24 septembre 2019
Enseignements : Droit de la Compliance
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Résumé de la leçon.
A première vue, le Droit de la concurrence et le Droit de la compliance sont étrangers l'un à l'autre. En effet tandis que, dans son acception classique le premier est Ex Post le second est Ex Ante (se rapprochant ainsi du Droit de la Régulation). Plus encore le Droit de la concurrence est attaché à un organisme spécifique, "l'Autorité de concurrence", ce qui va le rapprocher du Droit de la Régulation, lequel se "repère" par l'institution d'une "Autorité de régulation", alors que le Droit de la compliance est à ce point peu institutionnalisé que l'on continue à douter même de son existence. En troisième lieu, par nature le Droit de la concurrence s'applique à toutes les "entreprises", notion très large en ce qu'elle est directement construite sur la notion d'activité, alors que le Droit de la compliance prend comme sujets de droit les "opérateurs cruciaux".
Mais l'efficacité des techniques de Compliance a été repérée par les Autorités de concurrence qui, notamment à travers les techniques d'engagement et de "programmes" ont eu à partir des années 1990, sur le modèle du contrôle des concentrations, partie Ex Ante du Droit de la concurrence, développé d'une façno prétorienne des outils de compliance, par du "droit souple", puis les ont sécurisé en les insérant au sein même des procédures juridiquement organisées de sanction, les Autorités pouvant utiliser leur double qualité d'autorité de sanction et d'autorité de poursuite. Sans doute ce cumul d'un fonctionnement contractuel au sein de procédure juridictionnelle, par l'utilisation de programmes qui constituent à la fois des engagements spontanés mais sont aussi des contreparties d'autorisation de concentration, voire de contrepartie de clémence, voire des parties insécables de prononcés de sanction, posent à la fin des difficultés juridiques.
Il demeure que par l'insertion du Droit de la compliance c'est un mixte de contrat et de contrainte qui est ainsi inséré.
Par le contrat, qui libère l'Autorité de toute référence à son pouvoir par mécanisme de délégation dans la hiérarchie des normes, l'Autorité peut se transformer en Autorité de Régulation. C'est ce que les Autorités de concurrence sont en train de faire vis-à-vis des opérateurs numériques.
Mais les Autorités de concurrence sont-elles légitimes à emprunter tout d'abord à une contrainte par le biais procédural neutre de l'accroissement d'efficacité, pour ensuite passer à une véritable contractualisation, ce qui permet de disposer des finalités pour la satisfaction desquelle elles ont été instituées ? N'est-ce pas à l'Etat, à travers un Gouvernement responsable politiquement qui doit fixer des finalités qui cessent d'être économiques?
En effet les Autorités de concurrence rendent compte de l'exercice de leurs pouvoirs devant les juridictions du recours. Mais s'agit-il d'un contrôle de légalité externe ou d'un contrôle substantiel ? Cette question qui s'est posée à propos du contrôle des concentrations ne pose de nouveau d'une façon plus générale si la finalité du Droit de la concurrence, telle qu'elle est posée à travers ce que la Commission se permet d'appeler la "politique de la concurrence" devient à ce point politique, sans pour autant engager de responsabilité.
Les Autorités de concurrence qui deviennent ainsi en matière numérique des "superviseurs" alors qu'elles ne sont pas des régulateurs, peuvent prétendre que le Droit de la concurrence serait une des voies pour remettre de l'ordre dans l'espace numérique.
19 septembre 2019
droit illustré
Les fables de La Fontaine sont source inépuisable pour aborder puis approfondir le Droit.
Prenons une Fable moins connue que d'autres : Les oreilles du lièvre. (les expressions plus particulièrement mises en rouge le sont par nos soins, anticipant la pertinence qu'elles présentent dans une perspective plus juridique),
Un animal cornu blessa de quelques coups Le lion, qui plein de courroux, Pour ne plus tomber en la peine, Bannit des lieux de son domaine Toute bête portant des cornes à son front. Chèvres, Béliers, Taureaux aussitôt délogèrent, Daims et Cerfs de climat changèrent ; Chacun à s'en aller fut prompt. Un lièvre, apercevant l'ombre de ses oreilles, Craignit que quelque Inquisiteur N'allât interpréter à cornes leur longueur, Ne les soutînt en tout à des cornes pareilles. Adieu, voisin grillon, dit-il, je pars d'ici. Mes oreilles enfin seraient cornes aussi ; Et quand je les aurais plus courtes qu'une Autruche, Je craindrais même encor. Le Grillon repartit : Cornes cela ? Vous me prenez pour cruche ; Ce sont oreilles que Dieu fit. On les fera passer pour cornes, Dit l'animal craintif, et cornes de Licornes J'aurai beau protester ; mon dire et mes raisons Iront aux Petites-Maisons. |
II. LA DIFFICULTE DU CAS, POURTANT A PREMIERE VUE SIMPLE : LE LIEVRE DEVRAIT POUVOIR DORMIR SUR SES DEUX OREILLES
Le cas ne devrait pas poser difficulté.
