Matières à Réflexions

Enseignements : Droit et Cinéma

Le thème "Droit et Cinéma" est à la fois étroit, puisqu'il vise l'intersection entre les deux, à savoir les films dans lesquels le droit est visé, ce qui n'est pas très fréquent. En outre, l'étude du droit dans le cinéma est moins étudié que, par exemple, les rapports entre le droit et la littérale, lesquels renvoient à un courant complet de pensée "Law and Litterature". Mais dans le même temps, il est difficile de penser les rapports entre le droit et le cinéma sans avoir une connaissance plus large, et du droit et du cinéma.

Ainsi une bibliographie plus large, visant l'un et l'autre, serait bienvenue, regardant du côté des cinéphiles et des juristes érudits. Mais la bibliographie passe d'un excès à l'autre et cesse d'être étriquée pour devenir monumentale.

C'est pourquoi la présente bibliographie cherche un équilibre entre les deux pour rassembler des références permettant de mieux comprendre la représentation que le cinéma, d'une façon générale et film après film, donne du droit.

Dictionnaire bilingue du Droit de la Régulation et de la Compliance

La notion de "biens communs" renvoie à une conception politique en ce qu'ils visent des biens objectivement marchands comme les biens culturels ou les prestations médicales mais dont la collectivité va poser que chacun doit y avoir accès alors même que l'individu n’a pas les moyens d’en payer le prix exact. C’est alors le contribuable - présent ou futur - ou les partenaires sociaux qui en supporteront le coût, voire certaines entreprises par le mécanisme de "responsabilité sociétale".

Cette protection des biens communs peut être faite par l’État, au nom de l'intérêt du groupe social dont il a la charge et dont il exprime la volonté, à travers notamment la notion d'intérêt général. Dans ce cadre aujourd'hui restreint que représente l’État, une telle référence se heurte au principe de concurrence. Cela est particulièrement net en Europe, qui repose sur une Union construite sur un ordre juridique autonome et intégré dans les États-membres dans lequel la concurrence continue d'avoir valeur de principe et bénéficie du mécanisme de la hiérarchie des normes. L'évolution du droit européen a mis en équilibre le principe de concurrence avec d'autres principes, comme celui de la gestion des risques systémiques, par exemple sanitaires, financiers ou environnementaux et la création de l'Union bancaire montre que le principe de concurrence n'est plus faîtier dans le système européen.

Mais l'on en reste encore à une conception économique et financière de l'Europe que la définition du Droit de la Régulation, lorsqu'on le restreint à la gestion des défaillances de marché alimente. Il est concevable que l'Europe évolue un jour vers une conception plus humaniste de la Régulation, celle-là même que les États européens pratiquent et défendent, notamment à travers la notion de service public. Les services publics concrétisent l'accès de chacun à des biens communs, comme l'éducation, la santé ou la culture.

Paradoxalement, alors même que le Droit ne se met guère en place à l'échelle mondiale, c'est à ce niveau-là que la notion juridique de "biens communs" s'est développée.

Lorsqu'on se réfère à des biens que l'on dit "biens globaux", on vise alors des biens qui sont communs à l'humanité, comme les océans ou les civilisations. C'est tout à la fois le cœur de la nature et le coeur de l'être humain, ce qui plonge le plus dans le passé et le futur. Paradoxalement, la notion de "biens globaux" est plus encore politique en substance mais faute de gouvernement politique mondial, leur protection effective est difficile, leur consécration politique ne pouvant être effective que nationalement ou que simplement déclaratoire internationalement. C’est pourquoi, cet équilibre à leur bénéfice ne s’opère pour l’instant qu’à l’échelle nationale, ce qui renvoie à la difficulté de la régulation de la mondialisation.

Ainsi, les "biens communs" existent juridiquement davantage sous leur face noire : les "maux globaux", contre lesquels un "Droit global" se met effectivement en place. La notion des "maux globaux" constitue une sorte de miroir des biens communs. On observe alors que les pays qui développent des discours juridiques de régulation des maux globaux et des biens globaux déploient de ce fait un droit national unilatéral mondial. C'est le cas des États-Unis, notamment en régulation financière ou plus largement à travers le Droit de la Compliance en train de naître. Les entreprises y ont leur rôle à jouer, notamment à travers les Codes de conduite et la Responsabilité sociétale.

Base Documentaire : Doctrine

Référence complète : Brohard, Y., Entre art et science : le corps en mouvement, communication à l'Académie, Canal Académie, 2018.

