Dictionnaire bilingue du Droit de la Régulation et de la Compliance

 

En principe le mécanisme même de marché est gouverné par la liberté, les libertés des agents eux-mêmes - liberté d'entreprendre et de contracter - et liberté concurrentielle qui marque le marché lui-même, la convergence de ces libertés permettant le fonctionnement autorégulé de la "loi du marché", à savoir la rencontre massifié des offres et des demandes qui engendre le prix adéquat ("juste prix").

Pour que cela fonctionne, il faut mais il suffit qu'il n'y ait pas de barrière à l'entrée et qu'il n'y ait pas de comportement par lesquels des opérateurs puissent entraver cette loi du marché concurrentiel, ces abus de marché étant l'abus de position dominante et l'entente.

Mais s'il s'agit des marchés financiers, lesquels sont des marchés régulés, les "abus de marchés" y sont sanctionnés au cœur même de la régulation. En effet, la régulation des marchés financiers suppose que l'information y soit distribué au profit des investisseurs, voire d'autres parties prenantes, éventuellement des informations non exclusivement financières. Cette intégrité des marchés financiers qui, au-delà de l'intégrité de l'information, doivent atteindre la transparente, justifie que l'information soit pleinement et également partagée. C'est pourquoi ceux qui ont titulaire ou doivent être titulaire d'une information qui n'est pas partagée par les autres (information privilégiée) ne doivent pas l'utiliser sur le marché tant qu'ils ne l'ont pas rendu publiques. De la même façon, ils ne doivent pas diffuser de mauvaises informations au marché. Pas plus qu'ils ne doivent manipuler les cours.

Ces sanctions ont été essentiellement conçues par la théorie financière américaine, concrétisées par les juridictions américaines, puis reprises en Europe. Dans la mesure où elles sanctionnent à la fois un comportement reprochable et constituent un instrument d'ordre public de direction et de protection des marchés, la question du cumul du droit pénal et du droit administratif répressif ne pouvait que se poser avec difficulté et agressivité.

Base Documentaire : Doctrine

 Référence complète : R. Sève, "L'Obligation de Compliance  et les mutations de la souveraineté et de la citoyenneté", in M.-A. Frison-Roche (dir.), L'obligation de ComplianceJournal of Regulation & Compliance (JoRC) et Dalloz, coll. "Régulations & Compliance", 2024, à paraître.

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📕lire une présentation générale de l'ouvrage, L'Obligation de Compliance, dans lequel cet article est publié

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► Résumé de l'article (fait par le Journal of Regulation & Compliance - JoRC) : La contribution décrit "les changements de philosophie du droit que la notion de compliance peut impliquer par rapport à la représentation moderne de l’Etat assurant l’effectivité des lois issues de la volonté générale, dans le respect des libertés fondamentales qui constituent l’essence du sujet de droit.".

Le contributeur estime que la définition de la compliance tient à des auteurs qui « jouer un rôle d’éclairage et de structuration d’un vaste ensemble d’idées et de phénomènes précédemment envisagés de manière disjointe.  Pour ce qui nous occupe, c’est sûrement le cas de la théorie de la compliance, développée en France par Marie-Anne Frison-Roche dans la lignée de grands économistes (Jean-Jacques Laffont, Jean Tirole) et dont la première forme résidait dans les travaux bien connus de la Professeure sur le droit de la régulation. ».

S'appuyant sur les Principles of the Law de l’American Law Institute, qui considère que la compliance est un « set of rules, principles, controls, authorities, offices and practices designed to ensure that an organisation conforms to external and internal norms», il souligne que la compliance apparaît alors un mécanisme neutre visant à l'efficacité par un passage vers l'Ex Ante. Mais il souligne que la nouveauté tient dans le fait de viser "seulement" des événements futurs, en "refondamentalisant" et en "monumentalisant" la matière par la notion de "buts monumentaux" conçue par Marie-Anne Frison-Roche, faisant apparaître un nouveau jus comune. Ainsi, "la compliance c’est l’idée permanente du droit appliquée à de nouveaux contextes et défis.". 

Il ne s'agit donc pas de faire des économies budgétaires mais bien plutôt de continuer à faire vivre la philosophie du Contrat social à des enjeux complexes, notamment les enjeux environnementaux. 

Cela renouvelle la place qu'y occupe le citoyen car il y apparaît non seulement comme individu, ce qui est dans la conception classique grecque et chez Rousseau, mais encore à travers des entités, notamment les ONG, tandis que les grandes entreprises, parce qu'elles ont seules les moyens de poursuivre les buts monumentaux de la compliance, seraient comme des "super-citoyens", ce dont l'espace numérique commence à développer l'expérience, au risque de disparition de l'individu lui-même par l'effet du "capitalisme de surveillance". Mais de la même façon que la pensée du Contrat social s'articule avec celle du capitalisme, la compliance se situe sans rupture fondamentale  dans un prolongement historique logique : "C’est le développement et la complexité du capitalisme qui forcent à introduire dans les entités privées des mécanismes procéduraux d’essence bureaucratique, pour discipliner les salariés, contenir les critiques internes et externes, soutenir les managers en place" en les forçant à justifier les rémunérations, les avantages, etc.

En outre, selon les termes de l'auteur, "Avec les buts monumentaux, - la prise en compte des effets lointains, diffus, agrégés par delà les frontières, de l’intérêt des générations futures, de tous les êtres vivants - ,  on passe, pour ainsi dire, à une dimension industrielle de l’éthique, que seuls de vastes systèmes de traitement de l’information permettent d’envisager effectivement.".

C'est ainsi que l'on peut trouver une répartition entre l'intelligence artificielle et les êtres humains dans les organisations, notamment les entreprises, ou dans les processus de décisions.

De la même façon, la liberté de l'individu ne disparaît pas par la Compliance car c'est précisément et au contraire l'un de ses buts monumentaux que de rendre les individus aptes à choisir dans un environnement complexe, notamment dans l'espace numérique où le système démocratique est désormais en jeu, tandis que des mécanismes techniques, comme le lancement d'alerte, vont renaître le droit à la désobéissance civile, invalidant le grief de "capitalisme de surveillance".

L'auteur conclut que les enjeux sont si grands que la Compliance qui a déjà dépassé les distinctions entre le droit privé et le droit public, entre le droit national et le droit international, doit aussi dépasser celle entre l'information et et le secret, notamment en raison des cyber-risques, ce qui requiert de l'Etat l'élaboration et la pratique de stratégies non-publiques de Compliance pour préserver l'avenir.

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Base Documentaire : Doctrine

► Référence complète : D. Gutmann, "Tax Law and Compliance Obligation", in M.-A. Frison-Roche (dir.), Compliance ObligationJournal of Regulation & Compliance (JoRC) et Bruylant, coll. "Compliance & Regulation", à paraître

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► Résumé de l'article (fait par le Journal of Regulation & Compliance - JoRC) : The author takes up the hypothesis of a Compliance Law defined by its Monumental Goals, the realisation of which is entrusted to "crucial operators" and confronts it with Tax Law. The link is particularly effective since these operators possess what governments need in this area: relevant Information.

Going further, Compliance Law can give rise to two types of obligations on the part of these operators, either towards others operators who need to be monitored, corrected or denounced, or towards themselves, when they need to make amends.

In the first part of this contribution, the author shows that Compliance Obligation reproduces the mechanism of a Tax Law which, for large companies, is embroiled in a process of increasing Globalisation. It enables Governments to aspire to the "Monumental Goals" of combating tax optimisation and impoverishing governments, victims of the erosion of the tax base, in the face of the strategies of companies that are more powerful than they are themselves, by using this very power of firms to turn it against them. Companies become the willing or de facto allies of governments, particularly when it comes to recovering tax debts, or assist them in their stated ambition to achieve social justice.  In this way, the State "manages" Tax Law by cooperating with companies.

In the second part, the author outlines the contours of this business Compliance Obligation, which is no longer simply a matter of paying tax. Beyond this financial obligation, it is more a question of mastering Information, particularly when multinational companies are subject to specific tax reporting obligations and are required to reveal their tax strategy, presumed to be transparent and coherent within the group : this legal presumption gives rise to obligations to seek information and ensure coherence, since a single tax strategy is not self-evident in a group.

The author emphasises that companies have accepted the principles governing these new compliance obligations and are tending to transform these obligations, particularly Transparency, into a communication strategy, in line with the ESG criteria that have been developed and a desire for fruitful relations with stakeholders. Therefore the tax relations developed by major companies are being extended not only to the tax authorities, but also to NGOs, by incorporating a strong ethical dimension. This is leading to new strategies, particularly in the area of Vigilance.

The author concludes: "A n’en pas douter, l’obligation de compliance existe bel et bien en matière fiscale." ("There is no doubt that the Compliance Obligation does exist in tax matters").

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🦉Cet article est accessible en texte intégral pour les personnes inscrites aux enseignements de la Professeure Marie-Anne Frison-Roche

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Base Documentaire : Doctrine

► Référence complète : R. Sève, "Compliance Obligation and changes in Sovereignty and Citizenship", in M.-A. Frison-Roche (dir.), Compliance ObligationJournal of Regulation & Compliance (JoRC) et Bruylant, coll. "Compliance & Regulation", à paraître

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► Résumé de l'article (fait par le Journal of Regulation & Compliance - JoRC) : The contribution describes "les changements de philosophie du droit que la notion de compliance peut impliquer par rapport à la représentation moderne de l’Etat assurant l’effectivité des lois issues de la volonté générale, dans le respect des libertés fondamentales qui constituent l’essence du sujet de droit." ("the changes in legal philosophy that the notion of Compliance may imply in relation to the modern representation of the State ensuring the effectiveness of laws resulting from the general will, while respecting the fundamental freedoms that constitute the essence of the subject of law").

The contributor believes that the definition of Compliance is due to authors who « jouer un rôle d’éclairage et de structuration d’un vaste ensemble d’idées et de phénomènes précédemment envisagés de manière disjointe.  Pour ce qui nous occupe, c’est sûrement le cas de la théorie de la compliance, développée en France par Marie-Anne Frison-Roche dans la lignée de grands économistes (Jean-Jacques Laffont, Jean Tirole) et dont la première forme résidait dans les travaux bien connus de la Professeure sur le droit de la régulation. » ( "play a role in illuminating and structuring a vast set of ideas and phenomena previously considered in a disjointed manner.  For our purposes, this is certainly the case with the theory of Compliance, developed in France by Marie-Anne Frison-Roche in the tradition of great economists (Jean-Jacques Laffont, Jean Tirole) and whose first form was in her well-known work on Regulatory Law").

Drawing on the Principles of the Law of the American Law Institute, which considers compliance to be a "set of rules, principles, controls, authorities, offices and practices designed to ensure that an organisation conforms to external and internal norms", he stresses that Compliance thus appears to be a neutral mechanism aimed at efficiency through a move towards Ex Ante. But he stresses that the novelty lies in the fact that it is aimed 'only' at future events, by 'refounding' and 'monumentalising' the matter through the notion of 'monumental goals' conceived by Marie-Anne Frison-Roche, giving rise to a new jus comune. Thus, "la compliance c’est l’idée permanente du droit appliquée à de nouveaux contextes et défis." ("Compliance is the permanent idea of Law applied to new contexts and challenges"). 

So it's not a question of making budget savings, but rather of continuing to apply the philosophy of the Social Contract to complex issues, particularly environmental issues. 

This renews the place occupied by the Citizen, who appears not only as an individual, as in the classical Greek concept and that of Rousseau, but also through entities such as NGOs, while large companies, because they alone have the means to pursue the Compliance Monumental Goals, would be like "super-citizens", something that the digital space is beginning to experience, at the risk of the individuals themselves disappearing as a result of "surveillance capitalism". But in the same way that thinking about the Social Contract is linked to thinking about capitalism, Compliance is part of a logical historical extension, without any fundamental break: "C’est le développement et la complexité du capitalisme qui forcent à introduire dans les entités privées des mécanismes procéduraux d’essence bureaucratique, pour discipliner les salariés, contenir les critiques internes et externes, soutenir les managers en place" ("It is the development and complexity of capitalism that forces us to introduce procedural mechanisms of a bureaucratic nature into private entities, in order to discipline employees, contain internal and external criticism, and support the managers in place") by forcing them to justify remuneration, benefits, and so on.

Furthermore, in the words of the author, "Avec les buts monumentaux, - la prise en compte des effets lointains, diffus, agrégés par delà les frontières, de l’intérêt des générations futures, de tous les êtres vivants - ,  on passe, pour ainsi dire, à une dimension industrielle de l’éthique, que seuls de vastes systèmes de traitement de l’information permettent d’envisager effectivement." ("With the Monumental Goals - taking into account the distant, diffuse effects, aggregated across borders, the interests of future generations, of all living beings - we move, so to speak, to an industrial dimension of ethics, which only vast information processing systems can effectively envisage").

This is how we can find a division between artificial intelligence and human beings in organisations, particularly companies, or in decision-making processes.

In the same way, individual freedom does not disappear with Compliance, because it is precisely one of its monumental goals to enable individuals to make choices in a complex environment, particularly in the digital space where the democratic system is now at stake, while technical mechanisms such as early warning will revive the right to civil disobedience, invalidating the complaint of "surveillance capitalism".

The author concludes that the stakes are so high that Compliance, which has already overcome the distinctions between Private and Public Law and between national and international law, must also overcome the distinction between Information and secrecy, particularly in view of cyber-risks, which requires the State to develop and implement non-public Compliance strategies to safeguard the future.

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Base Documentaire : Doctrine

 Référence complète : D. Gutmann, "Droit fiscal et obligation de compliance", in M.-A. Frison-Roche (dir.), L'Obligation de ComplianceJournal of Regulation & Compliance (JoRC) et Dalloz, coll. "Régulations & Compliance", 2024, à paraître

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📕lire une présentation générale de l'ouvrage, L'Obligation de Compliance, dans lequel cet article est publié

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 Résumé de la contribution (fait par le Journal of Regulation & Compliance ) : L’auteur reprend l’hypothèse d’un Droit de la compliance défini par ses Buts Monumentaux dont la concrétisation est confiée à des « opérateurs cruciaux » et la confronte au Droit fiscal. L’articulation s’opère particulièrement bien puisque ces opérateurs-là possèdent ce dont les Etats sont en la matière besoin : l’information pertinente.

Allant plus loin, le Droit de la compliance peut engendrer à la charge de ces opérateurs deux types d’obligations, soit à l’égard d’autrui qu’il convient de surveiller, de corriger ou de dénoncer, soit à l’égard de soi-même, lorsqu’il s’agit de s’amender.

Dans une première partie de la contribution, l’auteur montre que ce faisant, les obligations de compliance reproduisent le fonctionnement d’un droit fiscal qui, pour les grandes entreprises, se trouve embarqué dans un processus de mondialisation croissante. Elles permettent aux Etats d’ambitionner la concrétisation de « buts monumentaux » que sont la lutte contre l’optimisation fiscale et l’appauvrissement des Etats, victimes de l’érosion de l’assiette fiscale, face aux stratégies d’entreprises plus puissantes qu’eux, en s’appuyant sur cette puissance même pour la retourner contre les entreprises. Celles-ci deviennent de gré ou de fait les alliés des Etats, notamment pour recouvrer les créances fiscales et les assistent dans une ambition assumée de justice sociale.  La « gestion » du Droit fiscal par l’Etat s’opère ainsi par la coopération avec les entreprises.