La règle est claire : sont objet de sanction les animaux à corne. Et le lièvre n'a pas de corne.
Ainsi, en application de l'article 5 du Code civil qui exprime un principe général, lorsque la règle posée par le Législateur, ici visé par le "Lion", et qu'elle n'ait ni obscure, contradictoie ou incomplète, ce qui obligerait à la compléter pour l'appliquer d'une façon particulière (article 4 du Code civil), le lièvre n'est pas concerné par une telle règle.
Plus encore, il s'agit d'une règle de sanction, puisque celui qui est visé par elle est "banni" : nous sommes donc en "matière pénale". Ainsi, la méthode de l'interprétation restrictive, et selon un principe constitutionnel applicable, un cas qui n'est pas prévu par le texte d'incrimination ne peut pas être sanctionné. Ainsi si les "animaux cornus" sont visés, comme un lièvre n'a pas de corne, alors comme il est clair qu'il n'a pas de corne, il n'est pas concerné.
Cela est clair, puisque "Dieu", c'est-à-dire à la fois la nature même et la Raison, le montre.
Il n'y a pas d'ambiguité.
Et les voisins le disent au lièvre, qui ne devrait donc pas modifier son comportement, du fait d'un texte qui ne saurait le concerner.
III. MAIS IL Y A DEUX OMBRES : L'OMBRE DE L'INQUISITEUR ET L'OMBRE DE L'OREILLE PROJETEE
La première ombre est que si c'est le "Lion" qui a pris la nouvelle règle, c'est "l'Inquisiteur" qui la mettra en oeuvre.
Certes, le Lion fût sans doute excessif pour réagir à un cas particulier qui l'a meurtri lui, mais enfin c'est Lui, et donc à partir de sa blessure propre, il tire une règle générale et abstraite qui frappe toutes les "bêtes cornues", dont il est aisé, dans une dialectique montante puis descendante de faire une énumération non limitative.
Puisqu'on connait la définition de la "corne". Et qu'il s'agit d'un "animal".
Mais ce n'est pas l'hubris ou la colère du Politique qui pose la règle qu'il faut craindre, c'est le "raisonnement" de l"Inquisiteur, c'est son "raisonnement" qui balayera toutes les "raisons" du liévre, ce que celui-ci sait par avance.
En effet, l'Inquisiteur est un personnage sans pouvoir directement légitme, il n'est pas Roi. Il tire son pouvoir du texte général et abstrait du bannisement. Mais il va utiliser celui-ci pour frapper qui il veut, par exemple un lièvre, s'il en a envie, s'il n'aime pas celui-là, ou s'il n'aime aucun lièvre (et l'on se soucie de la fabre Le loup et l'agneau : "si ce n'est toi, c'est donc quelqu'un des tiens").
Comment pourrait-il le faire sans dévoiler sa partialité ? son excès de pouvoir (roitelet caché sous le costume de l'exécutant) ?
Il va le faire par "l'interprétation".
Pour cela, et l'on retrouve ici l'article 4 du Code civil, il faut trouver une "ombre", cette ombre qui obscursit le texte à appliquer et "oblige" alors l'exécutant à exercer du pouvoir.
Et justement, comme nous le dit la Fable, les oreilles font une ombre ! et cette ombre ont la forme d'une corne ! A ce compte-là, il suffit de quitter le soleil, de tourner son regard vers l'ombre, vers le côté obscur de l'interprétation, et l'on voit alors se dessiner une corne. Ainsi, le lièvre se met à entrer dans la catégorie du texte.
Par le jeu de la technique de la qualification, il est qualifié d'animal cornu, puisque les animaux concrets cités ne l'étaient qu'à titre d'exemples, la liste n'était pas close. Et peu importe la longueur, comme le précise le déjà saisi par la Justice, même aussi courtes que les oreilles d'une autruche, l'ombre sera encore là.