Écouter la conférence.

Base Documentaire : Films

Voir l'extrait du film dans lequel l'avocat plaide l'innocence de sa cliente.

Henri-Georges Cluzot est un cinéaste qui utilise ici Brigitte Bardot, au sommet de sa célébrité, à contre-emploi.

Enseignements : Droit et Cinéma

Le contrôle final qui est attaché à l'enseignement de Droit et Cinéma prend la forme d'une dissertation.

Les étudiants doivent traiter un sujet, en choisissant parmi deux sujets qui leur est proposé. La copie peut être rédigée en langue française ou en langue anglaise.

Le sujet reflète l'esprit dans lequel l'enseignement a été donné et la méthode par laquelle les séances successives se sont déroulées.

En effet, le séminaire est construit sur des analyses d'une dizaine de films, qui se recoupent, évoquent d'autres films, et ont en commun des personnages ou des thèmes juridiques. La juxtaposition de ces analyses monographiques n'empêche pas une vision plus globale du rapport entre le droit et le cinéma, qui apparaît par l'ensemble du séminaire. Cette vision globale doit apparaître dans la copie;

Ainsi, l'enjeu du travail final sur table est de traiter un thème très général, en s'appuyant sur des analyses qui au fur et à mesure des séances ont dégagé à travers des films particuliers, des problématiques générales. C'est cette aptitude à un aller-retour des perspectives particulier vers la problématique générale qu'exprime le sujet donné au travail de contrôle final, qui est plus particulièrement apprécié.

Enseignements : Droit et Cinéma

Ce livret de séminaire expose le contenu et les objectifs du séminaire.

Tout semble opposer le Droit et le Cinéma. Le film est une œuvre de fiction, prenant donc par nature distance par rapport à la réalité, tandis que le Droit est un "art pratique" qui doit résoudre les difficultés ou éviter qu'elles n'adviennent. Mais le cinéma traduit aussi une société, une culture, une époque. En outre le droit lui ressemble en ce qu'il possède la même puissance de créer sa propre réalité. Plus encore, le droit se met en scène, notamment à travers des procès, des costumes, des vedettes, etc.

En outre, la "société juridique" s'insinue dans le cinéma, lorsque le film choisit un thème ou une affaire juridiques ou bien lorsque le film retranscrit l'état de maturité juridique d'une société, par exemple aux États-Unis. Chacune des séances est construite sur un film en particulier, auquel est rattaché une problématique, détaillée dans ce livret de séminaire. Celui-ci indique également les modes d'évaluation et la charge de travail.

Ainsi, le cinéma nous apprend sur la façon dont toute ou telle société, toute ou telle époque fait place au droit.

Il révèle ce qu'est telle ou telle branche du droit. Le droit du procès s'y prête particulièrement bien, car le droit y est lui-même non seulement récit mais encore personnage, drame, spectacle, autour de ces personnages sous la lumière que sont l'avocat et le juge. Mais le cinéma peut encore révéler le droit de la famille ou le droit international public.

Le cinéma, art populaire, peut d'ailleurs être utilisé comme vecteur pour que le Droit innerve davantage la société, mode d'éducation ou mode critique de la part du Droit dans la vie de chacun. Ainsi, la puissance du cinéma américain participe de ce que certains appelle "l'américanisation du droit".

Enseignements : Droit et Cinéma

Chaque étudiant doit réaliser un exposé oral, correspondant au thème de la séance, soit seul soit  à deux, voire exceptionnellement à trois. 
 
Il y aurait donc 11 ou 12 exposés;
 
Comme les films doivent correspondre aux goûts cinématographiques des étudiants, il est proposé ci-dessous une longue liste de films, auxquels sont associés des thèmes assez généraux.
 
Cette liste est accessible avant le début du séminaire, afin que chacun des étudiants inscrits ait pu y réfléchir par avance, que lors de la première séance une présentation soit rapidement faite de chacun et que les exposés puissent commencer dès la deuxième séance

 

Retourner à la présentation générale du Séminaire.

2 octobre 2024

Base Documentaire : Doctrine

► Référence complète : E. Abécassis, Divorce à la française, Paris, Grasset, 288 p.

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📗lire la 4ième de couverture

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📝lire l'entretien d'Eliette Abécassis sur le rapport avec le droit, la justice, la famille, "Dalloz-Actu", 3 octobre 2024.

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► Présentation de l'ouvrage : "Le «  divorce à la française  » n’est pas un «  jardin à la française  »  : c’est une boucherie  !