Dans une seconde partie, l’auteur dessine les contours de cette obligation de compliance, qui n’est plus seulement de payer l’impôt. Au-delà de cette obligation financière, il s’agit plutôt de maîtriser l’information, notamment lorsqu’il s’agit d’entreprises multinationales contraintes à des obligations spécifiques de reporting fiscal et de dévoiler leur stratégie fiscale, présumée transparente et cohérente à l’intérieur du groupe (présomption qui engendre des obligations de recherche d’informations et de mise en cohérente car l’unicité stratégique fiscale ne va pas de soi dans un groupe). 

L’auteur souligne que les entreprises ont admis ces principes qui gouvernent ces nouvelles obligations de compliance et tendent à transformer ces obligations, notamment de transparence en stratégie de communication, au regard des critères ESG qui se sont par ailleurs développés et d’une volonté de relations fructueuses avec les parties prenantes. C’est pourquoi les relations fiscales développées par les grandes entreprises se déploient non seulement à l’égard des autorités fiscales mais encore des ONG, en intégrant une forte dimension éthique. Cela débouche sur de nouvelles stratégies, observé notamment à propos du devoir de vigilance.

Et l’auteur de conclure : « A n’en pas douter, l’obligation de compliance existe bel et bien en matière fiscale. ».

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Base Documentaire : Doctrine

► Référence complète : M. Brochier & S. Darrois, "Les potentielles actions judiciaires en matière d’information extra-financière", Banque & Droit, n°216, juillet-août 2024, pp.10-12

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► Résumé de l'article (fait par MAFR) : Les auteurs partent d'un constat : la multiplication des obligations pesant sur les entreprises en matière d’information extra-financière, laquelle entraîne mécaniquement une multiplication des potentiels faits générateurs de responsabilité de ces entreprises. Dans le même temps, bien qu'ils constatent pour l'heure une absence de procès en la matière, ils mettent l'accent sur le nid à contentieux que pourraient constituer ces règles.

À cet égard, les auteurs mettent en avant le risque d'instrumentalisation de ces actions en responsabilité, tantôt par des "acteurs de la société civile", tantôt par des actionnaires minoritaires ou dits "activistes", les uns et les autres cherchant à peser sur la gestion de la société. Ils relèvent également que les émetteurs d'information extra-financière pourraient être amenés à agir en responsabilité contre les agences de notation RSE, champ d'activité pour l'heure relativement peu réglementé alors même qu'il peut avoir des conséquences considérables pour l'entreprise. 

Ils concluent sur l'importance de l'information. Si l'information, en l'occurence extra-financière, est bien sûr l'objet des règles évoquées, ils relèvent qu'en cas de crise et face au risque de réputation la seule solution efficace est de communiquer rapidement au public une information claire, fiable et intelligible. Ils soulignent enfin que cette transparence demandée aux grandes entreprises quant à leur impact sur leur environnement est la contrepartie de leur puissance. 

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7 décembre 2024

droit illustré

► Référence complète : M.-A. Frison-Roche., "Description d'un risque systémique : Description d'un risque systémique : 🎬𝑲𝒆𝒓𝒗𝒊𝒆𝒍 - 𝒖𝒏 𝒕𝒓𝒂𝒅𝒆𝒓 - 𝟓𝟎 𝒎𝒊𝒍𝒍𝒊𝒂𝒓𝒅𝒔", billet décembre 2024.

 

🎞️voir le film-annonce 

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Dans le documentaire proposé en novembre 2024 par la chaîne Max, le propos est de décrire ce qui est présenté comme l'engrenage déclenché par le comportement solitaire d'un trader, Jérôme Kerviel, sur l'ensemble de la banque Société générale.

On y voit et on y écoute tous les protagonistes s'exprimer en français, doublés en anglais, le quartier de La Défense faisant le fond du décor, pour préserver le marché financier d'une crise systémique.

 

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7 novembre 2024

Base Documentaire : Doctrine

► Référence complète : Th. Favario, "Le contenu du "rapport de durabilité"", JCP E, 7 nov. 2024, n° 45, doss. 1319, pp. 28-33

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► Résumé de l'article (fait par l'auteur) : "Mesure emblématique de la directive du 14 décembre 2022 (directive CSRD) désormais transposée en droit interne, le « rapport de durabilité » complète l'information due par les sociétés les plus importantes. Tenues d'y rendre compte de la manière dont elles intègrent « les enjeux de durabilité », ce rapport impose en creux à ces sociétés de s'inscrire dans une dynamique de « durabilité » de nature à influer sur leur organisation et leur activité.".

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5 novembre 2024

Publications

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 Référence complète : M.-A. Frison-Roche, "Naissance d'une branche du Droit : le Droit de la Compliance", in Mélanges offerts à Louis Vogel. La vie du droit, LexisNexis - Dalloz - LawLex - LGDJ, 2024, pp. 177-188.

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📗Lire la présentation générale des Mélanges offerts à Louis Vogel

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📝lire l'article

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🚧lire le document de travail bilingue sur la base duquel cet article a été élaboré, doté de développements supplémentaires, de références techniques et de liens hypertextes

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► Résumé de l'article : L’étude porte sur les différents mouvements qui ont fait naître le Droit de la Compliance, l’accent étant plus particulièrement mis sur le Droit de la Concurrence.

Après une réflexion préalable sur la construction du système juridique en branches du Droit, leur classement les unes par rapport aux autres, la difficulté rencontrée à ce propos par le Droit économique, et les différents mouvements qui en font naître une, diversité dont la branche garde par la suite la trace, l’étude est construite en 4 parties.

Pour rechercher ce qui a fait naître le Droit de la Compliance, la première partie convie à récuser la perspective étroite d’une définition qui se contente de définir celui-ci par le fait de « se conformer » aux réglementations applicables. Cela a pour effet d’accroître l’efficacité de celles-ci mais cela ne produit pas une branche du Droit, étant un outil d’efficacité comme un autre.

La deuxième partie de l’étude vise à éclaircir ce qui apparaît comme une « énigme », car l’on affirme souvent que cela viendrait d’une méthode souple, ou d’un texte américain, ou d’autant de réglementations qu’il y a d’occasions d’en prendre. Il apparaît plutôt qu’il s’est agi aux États-Unis au sortir de la crise de 1929, d’établir une autorité et des règles pour prévenir un nouvel effondrement atroce de système, tandis qu’il s’est agi en Europe, en 1978, en souvenir de l’usage des fichiers, d’établir une autorité et des règles pour prévenir une atteinte atroce aux droits humains. Un élément commun qui vise l’avenir (« plus jamais ça »), mais pas le même objet de rejet préventif. Cette différence des deux naissances explique l’unicité et la diversité des deux Droits de la compliance, les tensions qui peuvent exister entre les 2, l'impossibilité d'obtenir un Droit global.

La troisième partie analyse la façon dont le Droit de la concurrence a fait naître en son soin la conformité : une branche secondaire qui est gage de conformité à la réglementation concurrentielle. Notamment développée ainsi à travers le droit souple émis par les autorités de concurrence, il en résulte une sorte d’obéissance souple, une collaboration bien comprise de type procédurale par laquelle l’entreprise éduque, surveille, voire sanctionne, sans sortir du Droit de la Concurrence dont la conformité constitue l’annexe. L’on peut mesurer ici le chemin qui sépare une culture de conformité d’un Droit de la Compliance.

La quatrième partie vise à montrer que le Droit de la Concurrence et le Droit de la Compliance sont deux branches du Droit autonomes et articulées. Le Droit de la Compliance étant une branche du Droit construite sur des Buts Monumentaux, notamment la durabilité des systèmes et la préservation des êtres humains qui y sont impliqués pour qu’ils n’y soient pas broyés mais en bénéficient, l’enjeu actuel de la construction européenne est de construire à côté du plier concurrentiel le pilier du Droit de la Compliance. Les juridictions sont en train de le faire et de les articuler.

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9 septembre 2024

Conférences

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► Référence complète : M.-A. Frison-Roche, "Pourquoi les textes et la pratiques sur le rapport de durabilité vont participer au Contentieux Systémique", in Le rapport de durabilité : Obligations et Contentieux Systémiques Émergents, 9 septembre 2024, 11h-12h30, Cour d'appel de Paris, salle Cassin

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🕴️🕴️Interviennent également à cette conférence Florence Peybernès, présidente du H2A, et Alexis Gazzo, associé d'EY.

🧮consulter le programme complet de cette manifestation

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⚙️Cette manifestation a été conçue comme un élément du cycle de conférences-débats "Contentieux Systémique Émergent", organisé à l'initiative de la Cour d'appel de Paris, avec la Cour de cassation, la Cour d'appel de Versailles, l'École nationale de la magistrature (ENM) et l'École de formation des barreaux du ressort de la Cour d'appel de Paris (EFB), sous la responsabilité scientifique de Marie-Anne Frison-Roche.

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🔲consulter les slides ayant servi de support à l'intervention

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🌐consulter sur LinkedIn les slides ayant servi de support à l'intervention

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► Résumé de la conférence : cette conférence a été conçue comme une introduction au thème général et aux conférences de Florence Peybernès et Alexis Gazzo. Elle ne prend donc pour thème que le rapport entre le Contentieux systémique et le rapport de Durabilité et n'abordera pas en tant que tel ce qui est mentionné dans le plan en dernière partie à savoir l'enjeu de régulation, supervision, compliance et responsabilité.

Cette conférence générale ouvre donc trois perspectives, que le rapport de durabilité implique, sur le lien même entre la Durabilité, le rapport de durabilité, et le Contentieux Systémique. Cela explique que ce thème du rapport de durabilité fasse l'objet d'une conférence-débat dans ce cycle général de conférences consacré au Contentieux Systémique .

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🔓Lire ci-dessous les lignes de force de la conférence

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7 mars 2024

Conférences

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 Référence complète : M.-A. Frison-Roche, "L’enjeu de la confidentialité des avis juridiques internes au regard des « Buts Monumentaux » de la Compliance", in L’instauration d’un Legal Privilege à la française. Le temps de l’action au service de la souveraineté et de la compétitivité de nos entreprises, Association française des juristes d'entreprise (AFJE), Association nationale des juristes de banque (ANJB) et Cercle Montesquieu, 7 mars 2024, Maison de la Chimie, 28 rue Saint Dominique Paris

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📝Sur le même sujet, lire l'article de Marie-Anne Frison-Roche "La compliance, socle de la confidentialité nécessaire des avis juridiques élaborés en entreprise"

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8 février 2024

Base Documentaire : Doctrine

 Référence complète : Th. Baudesson, "L'évolution des rapports entre avocats et autorités de poursuites depuis l'introduction de la CJIP", in M.-A. Frison-Roche et M. Boissavy (dir.), Compliance et droits de la défense. Enquête interne – CJIP – CRPCJournal of Regulation & Compliance (JoRC) et Dalloz, coll. "Régulations & Compliance", 2024, sous presse.

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📕consulter une présentation générale de l'ouvrage, Compliance et droits de la défense. Enquête interne – CJIP – CRPC, dans lequel cet article est publié

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► Résumé de la contribution (résumé fait par le Journal of Regulation & Compliance - JoRC) : L''auteur estime que la CJIP, évolution la plus marquante de la procédure pénale, fait  dialoguer le Barreau et les autorités de poursuite, qui passent d'une logique de confrontation à la coopération. Il s'agit d'une relation d'un type nouveau. Le Procureur concerné est avant tout le PNF qui bénéficie d'une expertise en la matière qu'il diffuse par sa soft law et apporte plus de sécurité aux entreprises. 

Il illustre ses propos notamment par la CJIP dite Airbus dans laquelle il y eut confrontation avec les pratiques anglaises et américaines dans des "enquêtes de coopérations" qui requièrent une confiance réciproque.  Mais il reconnaît les progrès qui restent à faire, aussi bien du côté des avocats qui en France semblent demeurer comme par principe en opposition aux magistrats et peu sensibles à ce qui pourrait être leur rôle dans la recherche de la vérité, que du côté des magistrats qui semblent percevoir les avocats comme des sortes de "mercenaires" dont il faudrait par principe se méfier. C'est pour cela que dans leur guide sur les enquêtes internes l'AFA et le PNF demandent que l'avocat qui mène l'enquête et celui qui assure la défense pénale de l'entreprise ne puisse pas  être le même, ce que l'auteur explique par cette défiance, présumant des enquêtes de complaisance, suspicion de principe que l'auteur regrette. De la même façon, le refus des magistrats de reconnaître le secret professionnel couvrant le rapport d'enquête paraît à l'auteur archaïque par rapport aux conceptions anglo-saxonnes, car le DOJ comme le SFO admettent aisément le legal privilege attaché à ce rapport. De ce fait, la France ne serait pas au même niveau d'État de Droit que les États-Unis et le Royaume-Uni. 

L'auteur en conclut que des progrès restent donc à faire pour que la France achève son évolution pour devenir pleinement attractive pour que des entreprises qui, confrontées à des pratiques répréhensibles, soient effectivement menées à entreprendre une démarche d'auto-révélation.

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🦉Cet article est accessible en texte intégral pour les personnes inscrites aux enseignements de la Professeure Marie-Anne Frison-Roche

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5 décembre 2023

Organisation de manifestations scientifiques

 Référence complète : M.-A. Frison-Roche, M. Mekki et J.-Ch. Roda (dir.), La Vigilance, pointe avancée de l'Obligation de ComplianceJournal of Regulation & Compliance (JoRC), Institut de Recherche Juridique de la Sorbonne (André Tunc - IRJS), Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, 5 décembre 2023.

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🏗️Ce colloque s'inscrit dans le cycle de colloques organisé par le Journal of Regulation & Compliance (JoRC) et ses Universités partenaires, portant en 2023 sur le thème général de L'Obligation de Compliance.

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📚Les travaux s'inséreront ensuite dans les ouvrages : 

📕L'obligation de Compliance, à paraître dans la collection 📚Régulations & Compliance, coéditée par le Journal of Regulation & Compliance (JoRC) et Dalloz, publié en langue française.

📘Compliance Obligation, à paraître dans la collection 📚Compliance & Regulation, coéditée par le Journal of Regulation & Compliance (JoRC) et Bruylant, publié en langue anglaise.

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► Présentation générale du colloque : L'Obligation de Vigilance est difficile à cerner à travers la multiplicité des textes et les cas dans lesquels on peut l'appréhender. Cela est particulièrement perceptible à travers le mécanisme de Vigilance qui tout à la fois illustre, voire force le trait, de l'Obligation de Vigilance. A travers les textes internationaux, la loi française et les textes européens adoptés ou en gestation, les contraintes de vigilance, mais aussi les structures et actions mises en place que les entreprises ont organisé ainsi que les actions que les parties prenantes ont engagé, la Vigilance a mis en lumière des aspects de l'Obligation de Compliance, voire a modifié celle-ci. 

L'effet de révélation ainsi produit et le mouvement ainsi déclenché, dont les racines sont profondes et les effets systémiques très importants, justifient que l'on cerne davantage des mécanismes qui sont articulés entre eux alors qu'ils sont parfois perçus en silo, ce qui rend difficile la compréhension d'ensemble. De la même façon, parce que la Vigilance est la pointe avancée de l'Obligation de Compliance, l'on peut ainsi mieux distinguer et articuler ce qui relève des spécificités sectorielles, notamment en matière bancaire et financière ou bien en matière numérique, et les articuler avec ce que la Vigilance a, comme la Compliance, de plus général. Plus encore, l'intensité de la Vigilance varie selon les ambitions quelle porte et selon la position de l'entreprise assujettie, ce que traduisent les variations de qualification juridique qui vont du devoir à l'obligation pénalement sanctionnée. 