D'analogie en analogie, le texte étend son emprises et l'Inquisiteur son pouvoir. Sous couvert d'interprétation.
La réalité n'est pas un obstacle, si la forme de la corne est retrouvée. Ainsi, le texte visant "toute bête portant des cornes", ce que l'ombre valide pour le lièvre, à n'en pas douter, n'exige pas qu'il s'agisse d'un animal réel et véridique et la licorne fera aussi l'affaire, l'imaginaire n'étant plus soustrait à l'imperium de l'Inquisiteur.
C'est ainsi que le raisonnement analogique fait suivre le lièvre parce que face à la souplesse du raisonnement juridique manié par celui qui veut exercer le pouvoir que le Droit offre, même à celui qui n'est pas le Lion, aucune justification ne peut plus tenir car le résultat du procès est déjà contenu dans la qualification.
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L'on mesure ici que, pour le meilleur et ici pour le pire, l'art et la puissance du Droit tient dans la qualification du réel.
En Droit, les lions ne sont pas irascibles, les objets ne sont pas saisis par leur ombre et les inquisiteurs ne jugent pas avant d'interpréter textes et faits pour y voir des licornes ; ils retiennent leurs pouvoirs pour respecter l'Etat de Droit et la liberté des lièvres.
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18 septembre 2019
Base Documentaire : Soft Law
Référence complète : Auer, R., Embedder supervision: how to build regulation into blockchain finance, Bank for International Settlements, Monetoary and Economic Department, working paper n°811, september 2019.
17 septembre 2019
Blog
Pour se déployer, la technologie ne suffit pas, il faut encore que le client ignore le Droit. Et les plateformes s'emploient à non seulement développer la technologie mais encore à maintenir leurs clients dans l'ignorance du Droit et de leurs droits.
L'on peut prendre des examples au quotidien.
Par exemple, aujourd'hui.
Un cas d'un exécution d'un contrat de transport, doublé d'une agression, ce qui entraîne l'application du droit des contrats et du droit pénal. Mais pour les prestataires qui répondent au nom des règles pour Kapten, il y a d'autres règles d'où il résulte que la victime de l'inexécution d'un acte juridique et d'un fait juridique d'agression ne reçoit rien. Tout en affirmant le souci de la "qualité du service". En glissant au passage des qualifications juridiques inexactes mais qui soustrayent la plateforme à toute contrainte, en mettant dans le jeu d'autres, comme la notion floue de "partenaire" et celle plus consistante de "secret", afin de mieux démunir le client, dont pourtant le souci premier est affirmé.
Voyons tout d'abord le cas (I), puis le traitement juridique par la plateforme (II) et les réflexions que cela inspire, au regard de jurisprudence et de législations de plus en plus sévères en conséquence à l'égard de plateforme (III).
I. LE CAS : INEXECUTION DU CONTRAT DE TRANSPORT ET FAITS D'AGRESSION APPELANT UNE QUALIFICATION PENALE
Les faits résultent du récit rapportant à la victime à l'entreprise Kapten, avec laquelle il n'est possible que de communiquer par e-mail adressé à la plateforme, ce qui suscite des réponses signées par des prénoms, qui varient à chaque fois.
Comme les faits avaient été brièvement rapportés par un bref e-mail le matin, un premier e-mail signé d'un prénom féminin avait demandé un numéro de téléphone où il puisse y avoir un récit de l'événèment. Dans cette discussion téléphonique ayant lieu l'après-midi, la personne de chez Kapten, se présentant par un autre prénom féminin, rappela que Kapten allait se rapprocher du "chauffeur partenaire". Quand il lui fût rappeler que le chauffeur n'était pas un tiers mais une personne dont le comportement engageait la responsabilité de Kapten, celui va immédiatement refuté par la personne.
Voilà le récit, en date du 17 septembre 2019, résultant d'un e-mail adressé à 19h.
"Chère Madame,
J’ai donc pu vous expliquer longuement par téléphone les faits.
Vous m’avez confirmé que votre chauffeur avait pris un itinéraire qui n’était pas conforme à ce qu’il devait être à un itinéraire devait m'amener à Sciences po, établissement où je suis professeur et où je devais faire cours à mes étudiants.
