La tarification résulte d’un acte de volonté par lequel un organisme fixe un montant ou une méthode de calcul pour obtenir un montant qu’il affecte à un bien ou à un service. La tarification s’oppose en cela au prix, lequel résulte quant à lui d'une façon spontanée du mécanisme du marché et de la concurrence qui gouverne celui-ci.
La tarification est un outil ex ante privilégié de la Régulation. Elle est privilégiée lorsqu'il s'agit de fixer les coûts d'accès pour les utilisateurs à des réseaux d'infrastructure essentiels, qui sont des monopoles économiquement naturels. Dans un processus de libéralisation, parce que la régulation a alors pour fin de construire la concurrence, la maturation concurrentielle conduira à quitter les « prix réglementés », c'est-à-dire la tarification, pour aller vers « prix libres », c'est-à-dire des prix de marché.
L’expérience en matière électrique a montré que parfois, il convenait politiquement de permettre à ceux qui avaient choisi les aléas des mouvements des prix de marché de revenir sous l’abri des tarifications.
Les méthodes de tarifications sont multiples, la France préférant la tarification au regard des coûts.
Le secteur des télécommunications fut le premier secteur à être libéralisé en Europe, non pas tant par volonté politique, mais parce que le progrès technologique avait de fait fait déjà entré la concurrence dans le secteur et qu’il convenait mieux de l’organiser plutôt que de laisser la concurrence s’installer en désordre.
Le secteur de la téléphonie fut libéralisé par directive communautaire, la loi de transposition de 1996 ayant installé l’Autorité de Régulation des Télécommunications (ART, aujourd’hui l’ARCEP, qui a eu pour tâche de favoriser les nouveaux entrants et de construire le marché des mobiles, en attribuant des fréquences. L’enjeu aujourd’hui n’est plus la libéralisation mais l’accompagnement de l’innovation technologique et de l’incitation des opérateurs à y procéder, par exemple dans les lignes ADSL, afin que des phénomènes comme l’échec du « plan câble » ne se renouvellent pas, que le "plan fibre" se déroule mieux, etc..
La maturité concurrentielle fait que l’Autorité de concurrence intervient fréquemment en matière de télécommunications, notamment lorsque des autorisations de concentrations doivent être données par cette Autorité, le Régulateur ne formulant qu'un avis.
Par ailleurs, l'enjeu majeur actuel qui a remis à l'ordre du jour les discussions autour de la dialectique entre contenant et contenu est de déterminer la place que les télécommunications ont et auront dans le numérique et qui pourrait être une régulation spécifique d'Internet, et par là même le Régulateur des télécommunications.
En premier lieu, le Droit de la Régulation et de la Compliance est difficile à comprendre notamment parce qu'il souffre d’ambiguïté et de confusion du fait de son vocabulaire d'origine anglophone, dans lequel des mots ou expressions proches ou identiques n'ont pourtant pas la même signification.
A tout seigneur tout honneur, c'est le cas pour le terme de "Régulation".
En langue anglaise, regulation vise le phénomène que la langue française exprime par le terme "Réglementation". Mais elle peut aussi viser l'appareillage complet de ce qui va tenir un secteur atteint une défaillance de marché et dans laquelle la réglementation n'est qu'un outil parmi d'autres. On utilisera alors avec précision l'expression Regulatory System, mais aussi le terme Regulation, l'usage de la majuscule signalant la différence. Il est inévitable que dans une lecture rapide, voire par le jeu du numérique, qui écrase les majuscules, et les traductions automatiques, cette distinction de formulation, tenant à une minuscule/majuscule disparaisse. Et la confusion naît.
Les conséquences sont considérables. C'est notamment en raison de cette homonymie, que fréquemment en langue française l'on mette au même niveau le Droit de la Régulation et la réglementation. L'on s'appuiera sur une telle association, de nature tautologique, pour affirmer que "par nature" le Droit de la Régulation serait de "droit public", puisque la réglementation a pour auteur des personnes publiques, notamment l’État ou les Autorités administratives indépendantes que sont les Régulateurs. Reste lors la difficile justification de la présence considérable des contrats, des arbitres, etc. Sauf à critiquer l'idée même de Droit de la Régulation, parce qu'il serait le signe d'une sorte de victoire des intérêts privés, puisque conçus par des instruments de droit privé.
Apparaissent ainsi deux inconvénients majeurs. En premier lieu, cela maintient dans le Droit de la Régulation la summa divisio du Droit public et du Droit privé, qui ne parvient plus à rendre compte de l'évolution du Droit en la matière et conduit des observateurs, notamment des économistes ou des institutions internationales, à affirmer que le Droit de Common Law serait plus adapté aujourd'hui à l'économie mondiale notamment parce que celui-ci fait certes place au Droit administratif, au Droit constitutionnel, etc., mais ne les conçoit pas dans la distinction Droit public/Droit privé, comme continue de le faire le Droit continental de Civil Law.