Les différents systèmes juridiques traduisent ces évolutions dans leur loi, leur jurisprudence et la pratique des entreprises et des parties prenantes de façon spécifique car ces différents techniques expriment des normes de comportement et de reddition de comptes dont les exigences probatoires, les conceptions de la responsabilité et les traductions institutionnelles à travers de possibles organes de régulation sont la traduction directe.

En conséquence, le colloque est construit en trois temps. Après une Introduction générale sur les rapports systémiques entre la Vigilance et la Compliance, une première partie porte sur la variation des Intensités  de la Vigilance, pointe avancée de la Compliance, une deuxième partie porte sur les Tensions que la Vigilance engendre ou exacerbe, une troisième partie porte sur les Modalités que la Vigilance emprunte dans les systèmes de Compliance.

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► Interviennent : 

🎤Laurence Dubin, Professeure à l'Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne

🎤Marie-Anne Frison-Roche, Professeure de Droit de la Régulation et de la Compliance, directrice du Journal of Regulation & Compliance (JoRC)

🎤Bernard Haftel, Professeur à l'Université Paris-Nord 

🎤Marie Lamoureux, Professeure à Aix-Marseille Université

🎤Grégoire Loiseau, Professeur à l'Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne

🎤Véronique Magnier, Professeure à l'Université Paris-Saclay

🎤Gilles J. Martin, Professeur émérite à l'Université Côte d'Azur, membre du Groupe de Recherche en Droit, Économie, Gestion (GREDEG) du CNRS

🎤Mustapha Mekki, Professeur à l'Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne

🎤Jean-Christophe Roda, Professeur à l'Université Jean Moulin Lyon 3

🎤Anne-Claire Rouaud, Professeure à l'Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne

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Lire une présentation détaillée de la manifestation ci-dessous⤵️

28 novembre 2023

Base Documentaire : Doctrine

► Référence complète : D. Mainguy, Droit de la "guerre atypique". Réflexions sur les conflits non armés et non militaires (lawfare, guerre économique et informationnelle), LGDJ, 2023, 336 p.

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📗lire la 4ième de couverture

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📗lire le sommaire de l'ouvrage

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📗lire la table des matières

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► Résumé de l'ouvrage (fait par l'éditeur) : "Les logiques de conflictualité ont changé de forme depuis une vingtaine d’années. À des conflits majoritairement armés se surajoutent ou se substituent parfois des formes d’agressions non armées et non militaires, souvent ressenties comme de véritables actes de « guerre ». Ces actes sont par ailleurs généralement situés en deçà du « seuil » du droit des conflits armés. Or, précisément, il n’existe pas, de manière explicite en tout cas, de règles conventionnelles internationales permettant de contrôler ces nouvelles formes d’agressions.

Cet essai propose une réflexion générale sur ces nouvelles formes de guerre « atypique », d’abord pour identifier ses formes et ses acteurs, et surtout pour formuler une proposition, celle de l’hypothèse de l’existence d’un ensemble de règles internationales, issues de coutumes internationales, de jus cogens, susceptibles d’être mobilisées pour former un embryon de droit international des conflits non armés, le tout à l’origine de l’institution moderne de l’arbitrage international. Elles peuvent conduire à un contrôle des décisions prises et des actes de guerre atypique par des juridictions internes, internationales ou des arbitres internationaux. C’est déjà d’ailleurs le cas dans quelques situations spécifiques. Elles permettent de proposer un panorama de l’essentiel de ces actes de guerre atypique et d’en définir les termes : lawfare, guerre économique, guerre informationnelle, les règles applicables existantes ou à créer et un certain nombre de cas concrets, sans prétendre bien entendu à l’exhaustivité.".

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9 novembre 2023

Publications

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 Référence complèteM.-A. Frison-Roche, "La compliance, socle de la confidentialité nécessaire des avis juridiques élaborés en entreprise", D. 2023, édito du 9 novembre 2023.

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📝lire l'article

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► Résumé de l'article : La loi d'orientation et de programmation du ministère de la justice 2023-2027 avait introduit en droit français la confidentialité des avis des juristes d'entreprise (avant que le Conseil constitutionnel, pour une question de procédure parlementaire, n'annule la disposition, laissant donc la question toujours ouverte). Cette évolution est nécessaire pour répondre à l'injonction faite aux entreprises d'être de plus en plus en conformité avec les lois, celle-ci n'étant elle-même que l'un des outils d'un mouvement plus large : le Droit de la Compliance.

Cette branche du Droit, à travers notamment la loi "Sapin 2" de 2016, la loi "Vigilance" de 2017 ou encore le Digital Services Act (DSA), impose aux entreprises de mettre en oeuvre les moyens nécessaires pour satisfaire des Buts Monumentaux contenus dans les lois ou réglementations. Cela suppose dans un premier temps que les entreprises disposent d'information (via l'alerte, la cartographie des risques, la vigilance, la rapport de durabilité, etc.), leur permettant de connaître leurs conformités et non-conformités, afin qu'elles puissent, dans un second temps, agir effectivement pour mettre fin aux manquements actuels, prévenir des manquements futurs et atteindre les buts fixés.

Ce système de compliance nécessite que l'information portée à la connaissance des managers soit fiable et sincère. Or, si la non-conformité n’est pas analysée et transmise en étant protégée par la confidentialité, l’entreprise préférera n’en rien connaître et ne pourra donc pas agir de manière adéquate, ce qui privera la collectivité de sa puissance d’action dans le futur. C’est pourquoi la confidentialité des avis des juristes d'entreprise s’appuie sur la définition même du Droit de la Compliance.

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28 septembre 2023

Base Documentaire : Doctrine

 Référence complète : B. François, "La communication renouvelée: du reporting financier au reporting de durabilité", in F. Barrière et M. Zolomian (dir.), Le droit des sociétés saisi par le climatJCP E, n° 39, 28 septembre 2023, pp. 27-34.

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► Résumé de l'article (fait par l'auteur) : "Les entreprises sont aujourd’hui encouragées à aller au-delà de la publication statique d’informations environnementales, sociales et de gouvernance (ESG) en indiquant de manière dynamique où elles se situent sur cette trajectoire de la transition écologique et comment elles comptent progresser sur le court et le moyen termes avec l’ensemble de leurs parties prenantes. Par ailleurs, ces dernières, se méfiant de toute tentation d’éco- blanchiment (greenwashing) ou de blanchiment sociétal (corporate washing) de la part des entreprises, sont désireuses d’obtenir d’elles des informations fiables. Il s’ensuit une communication renouvelée.".

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🦉Cet article est accessible en texte intégral pour les personnes inscrites aux enseignements de la Professeure Marie-Anne Frison-Roche

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7 septembre 2023

Publications

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 Référence complète : M.-A. Frison-Roche & Arnoldo Wald, "Le cas Petrobras, une juste adéquation de la responsabilité pour protéger les personnes impliquées dans des systèmes globaux", RIDC, juillet-septembre 2023, n° 3, pp. 563-582.

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► Résumé de l'article : Cet article présente brièvement les principaux aspects de la responsabilité des sociétés sur le marché des capitaux conformément au droit brésilien, découlant du devoir d’informer les actionnaires et les investisseurs, pour ensuite commenter la récente sentence partielle rendue dans le cadre d’un arbitrage intenté par des actionnaires minoritaires contre Petrobras, qui souligne la légitimité de ces derniers à engager la responsabilité de la société.

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15 mars 2023

Base Documentaire : Doctrine

 Référence complète : J.-Ch. Roda, "Compliance, Internal Investigations and International Competitiveness: What are Risks for the French Companies (in the Light of Antitrust Law)?", in M.-A. Frison-Roche (dir.), Compliance Monumental GoalsJournal of Regulation & Compliance (JoRC) et Bruylant,  coll. "Compliance & Regulation", 2023, pp. 355-368

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📘consulter une présentation générale de l'ouvrage, Compliance Monumental Goals, dans lequel cet article est publié

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 Résumé de l'article: The author draws on American and European Competition Law to measure whether internal investigations, as far as they provide factual elements, can provide foreign authorities and competitors, here American, with "sensitive information" (notably via leniency programs), and as such constitute a competitive handicap. But this turns out to be quite difficult, whereas compliance audits, for example under the legal duty of vigilance, can provide American litigants with useful information, drawn from internal documents, in particular the reports of compliance officers, which can be captured by procedures of discovery.

French Law remains weak in the face of these dangers, due to its refusal to recognise the legal privilege mechanism concerning these internal documents, contrary to American Law and the consequent effectiveness of discovery in international procedures, concerning internal documents, in particular resulting from internal investigations. Solutions have been proposed, the activation of a new conception of blocking statutes being complex, the prospect of adopting a legal privilege being more effective, but there would remain the hypothesis of an international conflict of privilege, American Law having a strict design of legal advice justifying it and judges checking that powerful companies do not use it artificially.

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12 janvier 2023

Base Documentaire : 05. CJCE - CJUE

Référence complète : CJUE, 1ière ch.,  12 janv. 2023, RW  c.  Österreichische Post AG, C-154/21.

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Lire l'arrêt.

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Fiche de l'arrêt : Dans un contentieux entre un particulier et une entreprise postale (RW c. Österreichische Post AG, la Cour suprême de l'Autriche a décidé le 18 février 2021 de saisir la CJUE d'une question préjudicielle sur le sens à donner au "droit d'accès de la personne concernée à ses données" (article 15 RGPD) : jusqu'où doivent aller les informations à lui communiquer sur les destinataires ou catégories de destinataires auxquelles ces informations sont communiquées par celui qui recueille ces informations.

 

considérant les observations présentées :

–        pour RW, par Me R. Haupt, Rechtsanwalt,

–        pour Österreichische Post AG, par Me R. Marko, Rechtsanwalt,

–        pour le gouvernement autrichien, par MM. G. Kunnert, A. Posch et par Mme J. Schmoll, en qualité d’agents,

–        pour le gouvernement tchèque, par MM. M. Smolek et J. Vláčil, en qualité d’agents,

–        pour le gouvernement italien, par Mme G. Palmieri, en qualité d’agent, assistée de Mme M. Russo, avvocato dello Stato,

–        pour le gouvernement letton, par Mmes J. Davidoviča, I. Hūna et K. Pommere, en qualité d’agents,

–        pour le gouvernement roumain, par Mmes L.-E. Baţagoi, E. Gane et A. Wellman, en qualité d’agents,

–        pour le gouvernement suédois, par Mme H. Eklinder, M. J. Lundberg, Mmes C. Meyer-Seitz, A. M. Runeskjöld, M. Salborn Hodgson, Mmes R. Shahsavan Eriksson, H. Shev et M. O. Simonsson, en qualité d’agents,

–        pour la Commission européenne, par MM. F. Erlbacher et H. Kranenborg, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 9 juin 2022,

rend le présent

Arrêt

1        La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 15, paragraphe 1, sous c), du règlement (UE) 2016/679 du Parlement européen et du Conseil, du 27 avril 2016, relatif à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données, et abrogeant la directive 95/46/CE (règlement général sur la protection des données) (JO 2016, L 119, p. 1) (ci-après le « RGPD »).

2        Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant RW à Österreichische Post AG (ci-après l’« Österreichische Post ») au sujet d’une demande d’accès à des données à caractère personnel en vertu de l’article 15, paragraphe 1, sous c), du RGPD.

 Le cadre juridique

3        Les considérants 4, 9, 10, 39, 63 et 74 du RGPD sont libellés comme suit :

« (4)      [...] Le droit à la protection des données à caractère personnel n’est pas un droit absolu ; il doit être considéré par rapport à sa fonction dans la société et être mis en balance avec d’autres droits fondamentaux, conformément au principe de proportionnalité. [...]

[...]

(9)      Si elle demeure satisfaisante en ce qui concerne ses objectifs et ses principes, la directive 95/46/CE [du Parlement européen et du Conseil, du 24 octobre 1995, relative à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données (JO 1995, L 281, p. 31),] n’a pas permis d’éviter une fragmentation de la mise en œuvre de la protection des données dans l’Union [européenne], une insécurité juridique ou le sentiment, largement répandu dans le public, que des risques importants pour la protection des personnes physiques subsistent, en particulier en ce qui concerne l’environnement en ligne. Les différences dans le niveau de protection des droits et libertés des personnes physiques, en particulier le droit à la protection des données à caractère personnel, à l’égard du traitement des données à caractère personnel dans les États membres peuvent empêcher le libre flux de ces données dans l’ensemble de l’Union. Ces différences peuvent dès lors constituer un obstacle à l’exercice des activités économiques au niveau de l’Union, fausser la concurrence et empêcher les autorités de s’acquitter des obligations qui leur incombent en vertu du droit de l’Union. Ces différences dans le niveau de protection résultent de l’existence de divergences dans la mise en œuvre et l’application de la directive 95/46/CE.

(10)      Afin d’assurer un niveau cohérent et élevé de protection des personnes physiques et de lever les obstacles aux flux de données à caractère personnel au sein de l’Union, le niveau de protection des droits et des libertés des personnes physiques à l’égard du traitement de ces données devrait être équivalent dans tous les États membres. [...]

[...]

(39)      Tout traitement de données à caractère personnel devrait être licite et loyal. Le fait que des données à caractère personnel concernant des personnes physiques sont collectées, utilisées, consultées ou traitées d’une autre manière et la mesure dans laquelle ces données sont ou seront traitées devraient être transparents à l’égard des personnes physiques concernées. Le principe de transparence exige que toute information et communication relatives au traitement de ces données à caractère personnel soient aisément accessibles, faciles à comprendre, et formulées en des termes clairs et simples. [...]

[...]

(63)      Une personne concernée devrait avoir le droit d’accéder aux données à caractère personnel qui ont été collectées à son sujet et d’exercer ce droit facilement et à des intervalles raisonnables, afin de prendre connaissance du traitement et d’en vérifier la licéité. [...] En conséquence, toute personne concernée devrait avoir le droit de connaître et de se faire communiquer, en particulier, les finalités du traitement des données à caractère personnel, si possible la durée du traitement de ces données à caractère personnel, l’identité des destinataires de ces données à caractère personnel, la logique qui sous-tend leur éventuel traitement automatisé et les conséquences que ce traitement pourrait avoir, au moins en cas de profilage. [...] Ce droit ne devrait pas porter atteinte aux droits ou libertés d’autrui, y compris au secret des affaires ou à la propriété intellectuelle, notamment au droit d’auteur protégeant le logiciel. Cependant, ces considérations ne devraient pas aboutir à refuser toute communication d’informations à la personne concernée. [...]

[...]

