont que l’illustration de ce « contentieux systémique émergent » dont la formation a pour objet de montrer les nouveaux champs, les nouvelles techniques, les nouvelles normes, etc., en lien avec l’ampleur et la diversité des attentes des parties prenantes. Le cycle vise à favoriser les échanges croisés, afin d’alimenter la réflexion des magistrats en amont des litiges qui leurs seront soumis.
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🔴Registrations and information requests can be sent to: inscriptionscse@gmail.com
🔴For the attorneys, registrations have to be sent to the following address: https://evenium.events/cycle-de-conferences-contentieux-systemique-emergent/
⚠️The conference-debates are held in person only, in the Cour d’appel de Paris (Paris Court of Appeal).
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► General Presentation of the Cycle: In 2024, the Cour d’appel de Paris (Paris Court of Appeal) created a new specialised chamber: chamber 5-12 Contentieux émergent – Devoir de vigilance et responsabilité écologique (Emerging litigation - Duty of vigilance and environmental liability). Vigilance litigation is an example of what is emerging more generally: Systemic Litigation, often linked to technologies. This calls for a new way of judging, organising procedures and relations between professionals. A series of conference-debates on Emerging Systemic Litigation (ESL) is being organised jointly by the Paris Court of Appeal, the Versailles Court of Appeal, the Cour de cassation (French Court of cassation), the École nationale de la magistrature - ENM (French National School for the Judiciary) and the École de formation des barreaux du ressort de la Cour d'appel de Paris - EFB (Paris Bar School), under the scientific responsibility of Professor Marie-Anne Frison-Roche.
In this context, a series of conference-debates involving professionals from a wide range of backgrounds is being proposed on the following themes:
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🧮read below the full programme of this cycle of conference-debates⤵️
June 6, 2024
Publications
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🌐subscribe to the Newsletter MAFR Regulation, Compliance, Law
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► Full Reference: M.-A. Frison-Roche, "François Terré. In memoriam", D. 2024, p. 1028
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🌞read the in memoriam published in the Recueil Dalloz on June 6, 2024 (in French)
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Jan. 15, 2023
Compliance: at the moment
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► Référence complète : M.-A. Frison-Roche, "Si l'algorithme engendre un risque systémique de fraude, l'entreprise doit trouver le moyen de prévenir et détecter celle-ci : cas d'école", Newsletter MAFR Law, Compliance, Regulation, 15 janvier 2023.
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Le cas agite et inquiète à juste titre. Il est notamment relayé dans Le Parisien et dans Libération.
Il apparait qu'un professeur de master découvre que la moitié de la promotion de ses étudiants avait fait écrire sa copie par un algorithme (ChatGPT), dont on dit que les productions mécaniques se rapprochent, à s'y méprendre, du "langage naturel", c'est-à-dire manié par les êtres humains. Il en a résulté des copies correctes, mais si identiques que l'usage de l'outil par les étudiants avait été ainsi détecté.
La dimension systémique du phénomène mérite qu'on y réfléchisse car il s'agit non seulement de détecter mais encore de prévenir le recours à cet outil, si l'on veut que les travaux rendus par les étudiants permettent d'évaluer leurs niveaux.
L'on peut certes rechercher des solutions très radicales, comme obliger les étudiants à écrire à la main dans des contrôles faits sur table et surveillés..., ou interdire le recours aux algorithmes, interdiction dont l'effectivité va être difficile ; ou rêver d'une Université où l'on leur donnerait des sujets de réflexion à traiter chacun d'une façon originale, ce qui suppose sans doute un nombre d'étudiants moins élevés (d'ailleurs, les lycées et collègues sont aussi concernés).
Mais si l'on regarde le "but" : il s'agit bien de prévenir et détecter un comportement systémiquement dommageable, pour l'Université et pour les étudiants eux-mêmes (qui n'auront rien appris ; ce sont les premières victimes).
Or, la prévention et détection des comportements systémiquement dommageables non pas tant pour les sanctionner mais pour qu'ils ne prospèrent pas à l'avenir, ici garder les avantages des algorithmes comme outils et prévenir leur usage dolosif, c'est la définition du Droit de la Compliance comme mode de prévention et de détection des maux systémique. Cela constitue un "but monumental".
