18 février 2015
Enseignements : Droit de la régulation bancaire et financière, Semestre de printemps 2015
Le secteur bancaire et financier d'une part et le droit de la concurrence correspondent à deux logiques différentes, alors même que le droit de la concurrence interfère nécessairement sur ces secteurs, puisque les entreprises financières et bancaires proposent des services à des consommateurs finaux. C'est pourquoi, bien qu'au départ protégé de l'applicabilité du droit de la concurrence en raison de sa spécificité, ces secteurs ont été petit à petit conquis. Ils l'ont été par le biais du contrôle des concentrations, par la sanctions des pratiques anticoncurrentielles et par la prohibition des aides d'État. La directive MIF 1 a adhéré pleinement au principe concurrentiel.
Mais après ce premier temps, un nouvel équilibre est en train de se mettre en place. Ainsi, la directive MIF 2 a tiré les leçons des dégâts engendrés par un principe de concurrence sans partage sur les marchés des instruments financiers. De la même façon, les juridictions supérieures ont infléchi le principe de concurrence en reconnaissant la nécessité d'organiser des relations interbancaires, notamment dans les moyens de paiement. L'on constate d'ailleurs que la Commission européenne a su infléchir les principes pour gérer la crise financière de 2008-2009. Plus encore, la construction de l'Union bancaire crée un nouvel équilibre institutionnel entre logique concurrentielle et logique bancaire, en créant un continuum entre Banque centrale et Commission.
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21 novembre 2014
Conférences
Sans doute faut-il partir du fait que le secteur du médicament est régulé, dans le but de préserver le consommateur final, le malade qui accède à un bien commun : la santé.
Le fait que le médicament doivent circuler d'opérateur en opérateur, de segment de marché en segment de marché, ne change pas cette réalité sociale et politique, constituée par le souci particulier, traduit par le "caractère fixe du prix" du médicament pour celui qui le consomme, ce qui est un oxymore, et par le fait que celui-ci n'est le plus souvent pas le payeur, ce qui est un contresens dans un système de prix.
C'est donc à partir de ces "contrariétés techniques", qui ne s'expliquent que par la profondeur politique du système de santé, qu'il convient d'analyser l'un des segments les plus chahutés par l'énergie compétitive, à savoir la distribution en gros, segment de circulation du médicament entre celui qui le fabrique et celui qui le vend au détail au consommateur final.
Certes, la concurrence, servie par son outil juridique naturel qu'est le contrat, doit se déployer dans les interstices de la régulation qui est le principe d'organisation. Mais c'est la régulation qui continue de fixer les soucis qui guident l'application des règles, par exemple le souci de disponibilité des médicaments, toujours et en masse critique. Le mécanisme concurrentiel, de l'instant et de la tension, fonctionne sur d'autres impératifs. Ainsi, lorsque les Autorités de concurrence lisent les textes, elles donnent à la compétition un espace de jeu qui lui donne place de principe, sans avoir souci de la pérennité du système ou de la gestion d'une crise sanitaire. Elles ne se soucient pas de régulation. On peut le comprendre, puisqu'il s'agit d'autorité de concurrence.
Mais le droit d'un segment du système de santé est coloré par les principes fondamentaux du système dans son entier. Or, pour la France et l'Europe, la santé et le médicament sont gouvernés par le souci de la protection de l'usager, la concurrence qui sert le client solvable a une autre finalité. Elle doit se plier et ne jouer qu'entre des distributeurs qui respectent également et avant tout les obligations que le système de régulation a mis à la charge des distributeurs en gros.
Les travaux seront publiés dans la Revue Lamy Concurrence - Régulation au premier semestre 2015.
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13 novembre 2014
Base Documentaire : Doctrine
Référence complète : Rouyère, A., Le concept de régulation en droit, in Vila, J.-B., (dir.), Régulation et jeux d'argent et de hasard, coll. " Droit et Économie", LGDJ - Lextenso éditions, 2018, p. 21-38.
Les étudiants de Sciences-Po peuvent consulter l'article via le Drive, dossier "MAFR - Regulation & Compliance"
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23 octobre 2014
Publications
Accéder à la présentation du colloque.
Ce Working paper a servi également de base à un article paru dans la Revue Concurrences.