(74)      Il y a lieu d’instaurer la responsabilité du responsable du traitement pour tout traitement de données à caractère personnel qu’il effectue lui-même ou qui est réalisé pour son compte. Il importe, en particulier, que le responsable du traitement soit tenu de mettre en œuvre des mesures appropriées et effectives et soit à même de démontrer la conformité des activités de traitement avec le présent règlement, y compris l’efficacité des mesures. Ces mesures devraient tenir compte de la nature, de la portée, du contexte et des finalités du traitement ainsi que du risque que celui-ci présente pour les droits et libertés des personnes physiques. »

4        L’article 1er du RGPD, intitulé « Objet et objectifs », dispose, à son paragraphe 2 :

« Le présent règlement protège les libertés et droits fondamentaux des personnes physiques, et en particulier leur droit à la protection des données à caractère personnel. »

5        L’article 5 du RGPD, intitulé « Principes relatifs au traitement des données à caractère personnel », prévoit :

« 1.      Les données à caractère personnel doivent être :

a)      traitées de manière licite, loyale et transparente au regard de la personne concernée (licéité, loyauté, transparence) ;

[...]

2.      Le responsable du traitement est responsable du respect du paragraphe 1 et est en mesure de démontrer que celui-ci est respecté (responsabilité). »

6        L’article 12 du RGPD, intitulé « Transparence des informations et des communications et modalités de l’exercice des droits de la personne concernée », énonce :

« 1.      Le responsable du traitement prend des mesures appropriées pour fournir toute information visée aux articles 13 et 14 ainsi que pour procéder à toute communication au titre des articles 15 à 22 et de l’article 34 en ce qui concerne le traitement à la personne concernée d’une façon concise, transparente, compréhensible et aisément accessible, en des termes clairs et simples, en particulier pour toute information destinée spécifiquement à un enfant. Les informations sont fournies par écrit ou par d’autres moyens y compris, lorsque c’est approprié, par voie électronique. Lorsque la personne concernée en fait la demande, les informations peuvent être fournies oralement, à condition que l’identité de la personne concernée soit démontrée par d’autres moyens.

2.      Le responsable du traitement facilite l’exercice des droits conférés à la personne concernée au titre des articles 15 à 22. Dans les cas visés à l’article 11, paragraphe 2, le responsable du traitement ne refuse pas de donner suite à la demande de la personne concernée d’exercer les droits que lui confèrent les articles 15 à 22, à moins que le responsable du traitement ne démontre qu’il n’est pas en mesure d’identifier la personne concernée.

[...]

5.      Aucun paiement n’est exigé pour fournir les informations au titre des articles 13 et 14 et pour procéder à toute communication et prendre toute mesure au titre des articles 15 à 22 et de l’article 34. Lorsque les demandes d’une personne concernée sont manifestement infondées ou excessives, notamment en raison de leur caractère répétitif, le responsable du traitement peut :

a)      exiger le paiement de frais raisonnables qui tiennent compte des coûts administratifs supportés pour fournir les informations, procéder aux communications ou prendre les mesures demandées ; ou

b)      refuser de donner suite à ces demandes.

Il incombe au responsable du traitement de démontrer le caractère manifestement infondé ou excessif de la demande.

[...] »

7        L’article 13 du RGPD, intitulé « Informations à fournir lorsque des données à caractère personnel sont collectées auprès de la personne concernée », prévoit, à son paragraphe 1 :

« Lorsque des données à caractère personnel relatives à une personne concernée sont collectées auprès de cette personne, le responsable du traitement lui fournit, au moment où les données en question sont obtenues, toutes les informations suivantes :

[...]

e)      les destinataires ou les catégories de destinataires des données à caractère personnel, s’ils existent ; [...]

[...] »

8        L’article 14 du RGPD, intitulé « Informations à fournir lorsque les données à caractère personnel n’ont pas été collectées auprès de la personne concernée », dispose, à son paragraphe 1 :

« Lorsque les données à caractère personnel n’ont pas été collectées auprès de la personne concernée, le responsable du traitement fournit à celle-ci toutes les informations suivantes :

[...]

e)      le cas échéant, les destinataires ou les catégories de destinataires des données à caractère personnel ;

[...] »

9        Aux termes de l’article 15 du RGPD, intitulé « Droit d’accès de la personne concernée » :

« 1.      La personne concernée a le droit d’obtenir du responsable du traitement la confirmation que des données à caractère personnel la concernant sont ou ne sont pas traitées et, lorsqu’elles le sont, l’accès auxdites données à caractère personnel ainsi que les informations suivantes :

a)      les finalités du traitement ;

b)      les catégories de données à caractère personnel concernées ;

c)      les destinataires ou catégories de destinataires auxquels les données à caractère personnel ont été ou seront communiquées, en particulier les destinataires qui sont établis dans des pays tiers ou les organisations internationales ;

d)      lorsque cela est possible, la durée de conservation des données à caractère personnel envisagée ou, lorsque ce n’est pas possible, les critères utilisés pour déterminer cette durée ;

e)      l’existence du droit de demander au responsable du traitement la rectification ou l’effacement de données à caractère personnel, ou une limitation du traitement des données à caractère personnel relatives à la personne concernée, ou du droit de s’opposer à ce traitement ;

f)      le droit d’introduire une réclamation auprès d’une autorité de contrôle ;

g)      lorsque les données à caractère personnel ne sont pas collectées auprès de la personne concernée, toute information disponible quant à leur source ;

h)      l’existence d’une prise de décision automatisée, y compris un profilage, visée à l’article 22, paragraphes 1 et 4, et, au moins en pareils cas, des informations utiles concernant la logique sous-jacente, ainsi que l’importance et les conséquences prévues de ce traitement pour la personne concernée.

2.      Lorsque les données à caractère personnel sont transférées vers un pays tiers ou à une organisation internationale, la personne concernée a le droit d’être informée des garanties appropriées, en vertu de l’article 46, en ce qui concerne ce transfert.

3.      Le responsable du traitement fournit une copie des données à caractère personnel faisant l’objet d’un traitement. Le responsable du traitement peut exiger le paiement de frais raisonnables basés sur les coûts administratifs pour toute copie supplémentaire demandée par la personne concernée. Lorsque la personne concernée présente sa demande par voie électronique, les informations sont fournies sous une forme électronique d’usage courant, à moins que la personne concernée ne demande qu’il en soit autrement.

4.      Le droit d’obtenir une copie visée au paragraphe 3 ne porte pas atteinte aux droits et libertés d’autrui. »

10      L’article 16 du RGPD, intitulé « Droit de rectification », dispose :

« La personne concernée a le droit d’obtenir du responsable du traitement, dans les meilleurs délais, la rectification des données à caractère personnel la concernant qui sont inexactes. Compte tenu des finalités du traitement, la personne concernée a le droit d’obtenir que les données à caractère personnel incomplètes soient complétées, y compris en fournissant une déclaration complémentaire. »

11      Aux termes de l’article 17 du RGPD, intitulé « Droit à l’effacement (« droit à l’oubli ») » :

« 1.      La personne concernée a le droit d’obtenir du responsable du traitement l’effacement, dans les meilleurs délais, de données à caractère personnel la concernant et le responsable du traitement a l’obligation d’effacer ces données à caractère personnel dans les meilleurs délais, lorsque l’un des motifs suivants s’applique :

a)      les données à caractère personnel ne sont plus nécessaires au regard des finalités pour lesquelles elles ont été collectées ou traitées d’une autre manière ;

b)      la personne concernée retire le consentement sur lequel est fondé le traitement, conformément à l’article 6, paragraphe 1, point a), ou à l’article 9, paragraphe 2, point a), et il n’existe pas d’autre fondement juridique au traitement ;

c)      la personne concernée s’oppose au traitement en vertu de l’article 21, paragraphe 1, et il n’existe pas de motif légitime impérieux pour le traitement, ou la personne concernée s’oppose au traitement en vertu de l’article 21, paragraphe 2 ;

d)      les données à caractère personnel ont fait l’objet d’un traitement illicite ;

e)      les données à caractère personnel doivent être effacées pour respecter une obligation légale qui est prévue par le droit de l’Union ou par le droit de l’État membre auquel le responsable du traitement est soumis ;

f)      les données à caractère personnel ont été collectées dans le cadre de l’offre de services de la société de l’information visée à l’article 8, paragraphe 1.

2.      Lorsqu’il a rendu publiques les données à caractère personnel et qu’il est tenu de les effacer en vertu du paragraphe 1, le responsable du traitement, compte tenu des technologies disponibles et des coûts de mise en œuvre, prend des mesures raisonnables, y compris d’ordre technique, pour informer les responsables du traitement qui traitent ces données à caractère personnel que la personne concernée a demandé l’effacement par ces responsables du traitement de tout lien vers ces données à caractère personnel, ou de toute copie ou reproduction de celles-ci.

[...] »

12      L’article 18 du RGPD, intitulé « Droit à la limitation du traitement », dispose, à son paragraphe 1 :

« La personne concernée a le droit d’obtenir du responsable du traitement la limitation du traitement lorsque l’un des éléments suivants s’applique :

a)      l’exactitude des données à caractère personnel est contestée par la personne concernée, pendant une durée permettant au responsable du traitement de vérifier l’exactitude des données à caractère personnel ;

b)      le traitement est illicite et la personne concernée s’oppose à leur effacement et exige à la place la limitation de leur utilisation ;

c)      le responsable du traitement n’a plus besoin des données à caractère personnel aux fins du traitement mais celles-ci sont encore nécessaires à la personne concernée pour la constatation, l’exercice ou la défense de droits en justice ;

d)      la personne concernée s’est opposée au traitement en vertu de l’article 21, paragraphe 1, pendant la vérification portant sur le point de savoir si les motifs légitimes poursuivis par le responsable du traitement prévalent sur ceux de la personne concernée.

[...] »

13      L’article 19 du RGPD est ainsi libellé :

« Le responsable du traitement notifie à chaque destinataire auquel les données à caractère personnel ont été communiquées toute rectification ou tout effacement de données à caractère personnel ou toute limitation du traitement effectué conformément à l’article 16, à l’article 17, paragraphe 1, et à l’article 18, à moins qu’une telle communication [ne] se révèle impossible ou [n’]exige des efforts disproportionnés. Le responsable du traitement fournit à la personne concernée des informations sur ces destinataires si celle-ci en fait la demande. »

14      Selon l’article 21 du RGPD, intitulé « Droit d’opposition » :

« 1.      La personne concernée a le droit de s’opposer à tout moment, pour des raisons tenant à sa situation particulière, à un traitement des données à caractère personnel la concernant fondé sur l’article 6, paragraphe 1, point e) ou f), y compris un profilage fondé sur ces dispositions. Le responsable du traitement ne traite plus les données à caractère personnel, à moins qu’il ne démontre qu’il existe des motifs légitimes et impérieux pour le traitement qui prévalent sur les intérêts et les droits et libertés de la personne concernée, ou pour la constatation, l’exercice ou la défense de droits en justice.

2.      Lorsque les données à caractère personnel sont traitées à des fins de prospection, la personne concernée a le droit de s’opposer à tout moment au traitement des données à caractère personnel la concernant à de telles fins de prospection, y compris au profilage dans la mesure où il est lié à une telle prospection.

3.      Lorsque la personne concernée s’oppose au traitement à des fins de prospection, les données à caractère personnel ne sont plus traitées à ces fins.

4.      Au plus tard au moment de la première communication avec la personne concernée, le droit visé aux paragraphes 1 et 2 est explicitement porté à l’attention de la personne concernée et est présenté clairement et séparément de toute autre information.

5.      Dans le cadre de l’utilisation de services de la société de l’information, et nonobstant la directive 2002/58/CE [du Parlement européen et du Conseil, du 12 juillet 2002, concernant le traitement des données à caractère personnel et la protection de la vie privée dans le secteur des communications électroniques (directive vie privée et communications électroniques) (JO 2002, L 201, p. 37)], la personne concernée peut exercer son droit d’opposition à l’aide de procédés automatisés utilisant des spécifications techniques.

6.      Lorsque des données à caractère personnel sont traitées à des fins de recherche scientifique ou historique ou à des fins statistiques en application de l’article 89, paragraphe 1, la personne concernée a le droit de s’opposer, pour des raisons tenant à sa situation particulière, au traitement de données à caractère personnel la concernant, à moins que le traitement ne soit nécessaire à l’exécution d’une mission d’intérêt public. »

15      L’article 79 du RGPD, intitulé « Droit à un recours juridictionnel effectif contre un responsable du traitement ou un sous-traitant », énonce, à son paragraphe 1 :

« Sans préjudice de tout recours administratif ou extrajudiciaire qui lui est ouvert, y compris le droit d’introduire une réclamation auprès d’une autorité de contrôle au titre de l’article 77, chaque personne concernée a droit à un recours juridictionnel effectif si elle considère que les droits que lui confère le présent règlement ont été violés du fait d’un traitement de ses données à caractère personnel effectué en violation du présent règlement. »

16      L’article 82 du RGPD, intitulé « Droit à réparation et responsabilité » prévoit, à son paragraphe 1 :

« Toute personne ayant subi un dommage matériel ou moral du fait d’une violation du présent règlement a le droit d’obtenir du responsable du traitement ou du sous-traitant réparation du préjudice subi. »

 Le litige au principal et la question préjudicielle

17      Le 15 janvier 2019, RW s’est adressé à l’Österreichische Post afin d’obtenir, sur le fondement de l’article 15 du RGPD, l’accès aux données à caractère personnel le concernant conservées ou ayant été conservées dans le passé par celle-ci et, en cas de communication des données à des tiers, l’identité de ces destinataires.

18      En réponse à cette demande, l’Österreichische Post s’est limitée à indiquer qu’elle utilise des données, dans la mesure autorisée par le droit, dans le cadre de son activité d’éditeur d’annuaires téléphoniques et qu’elle propose ces données à caractère personnel à des partenaires commerciaux à des fins de marketing. Au demeurant, elle a renvoyé à un site Internet pour plus d’informations et concernant d’autres fins de traitement des données. Elle n’a pas communiqué à RW l’identité des destinataires concrets des données.

19      RW a assigné l’Österreichische Post devant les juridictions autrichiennes en demandant qu’il soit fait injonction à cette dernière de lui fournir, notamment, l’identité du ou des destinataires de ses données à caractère personnel ainsi communiquées.

20      Au cours de la procédure judiciaire ainsi engagée, l’Österreichische Post a informé RW que ses données à caractère personnel avaient été traitées à des fins de marketing et transmises à des clients, parmi lesquels des annonceurs dans le secteur de la vente par correspondance et le commerce physique, des entreprises informatiques, des éditeurs d’adresses et des associations telles que des organisations caritatives, des organisations non gouvernementales (ONG) ou des partis politiques.

21      Les juridictions de première instance et d’appel ont débouté RW de son recours au motif que l’article 15, paragraphe 1, sous c), du RGPD, en ce qu’il se réfère aux « destinataires ou catégories de destinataires », accorderait au responsable du traitement la possibilité d’indiquer seulement à la personne concernée les catégories de destinataires, sans devoir désigner nommément les destinataires concrets auxquels les données à caractère personnel sont transmises.

22      RW a introduit un pourvoi en Revision auprès de l’Oberster Gerichtshof (Cour suprême, Autriche), la juridiction de renvoi.

23      Cette juridiction s’interroge sur l’interprétation de l’article 15, paragraphe 1, sous c), du RGPD, dans la mesure où le libellé de cette disposition ne permettrait pas clairement de savoir si celle-ci accorde à la personne concernée le droit d’avoir accès aux informations relatives aux destinataires concrets des données communiquées ou si le responsable du traitement dispose d’un choix discrétionnaire quant à la manière dont il entend donner suite à une demande d’accès à l’information sur les destinataires.