🔴 M.-A. Frison-Roche, 📕Les buts monumentaux de la Compliance, 2022
Pour concrétiser une telle ambition, notamment face à la puissance de ces outils neutres que sont les algorithmes, qui permettent d'ailleurs à des professeurs de rédiger sans difficulté des cours sur l'originalité desquels on ne leur demande pas de compte, le Droit de la Compliance présente un atout majeur : il repose sur les entreprises elles-mêmes, notamment celles par lesquelles le risque est né.
Historiquement, le Droit de la Compliance est né aux Etats-Unis, en imposant aux entreprises ayant contribué par leur comportement interne à la crise de 1929 une série d'obligations de prudence, de gestion des conflits d'intérêts, d'information et de soumission à un superviseur.
🔴 M.-A. Frison-Roche, 📝Compliance : avant, maintenant, après, 2018
C'est en effet aux entreprises de trouver les solutions pour détecter et prévenir les comportements systémiques dommageables.
L'article publié dans Libération fait état des travaux menés par les entreprises fabriquant les algorithmes pour que soient insérés dans les textes des signaux, indétectables par l'usager (par exemple l'algorithme achevant une phrase sur dix par un mot finissant par la même lettre, ou une phrase sur vingt par un mot commençant par la même lettre), mais qu'un autre algorithme pourrait "détecter" pour que le travail produit soit analysé par le professeur (comme on le fait déjà en matière de plagiat).
Il s'agit ici d'une "compliance consentie, choisie par l'entreprise elle-même ; cela pourrait être leur être également imposé.
🔴 L. Benzoni et B. Deffains, 📝Approche économique des outils de la Compliance: finalité, effectivité et mesure de la Compliance subie et choisie, in M.-A. Frison-Roche (dir.), 📕Les outils de la Compliance, 2021
Apparaît ainsi le juste et efficace rapport entre le Droit de la Compliance et ce que l'on appelle "l'intelligence artificielle", dès l'instant que l'on n'a précisément pas une vision mécanique du Droit de la Compliance, ce qui permet de laisser les algorithmes à leur place : des "outils".
🔴 M.-A. Frison-Roche, 🎥Compliance, Intelligence artificielle et gestion des entreprises : la juste mesure, 2022
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Nov. 26, 2020
Publications
Full reference : Frison-Roche, M.A., Pour une conception humaniste du Droit des affaires et de son enseignement (For a humanist conception of Business Law and of its teaching), in Un juriste pluriel. Mélanges en l'honneur d'Alain Couret, Editions Francis Lefebvre and Dalloz, 2020, pp.985-990.
Read the article
Read the general presentation of the book in which this article has been published
Updated: July 25, 2020 (Initial publication: July 1, 2020)
Publications
This working document served as the basis for an article, contribution in the collective book Compliance Tools, 2020
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Summary of this working paper:
Training is a specific Compliance tool and a dimension that each Compliance tool expresses.
Firstly, as a training it is a specific Compliance Tool, it is supervised by Regulators. It even becomes compulsory when it is contained in Compliance programs. Since the effectivity and the efficiency are legal requirements, what is therefore the margin of companies to design it and how can we measure its result?
Secondly, as each Compliance Tool contains, more and more, an educational dimension, we can take back each of them to detect this perspective. Thus, even sanctions and prescriptions, are lessons: lessons given, lessons to follow. The question is then to know who, in this so pedagogic Compliance Law, are the "instructors"?
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Introduction:
Training is akin to these things - and very precious - that we do, or even dream of doing, but so poorly expressed from the moment we take them as an object of technical writing. Just do it.
It would be however unfortunate to publish a book on Compliance Tools without giving a particular place to training, the piece would miss in the puzzle.
So much money spent by companies, by fair or foul means, especially when Compliance programs imposed as sanctions contain heavy training obligations leading people to retain word for word everything that is forbidden to them, in order to always abstain from now on. Training is thus the sharp point of such Hard Law appearing under the steel of Criminal Law's sword in amphitheaters and e-learnings.
But also so much speeches about the necessity of a "Compliance culture" which should be instilled to firms, Compliance spousing with joy in an harmony with their "raison d'être" and the historical identity of this group of people which is the company itself through trainings which tell Compliance as a link, an outstretched hand toward those with whom managers want to renew a moral contract in an ethic for which they give the good example. It is not Prohibition anymore but Communication and Community that set the tone of a human dialogue with employees, stakeholders, administration and judges.