Antoine et Margaux Maurepas se sont aimés et ont eu ensemble deux enfants. Lui est chirurgien, elle est romancière. Voilà qu’au moment de divorcer, ils se déchirent pour la garde de leurs enfants.
Le mari, la femme, le fils, la fille, la mère de l’un, la mère de l’autre, la deuxième épouse de l’un, le frère de l’autre, l’ami de l’un, l’amant de l’autre, l’éditeur de l’une, la comptable de l’autre  : plus les témoignages se succèdent auprès de la Juge aux Affaires familiales, plus la vérité se dérobe : Est-elle folle, est-il un pervers manipulateur et violent, qui est infidèle à qui, qui instrumentalise les enfants, qui complote avec sa mère, qui a le pouvoir symbolique et le pouvoir financier, entre l’écrivaine qui invente des fictions et le chirurgien qui opère ses patients  ? Qui est le bourreau, qui est la victime  ? Un tourbillon de témoignages, auditions, procès-verbaux, qui se contredisent sur les faits comme sur leur interprétation, et autant de versions à démêler, pour la Juge comme pour la lectrice et le lecteur, qui se trouvent exactement dans la même position d’inconfort qu’elle  : chacune et chacun est crédible quand on l’écoute ou le lit, et pourtant rien ne s’accorde dans ce puzzle d’une famille éclatée.

Les enfants pourront-ils échapper au jugement de Salomon  ? La décision juste devant la loi sera-t-elle la bonne décision?
Ce sont certaines des interrogations qui traversent ces pages vertigineuses, où tous se reconnaîtront et essaieront de démêler le vrai du faux et de sauver ce qu’il reste à sauver.

Le procès impitoyable du couple, de la fiction et de la société. Un huis-clos étourdissant où Eliette Abécassis assoit plus que jamais son talent de romancière.".

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8 septembre 2024

droit illustré

► Référence complète : M.-A. Frison-Roche., "Un martyr au service du Droit et de la Justice, caché sous un titre d'un quelconque thriller : 𝑴𝒆𝒏𝒂𝒄𝒆 𝒂𝒖 𝒔𝒐𝒎𝒎𝒆𝒕", billet septembre 2024.

 

► voir le film-annonce 

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En 2023, sort un film suédois.

Il est présenté comme un "thriller au suspense insoutenable", ce que son titre français soutient :  𝑴𝒆𝒏𝒂𝒄𝒆 𝒂𝒖 𝒔𝒐𝒎𝒎𝒆𝒕.

Ce n'est pas un thriller. Il n'y a pas une menace au sommet. Et cela n'est pa insoutenable.

C'est l'histoire d'un homme seul.

Pourtant quand il revient 3 jours à sa vie, en Suède, avec ses amis, il est comme vous et moi : il déjeune dans un jardin, respire l'air frais, voudrait bien acheter une jolie petite maison, demande des nouvelles de la famille.

Mais quand il remplit son office, il est seul.

Il a tout pour être absolument seul. 

Nous sommes au début des années 60.

Il vit à New-York et travaille toute la journée. Lorsqu'on est le Secrétaire Général de l'ONU l'on a peu de temps pour aller dans des dîners, pour se promener avec un chien dans Central Park. Un chien, des enfants, une femme, il n'en a pas. Il a un petit singe, qu'il a ramené de Somalie, sans doute un des nombreux pays où il a été pour aider, aider, aider. Peut-être avec succès ou pas. Peut-être de la bonne façon ou pas. Cela n'est pas dit, ce que l'on voit, c'est son petit singe qui est sur son épaule, qui s'asseoit sur sa feuille où il peut enfin s'exprimer dans sa langue natale, qui court sur son table où il dine seul, toujours seul.

Il est toujours habillé pareil.

Chaque matin, il met une chemise blanche identique à celle de la veille. Chaque matin, il lace ses chaussures.

Car chaque matin, il va à son bureau pour que lui tombe dessus les catastrophes, les urgences, les drames, les situations insolubles.

A chaque fois, il essaie de trouver la moins pire des solutions, de trouver les moins pires des interlocuteurs. Et il rentre chez lui.

Pourquoi faire cela ? 

Il écrit en suédois, avec son petit singe sur son épaule que dans sa solitude, qui n'est pas un drame, qui est son état, il faut trouver ce pourquoi il faut se sacrifier.