En second lieu, sans doute parce que ce Droit nouveau puise dans des théories économiques et financières qui se construisent principalement au Royaume-Uni et aux États-Unis, l'habitude se prend de ne plus traduire. L'on trouve ainsi dans d'autres langues, dans des textes écrits en français par exemple, des phrases comme "le Régulateur doit être accountable".
Il est inexact que l'idée d'accountability , qui renvoie à une reddition des comptes, soit réductible à l'idée de "responsabilité". Les auteurs ne le traduisent pas, ils ne recopient et l'insèrent dans des textes rédigés en français.
L'on passe de la "traduction-trahison" à l'absence de traduction, c'est-à-dire à la domination du système de pensée dont le mot est originaire.
Un des enjeux actuels majeurs de ce phénomène est dans le terme même de la "Compliance". Le terme francophone de "conformité" ne le traduit pas. Pour respecter ce qu'est la compliance, il convient pour l'instant de le recopier, afin de ne pas le dénaturer. L'enjeu est de trouver un mot francophone qui exprime cette idée nouvelle, notamment au regard des systèmes juridiques qui ne sont pas de Common Law, afin que leur cadre général demeure.
La notion de transition a été dans un premier temps le signe du caractère transitoire du Droit de la Régulation et la preuve de sa consubstantialité avec le Droit de la concurrence.
En effet, surtout dans les secteurs dont on pensait que l'idéal pouvait être la concurrence, comme en matière de télécommunication, l'on a pensé que le marché concurrentiel n'était pas présent en raison de phénomènes historiques, comme la constitution de monopoles publics. Il suffisait donc en premier lieu et par un acte juridique de déclarer la concurrence comme principe licite puis, parce qu'il ne suffit pas de déclarer la concurrence, il faut encore la construire en traitant la dominance de certains opérateurs, notamment les opérateurs historiques, il fallait mettre en place un appareillage régulatoire. Dans cette perspective, le droit de la régulation, notamment la constitution d'Autorités de régulation, réussirait par l'instauration grâce à la force du Droit d'un marché concurrentiel, signant alors la fin de ce droit particulier, remplacé par le Droit commun de la concurrence, sous le seul et suffisant office d'une Autorité de concurrence.
Dans cette perspective, le Droit de la Régulation avait pour but d'opérer une transition vers le Droit de la concurrence.
Cela n'est pas passé ainsi. Le Droit de la Régulation ne s'est pas dissous dans le Droit de la Concurrence. Il semble aujourd'hui acquis que le Droit de la Régulation n'exprime pas une "transition".
Mais ce terme a pris une tout autre signification à travers la notion de "transition énergétique". En effet, et pour prendre l'exemple français de la Loi du 18 août 2015 sur la transition énergétique pour une croissance verte, le Droit de la Régulation exprime aujourd'hui une volonté politique de transformation qui ne ramène pas vers l'ordinaire marchand mais au contraire vers une économie construite sur des piliers qui n'existerait pas sans une régulation qui, ici, repose tout à la fois sur la protection de l'environnement et la protection des personnes.
Ainsi, la notion de transition renoue avec la notion de politiques publiques et permet aux Régulateurs sectoriels et aux opérateurs cruciaux de concrétiser d'une façon dynamique le passage d'une régulation à une autre régulation, ce que le Politique seul ne peut pas faire.
La transparence n'est pas un état naturel, elle n'est pas même un principe juridique du droit classique. Les situations, les personnes et les informations ne sont portées à la connaissance que de ceux qui sont dans la situation même, par exemples les parties au contrat, mais elles ne sont pas connues des tiers. Ainsi le contrat n'est pas transparent, conséquence de la règle de base qui distinguent les parties et les tiers au contrat. De la même façon sur un marché ordinaire de biens et services, c'est le secret des affaires, le secret des fabriques, le secret des stratégies qui demeurent le principe, conservés par les autorités de concurrence. L'information et la transparence ne jouent que sur les prix proposés, pas même sur la façon dont ils sont fabriqués.
Il est vrai que le principe de l'information a progressé, et en droit des contrats et en droit des sociétés, branches du droit qui interfèrent avec le droit de la régulation. Mais il ne s'agit encore que d'imposer une mise à disposition de l'information pour celui qui en a besoin, alors que la transparence, évoquant la maison de verre, impose que toute donnée pertinente soit portée à la connaissance de tous. Ainsi les marchés financiers doivent être transparents, comme leurs régulateurs, et non pas seulement l’information disponible. La transparence est donc un mécanisme de système qui dépasse la simple efficacité de l'obligation d'information.
Par ailleurs elle est devenue constitutive des systèmes régulés, comme elle est devenue une des règles constituant l'ossature des nouveaux mécanismes juridiques de supervision et de compliance des "entreprises cruciales". C'est pourquoi l'exigence de transparence se renforce chaque jour et prend la forme de règles et de procédures supra-nationales.