It is possible to assume that the former does not exclude the latter, that Training should target all of this, the learning of mandatory prescriptions to follow without discussion but also the adhesion to guidelines, and this because everyone has understood that they are funded.
Everything and its contrary, then. "Learning by heart" takes here its full sense: get everyone to remember mechanically in order for no one to misstep (with always more machines which massively teach us the regulatory corpus on our mobile screens) but also succeed in bringing our "heart" in Compliance, thanks to specific training methods (with always smaller groups, with always less public discussions in pleasant places). Everything and its contrary, then.
It would be imperative but also sufficient to cumulate. Doing everything. Those who propose training softwares as those who organize conferences, meetings and travels and are favorable to this addition of face-to-face and distancing methods, of mechanic and of human relations. Concretely, at the end companies observe that since the first does not replace the second, costs add up. But, in Compliance, costs constitute a grave default of it, training taking a large part of this default. Managers end up finding the addition too heavy, especially if they thought that training of people is one of the public school's mission and not one of private companies' purpose!footnote-1837.
Moreover, training to Compliance is not outside Compliance Law, which makes it specific!footnote-1838. Indeed, Compliance Law, corpus of Ex Ante mechanisms, targets to concretize "monumental goals"!footnote-1836. Set by public authorities, these monumental goals are internalized in companies in order for them to implement expected means in order for them to be reached in the future. These monumental goals can be negative (that corruption, money laundering, human rights violations, financial system crisis, etc. shall not occur), or positive (that ecological equilibrium shall be restored, that education shall be supplied, that healthcare shall be provided, etc.).
Compliance Law takes as criteria of effectivity for implemented mechanisms, their reality, but also their efficiency, that is their ability to make sure their goal is achieved.Training must achieve its goal. Thus, in Compliance, the purpose is not only the one of every training, that is transmitting a knowledge in order to making the student more learned!footnote-1839, but it is to contribute to the "monumental goal" of Compliance Law itself, which is a practical goal and not a scholar goal. For example, training about the applicable rules concerning corruption should have an effect to reduce corruption. And because corruption is itself a part of Compliance Law, in the same way the Regulation Authority can force to educate oneself or train others, the Supervision Authority should control not only the reality but also the effectivity and the efficiency of trainings.
However, the effectivity and the efficiency of Compliance training, because they are full part of Compliance Law, should be controlled by the Authority not only in their reality but also in their concrete ability to participate in the pursued goal. Thus, to keep the example of fight against corruption, training plays in it an essential role because the firm faces an alternative: either a mechanic solution consisting in setting literal interdictions, for example the interdiction to give up a value greater than a certain amount (according to the "anti-gift" rule) with the risk of getting around that every literal prescription offers, or a a solution by training consisting in explaining to everybody that it is wrong to corrupt but that it is acceptable to give samples. Training rather bets on spirit while the machine integrates the letter.
But this refers to the Regulation and Supervision Authority which will appreciate the company due diligences to reach the goals. One observes that, more and more, Authorities economize one step: rather than explain to the companies how educate people that work for them or with them, regulators educate directly. Is on this point remarkable the "guide" published in 2012, whose second edition of 2019 has been updated in 2020, jointly by the Department of Justice (DoJ) and the financial regulator (Securities &Exchanges Commission - SEC) to know everything about the Foreign Corruption Practices Act (FCPA). Through the explanations offered to everyone!footnote-1840 of the principles, the reminded definitions, the told cases, they are behaviors prescriptions which are formulated especially for foreign companies by the prosecutor authority and the American sanction authority, allied in this handbook which has such weight that we can consider that it is as valuable as a guideline, soft law creator of Law and rights.
In the concentration of all powers which is often reproached to the Regulator, there is also the magisterium of the teacher, the one who educates stakeholders. After having assumed, on the American model, that the regulator should be the "advocate" of the rules for companies, proving to them the interest that they have to respect them, it is logical that, in what some have called "Regulation, Act 2" this Regulator's pleading about the good news of Regulation for the firm justifying thus that this one integrates it in Ex Ante was prolonged in magistral lesson: the "regulator-institutor" explains to everybody how using rules for an always still in progress Law ("Better Regulation").
While training was before only peripheral, it is now at the heart. If it is so important, as every other "Compliance tool", it should take what we expect from it. The publications about training most often exhibit what it should be and a sorrowful spirit measures what sometimes appears as a huge gap between descriptions and realities sometimes reported.