Comme je voyais que nous allions par des détours et que je risquais d’être en retard, tandis que je téléphonais par ailleurs – car j’étais précisément au téléphone avec un membre de la direction de Sciences po -, je lui ai indiqué qu’il fallait prendre un itinéraire plus rapide car j’allais finir par être en retard.
Votre chauffeur a alors arrêter la voiture devant les Invalides (venant du 16ième, nous avions fait un détour conséquent et nous étions donc à cet emplacement). Il a commencé à crier, ce que mon correspondant a entendu.
Puis en me tutoyant, il m’a intimé l’ordre de descendre de sa voiture : « tu es chez moi, descends, je ne veux plus de toi », etc.
Je lui ai indiqué, conservant pour ma part le vouvoiement qu’il fallait qu’il termine sa course.
Il a ouvert la porte, a continué à crier, à me menacer, un attroupement de passants et de touristes se constituant.
Mon interlocuteur de la direction de Sciences po, qui entendait tout cela, m’a conseillé de descendre.
En effet, votre chauffeur non seulement m’insultait, mais m’a menacée de ses deux poings.
J’ai dit cela à mon interlocuteur téléphonique qui m’a dit de descendre immédiatement, pour ne pas subir des coups et blessures.
Les personnes qui entouraient la voiture m’ont dit de descendre, me disant qu’il fallait mieux perdre un téléphone que d’être frappée, en disant à votre chauffeur d’arrêter de crier, de me menacer et de brandir ses poings.
Puis, il m’a arraché mon téléphone, afin que je ne puisse plus parler.
Je suis sortie.
Une personne qui était à l’extérieur lui a demandé mon téléphone ; il lui a donné. Une autre a relevé le numéro de sa plaque.
Elles m’on demandé si je me sentais bien, et si je voulais aller au commissariat immédiatement.
Je ne pouvais pas, car j’étais définitivement en retard.
J’ai fini le trajet à pied jusqu’à Sciences po, où je suis arrivée en retard.
Je pense que je trouverai le temps demain pour aller déposer plainte.
Je vous demander les mesure que vous allez prendre en considération des différents dommages que j’ai subis.
Bien à vous".
A 19h15, réception immédiate d'un e-mail de Kapten, cette fois-ci signé d'un(e) dénommé(e) Stephie, retour immédiat d'un courriel informant d'un traitement juridique fait aux demandes formulées, étant observé que les faits - étayés par de nombreux témoignages et par le constat par leur propre appareil de suivi des courses montrant les détours pris, n'étaient pas contestés.
II. LE TRAITEMENT JURIDIQUE PAR LA PLATEFORME DE LA DEMANDE: NOUS NE REMBOURSONS PAS LA PRESTATION INEXECUTEE, NOUS N'INDEMNISATIONS LE DOMMAGE, LE FAIT DELICTUEUX NE NOUS CONCERNE PAS ET NOUS NE VOUS COMMUNIQUERONS PAS D'INFORMATION A SON PROPOS
"Stephie (Customer Service France ) 17 sept. 19:14 CEST Bonjour, Stephie de Kapten" |
III. L'IGNORANCE DE L'ETAT DU DROIT PAR LA POPULATION CONDUIT LES OPERATEURS A LUI EN DONNER EFFICACEMENT UNE REPRESENTATION INEXACTE, CE QUI RENDENT INEFFECTIVES LEURS OBLIGATIONS
Si l'on reprend l'état du Droit,
- le Conseil constitutionnel, par décision QPC du 22 mai 2015, UBER, a rappelé que nous sommes ici dans un droit d'ordre public, notamment parce que cette activité met en jeu la sécurité de la personne transportée est en jeu.
- à ce titre, le Tribunal de grande instance de Paris, par un jugement de 27 janvier 2016, confirmé par la Cour d'appel de Paris dans un arrêt du 12 octobre 2016, Union Nationale des Taxis c/ UBER, a posé que les principes de la concurrence loyale s'imposaient particulièrement sur les activités de VTC.
- en raison des impératifs de sécurité des voyageurs, la municipalité de Chicago a adopté une nouvelle réglementation en juillet 2016, étendant aux entreprises de VTC les exigences jusqu'ici ne visant que les entreprises de taxi, pour les contraindre aux mêmes exigences sur les qualités auxquelles doivent répondre les chauffeurs.
- le régulateur de l'activité de taxi à Londres (Transport for London) a refusé le 27 septembre 2017 de renouvellement la licence d'UBER en raison de l'absence de contrôle que celui-ci exerce sur ses chauffeurs.