24      Ladite juridiction fait toutefois observer que la ratio legis de ladite disposition plaiderait plutôt en faveur de l’interprétation selon laquelle c’est la personne concernée qui a le choix de demander des informations relatives aux catégories de destinataires ou aux destinataires concrets de ses données à caractère personnel. Selon elle, toute interprétation contraire porterait gravement atteinte à l’effectivité des voies de recours dont dispose la personne concernée pour protéger ses données. En effet, dans le cas où les responsables disposeraient du choix d’indiquer aux personnes concernées les destinataires concrets ou seulement les catégories de destinataires, il serait à craindre que, en pratique, quasiment aucun d’entre eux ne fournira les informations relatives aux destinataires concrets.

25      En outre, contrairement à l’article 13, paragraphe 1, sous e), et à l’article 14, paragraphe 1, sous e), du RGPD, qui prévoient une obligation pour le responsable du traitement de fournir les informations qu’ils visent, l’article 15, paragraphe 1, de ce règlement mettrait l’accent sur la portée du droit d’accès de la personne concernée, ce qui tendrait également à indiquer, selon la juridiction de renvoi, que la personne concernée a le droit de choisir entre demander des informations sur les destinataires concrets ou sur les catégories de destinataires.

26      Enfin, la juridiction de renvoi ajoute que le droit d’accès prévu à l’article 15, paragraphe 1, du RGPD porte non pas uniquement sur les données à caractère personnel actuellement traitées mais également sur l’ensemble des données traitées dans le passé. À cet égard, elle précise que les considérations figurant dans l’arrêt du 7 mai 2009, Rijkeboer (C‑553/07, EU:C:2009:293), fondées sur la finalité du droit d’accès prévu par la directive 95/46, peuvent être transposées au droit d’accès visé à l’article 15 du RGPD, et cela d’autant plus qu’il peut être déduit des considérants 9 et 10 de celui-ci que le législateur de l’Union n’a pas entendu réduire le niveau de protection par rapport à cette directive.

27      Dans ces circonstances, l’Oberster Gerichtshof (Cour suprême) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour la question préjudicielle suivante :

« L’article 15, paragraphe 1, sous c), du [RGPD] doit-il être interprété en ce sens que le droit d’accès est limité à l’information sur les catégories de destinataires si les destinataires concrets ne sont pas encore connus lorsque les communications sont envisagées, mais qu’il doit impérativement s’étendre également à l’information sur les destinataires de ces informations lorsque des données ont déjà été communiquées ? »

 Sur la question préjudicielle

28      Par sa question préjudicielle, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 15, paragraphe 1, sous c), du RGPD doit être interprété en ce sens que le droit d’accès de la personne concernée aux données à caractère personnel la concernant, prévu par cette disposition, implique, lorsque ces données ont été ou seront communiquées à des destinataires, l’obligation pour le responsable du traitement de fournir à cette personne l’identité concrète de ces destinataires.

29      À titre liminaire, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, l’interprétation d’une disposition du droit de l’Union requiert de tenir compte non seulement de ses termes, mais également du contexte dans lequel elle s’inscrit ainsi que des objectifs et de la finalité que poursuit l’acte dont elle fait partie (arrêt du 15 mars 2022, Autorité des marchés financiers, C‑302/20, EU:C:2022:190, point 63). En outre, lorsqu’une disposition du droit de l’Union est susceptible de faire l’objet de plusieurs interprétations, il convient de privilégier celle qui est de nature à sauvegarder son effet utile (arrêt du 7 mars 2018, Cristal Union, C‑31/17, EU:C:2018:168, point 41 et jurisprudence citée).

30      S’agissant, tout d’abord, du libellé de l’article 15, paragraphe 1, sous c), du RGPD, il convient de rappeler que cette disposition énonce que la personne concernée a le droit d’obtenir du responsable du traitement la confirmation que des données à caractère personnel la concernant sont ou ne sont pas traitées et, lorsqu’elles le sont, l’accès auxdites données à caractère personnel ainsi que les informations relatives aux destinataires ou catégories de destinataires auxquels ces données à caractère personnel ont été ou seront communiquées.

31      À cet égard, il y a lieu de relever que les termes « destinataires » et « catégories de destinataires » figurant dans cette disposition sont utilisés successivement, sans qu’il soit possible de déduire un ordre de priorité entre l’un et l’autre.

32      Ainsi, force est de constater que le libellé de l’article 15, paragraphe 1, sous c), du RGPD ne permet pas de déterminer, de manière univoque, si la personne concernée aurait le droit d’être informée, lorsque les données à caractère personnel la concernant ont été ou seront communiquées, de l’identité concrète des destinataires de celles-ci.

33      Ensuite, en ce qui concerne le contexte dans lequel s’inscrit l’article 15, paragraphe 1, sous c), du RGPD, il importe de rappeler, en premier lieu, que le considérant 63 de ce règlement prévoit que la personne concernée doit avoir le droit de connaître et de se faire communiquer, en particulier, l’identité des destinataires de ces données à caractère personnel et ne précise pas que ce droit pourrait être limité aux seules catégories de destinataires, ainsi que l’a relevé M. l’avocat général au point 23 de ses conclusions.

34      En deuxième lieu, il convient également de rappeler que, pour respecter le droit d’accès, tout traitement de données des personnes physiques à caractère personnel doit être conforme aux principes énoncés à l’article 5 du RGPD (voir, en ce sens, arrêt du 16 janvier 2019, Deutsche Post, C-496/17, EU:C:2019:26, point 57).

35      Or, au nombre de ces principes figure le principe de transparence visé à l’article 5, paragraphe 1, sous a), du RGPD, qui implique, ainsi qu’il ressort du considérant 39 de ce règlement, que la personne concernée dispose d’informations sur la manière dont ses données à caractère personnel sont traitées et que ces informations soient aisément accessibles et compréhensibles.

36      En troisième lieu, il convient de relever, ainsi que l’a souligné M. l’avocat général au point 21 de ses conclusions, que, à la différence des articles 13 et 14 du RGPD, qui fixent une obligation pour le responsable du traitement de fournir à la personne concernée les informations relatives aux catégories de destinataires ou aux destinataires concrets des données à caractère personnel la concernant lorsque celles-ci sont ou ne sont pas collectées auprès de la personne concernée, l’article 15 du RGPD prévoit un véritable droit d’accès en faveur de la personne concernée, de sorte que cette dernière doit disposer du choix d’obtenir soit les informations sur les destinataires spécifiques auxquels lesdites données ont été ou seront communiquées, lorsque cela est possible, soit celles concernant les catégories de destinataires.

37      En quatrième lieu, la Cour a déjà jugé que l’exercice de ce droit d’accès doit permettre à la personne concernée de vérifier non seulement que les données la concernant sont exactes, mais également qu’elles sont traitées de manière licite (voir, par analogie, arrêts du 17 juillet 2014, YS e.a., C-141/12 et C-372/12, EU:C:2014:2081, point 44, ainsi que du 20 décembre 2017, Nowak, C-434/16, EU:C:2017:994, point 57), notamment qu’elles ont été communiquées à des destinataires autorisés (voir, par analogie, arrêt du 7 mai 2009, Rijkeboer, C‑553/07, EU:C:2009:293, point 49).

38      En particulier, ce droit d’accès est nécessaire pour permettre à la personne concernée d’exercer, le cas échéant, son droit à la rectification, son droit à l’effacement (« droit à l’oubli »), son droit à la limitation du traitement, qui lui sont reconnus, respectivement, par les articles 16, 17 et 18 du RGDP (voir, par analogie, arrêts du 17 juillet 2014, YS e.a., C‑141/12 et C‑372/12, EU:C:2014:2081, point 44, ainsi que du 20 décembre 2017, Nowak, C‑434/16, EU:C:2017:994, point 57), ainsi que son droit d’opposition au traitement de ses données à caractère personnel, prévu à l’article 21 du RGPD, et son droit de recours en cas de dommage subi, prévu aux articles 79 et 82 du RGPD (voir, par analogie, arrêt du 7 mai 2009, Rijkeboer, C-553/07, EU:C:2009:293, point 52).

39      Ainsi, afin de garantir l’effet utile de l’ensemble des droits mentionnés au point précédent du présent arrêt, la personne concernée doit disposer, en particulier, d’un droit à être informée de l’identité des destinataires concrets dans le cas où ses données à caractère personnel ont déjà été communiquées.

40      Une telle interprétation est confirmée, en cinquième et dernier lieu, par la lecture de l’article 19 du RGPD qui prévoit, à sa première phrase, que le responsable du traitement notifie, en principe, à chaque destinataire auquel les données à caractère personnel ont été communiquées toute rectification ou tout effacement de données à caractère personnel ou toute limitation du traitement et, à sa seconde phrase, que ce responsable fournit à la personne concernée des informations sur ces destinataires si celle-ci en fait la demande.

41      Ainsi, l’article 19, seconde phrase, du RGPD confère expressément à la personne concernée le droit d’être informée des destinataires concrets des données la concernant par le responsable du traitement, dans le cadre de l’obligation qu’a ce dernier d’informer tous les destinataires de l’exercice des droits dont cette personne dispose au titre de l’article 16, de l’article 17, paragraphe 1, et de l’article 18 du RGPD.

42      Il découle de l’analyse contextuelle qui précède que l’article 15, paragraphe 1, sous c), du RGPD constitue l’une des dispositions destinées à garantir la transparence des modalités de traitement des données à caractère personnel à l’égard de la personne concernée et permet à celle-ci, ainsi que l’a relevé M. l’avocat général au point 33 de ses conclusions, d’exercer les prérogatives prévues notamment aux articles 16 à 19, 21, 79 et 82 du RGPD.

43      Partant, il convient de considérer que les informations fournies à la personne concernée au titre du droit d’accès prévu à l’article 15, paragraphe 1, sous c), du RGPD doivent être les plus exactes possibles. En particulier, ce droit d’accès implique la possibilité pour la personne concernée d’obtenir de la part du responsable du traitement les informations sur les destinataires spécifiques auxquels les données ont été ou seront communiquées ou, alternativement, de choisir de se borner à demander des informations concernant les catégories de destinataires.

44      Enfin, s’agissant de la finalité que poursuit le RGPD, il convient de relever que ce règlement vise, notamment, ainsi qu’il ressort de son considérant 10, à assurer un niveau élevé de protection des personnes physiques au sein de l’Union (arrêt du 6 octobre 2020, La Quadrature du Net e.a., C-511/18, C-512/18 et C-520/18, EU:C:2020:791, point 207). À cet égard, ainsi que l’a relevé en substance M. l’avocat général au point 14 de ses conclusions, le cadre juridique général créé par le RGPD met en œuvre les exigences découlant du droit fondamental à la protection des données à caractère personnel protégé par l’article 8 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, notamment les exigences expressément prévues au paragraphe 2 de cet article (voir, en ce sens, arrêt du 9 mars 2017, Manni, C-398/15, EU:C:2017:197, point 40).

45      Or, cet objectif conforte l’interprétation de l’article 15, paragraphe 1, du RGPD figurant au point 43 du présent arrêt.

46      Dès lors, il résulte également de l’objectif poursuivi par le RGPD que la personne concernée a le droit d’obtenir du responsable du traitement des informations sur les destinataires concrets auxquels les données à caractère personnel la concernant ont été ou seront communiquées.

47      Cela étant, il importe, enfin, de souligner que, ainsi qu’il ressort du considérant 4 du RGPD, le droit à la protection des données à caractère personnel n’est pas un droit absolu. En effet, ce droit doit être considéré par rapport à sa fonction dans la société et être mis en balance avec d’autres droits fondamentaux, conformément au principe de proportionnalité, ainsi que la Cour l’a réaffirmé, en substance, au point 172 de l’arrêt du 16 juillet 2020, Facebook Ireland et Schrems (C‑311/18, EU:C:2020:559).

48      Partant, il peut être admis que, dans des circonstances spécifiques, il ne soit pas possible de fournir des informations sur des destinataires concrets. Dès lors, le droit d’accès pourra être limité à l’information sur les catégories de destinataires s’il est impossible de communiquer l’identité des destinataires concrets, en particulier lorsque ceux-ci ne sont pas encore connus.

49      En outre, il y a lieu de rappeler que, en vertu de l’article 12, paragraphe 5, sous b), du RGPD, le responsable du traitement peut, conformément au principe de responsabilité visé à l’article 5, paragraphe 2, de ce règlement ainsi qu’au considérant 74 de celui-ci, refuser de donner suite aux demandes de la personne concernée lorsque celles-ci sont manifestement infondées ou excessives, étant précisé qu’il incombe à ce même responsable du traitement de démontrer le caractère manifestement infondé ou excessif desdites demandes.

50      En l’occurrence, il ressort de la demande de décision préjudicielle que l’Österreichische Post a rejeté la demande introduite par RW sur le fondement de l’article 15, paragraphe 1, du RGPD, tendant à ce que celle-ci lui fournisse l’identité des destinataires auxquels elle avait communiqué les données à caractère personnel la concernant. Il appartiendra à la juridiction de renvoi de vérifier si, compte tenu des circonstances en cause au principal, l’Österreichische Post a établi le caractère manifestement infondé ou excessif de cette demande.

51      Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu de répondre à la question préjudicielle que l’article 15, paragraphe 1, sous c), du RGPD doit être interprété en ce sens que le droit d’accès de la personne concernée aux données à caractère personnel la concernant, prévu par cette disposition, implique, lorsque ces données ont été ou seront communiquées à des destinataires, l’obligation pour le responsable du traitement de fournir à cette personne l’identité même de ces destinataires, à moins qu’il ne soit impossible d’identifier ces destinataires ou que ledit responsable du traitement ne démontre que les demandes d’accès de la personne concernée sont manifestement infondées ou excessives, au sens de l’article 12, paragraphe 5, du RGPD, auxquels cas celui-ci peut indiquer à cette personne uniquement les catégories de destinataires en cause.

 Sur les dépens

52      La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

Par ces motifs, la Cour (première chambre) dit pour droit :

L’article 15, paragraphe 1, sous c), du règlement (UE) 2016/679 du Parlement européen et du Conseil, du 27 avril 2016, relatif à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données, et abrogeant la directive 95/46/CE (règlement général sur la protection des données),

doit être interprété en ce sens que :

le droit d’accès de la personne concernée aux données à caractère personnel la concernant, prévu par cette disposition, implique, lorsque ces données ont été ou seront communiquées à des destinataires, l’obligation pour le responsable du traitement de fournir à cette personne l’identité même de ces destinataires, à moins qu’il ne soit impossible d’identifier ces destinataires ou que ledit responsable du traitement ne démontre que les demandes d’accès de la personne concernée sont manifestement infondées ou excessives, au sens de l’article 12, paragraphe 5, du règlement 2016/679, auxquels cas celui-ci peut indiquer à cette personne uniquement les catégories de destinataires en cause.

Signatures

*      Langue de procédure : l’allemand.