Educating being without any doubt one of the most difficult actions, we should probably neither describe a paradise of maieutics nor write a hot paper against what already has the merit to exist, but list what we can expect from Training mechanisms when they apply to Compliance, because here, rather more than for the other tools, it is a mean obligation. Which content should have a training ? (I). Because Compliance Law targets training as one of the mean to reach "monumental goals" which constitutes the substantial heart of this branch of Law, the training dimension is not limited to stamped training, finding back this pedagogical dimension in almost all the other tools (II). In that, Training appears as the alpha and the omega of Compliance.
Sept. 7, 2019
Blog
Lisant sur mon écran d'ordinateur un article en accès libre dans une revue en partie librement accessible numériquement, une mention attire mon attention.
Elle a de quoi laisser perplexe toute personne qui écrit des articles et ouvrage qui requiert des lectures, lectures dont on indique au lecteur la trace pour l'inviter à son tour à y procéder dans ses propres recherches. Dans des travaux de recherche, de découverte et d'interrogation, donc.
Voilà le texte de la mention. :
Des DOI (Digital Object Identifier) sont automatiquement ajoutés aux références par Bilbo, l'outil d'annotation bibliographique d'OpenEdition.
Les utilisateurs des institutions abonnées à l'un des programmes freemium d'OpenEdition peuvent télécharger les références bibliographiques pour lesquelles Bilbo a trouvé un DOI.
"sont automatiquement ajoutés" ?
Il s'agit littéralement d'un "outil d'annotation bibliographique" ?
Si l'on s'abonne (le prix n'est pas indiqué, mais quand on écrit "-ium", c'est pour dire que l'on sort du gratuit...; comme le fait l'entreprise américaine Academia qui propose rapidement de "upgrapder" par un service payant pour accéder ), automatiquement les références seront téléchargées dès l'instant que l'algorithme, répondant au nom de "Bilbo" (n'est-ce pas le nom d'un personnage dans Le seigneur des anneaux ?), mais qui dans le civil a un nom qui reproduit sa fonction (Digital Object Identifier) fonction exprimée en langue anglaise va "automatiquement ajouter" une référence aux autres références qui auront été tacquées par l'algorithme.
Est-ce raisonnable ? Est-ce efficace ? Est-ce sans danger ?
C'est mécaniquement efficace, dès l'instant que l'on conçoit la référence bibliographique comme un "entassement mécanique" (I). Mais la référence bibliographique est et doit être tout autre chose, ce que les machines ne peuvent en rien restituer : être le reflet du parcours intellectuel que l'être humain qui écrivit l'article ou l'ouvrage fit pour écrit ce texte-là, une invitation à la lecture (et les machines ne lisent pas, on en arrive aujourd'hui à devoir le rappeler). Cette définition qui fut partagée de la bibliographie, qui ne mesure pas l'ampleur de l'empilement mais dessine ce vers quoi l'auteur s'est tourné pour chercher, pour trouver des réponses aux questions qu'il s'est posées, cela seul une personne peut le faire. En rien "Bilbo" (II). Or, si l'on se repose sur celui-ci, contre un abonnement, pour faire cette tâche-là, qui n'est reflet de rien, non seulement la bibliographie ne sera plus rien, mais des effets pervers, comme ceux observés comme celui des "citations", vont s'accroître (III).
Ensuite, si Bilbo écrit les bibliographie, tandis que Sophia fait les conférences, pourquoi un autre algorithme, que l'on pourrait appeler Thesarus ne pourrait pas écrire thèse, livre, essai, article, en ayant compilé toutes les règles formelles à respecter. Pourquoi non ? On se souviendra alors que les machines et les suites de chiffres ne lisent pas, n'écrivent pas, ne conçoivent pas, n'apprennent pas (l'expression Learning machine est un oximore), ne mémorisent pas (la "mémoire" d'un ordinaire n'est qu'une image), ne traduisent pas, n'ont pas d'émotion, n'aiment pas. Seuls les êtres humains le peuvent. Le sait-on encore ?
Lire ci-dessous une analyse plus détaillée.
June 29, 2019
Law by Illustrations
Le titre du film réalisé par Georges Cukor en 1950 Born Yesterday a été traduit en français par de la façon suivante : Comment l'esprit vient aux femmes.