Parce qu'il est difficile de réguler un "marché biface", sauf le temps fugace du contrôle des concentrations, l'idée accessible est de réguler directement l'entreprise qui tire tout son pouvoir de sa position sur une telle structure de marché.
On peut, comme le propose le Conseil d'État, dans son Rapport annuel Le numérique et les droits fondamentaux, considérer que la prise en considération par le droit de cette situation nouvelle doit prendre la forme d'une reconnaissance de la notion de "plateforme", pour l'ériger en catégorie juridique et lui associer une obligation de loyauté, sous la surveillance du régulateur des données personnelles.
L'on peut aussi recourir à une notion plus générale, ici utilisée, d'"entreprise cruciale", à laquelle correspondent des entreprises comme Google, FaceBook, Amazon, etc., parce que ces entreprises remplissent les critères de la définition, à la fois négative et positive de l'entreprise cruciale. La puissance publique est alors légitime, sans que l'État ait à devenir actionnaire, à se mêler de la gouvernance des entreprises et à surveiller les contrats, voire à certifier ceux-ci, comme en finance, sans exiger de l'entreprise ainsi régulée un comportement moral, car ces entreprises privées doivent par ailleurs poursuivre leur fin naturelle constituée par le profit, le développement et la domination, moteur du développement économique. Le développement technologique des plateformes n'en serait pas entravé, tandis que l'aliénation des personnes que l'on peut craindre pourrait être contrée.
15 octobre 2014
Publications
Référence complète FRISON-ROCHE, M.-A., La concurrence, objectif adjacent dans la régulation de l'énergie, in BEHAR-TOUCHARS, Martine, CHARBIT, Nicolas et AMARO, Rafael (dir.), À quoi sert la concurrence ?, Paris, oct. 2014, p.423-428.
Le droit économique se concevant d'une façon instrumentale, il se dessine et s'apprécie à partir des buts qu'il sert et poursuit.
L'instrument juridique est utilisé pour sa puissance normative dans le secteur de l'énergie. Il l'est parfois dans l'objectif de la concurrence, mais celui-ci est difficile à atteindre, comme le montre la force d'inertie des systèmes nationaux.
Cela peut paraître contrariant mais fondamentalement la concurrence n'est pas l'objectif principal du secteur de l'énergie. La concurrence n'en est pas exclue : elle est son objectif adjacent.
Ainsi, lorsque la concurrence permet au consommateur de plus aisément bénéficier du bien commun, elle est bienvenue. Lorsque la concurrence fait s'articuler à la fois la protection de l'environnement, le souci de l'eau, la construction du lien social, l'autonomie à long terme, la sécurité, elle est de droit. Mais lorsqu'elle ne concrétise pas spontanément ces objectifs, elle n'est pas première.
La concurrence ne peut alors que venir en soutènement du droit de la régulation, y compris dans la dimension politique de celui-ci. C'est alors aux États ou aux politiques de l'Union européenne de prendre le pas sur une application mécanique et neutre de l'ajustement des offres et des demandes.
Lire le working paper sur lequel l'article s'appuie et dans lequel les références techniques sont disponibles.
14 octobre 2014
Base Documentaire : Doctrine
Références complètes : Canivet, G., Prolégomènes à l'étude de la doctrine du Conseil constitutionnel en matière de concurrence, in BEHAR-TOUCHARS, Martine, CHARBIT, Nicolas et AMARO, Rafael (dir.), À quoi sert la concurrence ?, Paris, oct. 2014, p.423-428.
Les étudiants de Sciences po peuvent avoir accéder au texte de l'article via le drive de Sciences po, dossier "MAFR - Régulation".
3 octobre 2014
Conférences
Si l'on veut bien admettre que la régulation est identifiée par la mise en balance du principe de concurrence avec un autre principe, a-concurrentiel, voire anti-concurrentielle, alors la paix a vocation à se glisser dans cette définition technique de la régulation.
En effet, si l'on considère que le libéralisme a quant à lui partie liée avec la concurrence, l'on peut au contraire considérer que des mécanismes économiques qui sont "colorés" par le souci de justice sociale, la répartition équitable des richesses, la construction des infrastructures pour le bien commun futur, peuvent s'interpréter comme pouvant s'appuyer sur le concept de paix, conçue comme projet kantien. Ainsi organisée, la régulation relève alors du droit international public.