ARRÊT DE LA COUR (première chambre)

12 janvier 2023 (*)

« Renvoi préjudiciel – Protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel – Règlement (UE) 2016/679 – Article 15, paragraphe 1, sous c) – Droit d’accès de la personne concernée à ses données – Informations sur les destinataires ou catégories de destinataires auxquels les données à caractère personnel ont été ou seront communiquées – Limitations »

Dans l’affaire C‑154/21,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par l’Oberster Gerichtshof (Cour suprême, Autriche), par décision du 18 février 2021, parvenue à la Cour le 9 mars 2021, dans la procédure

RW

contre

Österreichische Post AG,

LA COUR (première chambre),

composée de M. A. Arabadjiev, président de chambre, M. L. Bay Larsen, vice‑président de la Cour, faisant fonction de juge de la première chambre, MM. P. G. Xuereb, A. Kumin et Mme I. Ziemele (rapporteure), juges,

avocat général : M. G. Pitruzzella,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la procédure écrite,

considérant les observations présentées :

–        pour RW, par Me R. Haupt, Rechtsanwalt,

–        pour Österreichische Post AG, par Me R. Marko, Rechtsanwalt,

–        pour le gouvernement autrichien, par MM. G. Kunnert, A. Posch et par Mme J. Schmoll, en qualité d’agents,

–        pour le gouvernement tchèque, par MM. M. Smolek et J. Vláčil, en qualité d’agents,

–        pour le gouvernement italien, par Mme G. Palmieri, en qualité d’agent, assistée de Mme M. Russo, avvocato dello Stato,

–        pour le gouvernement letton, par Mmes J. Davidoviča, I. Hūna et K. Pommere, en qualité d’agents,

–        pour le gouvernement roumain, par Mmes L.-E. Baţagoi, E. Gane et A. Wellman, en qualité d’agents,

–        pour le gouvernement suédois, par Mme H. Eklinder, M. J. Lundberg, Mmes C. Meyer-Seitz, A. M. Runeskjöld, M. Salborn Hodgson, Mmes R. Shahsavan Eriksson, H. Shev et M. O. Simonsson, en qualité d’agents,

–        pour la Commission européenne, par MM. F. Erlbacher et H. Kranenborg, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 9 juin 2022,

rend le présent

Arrêt

1        La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 15, paragraphe 1, sous c), du règlement (UE) 2016/679 du Parlement européen et du Conseil, du 27 avril 2016, relatif à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données, et abrogeant la directive 95/46/CE (règlement général sur la protection des données) (JO 2016, L 119, p. 1) (ci-après le « RGPD »).

2        Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant RW à Österreichische Post AG (ci-après l’« Österreichische Post ») au sujet d’une demande d’accès à des données à caractère personnel en vertu de l’article 15, paragraphe 1, sous c), du RGPD.

 Le cadre juridique

3        Les considérants 4, 9, 10, 39, 63 et 74 du RGPD sont libellés comme suit :

« (4)      [...] Le droit à la protection des données à caractère personnel n’est pas un droit absolu ; il doit être considéré par rapport à sa fonction dans la société et être mis en balance avec d’autres droits fondamentaux, conformément au principe de proportionnalité. [...]

[...]

(9)      Si elle demeure satisfaisante en ce qui concerne ses objectifs et ses principes, la directive 95/46/CE [du Parlement européen et du Conseil, du 24 octobre 1995, relative à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données (JO 1995, L 281, p. 31),] n’a pas permis d’éviter une fragmentation de la mise en œuvre de la protection des données dans l’Union [européenne], une insécurité juridique ou le sentiment, largement répandu dans le public, que des risques importants pour la protection des personnes physiques subsistent, en particulier en ce qui concerne l’environnement en ligne. Les différences dans le niveau de protection des droits et libertés des personnes physiques, en particulier le droit à la protection des données à caractère personnel, à l’égard du traitement des données à caractère personnel dans les États membres peuvent empêcher le libre flux de ces données dans l’ensemble de l’Union. Ces différences peuvent dès lors constituer un obstacle à l’exercice des activités économiques au niveau de l’Union, fausser la concurrence et empêcher les autorités de s’acquitter des obligations qui leur incombent en vertu du droit de l’Union. Ces différences dans le niveau de protection résultent de l’existence de divergences dans la mise en œuvre et l’application de la directive 95/46/CE.

(10)      Afin d’assurer un niveau cohérent et élevé de protection des personnes physiques et de lever les obstacles aux flux de données à caractère personnel au sein de l’Union, le niveau de protection des droits et des libertés des personnes physiques à l’égard du traitement de ces données devrait être équivalent dans tous les États membres. [...]

[...]

(39)      Tout traitement de données à caractère personnel devrait être licite et loyal. Le fait que des données à caractère personnel concernant des personnes physiques sont collectées, utilisées, consultées ou traitées d’une autre manière et la mesure dans laquelle ces données sont ou seront traitées devraient être transparents à l’égard des personnes physiques concernées. Le principe de transparence exige que toute information et communication relatives au traitement de ces données à caractère personnel soient aisément accessibles, faciles à comprendre, et formulées en des termes clairs et simples. [...]

[...]

(63)      Une personne concernée devrait avoir le droit d’accéder aux données à caractère personnel qui ont été collectées à son sujet et d’exercer ce droit facilement et à des intervalles raisonnables, afin de prendre connaissance du traitement et d’en vérifier la licéité. [...] En conséquence, toute personne concernée devrait avoir le droit de connaître et de se faire communiquer, en particulier, les finalités du traitement des données à caractère personnel, si possible la durée du traitement de ces données à caractère personnel, l’identité des destinataires de ces données à caractère personnel, la logique qui sous-tend leur éventuel traitement automatisé et les conséquences que ce traitement pourrait avoir, au moins en cas de profilage. [...] Ce droit ne devrait pas porter atteinte aux droits ou libertés d’autrui, y compris au secret des affaires ou à la propriété intellectuelle, notamment au droit d’auteur protégeant le logiciel. Cependant, ces considérations ne devraient pas aboutir à refuser toute communication d’informations à la personne concernée. [...]

[...]

(74)      Il y a lieu d’instaurer la responsabilité du responsable du traitement pour tout traitement de données à caractère personnel qu’il effectue lui-même ou qui est réalisé pour son compte. Il importe, en particulier, que le responsable du traitement soit tenu de mettre en œuvre des mesures appropriées et effectives et soit à même de démontrer la conformité des activités de traitement avec le présent règlement, y compris l’efficacité des mesures. Ces mesures devraient tenir compte de la nature, de la portée, du contexte et des finalités du traitement ainsi que du risque que celui-ci présente pour les droits et libertés des personnes physiques. »

4        L’article 1er du RGPD, intitulé « Objet et objectifs », dispose, à son paragraphe 2 :

« Le présent règlement protège les libertés et droits fondamentaux des personnes physiques, et en particulier leur droit à la protection des données à caractère personnel. »

5        L’article 5 du RGPD, intitulé « Principes relatifs au traitement des données à caractère personnel », prévoit :

« 1.      Les données à caractère personnel doivent être :

a)      traitées de manière licite, loyale et transparente au regard de la personne concernée (licéité, loyauté, transparence) ;

[...]

2.      Le responsable du traitement est responsable du respect du paragraphe 1 et est en mesure de démontrer que celui-ci est respecté (responsabilité). »

6        L’article 12 du RGPD, intitulé « Transparence des informations et des communications et modalités de l’exercice des droits de la personne concernée », énonce :

« 1.      Le responsable du traitement prend des mesures appropriées pour fournir toute information visée aux articles 13 et 14 ainsi que pour procéder à toute communication au titre des articles 15 à 22 et de l’article 34 en ce qui concerne le traitement à la personne concernée d’une façon concise, transparente, compréhensible et aisément accessible, en des termes clairs et simples, en particulier pour toute information destinée spécifiquement à un enfant. Les informations sont fournies par écrit ou par d’autres moyens y compris, lorsque c’est approprié, par voie électronique. Lorsque la personne concernée en fait la demande, les informations peuvent être fournies oralement, à condition que l’identité de la personne concernée soit démontrée par d’autres moyens.

2.      Le responsable du traitement facilite l’exercice des droits conférés à la personne concernée au titre des articles 15 à 22. Dans les cas visés à l’article 11, paragraphe 2, le responsable du traitement ne refuse pas de donner suite à la demande de la personne concernée d’exercer les droits que lui confèrent les articles 15 à 22, à moins que le responsable du traitement ne démontre qu’il n’est pas en mesure d’identifier la personne concernée.

[...]

5.      Aucun paiement n’est exigé pour fournir les informations au titre des articles 13 et 14 et pour procéder à toute communication et prendre toute mesure au titre des articles 15 à 22 et de l’article 34. Lorsque les demandes d’une personne concernée sont manifestement infondées ou excessives, notamment en raison de leur caractère répétitif, le responsable du traitement peut :

a)      exiger le paiement de frais raisonnables qui tiennent compte des coûts administratifs supportés pour fournir les informations, procéder aux communications ou prendre les mesures demandées ; ou

b)      refuser de donner suite à ces demandes.

Il incombe au responsable du traitement de démontrer le caractère manifestement infondé ou excessif de la demande.

[...] »

7        L’article 13 du RGPD, intitulé « Informations à fournir lorsque des données à caractère personnel sont collectées auprès de la personne concernée », prévoit, à son paragraphe 1 :

« Lorsque des données à caractère personnel relatives à une personne concernée sont collectées auprès de cette personne, le responsable du traitement lui fournit, au moment où les données en question sont obtenues, toutes les informations suivantes :

[...]

e)      les destinataires ou les catégories de destinataires des données à caractère personnel, s’ils existent ; [...]

[...] »

8        L’article 14 du RGPD, intitulé « Informations à fournir lorsque les données à caractère personnel n’ont pas été collectées auprès de la personne concernée », dispose, à son paragraphe 1 :

« Lorsque les données à caractère personnel n’ont pas été collectées auprès de la personne concernée, le responsable du traitement fournit à celle-ci toutes les informations suivantes :

[...]

e)      le cas échéant, les destinataires ou les catégories de destinataires des données à caractère personnel ;

[...] »

9        Aux termes de l’article 15 du RGPD, intitulé « Droit d’accès de la personne concernée » :

« 1.      La personne concernée a le droit d’obtenir du responsable du traitement la confirmation que des données à caractère personnel la concernant sont ou ne sont pas traitées et, lorsqu’elles le sont, l’accès auxdites données à caractère personnel ainsi que les informations suivantes :

a)      les finalités du traitement ;

b)      les catégories de données à caractère personnel concernées ;

c)      les destinataires ou catégories de destinataires auxquels les données à caractère personnel ont été ou seront communiquées, en particulier les destinataires qui sont établis dans des pays tiers ou les organisations internationales ;

d)      lorsque cela est possible, la durée de conservation des données à caractère personnel envisagée ou, lorsque ce n’est pas possible, les critères utilisés pour déterminer cette durée ;

e)      l’existence du droit de demander au responsable du traitement la rectification ou l’effacement de données à caractère personnel, ou une limitation du traitement des données à caractère personnel relatives à la personne concernée, ou du droit de s’opposer à ce traitement ;

f)      le droit d’introduire une réclamation auprès d’une autorité de contrôle ;

g)      lorsque les données à caractère personnel ne sont pas collectées auprès de la personne concernée, toute information disponible quant à leur source ;

h)      l’existence d’une prise de décision automatisée, y compris un profilage, visée à l’article 22, paragraphes 1 et 4, et, au moins en pareils cas, des informations utiles concernant la logique sous-jacente, ainsi que l’importance et les conséquences prévues de ce traitement pour la personne concernée.

2.      Lorsque les données à caractère personnel sont transférées vers un pays tiers ou à une organisation internationale, la personne concernée a le droit d’être informée des garanties appropriées, en vertu de l’article 46, en ce qui concerne ce transfert.

3.      Le responsable du traitement fournit une copie des données à caractère personnel faisant l’objet d’un traitement. Le responsable du traitement peut exiger le paiement de frais raisonnables basés sur les coûts administratifs pour toute copie supplémentaire demandée par la personne concernée. Lorsque la personne concernée présente sa demande par voie électronique, les informations sont fournies sous une forme électronique d’usage courant, à moins que la personne concernée ne demande qu’il en soit autrement.

4.      Le droit d’obtenir une copie visée au paragraphe 3 ne porte pas atteinte aux droits et libertés d’autrui. »

10      L’article 16 du RGPD, intitulé « Droit de rectification », dispose :

« La personne concernée a le droit d’obtenir du responsable du traitement, dans les meilleurs délais, la rectification des données à caractère personnel la concernant qui sont inexactes. Compte tenu des finalités du traitement, la personne concernée a le droit d’obtenir que les données à caractère personnel incomplètes soient complétées, y compris en fournissant une déclaration complémentaire. »

11      Aux termes de l’article 17 du RGPD, intitulé « Droit à l’effacement (« droit à l’oubli ») » :

« 1.      La personne concernée a le droit d’obtenir du responsable du traitement l’effacement, dans les meilleurs délais, de données à caractère personnel la concernant et le responsable du traitement a l’obligation d’effacer ces données à caractère personnel dans les meilleurs délais, lorsque l’un des motifs suivants s’applique :

a)      les données à caractère personnel ne sont plus nécessaires au regard des finalités pour lesquelles elles ont été collectées ou traitées d’une autre manière ;

b)      la personne concernée retire le consentement sur lequel est fondé le traitement, conformément à l’article 6, paragraphe 1, point a), ou à l’article 9, paragraphe 2, point a), et il n’existe pas d’autre fondement juridique au traitement ;

c)      la personne concernée s’oppose au traitement en vertu de l’article 21, paragraphe 1, et il n’existe pas de motif légitime impérieux pour le traitement, ou la personne concernée s’oppose au traitement en vertu de l’article 21, paragraphe 2 ;

d)      les données à caractère personnel ont fait l’objet d’un traitement illicite ;

e)      les données à caractère personnel doivent être effacées pour respecter une obligation légale qui est prévue par le droit de l’Union ou par le droit de l’État membre auquel le responsable du traitement est soumis ;

f)      les données à caractère personnel ont été collectées dans le cadre de l’offre de services de la société de l’information visée à l’article 8, paragraphe 1.

2.      Lorsqu’il a rendu publiques les données à caractère personnel et qu’il est tenu de les effacer en vertu du paragraphe 1, le responsable du traitement, compte tenu des technologies disponibles et des coûts de mise en œuvre, prend des mesures raisonnables, y compris d’ordre technique, pour informer les responsables du traitement qui traitent ces données à caractère personnel que la personne concernée a demandé l’effacement par ces responsables du traitement de tout lien vers ces données à caractère personnel, ou de toute copie ou reproduction de celles-ci.

[...] »

12      L’article 18 du RGPD, intitulé « Droit à la limitation du traitement », dispose, à son paragraphe 1 :

« La personne concernée a le droit d’obtenir du responsable du traitement la limitation du traitement lorsque l’un des éléments suivants s’applique :

a)      l’exactitude des données à caractère personnel est contestée par la personne concernée, pendant une durée permettant au responsable du traitement de vérifier l’exactitude des données à caractère personnel ;

b)      le traitement est illicite et la personne concernée s’oppose à leur effacement et exige à la place la limitation de leur utilisation ;

c)      le responsable du traitement n’a plus besoin des données à caractère personnel aux fins du traitement mais celles-ci sont encore nécessaires à la personne concernée pour la constatation, l’exercice ou la défense de droits en justice ;

d)      la personne concernée s’est opposée au traitement en vertu de l’article 21, paragraphe 1, pendant la vérification portant sur le point de savoir si les motifs légitimes poursuivis par le responsable du traitement prévalent sur ceux de la personne concernée.