Comme le titre anglais d'origine était plus pertinent : Born yesterday.
En effet, il s'agit dans ce merveilleux film, léger, construit, où même les méchants sont gentils (le personnage du caïd, qui ne veut pas que l'on puisse voir qu'il aime la jeune femme), de montrer comment un esprit simple et droit peut aisément apprendre le Droit. Il suffit pour cela "être né d'hier".
Ce qu'en français l'on désigne par l'expression "né de la dernière pluie", pour s'exclamer aussitôt qu'on ne l'est pas !
I. ÊTRE NÉ D'HIER, EN MATIÈRE JURIDIQUE
C'est en cela que celui qui n'est pas "né d'hier" en matière juridique, c'est-à-dire l'avocat, celui qui mène le personnage malhonnête à Washington, jusqu'aux marches du Capitole, pour qu'il puisse acheter un congressman, l'avocat qui organise l'achat de la Loi, celui qui connait la technique juridique et les personnes qui écrivent les textes qui régissent le peuple, c'est celui-là qui piétine la justice.
Mais celle qui est "née d'hier", c'est-à-dire celle qui ne connait rien à rien, qui est qualifiée par tous de "très bête", qui se présente elle-même comme "stupide", qui dit à chacun qu'elle ne comprend rien, qu'elle ne sait rien, qu'elle ne retient rien, c'est elle qui va apprendre le Droit (et non pas à "avoir de l'esprit", comme le dit si mal cette traduction, nous ne sommes en rien dans un film de Guitry).
Elle est la fiancée de l'entrepreneur malhonnête venu avec son avocat à Washington pour obtenir un amendement qui lui permettra de faire prospérer ses affaires, au détriment de ses concurrents honnêtes. Mais elle se tient si sottement qu'ils décident de lui donner un peu "d'éducation".
Comme elle ne connait rien à rien, qu'elle n'a aucune érudition, alors chacun sourit en coin ("qu'elle est bête, pensent-ils) : quand on lui parle d'Holmes comme un grand personnage, elle demande s'il sera là au dîner ? Puisqu'il est un si grand personnage, cela doit être bien intéressant de l'avoir en voisin de table. Et chacun de sourire en coin. Mais de vous à moi, beaucoup de personnes connaissent-ils Holmes ? Et, entre experts en droit, ne rêverions-nous pas de dîner avec Holmes ? En disant cela, cette personne n'a-t-elle pas exprimé naturellement le désir de parler de justice avec un très grand juge ?
Elle parle avec pertinence, car aujourd'hui nous aimerions bien dîner avec Justice Ginsburg, ce personnage de super-héros de B.D.
Parce que présentant ainsi, Justice Ginsburg ne fait pas peur. Dans le film, la jeune fille qui est dans "l'enfance du Droit" comme certains ont la chance d'être dans "l'enfance de l'Art", s'était fait reprendre avec condescendance après sa gaffe sur Holmes par une remarque générale de l'avocat sur la "Cour Suprême" a demandé à son éducateur s'il savait lui ce que c'était cette "cour suprême" dont elle ignorait l'existence. Et oui, lui il connaissait. C'est comme ça qu'ils sont allés s'y promener. Tant qu'à être à Washington, autant se promener.
Mais est-ce si important de connaître la Cour suprême, son fonctionnement, sa jurisprudence et ses cas pendants ? Notre jeune héroîne du film de Cukor fût très bien éduquée par son père, liftier de son état, qui ne pouvait donc ni lui payer des études, ni lui apprendre le Droit, mais lui inculqua qu'il ne fallait rien faire que l'on ne puisse ensuite voir écrit dans le New York Times. Ce qu'elle a retenu. L'on devrait chaque jour se répéter cela, se souvenir que cette presse-là, et de ce journal-là, cité par un homme qui passa sa vie à faire monter et descendre les autres dans un ascenseur, journal qui recueille les comportements des autres et permet au peuple de se forger une opinion à leurs propos.
C'est d'ailleurs le New-York Times qui dessina la super-héroine Ruth Ginsberg :
Mais notre personnage eût une sorte de malédiction : sa beauté. C'est la malédiction des femmes. Elle devint donc danseuse. Et sans doute dans des spectacles peu habillées. Ne gagnant pas d'argent. L'arrivée du caïd fût donc une aubaine. Qu'elle cache à son père, parce qu'elle sait que c'est mal de se vendre. Mais que faire d'autre quand on est belle et bête ?