Mais l'on peut concevoir un système dans une perspective plus économique, relevant davantage du droit des affaires. Ainsi, si l'on prend le programme "pétrole contre nourriture", on peut exactement le lire comme une régulation du commerce pour engendrer la paix, négativement pour empêcher la constitution des trésors de guerre et pour permettre de nourrir la population.
Plus encore, lorsque l'on examine les limitations faites aux droits des créations par le CERDI, ce fût bien au nom du droit des Etats d'exercer un pouvoir expressément de "régulation" pour apporter la paix grâce à la dévaluation afin que le citoyen puisse demeurer consommateur.
Peut-on aller plus loin ? Peut-on aller au-delà de la casuistique ?
27 juillet 2014
Blog
L'usage du téléphone dans les avions concerne à la fois la régulation aérienne et la régulation des télécommunications : c'est un cas d'interrégulation.
Jusqu'ici, le souci de sécurité porté par la régulation aérienne avait prévalu en France, avec l'interdiction de faire fonctionner les téléphones. Mais une directive européenne fait prévaloir le confort des consommateurs.
Le régulateur français des télécommunications, l'ARCEP, autorise en conséquence les compagnies à faire fonctionner les téléphones. Mais il tient compte de l'impératif de sécurité, en limitant les bandes passantes disponibles à celles qui ne sont pas utilisées par les pilotes.
Cas techniquement réussi d'interrégulation, et l'on peut penser que le régulateur aérien va donc abandonner son interdiction.
16 avril 2014
Base Documentaire : 06.1. Textes de l'Union Européenne
Référence complète: Parlement Européen et Conseil européen, Règlement (UE) No 596/2014 du 16 avril 2014 sur les abus de marché (règlement relatif aux abus de marché) et abrogeant la directive 2003/6/CE du Parlement européen et du Conseil et les directives 2003/124/CE, 2003/125/CE et 2004/72/CE de la Commission
18 mars 2014
Publications
Ce working paper est la base d'une contribution parue ultérieurement dans un numéro spécial de la Revue Concurrences.
Le fil conducteur est que la concurrence n'est pas le principe d'organisation du secteur énergétique, dont le secteur électrique dont partie. Par principe, il s'agit d'un secteur régulé.
Si la concurrence peut y trouver sa place, car elle n'est pas pour autant exclue, c'est d'une façon "adjacente".
En effet, parce que la concurrence produit de l'émulation, de l'innovation, de la réduction des coûts, elle est bienvenue lorsque rien ne s'y oppose. Plus encore, lorsque ces effets convergent vers les buts servis par la régulation, elle est doublement bienvenue.
Mais elle ne saurait être le principe du secteur de l'énergie, et cela d'une façon définitive car c'est d'une façon structurelle que ce secteur a par principe régulé.
24 février 2014
Publications
21 octobre 2013
Conférences
A première vue, parce que l’Ordre est une structure qui existe pour concevoir et faire vivre une déontologie dont le socle est moral, alors que le droit de la concurrence, dont le principal gardien est la Commission européenne, est le gardien du marché concurrentiel, lieu d’ajustement des désirs des demandeurs, satisfaits par des offreurs qui recherchent leur profit, les Ordres sont du côté de l’État et s’opposent à l’Europe et au droit de la concurrence.
Mais c’est avoir courte vue.
Au contraire, les marchés ont besoin de confiance, surtout quand l’activité est risquée (risque sanitaire) et que le demandeur est en asymétrie d’information (patient). Dès lors, celui-ci doit pouvoir s’en remettre à celui qui lui offre une prestation. Il ne le peut qu’en tant que celui-ci est un "professionnel", garanti par l’Ordre, qui est source de confiance pour un marché, devenu plus puissant de ce fait. L’Ordre est en cela l’avenir des marchés de confiance.
Lire une synthèse opérée par les organisateurs et publiée dans la Revue de l'Ordre des chirurgiens-dentistes.
9 juillet 2013
Publications
► Référence complète : Frison-Roche, M.A., La déontologie dans un monde ouvert et concurrentiel, in Servir le public au XXième siècle : les institutions ordinales plus utiles que jamais, CLIO, 2013, p.56-61.