Le Droit exprime alors l'idée politique selon laquelle non seulement l’intéressé, par exemple l’investisseur mais encore l’utilisateur du bien, voire le citoyen doit avoir en main l’information mais doit encore la comprenne. Cette intelligibilité serait un nouveau droit qui donnerait tout son sens à l’information, protègerait effectivement le consommateur, engagerait la responsabilité de son émetteur, et préviendrait efficacement le risque systémique et réduirait les inquiétudes du quotidien.
En cela la transparence est centrale à la fois en économie de la régulation, à travers les conceptions comportementaliste de l'économie qui se concentre sur le comportement du consommateur, qu'il convient donc d'éduquer pour qu'il soit apte à faire des choix, et dans une conception qui demeure politique de la régulation, dans laquelle l'entreprise choisit d'être transparente, même si elle n'est pas cotée, parce qu'elle reconnait le consommateur, le contractant et tous ceux qui ont affaire à elle comme pertinents pour la regarder et pour l'évaluer. Elle devient une façon de permettre à tous de faire de choix, d'accroître la concurrence entre les opérateurs, tous devenant transparents. On quitte alors la technique de la régulation pour entrer dans l'économie concurrentielle ordinaire renouvelée.
En cela la transparence est une dimension essentielle de la responsabilité sociétale des entreprises, dans le lien que celle-ci a avec le Droit de la régulation, le Droit de la supervision et le Droit de la compliance.
L'art et la puissance du Droit sont dans les mots. C'est pourquoi l'on rattache parfois le Droit aux Actes de langages.
La notion de "tribunal" en est un bon exemple. L'on peut définir un tribunal en repérant les occurrences de ce termes dans les textes : est ainsi un "tribunal" l'organisme qui est appelé "tribunal" et n'est pas un "tribunal" celui qui n'est pas appelé ainsi. La puissance d'une telle tautologie littérale a été longtemps celle du Droit français. La conséquence technique est considérable puisque la personne que la décision qu'un organisme peut prendre peut affecter est beaucoup moins protégée lorsque l'organisme est un "tribunal" que lorsqu'il ne l'est pas, lorsqu'il s'agit par exemple d'une administration, ou d'une société, ou de la famille.
En effet, la personne devant un tribunal est naturellement dotée et notamment de droits de la défense et bénéficie du principe du contradictoire. Et avant même le bénéfice de ces garanties de procédure, la personne a droit à ce que son juge soit indépendant et impartial. L'ensemble de ces principes ont valeur constitutionnelle car ce sont les libertés essentielles des personnes qui sont alors en jeu.
Dans la conception formelle et tautologique, cela ne concerne guère le Droit de la régulation, puisque celui-ci est plutôt institutionnellement construit sur des Autorités de régulation qui ont certes de grands pouvoirs cumulés mais qui sont des Autorités administratives et non pas des juridictions. Cela est d'autant plus éloigné que ces autorités administratives prennent des décisions administratives et non pas des jugements civils ou pénaux. C'est donc en dehors d'elles que se développe un Droit pénal des marchés régulés.
Mais l'on peut manier l'art de la qualification d'une façon non formelle et non tautologique. C'est ce qui fût fait par la Cour européenne des droits de l'homme dans l'interprétation qu'elle donna de l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme. En effet, celui-ci dispose que "chacun a droit à un tribunal impartial en matière civile et pénale".
Selon un raisonnement téléologique et en se souciant avant tout de la situation de la personne concernée, la CEDH a considéré que lorsqu'une personne est punie d'une façon significative pour une faute qu'elle a commise, nous sommes en "matière pénale", comme lorsque la décision affecte sa situation personnelle ou patrimoniale, nous sommes en "matière civile", quand bien même le droit national manie des règles par exemple formellement administrative dans un contentieux administratif. Plus encore, de ce seul fait, par l'effet que cela produit sur la personne et le danger que la perspective d'une telle décision représente pour celle, cela institue l'organisme en "tribunal", et déclenche au bénéfice de cette personne la totalité des garanties de procédures.
Les droit nationaux n'ont que progressivement admis ce raisonnement peu respectueux de la division du système juridique en branche du droit et des décisions successives des juridictions, de la Cour de cassation, du Conseil d’État et du Conseil constitutionnel, ont sanctionné les Régulateurs ou invalidé les textes organisant leurs procédures pour n'avoir pas respecté les conséquences de leur nature de "tribunal au sens européen", notamment pas l'exigence d'impartialité objective, ou les conséquences de l'applicabilité du principe Non bis in idem.
Débutée dans les années 1980, cette saga qui se poursuit montre et la puissance des mots alliée à l'art de la qualification et la force d'inertie d'un système administratif, à la fois parce qu'il est toujours difficile de changer et parce qu'un Droit administratif répressif peut prétendre être plus efficace parce que donnant moins d'armes à l'opératif soupçonné.