Quand le personnage qui doit l'éduquer pour qu'elle se tienne bien dans les diners en ville et ne recommence pas la bourde sur Holmes (mais vous, à propos, vous pourriez me parler de Holmes ?) lui demande si elle lit les journaux, elle s'effraie et répond qu'elle ne peut pas les lire, et n'en lit aucun : elle est si bête, stupide et sa tête est si vide.
Il l'emmène alors voir en statue un garçon bien sympathique; il s'appelle Thomas. Il a dit des choses qu'elle comprend : "de toutes mes forces, je m'élèverai contre la tyrannie". Cela lui plait, elle est d'accord. C'est un peu ce que lui disait son père et elle pense pareil. Il lui plaît bien, ce Thomas. Comment déjà ? Ah oui, Jefferson. Car quand on est "née d'hier", l'on n'a pas peur des monstres sacrés. S'ils ont dit des chose justifiées, cela devient des amis. L'histoirer du Droit est un "droit vivant".
Et celui qui l'accompagne ne se moque pas d'elle. C'est ainsi qu'elle lit la Déclaration d'indépendance, la Constitution des Etats-Unis, la Déclaration des Droits. Elle s'y reconnaît. Elle demande si ces textes si bien sont connus des autres personnes, parce que cela serait une si bonne idée. Et son mentor, en adoration devant un esprit si pur et si vif et si moral, répond que le pays fût construit sur ces trois textes. Elle trouve que c'est bien, tandis que la force des ces textes-là pénètrent en elle.
Pourquoi n'apprend-on pas le Droit ainsi ?
Sans doute parce que nous sommes des demi-savants et que jamais nous ne prenons Portalis comme un ami, que nous ne le voyons comme celui avec lequel nous dinerons très volontiers pour lui demander si les lois sont faites pour les hommes ou si les hommes sont faits pour les lois .... Tout de suite, parce que notre esprit n'est pas entièrement disponible, déjà encombré de quelques règles techniques, nous nous alourdissons de textes moins importants. Et nous devenons des ouvriers de cette technique que serait le droit.
II. LA QUALIFICATION NATURELLE PAR UN ESPRIT VIF ET FRAIS D'UNE SITUATION DE CARTEL
Avec ses nouveaux amis que sont Jefferson (le législateur) et Holmes (le juge), elle regarde ce qu'elle fait elle-même.
Or, elle n'arrête pas de signer des documents dont l'avocat lui répète qu'ils ne sont rien, qu'il ne faut les lire, qu'il faut comme d'habitude les signer.
Mais maintenant qu'elle n'a plus peur de son ignorance technique, elle dit qu'elle veut lire avant de signer. Il n'est pas besoin de connaître le Droit des contrats et le Droit des sociétés pour se dire cela.
Si l'avocat qui lui intime de signer ne lui explique pas ce qu'elle signe, elle ne signera pas.
Il lui explique alors que c'est une série de prise de contrôle d'entreprises de diverses nationalités, notamment françaises et italiennes, menés par son compagnon mais c'est elle qui signe. Il utilise même le terme technique de merger, se disant peut-être qu'en allant vers l'incompréhensible, elle va reculer et donc, en ne comprenant pas, elle signera d'autant plus.
Entretenir l'incompréhension d'une matière, c'est permettre à celle-ci de régner d'autant plus. Les techniciens de celle-ci le savent.
Mais la voilà qui s'exclame : "mais c'est un cartel ! et c'est très mal ! je ne signerai jamais".
Une application du Droit de la concurrence dans un film de Cukor, voilà un joli cas pratique, non ?
Ainsi, une inculte, une demeurée, une qui ne lit aucun journal, sait qualifier une situation ; mieux encore sait requalifier une situation. L'avocat lui présente la situation comme une "prise de contrôle", ce qui est régi par le Droit des sociétés et constitue une situation licite, mais elle requalifie la situation en "abus de marché" par la constitution d'un cartel, ce qui est sanctionné par le Droit de la concurrence car constituant une situation illicite.