- la Chambre sociale de la Cour de casation, par décision du 28 novembre 2018 a requalifié le rapport entre la plateforme et les conducteurs qui travaillent grâce à son intermédiaire, via des documents qualifiés par la plateforme de "documents non-contractuels" base d'un "partenariat", en requalifiant ce rapport de "lien de subordination", ce qui constitue un "contrat de travail".
- l'Etat de Californie a adopté le 10 septembre 2019 une loi requalifiant les relations entre les plateformes, notamment celles qui mettent en relation les chauffeurs et les personnes voulant être transportées, comme étant des "contrats de travail". Il en résulte une responsabilité civile de la platefore du fait de ses employés.
Même en l'état du Droit commun, le principe général de la responsabilité du fait des personnes dont on a la garde s'applique.
Si l'on reprend la réponse de "Stephie" : " Notre engagement est de vous transporter d'un point A à un point B sans être victime d'une situation indépendante de votre volonté.".
Là où il y a engagement, il y a responsabilité.
Mais à lire la suite, sans doute est-ce à une sorte d'engagement éthique où il est fait ici référence. En effet, la demande ayant précisément visait par quelles modalités les dommages allaient être pris en considération par Kapten, de cela il n'en est plus question sous la plume de "Stephie", seul interlocuteur saisissable.
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Pourquoi allons-nous vers un Droit de plus en plus sévère ?
C'est notamment parce que les plateformes donnent une représentation du Droit si inexacte tout en affirmant, par exemple, que la sécurité de la personne transportée est leur "priorité", que les sources du Droit (régulateurs, tribunaux et lois) ne peuvent alors que durcir le ton et ne veulent plus laisser jouer le seul droit des contrats, puisque le Droit des Obligations (qui comprend aussi la responsabilité) est si méconnu.
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15 septembre 2019
Blog
La décision est d'autant plus importante que sur cette question là le Gouvernement vient de réexprimer sa position, le 10 septembre 2019, en affirmant que lorsqu'il y a une GPA réalisée à l'étranger l'enfant est rattaché à son parent, puis le droit français permet son adoption par le conjoint de celui-ci. En cela l'exécutif reprend la position de la Cour de cassation, telle que la même Première Chambre civile l'avait déjà exprimée.
Le cas soumis à la Cour de cassation
Le cas avait fait grand bruit puisqu'il s'agit d'une femme qui avait vendu l'enfant plusieurs fois à plusieurs couples désirant un enfant, ce qui avait justifié sa condamnation pour escroquerie. Les juges du fond ont donc appliqué des textes relatifs aux choses à un enfant... On ne peut mieux reconnaître la marchandisation de celui-ci, mais ce n'est pas ici le sujet.
La mère avait choisi de livrer l'enfant au second couple, qui avait payé davantage. Pour ce faire, juridiquement la mère abandonne l'enfant à la naissance, celui-ci est reconnu par l'homme qui se déclare père de l'enfant. Puis la conjointe de l'homme adopte l'enfant. Le temps passe et l'enfant ainsi accueilli en fait et en droit grandit.
Puis il s'était avéré que l'homme du premier couple était le père de l'enfant. Tout cela s'était fait dans une confusion générale car, comme le dit avec une certaine candeur l'arrêt, il s'était agi d'une "insémination artisanale".
Du coup, l'idée juridique était fait pour le premier couple d'agir sur le terrain juridique de la reconnaissance d'enfant. En effet, de droit, le père peut contester la paternité de celui qui est déclaré telle en démontrant le lien biologique existant entre lui et l'enfant. Ainsi, alors que l'enfant déclaré depuis la naissance par le second homme et adopté, vivant chez le second couple, le premier couple, via cette action en contestation de paternité du second homme et en reconnaissance de paternité du premier, demandant le changement de nom famille de l'enfant et excluant tout contact à l'avenir avec le second couple.
Les juges du fond ont déclaré irrecevable une telle action.
La Cour d'appel de Rouen fonde cette déclaration d'irrecevabilité sur les articles 16-1 du Code civil, qui assure la primauté de la personne et l'article 16-7 qui déclare illicite la GPA
Le père forme donc un pourvoi devant la première chambre civile de la Cour de cassation.