[...] »

13      L’article 19 du RGPD est ainsi libellé :

« Le responsable du traitement notifie à chaque destinataire auquel les données à caractère personnel ont été communiquées toute rectification ou tout effacement de données à caractère personnel ou toute limitation du traitement effectué conformément à l’article 16, à l’article 17, paragraphe 1, et à l’article 18, à moins qu’une telle communication [ne] se révèle impossible ou [n’]exige des efforts disproportionnés. Le responsable du traitement fournit à la personne concernée des informations sur ces destinataires si celle-ci en fait la demande. »

14      Selon l’article 21 du RGPD, intitulé « Droit d’opposition » :

« 1.      La personne concernée a le droit de s’opposer à tout moment, pour des raisons tenant à sa situation particulière, à un traitement des données à caractère personnel la concernant fondé sur l’article 6, paragraphe 1, point e) ou f), y compris un profilage fondé sur ces dispositions. Le responsable du traitement ne traite plus les données à caractère personnel, à moins qu’il ne démontre qu’il existe des motifs légitimes et impérieux pour le traitement qui prévalent sur les intérêts et les droits et libertés de la personne concernée, ou pour la constatation, l’exercice ou la défense de droits en justice.

2.      Lorsque les données à caractère personnel sont traitées à des fins de prospection, la personne concernée a le droit de s’opposer à tout moment au traitement des données à caractère personnel la concernant à de telles fins de prospection, y compris au profilage dans la mesure où il est lié à une telle prospection.

3.      Lorsque la personne concernée s’oppose au traitement à des fins de prospection, les données à caractère personnel ne sont plus traitées à ces fins.

4.      Au plus tard au moment de la première communication avec la personne concernée, le droit visé aux paragraphes 1 et 2 est explicitement porté à l’attention de la personne concernée et est présenté clairement et séparément de toute autre information.

5.      Dans le cadre de l’utilisation de services de la société de l’information, et nonobstant la directive 2002/58/CE [du Parlement européen et du Conseil, du 12 juillet 2002, concernant le traitement des données à caractère personnel et la protection de la vie privée dans le secteur des communications électroniques (directive vie privée et communications électroniques) (JO 2002, L 201, p. 37)], la personne concernée peut exercer son droit d’opposition à l’aide de procédés automatisés utilisant des spécifications techniques.

6.      Lorsque des données à caractère personnel sont traitées à des fins de recherche scientifique ou historique ou à des fins statistiques en application de l’article 89, paragraphe 1, la personne concernée a le droit de s’opposer, pour des raisons tenant à sa situation particulière, au traitement de données à caractère personnel la concernant, à moins que le traitement ne soit nécessaire à l’exécution d’une mission d’intérêt public. »

15      L’article 79 du RGPD, intitulé « Droit à un recours juridictionnel effectif contre un responsable du traitement ou un sous-traitant », énonce, à son paragraphe 1 :

« Sans préjudice de tout recours administratif ou extrajudiciaire qui lui est ouvert, y compris le droit d’introduire une réclamation auprès d’une autorité de contrôle au titre de l’article 77, chaque personne concernée a droit à un recours juridictionnel effectif si elle considère que les droits que lui confère le présent règlement ont été violés du fait d’un traitement de ses données à caractère personnel effectué en violation du présent règlement. »

16      L’article 82 du RGPD, intitulé « Droit à réparation et responsabilité » prévoit, à son paragraphe 1 :

« Toute personne ayant subi un dommage matériel ou moral du fait d’une violation du présent règlement a le droit d’obtenir du responsable du traitement ou du sous-traitant réparation du préjudice subi. »

 Le litige au principal et la question préjudicielle

17      Le 15 janvier 2019, RW s’est adressé à l’Österreichische Post afin d’obtenir, sur le fondement de l’article 15 du RGPD, l’accès aux données à caractère personnel le concernant conservées ou ayant été conservées dans le passé par celle-ci et, en cas de communication des données à des tiers, l’identité de ces destinataires.

18      En réponse à cette demande, l’Österreichische Post s’est limitée à indiquer qu’elle utilise des données, dans la mesure autorisée par le droit, dans le cadre de son activité d’éditeur d’annuaires téléphoniques et qu’elle propose ces données à caractère personnel à des partenaires commerciaux à des fins de marketing. Au demeurant, elle a renvoyé à un site Internet pour plus d’informations et concernant d’autres fins de traitement des données. Elle n’a pas communiqué à RW l’identité des destinataires concrets des données.

19      RW a assigné l’Österreichische Post devant les juridictions autrichiennes en demandant qu’il soit fait injonction à cette dernière de lui fournir, notamment, l’identité du ou des destinataires de ses données à caractère personnel ainsi communiquées.

20      Au cours de la procédure judiciaire ainsi engagée, l’Österreichische Post a informé RW que ses données à caractère personnel avaient été traitées à des fins de marketing et transmises à des clients, parmi lesquels des annonceurs dans le secteur de la vente par correspondance et le commerce physique, des entreprises informatiques, des éditeurs d’adresses et des associations telles que des organisations caritatives, des organisations non gouvernementales (ONG) ou des partis politiques.

21      Les juridictions de première instance et d’appel ont débouté RW de son recours au motif que l’article 15, paragraphe 1, sous c), du RGPD, en ce qu’il se réfère aux « destinataires ou catégories de destinataires », accorderait au responsable du traitement la possibilité d’indiquer seulement à la personne concernée les catégories de destinataires, sans devoir désigner nommément les destinataires concrets auxquels les données à caractère personnel sont transmises.

22      RW a introduit un pourvoi en Revision auprès de l’Oberster Gerichtshof (Cour suprême, Autriche), la juridiction de renvoi.

23      Cette juridiction s’interroge sur l’interprétation de l’article 15, paragraphe 1, sous c), du RGPD, dans la mesure où le libellé de cette disposition ne permettrait pas clairement de savoir si celle-ci accorde à la personne concernée le droit d’avoir accès aux informations relatives aux destinataires concrets des données communiquées ou si le responsable du traitement dispose d’un choix discrétionnaire quant à la manière dont il entend donner suite à une demande d’accès à l’information sur les destinataires.

24      Ladite juridiction fait toutefois observer que la ratio legis de ladite disposition plaiderait plutôt en faveur de l’interprétation selon laquelle c’est la personne concernée qui a le choix de demander des informations relatives aux catégories de destinataires ou aux destinataires concrets de ses données à caractère personnel. Selon elle, toute interprétation contraire porterait gravement atteinte à l’effectivité des voies de recours dont dispose la personne concernée pour protéger ses données. En effet, dans le cas où les responsables disposeraient du choix d’indiquer aux personnes concernées les destinataires concrets ou seulement les catégories de destinataires, il serait à craindre que, en pratique, quasiment aucun d’entre eux ne fournira les informations relatives aux destinataires concrets.

25      En outre, contrairement à l’article 13, paragraphe 1, sous e), et à l’article 14, paragraphe 1, sous e), du RGPD, qui prévoient une obligation pour le responsable du traitement de fournir les informations qu’ils visent, l’article 15, paragraphe 1, de ce règlement mettrait l’accent sur la portée du droit d’accès de la personne concernée, ce qui tendrait également à indiquer, selon la juridiction de renvoi, que la personne concernée a le droit de choisir entre demander des informations sur les destinataires concrets ou sur les catégories de destinataires.

26      Enfin, la juridiction de renvoi ajoute que le droit d’accès prévu à l’article 15, paragraphe 1, du RGPD porte non pas uniquement sur les données à caractère personnel actuellement traitées mais également sur l’ensemble des données traitées dans le passé. À cet égard, elle précise que les considérations figurant dans l’arrêt du 7 mai 2009, Rijkeboer (C‑553/07, EU:C:2009:293), fondées sur la finalité du droit d’accès prévu par la directive 95/46, peuvent être transposées au droit d’accès visé à l’article 15 du RGPD, et cela d’autant plus qu’il peut être déduit des considérants 9 et 10 de celui-ci que le législateur de l’Union n’a pas entendu réduire le niveau de protection par rapport à cette directive.

27      Dans ces circonstances, l’Oberster Gerichtshof (Cour suprême) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour la question préjudicielle suivante :

« L’article 15, paragraphe 1, sous c), du [RGPD] doit-il être interprété en ce sens que le droit d’accès est limité à l’information sur les catégories de destinataires si les destinataires concrets ne sont pas encore connus lorsque les communications sont envisagées, mais qu’il doit impérativement s’étendre également à l’information sur les destinataires de ces informations lorsque des données ont déjà été communiquées ? »

 Sur la question préjudicielle

28      Par sa question préjudicielle, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 15, paragraphe 1, sous c), du RGPD doit être interprété en ce sens que le droit d’accès de la personne concernée aux données à caractère personnel la concernant, prévu par cette disposition, implique, lorsque ces données ont été ou seront communiquées à des destinataires, l’obligation pour le responsable du traitement de fournir à cette personne l’identité concrète de ces destinataires.

29      À titre liminaire, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, l’interprétation d’une disposition du droit de l’Union requiert de tenir compte non seulement de ses termes, mais également du contexte dans lequel elle s’inscrit ainsi que des objectifs et de la finalité que poursuit l’acte dont elle fait partie (arrêt du 15 mars 2022, Autorité des marchés financiers, C‑302/20, EU:C:2022:190, point 63). En outre, lorsqu’une disposition du droit de l’Union est susceptible de faire l’objet de plusieurs interprétations, il convient de privilégier celle qui est de nature à sauvegarder son effet utile (arrêt du 7 mars 2018, Cristal Union, C‑31/17, EU:C:2018:168, point 41 et jurisprudence citée).

30      S’agissant, tout d’abord, du libellé de l’article 15, paragraphe 1, sous c), du RGPD, il convient de rappeler que cette disposition énonce que la personne concernée a le droit d’obtenir du responsable du traitement la confirmation que des données à caractère personnel la concernant sont ou ne sont pas traitées et, lorsqu’elles le sont, l’accès auxdites données à caractère personnel ainsi que les informations relatives aux destinataires ou catégories de destinataires auxquels ces données à caractère personnel ont été ou seront communiquées.

31      À cet égard, il y a lieu de relever que les termes « destinataires » et « catégories de destinataires » figurant dans cette disposition sont utilisés successivement, sans qu’il soit possible de déduire un ordre de priorité entre l’un et l’autre.

32      Ainsi, force est de constater que le libellé de l’article 15, paragraphe 1, sous c), du RGPD ne permet pas de déterminer, de manière univoque, si la personne concernée aurait le droit d’être informée, lorsque les données à caractère personnel la concernant ont été ou seront communiquées, de l’identité concrète des destinataires de celles-ci.

33      Ensuite, en ce qui concerne le contexte dans lequel s’inscrit l’article 15, paragraphe 1, sous c), du RGPD, il importe de rappeler, en premier lieu, que le considérant 63 de ce règlement prévoit que la personne concernée doit avoir le droit de connaître et de se faire communiquer, en particulier, l’identité des destinataires de ces données à caractère personnel et ne précise pas que ce droit pourrait être limité aux seules catégories de destinataires, ainsi que l’a relevé M. l’avocat général au point 23 de ses conclusions.

34      En deuxième lieu, il convient également de rappeler que, pour respecter le droit d’accès, tout traitement de données des personnes physiques à caractère personnel doit être conforme aux principes énoncés à l’article 5 du RGPD (voir, en ce sens, arrêt du 16 janvier 2019, Deutsche Post, C-496/17, EU:C:2019:26, point 57).

35      Or, au nombre de ces principes figure le principe de transparence visé à l’article 5, paragraphe 1, sous a), du RGPD, qui implique, ainsi qu’il ressort du considérant 39 de ce règlement, que la personne concernée dispose d’informations sur la manière dont ses données à caractère personnel sont traitées et que ces informations soient aisément accessibles et compréhensibles.

36      En troisième lieu, il convient de relever, ainsi que l’a souligné M. l’avocat général au point 21 de ses conclusions, que, à la différence des articles 13 et 14 du RGPD, qui fixent une obligation pour le responsable du traitement de fournir à la personne concernée les informations relatives aux catégories de destinataires ou aux destinataires concrets des données à caractère personnel la concernant lorsque celles-ci sont ou ne sont pas collectées auprès de la personne concernée, l’article 15 du RGPD prévoit un véritable droit d’accès en faveur de la personne concernée, de sorte que cette dernière doit disposer du choix d’obtenir soit les informations sur les destinataires spécifiques auxquels lesdites données ont été ou seront communiquées, lorsque cela est possible, soit celles concernant les catégories de destinataires.

37      En quatrième lieu, la Cour a déjà jugé que l’exercice de ce droit d’accès doit permettre à la personne concernée de vérifier non seulement que les données la concernant sont exactes, mais également qu’elles sont traitées de manière licite (voir, par analogie, arrêts du 17 juillet 2014, YS e.a., C-141/12 et C-372/12, EU:C:2014:2081, point 44, ainsi que du 20 décembre 2017, Nowak, C-434/16, EU:C:2017:994, point 57), notamment qu’elles ont été communiquées à des destinataires autorisés (voir, par analogie, arrêt du 7 mai 2009, Rijkeboer, C‑553/07, EU:C:2009:293, point 49).

38      En particulier, ce droit d’accès est nécessaire pour permettre à la personne concernée d’exercer, le cas échéant, son droit à la rectification, son droit à l’effacement (« droit à l’oubli »), son droit à la limitation du traitement, qui lui sont reconnus, respectivement, par les articles 16, 17 et 18 du RGDP (voir, par analogie, arrêts du 17 juillet 2014, YS e.a., C‑141/12 et C‑372/12, EU:C:2014:2081, point 44, ainsi que du 20 décembre 2017, Nowak, C‑434/16, EU:C:2017:994, point 57), ainsi que son droit d’opposition au traitement de ses données à caractère personnel, prévu à l’article 21 du RGPD, et son droit de recours en cas de dommage subi, prévu aux articles 79 et 82 du RGPD (voir, par analogie, arrêt du 7 mai 2009, Rijkeboer, C-553/07, EU:C:2009:293, point 52).

39      Ainsi, afin de garantir l’effet utile de l’ensemble des droits mentionnés au point précédent du présent arrêt, la personne concernée doit disposer, en particulier, d’un droit à être informée de l’identité des destinataires concrets dans le cas où ses données à caractère personnel ont déjà été communiquées.

40      Une telle interprétation est confirmée, en cinquième et dernier lieu, par la lecture de l’article 19 du RGPD qui prévoit, à sa première phrase, que le responsable du traitement notifie, en principe, à chaque destinataire auquel les données à caractère personnel ont été communiquées toute rectification ou tout effacement de données à caractère personnel ou toute limitation du traitement et, à sa seconde phrase, que ce responsable fournit à la personne concernée des informations sur ces destinataires si celle-ci en fait la demande.

41      Ainsi, l’article 19, seconde phrase, du RGPD confère expressément à la personne concernée le droit d’être informée des destinataires concrets des données la concernant par le responsable du traitement, dans le cadre de l’obligation qu’a ce dernier d’informer tous les destinataires de l’exercice des droits dont cette personne dispose au titre de l’article 16, de l’article 17, paragraphe 1, et de l’article 18 du RGPD.

42      Il découle de l’analyse contextuelle qui précède que l’article 15, paragraphe 1, sous c), du RGPD constitue l’une des dispositions destinées à garantir la transparence des modalités de traitement des données à caractère personnel à l’égard de la personne concernée et permet à celle-ci, ainsi que l’a relevé M. l’avocat général au point 33 de ses conclusions, d’exercer les prérogatives prévues notamment aux articles 16 à 19, 21, 79 et 82 du RGPD.