Comment d'années d'études faut-il pour arriver à une telle aptitude ? Oui, mais si l'on est "née d'hier", l'on sait qu'il y a une entourloupe et que dans le pays du Searman Act (dont elle ignore l'existence) un accroissement de puissance bloque l'action de autres entreprises, ce qui est "mal" par rapport à la liberté d'entreprendre, notamment pour les petites entreprises. Et ça, elle le sent. Car les petits, c'est elle et c'est son père (la crise de 29 est encore dans les esprits).
Or, la distinction entre le bien et le mal n'a pas besoin de savoir technique ; le personnage de l'avocat montre même que le savoir juridique recouvre par les dollars qu'il engendre l'aptitude à les distinguer. Mais elle son esprit est si "vide", c'est-à-dire si pur et si rapide que la morale peut s'y déployer, la technique juridique n'a pas le temps d'y prendre toute la place disponible, la Justice y a naturellement sa place.
III. LA PERCEPTION IMMEDIATE DE CE QUE SONT LES PRINCIPES DE LIBERTE, DE JUSTICE ET DE DROIT, PAR LA FREQUENTATION DE THOMAS JEFFERSON
Pendant la première partie du film, quand elle se croyait bête et inapte alors qu'elle était simplement ignorante et entretenue dans son ignorance, bloquée dans son joli corps, elle répète mécaniquement "nous somms dans un pays de libre expression", mais elle ne comprend pas ce qu'elle dit.
Ensuite, quand elle tente d'apprendre seule, elle prend un ouvrage publié par son mentor, qui écrit de la science politique, prend chaque mot d'une phrase. Ne comprenant aucun de ses mots, elle va les chercher un à un dans le dictionnaire et met bout à bout les définitions. Mais elle ne comprend toujours rien. Elle en conclut que oui elle est vraiment très bête et irrécupérable, bonne à danser et à épouser le caïd.
Mais il ne faut pas lire mot à mot, une phrase se lit dans son ensemble, c'est ce que lui explique son professeur en se promenant dans un jardin, et elle trouve alors que c'est très simple et que oui oui elle aurait dit pareil.
Elle va voir la statue de Jefferson avec lui ; puis elle y retourne seule, retourne et retourne autour de lui. Et relit la frise qui surmonte la statue.
Parce que tout lui paraît simple. Et d'ailleurs, la liberté, la justice et le droit, elle a toujours été d'accord. Et son père, sous des mots différents, mais sans doute lui non plus n'avait pas davantage dîné avec Jefferson, le lui avait inculqué.
Et c'est ainsi que le sens de la justice inné chez cette jeune fille, libérée de sa beauté et mettant des lunettes pour lire plus facilement, peut s'alimenter par quelques lectures et quelques bonne fréquentations.
Et à mon avis un dîner convivial avec Holmes serait envisageable ...
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May 22, 2018
Thesaurus : Doctrine
Référence complète : Morel-Maroger, J., La compliance financière, les enseignements de l'affaire BNP Paribas, in Borga, N., Marin, J.-Cl. et Roda, J.-Cl. (dir.), Compliance : l'entreprise, le régulateur et le juge, Série Régulations & Compliance, Dalloz, 2018, pp. 69-78.
Lire une présentation générale de l'ouvrage dans lequel est publié l'article.
Consulter les autres titres de la Série dans laquelle est publié l'ouvrage.
Oct. 19, 2014
Blog
La presse qui relate les décisions de justice prend-elle le temps, la peine, de les lire ?
Par exemple, par une Ordonnance du 17 octobre 2014, Mme L. et autres, le Conseil d'État a suspendu l'application de la circulaire du 18 juillet 2014 qui supprime la condition de "mérite" pour des aides financières apportées aux étudiants. Ce juge des référés ne fait que suspendre l'application, l'instance au fond, en vue d'obtenir l'annulation, se poursuit et l'on ne connaît pas encore son résultat.
Mais la presse, par exemple l'article paru dans Le Monde, titre : "Le Conseil d'Etat annule la suspension des bourses au mérite". Pourtant, le Conseil d'État n'oblige pas à lire le texte même de ses décisions. Il y associe des communiqués de presse, accessible sur la première page de son site. Cela ne suffit pas, la presse confond une décision au fond, d'annulation, et une décision de référé, provisoire, de suspension. Pourtant la différence est importante : on ne sait pas encore à ce stade si cette circulaire est légale ou illégale.
Or, le grief développé au fond et ici pris en considération par l'Ordonnance du 17 octobre 2014 relève de l'art de la définition et de la qualification : le Gouvernement a le pouvoir de "fixer les conditions" : peut-on considérer que supprimer la condition relève encore de la fixation des conditions ?