Le pourvoi soutient que la CEDH implique dans son article 8 qui protège le droit à l'identité de l'enfant le droit d'être rattaché par un lien de filiation à son père, ce qui ouvre à celui-ci un droit à contester la filiation le rattachant à un homme qui n'est pas son père et un droit à faire reconnaitre sa filiation à son égard.
Le pourvoi soutient que les juges du fond ont rendu par leur décision impossible l'établissement du lien de filiation paternité, ce qui est une "ingérence dans la vie privée de l'enfant" et une violation de l'article 8, ingérence disproportionnée même si la convention de GPA est illicite en droit français.
La solution apportée par la Cour de cassation
La Cour de cassation rejette le pourvoi.
Elle vise tout d'abord l'article 16-7 du Code civil qui pose la nullité de la convention de GPA, puis l'article 16-9 qui ajoute que cette nullité est d'ordre public.
Or, "l'action de M.X. en contestation de la reconnaissance de paternité de M.Y., destinée à lui permettre d'établir sa propre filiation sur l'enfna, reposait sur la convention de gestation pour autrui qu'il avait concue avec Mme C." ; en celui, la Cour de cassation approuve les juges du fond en écrivant qu'ils ont "exactement déduit que la demande était irrecevable comme reposant sur un contrat prohibé par la loi".
Puis la Cour de cassation souligne que les juges du fond ont relevé que l'enfant vivant dans d'excellentes conditions avec le second couple et qu'il n'était "pas de son intérêt supérieur de voir remettre en cause le lien de filiation avec celui-ci, ce qui ne préjudicie en rien au droit de l'enfant de connaître la vérit sur ses origines".
La Cour de cassation relève dans l'arrêt d'appel que celui-ci "observe qu’il en est ainsi même si la façon dont ce lien de filiation a été établi par une fraude à la loi sur l’adoption n’est pas approuvée".
La Cour de cassation relève encore que l'arrêt d'appel "précise que le procureur de la République, seul habilité désormais à contester la reconnaissance de M. Y..., a fait savoir qu’il n’entendait pas agir à cette fin".
La Cour de cassation en conclut "qu’ayant ainsi mis en balance les intérêts en présence, dont celui de l’enfant, qu’elle a fait prévaloir, la cour d’appel n’a pas méconnu les exigences conventionnelles résultant de l’article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales".
Elle rejette donc le pourvoi.
La portée de la solution apportée par la Cour de cassation
C'est donc bien en application de l'article 8 de la CEDH que la filiation par une adoption, en tant qu'elle est entourée des garanties juridictionnelle, va prévaloir, sur un mécanisme de contestation de paternité.
Cela découle donc de la CEDH elle-même, parce que l'enfant par ailleurs peut exercer son droit à connaître ses origines, concrétisation de son "droit à l'identité", dont la filiation n'est pas la seule expression.
C'est également sans méconnaitre l'article 8 que la filiation dans le droit interne, en tant que la GPA est contraire à l'ordre public, peut non seulement bloquer un lien de filiation mais même un lien de filiation dite "biologique", en raison d'un ordre public que l'article 8 CEDH ne méconnait pas et dont l'avis de la CEDH demandée par l'Assemblée plénière de la Cour de cassation et rendu le 10 avril 2019 vise à travers les marges d'interprétations des Etats signataires.
L'Assemblée plénière se réunit pour intégrer cet avis qui vise l'état du Droit français en estimant que, notamment parce qu'il dispose des marges pour exprimer les valeurs qui lui sont propres, la GPA étant un sujet de société, et que l'état du Droit français lui permet de protéger les enfants puisqu'il dispose de la technique de l'adoption. Or, dans le cas auquel répond l'arrêt de la première chambre civile du 12 septembre 2019, c'est précisément la filiation par l'adoption qui est ici privilégiée,et par la Cour d'appel de Rouen, et par la Cour de cassation. En effet, lorsque la Haute Juridiction utilise des expression comme "en ont exactement déduit", cela signifie qu'elle reprend à son compte le raisonnement des juges du fond.