43      Partant, il convient de considérer que les informations fournies à la personne concernée au titre du droit d’accès prévu à l’article 15, paragraphe 1, sous c), du RGPD doivent être les plus exactes possibles. En particulier, ce droit d’accès implique la possibilité pour la personne concernée d’obtenir de la part du responsable du traitement les informations sur les destinataires spécifiques auxquels les données ont été ou seront communiquées ou, alternativement, de choisir de se borner à demander des informations concernant les catégories de destinataires.

44      Enfin, s’agissant de la finalité que poursuit le RGPD, il convient de relever que ce règlement vise, notamment, ainsi qu’il ressort de son considérant 10, à assurer un niveau élevé de protection des personnes physiques au sein de l’Union (arrêt du 6 octobre 2020, La Quadrature du Net e.a., C-511/18, C-512/18 et C-520/18, EU:C:2020:791, point 207). À cet égard, ainsi que l’a relevé en substance M. l’avocat général au point 14 de ses conclusions, le cadre juridique général créé par le RGPD met en œuvre les exigences découlant du droit fondamental à la protection des données à caractère personnel protégé par l’article 8 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, notamment les exigences expressément prévues au paragraphe 2 de cet article (voir, en ce sens, arrêt du 9 mars 2017, Manni, C-398/15, EU:C:2017:197, point 40).

45      Or, cet objectif conforte l’interprétation de l’article 15, paragraphe 1, du RGPD figurant au point 43 du présent arrêt.

46      Dès lors, il résulte également de l’objectif poursuivi par le RGPD que la personne concernée a le droit d’obtenir du responsable du traitement des informations sur les destinataires concrets auxquels les données à caractère personnel la concernant ont été ou seront communiquées.

47      Cela étant, il importe, enfin, de souligner que, ainsi qu’il ressort du considérant 4 du RGPD, le droit à la protection des données à caractère personnel n’est pas un droit absolu. En effet, ce droit doit être considéré par rapport à sa fonction dans la société et être mis en balance avec d’autres droits fondamentaux, conformément au principe de proportionnalité, ainsi que la Cour l’a réaffirmé, en substance, au point 172 de l’arrêt du 16 juillet 2020, Facebook Ireland et Schrems (C‑311/18, EU:C:2020:559).

48      Partant, il peut être admis que, dans des circonstances spécifiques, il ne soit pas possible de fournir des informations sur des destinataires concrets. Dès lors, le droit d’accès pourra être limité à l’information sur les catégories de destinataires s’il est impossible de communiquer l’identité des destinataires concrets, en particulier lorsque ceux-ci ne sont pas encore connus.

49      En outre, il y a lieu de rappeler que, en vertu de l’article 12, paragraphe 5, sous b), du RGPD, le responsable du traitement peut, conformément au principe de responsabilité visé à l’article 5, paragraphe 2, de ce règlement ainsi qu’au considérant 74 de celui-ci, refuser de donner suite aux demandes de la personne concernée lorsque celles-ci sont manifestement infondées ou excessives, étant précisé qu’il incombe à ce même responsable du traitement de démontrer le caractère manifestement infondé ou excessif desdites demandes.

50      En l’occurrence, il ressort de la demande de décision préjudicielle que l’Österreichische Post a rejeté la demande introduite par RW sur le fondement de l’article 15, paragraphe 1, du RGPD, tendant à ce que celle-ci lui fournisse l’identité des destinataires auxquels elle avait communiqué les données à caractère personnel la concernant. Il appartiendra à la juridiction de renvoi de vérifier si, compte tenu des circonstances en cause au principal, l’Österreichische Post a établi le caractère manifestement infondé ou excessif de cette demande.

51      Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu de répondre à la question préjudicielle que l’article 15, paragraphe 1, sous c), du RGPD doit être interprété en ce sens que le droit d’accès de la personne concernée aux données à caractère personnel la concernant, prévu par cette disposition, implique, lorsque ces données ont été ou seront communiquées à des destinataires, l’obligation pour le responsable du traitement de fournir à cette personne l’identité même de ces destinataires, à moins qu’il ne soit impossible d’identifier ces destinataires ou que ledit responsable du traitement ne démontre que les demandes d’accès de la personne concernée sont manifestement infondées ou excessives, au sens de l’article 12, paragraphe 5, du RGPD, auxquels cas celui-ci peut indiquer à cette personne uniquement les catégories de destinataires en cause.

 Sur les dépens

52      La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

Par ces motifs, la Cour (première chambre) dit pour droit :

L’article 15, paragraphe 1, sous c), du règlement (UE) 2016/679 du Parlement européen et du Conseil, du 27 avril 2016, relatif à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données, et abrogeant la directive 95/46/CE (règlement général sur la protection des données),

doit être interprété en ce sens que :

le droit d’accès de la personne concernée aux données à caractère personnel la concernant, prévu par cette disposition, implique, lorsque ces données ont été ou seront communiquées à des destinataires, l’obligation pour le responsable du traitement de fournir à cette personne l’identité même de ces destinataires, à moins qu’il ne soit impossible d’identifier ces destinataires ou que ledit responsable du traitement ne démontre que les demandes d’accès de la personne concernée sont manifestement infondées ou excessives, au sens de l’article 12, paragraphe 5, du règlement 2016/679, auxquels cas celui-ci peut indiquer à cette personne uniquement les catégories de destinataires en cause.

Signatures

*      Langue de procédure : l’allemand.

1 janvier 2023

Base Documentaire : Doctrine

► Référence complète : W. Feugère, "Les suites des alertes : observations sur les enquêtes internes", in W. Feugère (dir.), Le nouveau régime des dispositifs d’alerte en France : comment conjuguer conformité et efficacité, Cahiers de droit de l'entreprise (CDE), n° 1, janvier-février 2023, pp. 49-52.

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Résumé de l'article (fait par l'auteur) : "L’analyse du droit des alertes ne peut se concevoir que dans celle des enquêtes, qui en sont la suite incontournable. L’alerte est une information brute : elle doit être analysée, au-delà de sa seule recevabilité. Quels sont les faits exacts ? Quelle en est l’ampleur ? Quels en sont les enjeux et les impacts, les responsabilités ? Enfin, et surtout, qu’en conclure, que décider ? Une information doit donner lieu à réflexion et à une décision. L’enquête a précisément cet objectif : mettre en mesure les managers de décider.".

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🦉Cet article est accessible en texte intégral pour les personnes inscrites aux enseignements de la Professeure Marie-Anne Frison-Roche

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15 décembre 2022

Base Documentaire : Doctrine

► Référence complète : P. Larouche, "Pluralisme et multivalence en analyse économique du droit", Revue de droit d'Assas, n°24, déc. 2022, p.126-129.

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► Résumé de l'article : L'auteur montre que l'on a parfois une vision déformée de l'Analyse économique du Droit. Après avoir souligné que l'interdisciplinarité débute souvent par une "phase de déception initiative", il rappelle les profits de celle-ci à condition que chaque discipline respecte l'autre.

Or, dans l'analyse économique du droit, chacun s'est souvent bloqué, l'on en reste souvent au premier stade.

Sans doute, parce que ce mouvement né aux Etats-Unis il y a 60 ans, participait alors au mouvement de l'époque visant à faire de l'économie "une science à part entière à l'instar des sciences naturelles", mais ne prétendait pas décrire le monde ni constituer un système de preuves.

Ce n'est que plus tard que la "théorie du coût social" de Coase (1960) a été perçue comme pouvant s'appliquer à tout, ce que l'auteur ne prétendait pas.

Ce n'est qu'en 1970 que Posner y associe ce qui serait une supériorité du Common Law, le courant Law and Economics étant rejeté par les non anglo-américains. 

Mais ce double lien entre la conception très libérale de 1960 et très culturelle de 1970 n'est pas intrinsèque à l'AED.

En outre, pour Coase, les coûts de transactions sont faibles, parce qu'ils sont engendrés par le système juridique lui-même. Aujourd'hui, on admet au contraire qu'ils sont élevés parce qu'ils constituent par l'ensemble du système juridique, l'AED intégrant le pluralisme juridique.

Dès lors, le Droit reprend face à l'Economie à la façon sa spécificité et son ampleur.

L'AED ne peut plus aussi facilement que dans la conception précédente en tirer des conséquences normatives, où la réglementation américaine semblait pouvoir engendrer des solutions applicables partout parce qu'enrichie par l'analyse économique.

Corrélativement, le Droit doit moins rejeter l'analyse économique, dès l'instant que ce qu'est le Droit y est respecté, notamment l'économie de l'information.

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14 décembre 2022

Base Documentaire : 06.1. Textes de l'Union Européenne

 Référence complète : Directive (UE) 2022/2464 du Parlement européen et du Conseil, du 14 décembre 2022, modifiant le règlement (UE) n° 537/2014 et les directives 2004/109/CE, 2006/43/CE et 2013/34/UE en ce qui concerne la publication d’informations en matière de durabilité par les entreprises (en anglais Corporate Sustainability Reporting Directive, dite "CSRD").

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 Lire le texte 

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📝commentaires de ce texte et de l'ordonnance de transposition de celui-ci en Droit français :

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7 novembre 2022

Base Documentaire : Doctrine

► Référence complète : B. Lecourt, "La "directive RSE 2" ("directive CSRD") : le nouveau visage de l'information en matière environnementale et sociale", Rev. sociétés, novembre 2022, chron., pp.639-644

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► Résumé de l'article :

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🦉Cet article est accessible en texte intégral pour les personnes inscrites aux enseignements de la Professeure Marie-Anne Frison-Roche

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Mise à jour : 1 septembre 2022 (Rédaction initiale : 4 novembre 2021 )

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► Référence complète : M.-A. Frison-Roche, "Appréciation du lancement d'alerte et de l'obligation de vigilance au regard de la compétitivité internationale", in M.-A. Frison-Roche (dir.), Les Buts Monumentaux de la Compliance, coll. "Régulations & Compliance", Journal of Regulation & Compliance (JoRC) et Dalloz, 2022, p. 413-436.

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🚧lire le document de travail bilingue sur la base duquel cet article a été élaboré, doté de développements supplémentaires, de références techniques et de liens hypertextes

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📕consulter une présentation générale de l'ouvrage, Les Buts Monumentaux de la Compliance, dans lequel cet article est publié

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► Résumé de l'article (fait par le Journal of Regulation & Compliance) : Si l'on reprend techniquement les outils juridiques de Compliance et qu'on les confronte au souci que le Droit doit avoir de la  Compétitivité des entreprises, il faut que ces instruments juridiques n'y nuisent pas parce que le Droit de la Compliance, en raison de ses ambitions immenses, ne peut fonctionner que par une alliance entre des volontés politiques aux grandes prétentions (sauver la planète) et les entités qui sont aptes à concrétiser celles-ci (les opérateurs économiques cruciaux) : la volonté politique puisant dans la puissance des entreprises, il serait contradictoire que les instruments juridiques mis en place par le Droit nuisent à l'aptitude des entreprises à affronter la compétition économique mondiale, ou pire favorisent des compétiteurs internationaux relevant de système juridiques n'intégrant pas ses instruments du Droit de la Compliance.  

À partir de ce principe, l'on peut porter une appréciation sur ces deux techniques que sont le lancement d'alerte et l'obligation de vigilance : les deux consistent à capter de l'information, ce qui leur donne une forte unicité et les insère dans la compétition mondiale pour l'information.

Si l'on prend tout d'abord le lancement d'alerte, il apparaît que le premier bénéficiaire de celui-ci est l'entreprise elle-même puisqu'elle découvre une faiblesse et peut donc y remédier. C'est pourquoi qu'au-delà du principe de protection du lanceur d'alerte par l'accès de celui-ci au statut légal conçu par la loi dite "Sapin 2", il est critiquable que toutes les incitations ne sont pas mises en place pour que le titulaire d'une telle information la transmette au manager et que la loi, même après la transposition de la directive européenne de 2019, continuera d'exiger l'absence de contrepartie, la figure "héroïque du lanceur d'alerte et le refus de sa rémunération privant l'entreprise d'un moyen d'information et d'amélioration.  Mais la législation française a au contraire développé la bonne incitation quant à la personne à laquelle l'information est transmise car en obligeant à transmettre d'abord au manager, la transmission externe intervenant si celui-ci ne fait rien, l'incitation est ainsi faite au responsable interne d'agir et de mettre fin au dysfonctionnement, ce qui accroît la compétitivité de l'entreprise. 

Plus encore et même si cela paraît contre-intuitif, l'obligation de vigilance accroît fortement la compétitivité des entreprises qui y sont soumises. En effet la Loi en les obligeant à prévenir et à lutter contre les atteintes aux droits humains et à l'environnement leur a tacitement donnés tous les pouvoirs nécessaires pour le faire, notamment le pouvoir de capter des informations sur des entreprises tierces, y compris (voire surtout) celles qui ne sont pas soumises à des obligations de transparence. En cela, les entreprises, en tant qu'elles sont à ce titre responsables personnellement, détiennent un pouvoir de supervision sur d'autres, pouvoir qui permet de mondialisation le Droit de la Compliance et qui, au passage, accroît leur propre puissance. C'est pourquoi l'obligation de vigilance est à bien des égard une aubaine pour les entreprises qui y sont soumises.  La reprise du mécanisme par la prochaine Directive européenne, elle-même indifférente au territoire, ne fera que renforcer ce pouvoir global des entreprises vigilantes sur des entreprises éventuellement étrangères qui en deviennent les sujets passifs.

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1 septembre 2022

Base Documentaire : Doctrine

 Référence complète : J.-Ch. Roda, "Compliance, enquêtes internes et compétitivité internationale : quels risques pour les entreprises françaises (à la lumière du droit antitrust) ?", in M.-A. Frison-Roche (dir.), Les Buts Monumentaux de la Compliance, coll. "Régulations & Compliance", Journal of Regulation & Compliance (JoRC) et Dalloz, 2022, p. 367-380.

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📕consulter une présentation générale de l'ouvrage, Les Buts Monumentaux de la Compliance, dans lequel cet article est publié

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► Résumé de l'article (fait par le Journal of Regulation & Compliance) : L'auteur puise dans le Droit américain et européen de la concurrence pour mesurer si effectivement les enquêtes internes, en tant qu'elles fournissent des éléments factuels, peuvent fournir à des Autorités étrangères et des concurrents, ici américains, des "informations sensibles" (notamment via les programmes de clémences), et à ce titre constituent un handicap concurrentiel. Mais cela s'avère assez difficile alors que des audits de compliance, par exemple au titre du devoir de vigilance, peuvent fournir aux plaideurs américains des informations utiles, puisées dans des pièces internes, notamment les rapports de compliance officers , captables par les procédures de discovery. 

Le Droit français demeure faible face à ces dangers, en raison de son refus de reconnaître un legal privilege concernant ces documents internes, contrairement au Droit américain et l'efficacité conséquente de la discovery dans les procédures internationales, concernant les documents internes, notamment résultant d'enquêtes internes. Des solutions ont été proposées, l'activation d'une nouvelle conception des lois de blocage étant complexe, la perspective d'adopter un legal privilege étant plus efficace, mais il demeurerait l'hypothèse de conflit international de privilege, le Droit américain ayant une conception stricte du legal advice justifiant celui-ci et les juges contrôlant que les entreprises ne le manient pas artificiellement.

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