Seul le Conseil d'État statuant au fond répondra à cette question, qui relève de la logique juridique.
Sept. 28, 2014
Blog
Qui ne connaît la jurisprudence Baby-Loup ?Sur le moment, chacun s'en est ému, a eu son opinion, a commenté les retournements entre le premier arrêt de la Cour de cassation, l'arrêt de résistance de la Cour d'appel de Paris sur conclusions flambloyantes du Procureur général, l'arrêt contraire et protecteur de la crèche de l'assemblée plénière de la Cour de cassation.Mais aujourd'hui, faute de subventions, la crèche va sans doute fermer. Le conseil municipal de Conflan-Saint-Honorine le dira le 29 mars 2014.
1. Cette fermeture est corrélée au procès. L'association dût changer de commune, en raison de l'affaire. La nouvelle commune n'est pas tenue par les engagements de l'autre.
2. La petite crèche Baby-Loup restera pour toujours célèbre, car dans tous les cours portant sur la laïcité, les étudiants entendront parler d'elle. Elle est entrée au Panthéon du droit.
3. C'est si souvent le cas : Rose Jand'heur et Agnès Blanco , ces deux petites filles d'une dizaine d'années, depuis longtemps disparues ... Savaient-elles, vieilles dames, que leur patronyme, Jand'heur, Blanco, était et serait récité, couché sur des copies, invoqué par les plus grands auteurs ?
A petites filles, grands cas. A petite crèche, grand destin dans le paysage du droit.
Aug. 27, 2014
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Introduction au droit. The book of Muriel Fabre-Magnan is out. This is great. The law holds the attention of everyone all the time.
Because daily life is full of law and there is the awareness of this. Because world live has a turn increasingly legal.
Thus, the interest in the law is new, or at least has grown.
But the law is off-putting for anyone who didn't study, who doesn't practice. This mass, which is enormous and as inert, seems belch through dramatic cases or convictions shattering. Thus, the desire to discover and to understand law seems meet a sort of end of inadmissibility, seems to be hampered by the legal matter itself.
That is why everyone must buy Introduction au droit (Introduction to Law), the book (written in French) in the collection "Que sais-je ?" ("What can I know?"), by Muriel Fabre-Magnan.
By reading this book of 124 pages, one can understand what may represent the law, not only for every day but also the law in society in a civilized world.
The law is the key to a civilized system. But in a world which seems to be governed by the game of forces, the law is absent or just facade. Thus, reading, you'd think that the law is in fact very little ...
Read a presentation of the new edition of the Muriel Fabre-Magnan book : Introduction au droit.
Updated: Dec. 14, 2012 (Initial publication: Dec. 2, 2011)
Teachings : Droit général de la Régulation
May 30, 2012
Publications
Référence complète : FRISON-ROCHE, Marie-Anne, Le modèle perelmanien au regard des méthodes d'enseignement du droit, in FRYDMAN, Benoît et MEYER, Michel (dir.), Chaïm Perelman (1912-2012). De la nouvelle rhétorique à la logique juridique, coll."L'interrogation philosophique", PUF, Paris, p.219-227.
Lire la 4ième de couverture de l'ouvrage.
Lire une présentation générale de l'ouvrage dans lequel est inséré l'article.
Lire le résumé de l'article ci-dessous.
Aug. 31, 2007
Publications
Référence complète : FRISON-ROCHE, Marie-Anne, La recherche en matière économique, in Quelles perspectives pour la recherche juridique ?, collection « Droit et justice », PUF, 2007, pp. 93-101.
June 19, 1999
Publications
Référence complète : FRISON-ROCHE, Marie-Anne, L’injustice racontée aux enfants. De la littérature au droit, in L’avenir du droit, Mélanges François Terré, Dalloz-PUF-Jurisclasseur, 1999, pp.199-208.
Marcel Aymé écrivit une nouvelle : "Classes A et B". Il y narre un conte dans lequel des enfants, certes coupables d’une espiéglerie, sont pourtant victimes d’une injustice de la part du professeur, car celui-ci décrète un enfant coupable, sans preuve, par pur préjugé. Un tel écrit peut être analysé selon la méthode du mouvement "Droit et littérature".
Lire le résumé de l'article ci-dessous.