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Lire l’intégralité de la publication.
Lire l'article de synthèse rédigé par les organisateurs.
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lire ci-dessous la contribution proprement dite, constituant la synthèse des travaux ⤵️
1 janvier 2013
Base Documentaire : Doctrine
Référence complète : Malavoti, E. et Marty, F., La gratuité peut-elle avoir des effets concurrentiels ? Une perspective d'économie industrielle sur le cas Google, in Martial-Braz, N. et Zolynski, C. (dir.), La gratuité : un concept aux frontières de l'économie et du droit, coll. "Droit et Économie", L.G.D.J. - Lextenso éditions, 2013, p.71-89.
Accéder à une présentation générale de l'ouvrage dans lequel l'article est publié.
Accéder à une présentation complète des ouvrages publiés dans la collection "Droit et Économie".
Les étudiants de Sciences Po peuvent accéder au texte de l'article par le Drive de Sciences Po (dossier MAFR - Régulation).
11 octobre 2012
Base Documentaire : Doctrine
Référence complète : Tabuteau, Didier (dir.), Service public et santé, préface de Touraine, Marisol, coll. "Verbatim - Santé", Presses de Sciences po, 2012, 166 p.
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Lire la préface de Marisol Touraine.
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Les étudiants de Sciences Po peuvent accéder au texte de l'article par le Drive de Sciences Po (dossier MAFR - Régulation).
1 octobre 2012
Base Documentaire : Doctrine
Référence complète : Oster, T., Droit de la concurrence et assurance : cartographie des risques au lendemain de l'enquête sectorielle de la commission européenne et de l'adoption du nouveau règlement d'exemption catégorielle, in RGDA, n°4, Lextenso, 2012, p. 959.
Les étudiants de Sciences po peuvent lire l'article via le Drive dans le dossier "MAFR - Régulation & Compliance"
23 février 2012
Base Documentaire : 07. Cours d'appel
► Référence complète : Cour d'appel de Paris, arrêt du 23 février 2012, n°10/07889, Crédit Lyonnais et autres (affaire des images-chèques)
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19 janvier 2012
Organisation de manifestations scientifiques
La richesse des interventions est venue notamment du fait que les orateurs appartenaient à des disciplines diverses et étaient soit français soit allemand par exemple le président français de l’autorité de la concurrence et le Président du Bundeskartellamt.
L’on observe que la notion même de compétitivité est fluctuante suivant que l’on se réfère à l’économie réelle ou à la finance. D’ailleurs, est discuté le point de savoir si les banques doivent être traitées par les autorités de concurrence comme des entreprises ordinaires ou au contraire comme des entreprises particulières.
Il ressort en tout cas nettement que les droits de la concurrence sont fondamentalement situés c'est-à-dire dépendent de la culture du pays et de son histoire, notamment l’ordo-libéralisme allemand, dans lequel la concurrence est une parti d’une politique plus générale dont l’autorité de concurrence n’a pas la charge et que l’Etat assure, l’ensemble devant être cohérent. La manifestation a montré à quel point la France et l’Allemagne ont des valeurs communes, dans leur conception de l’innovation ou du lien social, dont l’économie concurrentielle doit tenir compte.
En cela la micro-économie, si elle devait être trop universalisante, ne reflèterait pas la réalité.
7 octobre 2011
Base Documentaire : Doctrine
Référence complète : Murphy, J., Roundtable on promoting compliance with competition law, OCDE (DAF/COMP), 2011, n°5.
Les étudiants Sciences Po peuvent consulter l'article via le drive, dossier "MAFR - Régulation & Compliance"
18 juin 2011
Publications
Référence complète : FRISON-ROCHE Marie-Anne, Régulation versus concurrence, in Mélanges en l’honneur de Marie-Stéphane Payet, Au-delà des codes, Dalloz, Paris, 2011, pp. 171-185.