Il a déjà consacré toutes les années précédentes à accompagner la décolonisation ; il croit au droit des peuples à disposer d'eux-mêmes. Il fait tout ce qu'il peut pour que la décolonisation se passe le moins mal possible en Afrique à l'égard des pays européens et maintenant que les pays ne soient pas tenus par les Etats-Unis et l'Union Soviétique. 

il ne fait que travailler.

Hegel appellerait cela un fonctionnaire, mais l'on nous dit que ce film n'est pas un cours de philosophie politique, puisque c'est un "thriller au suspense insoutenable".

Un jour, un coup d'Etat arrive dans un de ces pays d'Afrique.

Le Premier Ministre de ce pays vient le voir pour le dire, que le pays va être dépecé car une province aux ressources minières convoitée qui doit être détachée pour être mieux tenue par ceux d'avant, que lui-même est en danger, qu'il faut qu'il fasse quelque chose.

Il répond qu'il lui  faut un peu de temps.

Le Premier Ministre revient dans son pays. Il  est immédiatement assassiné. 

Des massacres débutent.

Une guerre civile menace.

La province dans laquelle sont ces ressources minières considérables notamment pour la fabrication de la bombe atomique, déclare sa secession. Des industriels étrangers se réunissent. Des réunions se tiennent dans le pays avec le nouveau président avec des représentants des divers intérêts.

Le Secrétaire Général dit : nous allons envoyer des casques bleus et ensuite nous réunirons le Conseil de Sécurité.

En cela, il se condamne. 

Il est critiqué de tous les côtés.

Le Conseil de sécurité se réunit.

Lors de la réunion de celui-ci, l'URSS demande sa démission immédiate car en envoyant les casques bleus dans ce qui est en réalité une opération militaire il a excédé ses pouvoirs et il a pris parti.

Il répond qu'il a été mandaté pour que l'ONU accompagne la décolonisation et que les pays concernés soient en paix, que la paix est la mission de l'ONU, que la paix implique que les pays décolonisés  ne soient pas soumis à la puissance de l'un ou l'autre des deux blocs qui sont à la manœuvre en alliance avec les industries impliquées.

En disant cela, il se condamne une deuxième fois.

Il revient dans son bureau où il apprend que son compagnon le petit singe s'est libéré de sa petite cage capitonnée de velours rouge où il demeure quand il attend son retour , a grimpé dans l'escalier, s'est étranglé par la fine laisse qui lui entourait le cou et qu'il est mort. Leur sort est parallèle, ce n'est qu'une anticipation. Il répond qu'il veut qu'on ôte son cadavre pour qu'il n'ait pas à voir son cadavre en rentrant (il n'est pas masochiste, juste dévoué à ce qu'il pense être juste).

Dans le pays les massacres continuent. Il décide d'aller lui-même rencontrer le président qui avait dans un premier temps accepté sa proposition de réunifier le pays puis a tout rejeté en bloc. 

Il se condamne donc une troisième fois.

Il n'y a aucun suspense dans ce film.

Dans l'avion, son lacet de chaussure se casse. Il n'en a pris de rechange. Mais son collaborateur lui passe le sien.

Malgré toutes les précautions prises pour que son avion ne soit pas repéré, l'avion a un accident en plein vol. Il n'y a pas de survivant.

La Suède se met en silence pour lui rendre hommage : le film s'achève sur les images d'archives d'un peuple recueilli.

Plus tard à titre posthume il recevra le prix Nobel de la Paix.

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Voilà la vie d'un homme droit ;

Appliquer le Droit, comme on peut, le moins mal possible donc.

Se faire menacer, injurier, sanctionner.

Etre inconnu du grand public

Exercer son pouvoir en se basant sur ce pour quoi il a été donné

Essayer de ne donner prise à personne, ni dans son habillement, ni dans son comportement (il aimerait se rapprocher de son ami qu'il aime depuis toujours, mais il ne le  veut pas pour ne pas donner prise).

Travailler jusqu'à l'épuisement (il dort sur le canapé de son bureau, prend une douche pour partir au Conseil de sécurité)

Dire la vérité.

N'avoir de reconnaissance et de prix qu'une fois mort.

C'est un documentaire sur Dag Hammarskjöld, ce qu'est l'intégrité et l'amour du Droit (ici le Droit international public) en ce qu'il sert la Justice.

J'aurais volontiers appelé ce film : Le martyr , mais je ne sais pas faire de "thriller au suspense insoutenable".