En outre, la Cour de cassation rejoint ici parfaitement la jurisprudence du Conseil d'Etat du 31 juillet 2019 qui pose que le droit de la CEDH n'empêche en rien le Ministre de l'Intérieur de refuser une naturalisation d'un adulte pour le motif qu'il aura eu recours à une GPA à l'étranger. Ainsi, les Hautes juridictions françaises, qu'elles soient judiciaires ou administratives, se réfèrent l'une et l'autre à l'ordre public : la GPA est une affaire d'ordre public. Et en rien une affaire privée. L'article 8 CEDH ne contredit en rien l'ordre public qui imprègne ce souci que l'Etat doit avoir de la filiation. C'est pour cela que c'est le juge, comme le dit exactement cet arrêt du 12 septembre 2019, qui doit toujours veiller sur l'intérêt supérieur de l'enfant, et non pas seulement les parties à la convention, l'agence intermédiaire, ou un tiers (comme un notaire, par exemple).
Ainsi l'Europe à travers et sa législation et la jurisprudence de ses différentes juridictions, continue fermement de refuser à laisser les agences construire le marché des femmes et des enfants.
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8 septembre 2019
Blog
7 septembre 2019
Blog
Lisant sur mon écran d'ordinateur un article en accès libre dans une revue en partie librement accessible numériquement, une mention attire mon attention.
Elle a de quoi laisser perplexe toute personne qui écrit des articles et ouvrage qui requiert des lectures, lectures dont on indique au lecteur la trace pour l'inviter à son tour à y procéder dans ses propres recherches. Dans des travaux de recherche, de découverte et d'interrogation, donc.
Voilà le texte de la mention. :
Des DOI (Digital Object Identifier) sont automatiquement ajoutés aux références par Bilbo, l'outil d'annotation bibliographique d'OpenEdition.
Les utilisateurs des institutions abonnées à l'un des programmes freemium d'OpenEdition peuvent télécharger les références bibliographiques pour lesquelles Bilbo a trouvé un DOI.
"sont automatiquement ajoutés" ?
Il s'agit littéralement d'un "outil d'annotation bibliographique" ?
Si l'on s'abonne (le prix n'est pas indiqué, mais quand on écrit "-ium", c'est pour dire que l'on sort du gratuit...; comme le fait l'entreprise américaine Academia qui propose rapidement de "upgrapder" par un service payant pour accéder ), automatiquement les références seront téléchargées dès l'instant que l'algorithme, répondant au nom de "Bilbo" (n'est-ce pas le nom d'un personnage dans Le seigneur des anneaux ?), mais qui dans le civil a un nom qui reproduit sa fonction (Digital Object Identifier) fonction exprimée en langue anglaise va "automatiquement ajouter" une référence aux autres références qui auront été tacquées par l'algorithme.
Est-ce raisonnable ? Est-ce efficace ? Est-ce sans danger ?
C'est mécaniquement efficace, dès l'instant que l'on conçoit la référence bibliographique comme un "entassement mécanique" (I). Mais la référence bibliographique est et doit être tout autre chose, ce que les machines ne peuvent en rien restituer : être le reflet du parcours intellectuel que l'être humain qui écrivit l'article ou l'ouvrage fit pour écrit ce texte-là, une invitation à la lecture (et les machines ne lisent pas, on en arrive aujourd'hui à devoir le rappeler). Cette définition qui fut partagée de la bibliographie, qui ne mesure pas l'ampleur de l'empilement mais dessine ce vers quoi l'auteur s'est tourné pour chercher, pour trouver des réponses aux questions qu'il s'est posées, cela seul une personne peut le faire. En rien "Bilbo" (II). Or, si l'on se repose sur celui-ci, contre un abonnement, pour faire cette tâche-là, qui n'est reflet de rien, non seulement la bibliographie ne sera plus rien, mais des effets pervers, comme ceux observés comme celui des "citations", vont s'accroître (III).
Ensuite, si Bilbo écrit les bibliographie, tandis que Sophia fait les conférences, pourquoi un autre algorithme, que l'on pourrait appeler Thesarus ne pourrait pas écrire thèse, livre, essai, article, en ayant compilé toutes les règles formelles à respecter. Pourquoi non ? On se souviendra alors que les machines et les suites de chiffres ne lisent pas, n'écrivent pas, ne conçoivent pas, n'apprennent pas (l'expression Learning machine est un oximore), ne mémorisent pas (la "mémoire" d'un ordinaire n'est qu'une image), ne traduisent pas, n'ont pas d'émotion, n'aiment pas. Seuls les êtres humains le peuvent. Le sait-on encore ?
Lire ci-dessous une analyse plus détaillée.
5 septembre 2019
Base Documentaire : Doctrine
Référence complète : Bergé, J.-S., Le concept juridique de monnaie, in Petites Affiches, n°178-179, septembre 2019