La concurrence et la régulation sont souvent confondues. Elles sont certes des liens, en ce que la régulation peut être requise lorsque la concurrence doit être construite et que les forces des opérateurs n’y suffisent pas. Mais dans d’autres situations, permanentes,la régulation s’impose, pour des raisons techniques (monopoles naturels, asymétrie d’information) ou politiques (accès à des biens que l’on veut "communs"). Dans ce cas, la régulation tient en équilibre la concurrence et d’autres principes concernant les biens marchands spéciaux concernés. La tradition proprement universitaire des « Mélanges » exprime cette unité dans l’espace et dans le temps d’Alma Mater autour des personnes qui en sont dignes, comme Marie-Stéphane Payet.
Lire le résumé de l'article ci-dessous.
18 janvier 2011
Publications
► Référence complète : Frison-Roche, M.-A., Régulation versus concurrence, in Au-delà des codes, Mélanges en l'honneur de Marie-Stéphane Payet, Dalloz, 2011, pp. 171-185.
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📕 Lire la présentation générale de l'ouvrage
💬Lire le discours fait à la remise des Mélanges faits en l'honneur de Marie-Stéphane Payet
📝Lire la préface faite pour la thèse publiée de Marie-Stéphane Payet
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Résumé de l'article : L'on peut considérer la régulation et la concurrence comme des "faux-amis", dans la mesure où l'on prend souvent l'un pour l'autre, l'expression qui est parfois utilisée de "régulation concurrentielle", poussant à la confusion à la confusion. Les deux notions ne se confondent pas. Mais elles ne sont pas pour autant étrangères ou toujours ennemies, en ce que la régulation serait synonyme de "réglementation", ce qui est faux", alors que la concurrence se déploierait sans règle, ce qui est également faux.
La régulation peut être la voie royale de la construction de la concurrence. Cela arrive notamment en cas de libéralisation, ou de privatisation, soit que les nouveaux entrants aient les forces, notamment informationnelles, pour prendre des parts de marché, soit que les investisseurs n'aient pas confiance dans l'opérateur historique public privatisé. La régulation amène alors à la concurrence, elle est ce par quoi la concurrence se construit.
Dans une toute autre perspective, parfois confondue avec la précédente, la régulation est établie en cas de défaillance définitive de marché. Cela tient alors à l'objet technique qui circule sur le marché, par exemple les télécommunication, l'énergie, la finance, la banque, etc. L'objet produit par exemple des monopoles économiquement naturels, comme des réseaux de transport, et la régulation s'impose, comme dans ce qu'on désigne parfois comme les "industries de réseaux". Il peut s'agir aussi d'objets qui engendrent des asymétries d'information, la régulation financière visant à les réduire, ou qui engendrent des risques, la régulation bancaire ou sanitaire se rejoignant sur ce point. Dans un tel cas, la régulation n'a plus en perspective la concurrence et le régulateur tient alors la balance entre le principe de concurrence et un autre principe, par exemple l'information, la protection du consommateur, l'accès au réseau, etc.
La question devient plus difficile, car plus "discutable", lorsque c'est le Politique, qui pose que le principe de concurrence ne suffit pas. Ainsi, lorsqu'il est posé que le bien est "commun" et que chacun doit y avoir accès, alors même qu'il ne peut l'acquérir au prix de marché, ce qui justifie des tarifications, des subventions, etc. La régulation devient politique, la tension entre le gouvernement et les régulateurs devient plus forte, etc. La régulation est souvent autant, voire plus contestée, que ne l'est la concurrence, car le régulateur apparaît comme discrétionnaire, alors qu'il n'a pas la légitimité en amont par l'élection, que détient le politique.
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16 décembre 2010
Publications
Référence complète : FRISON-ROCHE, Marie-Anne, Les commissions interbancaires : le bras de fer entre concurrence et régulation, in Commissions interbancaire. Le modèle relationnel en danger ?, Banque Droit, numéro hors série, décembre 2010, p.6-8
La décision de l'Autorité de concurrence du 20 septembre 2010 dans l'affaire dite des "Images-chèques" illustre une confusion entre système de concurrence et système de régulation. En effet, sur un marché concurrentiel, les agents sont atomisés et leur mobilité permanente permet l'émergence des prix exacts, le prix étant la première référence du modèle. Mais certains secteurs sont marqués par une défaillance de marché, il en est ainsi du secteur bancaire, menacé par un risque systémique de défaillance en série des acteurs. Pour cela, le régulateur, la banque de France, met en place une régulation, sous-jacente au marché bancaire, qui assure des systèmes solides, stables et permanents dans le temps, accompagnés d'une sorte de tarification. L'autorité de concurrence a appréhendé ce système de régulation à travers le modèle inverse qu'est l'instabilité concurrentielle. Il s'agit là d'une confusion épistémologique dommageable.
Lire le résumé de l'article ci-dessous.
N.B. : la décision de l'Autorité de la concurrence a été sur recours réformée par la Cour d'appel de Paris.
26 novembre 2010
Publications
Référence complète : FRISON-ROCHE, Marie-Anne, Ambition et efficacité de la régulation économique, in le droit face au risque financier, Revue de droit bancaire et financier, n°6, nov-dec 2010, études n°34, p.59-66.
Cet article est la suite d'une conférence.
Résumé de l'article :
Les rapports entre la régulation économique et la régulation financière sont ambigus. En effet, si l'on suit Walras, le marché financier est le plus pur des marchés et les Autorités de la concurrence traitent les établissements financiers le plus souvent comme des entreprises ordinaires en concurrence. D'ailleurs, un courant libéral considère que la concurrence peut être un moyen efficace de réguler le comportement des banques au bénéfice des consommateurs. En outre, la finance est toujours présente à l'intérieur même des marchés des biens et services puisque c'est la monnaie qui permet l'échange.
Mais, nous vivons le temps radicalement nouveau d'une sphère financière totalement autonome, immatérielle, globalisée et comme l'a montré Fernand Braudel, sans rapport avec le marché concurrentiel. Ce qu'il appelle "le temps des banquiers" est venu.
La seconde ambigüité vient de la confusion souvent faite entre la régulation et la réglementation. En effet, si le terme anglais Regulation désigne la règlementation, la régulation dépasse cet outil pour viser un ensemble de mécanismes de règles et d'institution qui mettent en équilibre le principe de concurrence et un autre principe, comme le service public, l'accès de tous à un bien essentiel ou la prévention des risques.
La présente étude est limitée à la régulation économique puisqu'un autre auteur a en charge de traiter l'ambition et l'efficacité de la régulation financière.
Pour cerner l'ambition de la régulation économique, il faut tout d'abord évoquer l'hypothèse historique et ponctuelle du passage au forceps d'une organisation monopolistique à une organisation concurrentielle. Il peut arriver que certains secteurs aient été organisés sous la forme de monopoles légaux, généralement conférés à des structures d’État, entreprises ou établissements publics.
Si il y a décision de libéraliser le secteur, par exemple par le jeu d'une directive communautaire, il ne suffit pas de déclarer la possibilité de concurrence, il faut l'établie "au forceps", car la puissance de ces opérateurs historiques est telle que les compétiteurs potentiels ne pourront pas de fait entrer dans le marché si un régulateur ne leur y fait pas place.
L'Autorité de régulation va alors systématiquement favoriser les nouveaux entrants par une régulation asymétrique, jusqu'à ce que les conditions d'une concurrence saine et forte soit établie, moment à partir duquel cette régulation en principe transitoire devrait pouvoir cesser, le secteur revenant alors sous la bannière du droit de la concurrence.
Le secteur des télécommunications est exemplaire en cela.
S’en distingue l’hypothèse économique d‘une régulation définitive d’une organisation d’un secteur qui ne peut engendrer ni maintenir ses équilibres intrinsèques.
En effet, il peut exister dans l’organisation économique du marché des « défaillances » naturelles (market failures), qui entravent définitivement la production d’un prix exact par la rencontre de l’offre et de la demande, quelle que soit la puissance des acteurs.
C’est notamment le cas lorsqu’il existe des infrastructures essentielles dont le meilleur exemple sont le réseau de transport de télécommunication ou d’énergie, dont il faut réguler l’accès des opérateurs à ses ces facilités pour passer du marché amont de la production au marché aval de la vente. Ces monopoles sur les infrastructures étant « naturels », il s’agit de régulations de nature économique, qui sont définitives et dont un régulateur prend la charge.
En finance la défaillance de marché prenant la forme d’asymétrie d’information, le régulateur financier sera définitivement établi pour faire circuler l’information et protéger l’investisseur.
La question aujourd’hui ouverte est de savoir si l’on peut conférer à la régulation de nouvelles ambitions sur de nouveaux territoires. Il en est ainsi de l’Internet, ou de l’agriculture.
Se distingue enfin l’hypothèse politique et souveraine d’une volonté de mettre face au principe de concurrence un principe a-concurrentiel ou anticoncurrentiel en équilibre. Il ne s’agit plus alors d’une obligation qu’engendrerait le marché mais d’une volonté politique, par exemple exprimée par le parlement, en ce qu’il est légitime de faire des choix pour décider du futur du groupe social qui a établi son pouvoir.
A ce titre, le Politique va fixer ce qu’il estime être des « biens communs » pour sa population. Les pouvoirs politiques vont alors créer de véritables droits subjectifs, comme un droit à la santé, ou un droit à la culture ou un droit au transport, qui vont entrer en équilibre avec le principe de concurrence et qu’un système de régulation, par exemple en matière de santé, v prendre en charge.
Après avoir cerné ces trois types d’ambitions de la régulation économique, il convient d’examiner l’efficacité de la régulation économique.
Tout d’abord, celle-ci ne peut être efficace que si elle dispose des institutions qui lui sont nécessaires, et avant toute chose, un Régulateur.
A ce titre, il faut ne pas confondre l’Autorité de régulation, qui construit un secteur, le supervise en permanence et dispose pour cela de pouvoirs ex ante, et l’Autorité de concurrence, institution ex post qui intervient ponctuellement pour réparer les dommages faits à des marchés de biens et services qui en principe fonctionnent d’ordinaire par eux-mêmes.
Le régulateur, lorsqu’il est présent d’une façon définitive (voir supra) intervient constamment dans le secteur, ce qui engendre une chaine dans son comportement entre des décisions ex ante et des décisions ex post. C’est à ce titre qu’il peut, selon les secteurs et les besoins, disposer du pouvoir réglementaire, du pouvoir de règlement des différents, du pouvoir de sanction, du pouvoir de transaction, etc. Cette palette des pouvoirs dont dispose le régulateur ne cesse de s’accroître et certains ont pu y voir une atteinte à la séparation des pouvoirs. Mais cela tient au fait que le droit de la régulation est de nature téléologique, cette normativité logée dans la finalité justifiant l’ampleur et la diversité de ces instruments.
En contrepartie et logiquement, l’usage de ces pouvoirs cumulés est entouré de multiples garanties.
Aussi le principe de légalité que les techniques procédurales ou l’obligation de motiver et les voies de recours permet de rendre « supportable » les pouvoirs par ailleurs nécessaires du régulateur.
Enfin, le régulateur doit justifier de son efficacité, les techniques de reddition des comptes (accountability) ne cessant de s’affiner, tandis que le secteur, et bientôt le droit à travers le principe de sécurité juridique, lui demande avant tout de ne pas se contredire dans le temps. Par cette forme de rationalité et de légitimité la régulation économique est le bastion avancé du droit moderne.
10 novembre 2010
Blog
Antoine Garapon vient de sortir un ouvrage particulièrement intéressant.
Antoine Garapon utilise la notion construite par Michel Foucault de "gouvernementalité", pour montrer qu'à la conception souveraine, puis disciplinaire, succède aujourd'hui une conception "managériale" de la justice.
A ce titre, dans un rattachement au néolibéralisme, c'est-à-dire à la compétition, les magistrats sont évalués, les tribunaux fermés, la mondialisation exacerbe la notation, et les individus sont invités, juges comme justiciables, à rechercher leurs intérêts au mieux dans le système.
La description est fondée mais la critique perce souvent.
Pourtant, trivialement, ne pourrait-on considérer que la justice est une ressource rare et qu'en tant que telle, il faut en mesurer la juste allocation des moyens, pour que soit effectif le droit au juge ?
Lire ci-joint l'analyse détaillée de l'ouvrage et son commentaire.
15 septembre 2010
Publications
Référence complète : FRISON-ROCHE, Marie-Anne, L'office du juge en matière de médicaments, in FRISON-ROCHE, Marie-Anne (Dir.), Concurrence, santé publique, innovation et médicament, coll. Droit et Economie, LGDJ, Paris, 2010, p.423-432.
Lire la présentation générale de l'ouvrage dans lequel l'article a été publié.