Le titre suédois du film est simplement le nom de cette personne : 𝑯𝒂𝒎𝒎𝒂𝒓𝒔𝒌𝒋ö𝒍𝒅,

 

Dag Hammarskjöld,

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29 mai 2024

droit illustré

► Référence complète : M.-A. Frison-Roche., "La justice au miroir de ses erreurs : Copie conforme", billet mai 2024.

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En 1947, sort un film Copie conforme qui eut un très grand succès, peut-être parce que Louis Jouvet y endossait tant de rôles.

C'est sous cet angle là qu'enfant on me parlait de ce film. Avant d'avoir fait connaissance avec la procédure juridique du "copie conforme", c'est par ce dédoublement du personnage de guignol qui change parce qu'il met une fausse moustache, ou des lunettes, et devient alors un autre, puis trouve un autre homme qui lui ressemble tant que les deux ne deviennent plus qu'un, que je suis d'abord ce qu'était "Copie conforme".

Plus tard, quand j'eus l'âge de lire des livres, puis des livres de droit, j'appris la procédure du "copie conforme" par laquelle un agent doté de l'autorité publique requise peut délivrer un autre document certifié comme reproduisant exactement un original et pouvant faire foi qu'il ne déforme pas celui-ci dans la copie qu'il en fait.

Quel film qui dit tout l'inverse du Droit, qui le fait mentir. 

Qui décrit l'injustice de la justice.

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Il y a beaucoup de perspectives dans ce film, ce qu'est un film, puisque le personnage central est un photographe célèbre, qui peut transformer tout le monde par les photos qu'il prend, la tête ou les jambes dissociés, photographiant l'inspecteur de police lui disant qu'il ne le fait pas payer "puisqu'il se paye sa tête" en lui déformant le visage lui tordant la bouche ce qui rend ses paroles incompréhensibles.

C'est cela l'art de se découper, de transformer, de mettre en carré, Jouvet habillé en prince opérant cela avec quiconque et avec tous.

Mais enfin, parlons ici plutôt du Droit puisqu'il va cesser de se dupliquer en vieillard, en ouvrir, en duc, en déménageur, tout en restant derrière sa caméra, que lorsqu'il sera confronté à la justice en ayant l'idée qui lui sera fatale : celle de trouver un alibi.

Cet alibi, c'est un personne qui n'existe pas puisqu'il s'appelle Monsieur Dupont, qu'il veut mourir (parce que la justice l'a pris pour un autre, pour un duc, pour un déménageur, etc.), et qu'il faut absolument rester dans sa vie qui lui plait et qu'il décrit avec soin : n'être pas "quelqu'un", n'être pas reconnu, avoir ses amis, sa journée réglée, son chat, la belle vie quoi.

Mais le photographe, qui ne peut donc vivre qu'en volant par son appareil et tous ses accessoires toutes les vies possibles de tous les autres possibles (car la femme parfaite photographiée par la tête de l'une et les jambes de l'autre n'existe pas davantage, le duc non plus, etc.), trouve enfin un homme qui croit ne pas vivre mais qui, de banalité en banalité touche plus le sol, en butant sur le pot-au-lait du matin, en rangeant chaque soir sa chemise. Et ça, il va l'appeler : Duplicata. Comme ils se ressemblent, il lui dit que tant qu'il ira cambrioler, l'autre se montrera et ainsi l'image sera donnée de son absence sur les lieux du crime puisqu'il était présent ailleurs.

La diabolicum probatio est faite : Louis Jouvet pouvait l'apporter, l'on n'en doutait pas de sa part, le Quai des orfèvres est si proche.

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Pourquoi le pâle reflet devient-il le personnage consistant ? l'on pourrait dire l'inverse car le splendide n'est qu'une image alors que la scène pivot du film est la discussion, toute entière, des deux dans laquelle le personnage qui croit n'être rien, puisqu'il n'est pas connu et n'a pas de prestance, a une vie et c'est par affection que sa collègue fera un faux témoignage pour lui, mais cela il ne le voit pas. Le voleur, celui qui n'a donc en réalité rien à lui, ne dit rien de lui, que pourrait-il dire puisqu'il est que duc, déménageur, vendeur de diamant, livreur, enfin il suffit de passer commande au photographe et d'attirer sa convoitise, expose juste l'exploitation qu'il va faire de l'insignifiant Dupont. 

Dupont quant à lui décrit sa vie, refuse qu'on la lui ôte, revendique que sa vie si insignifiante soit-elle c'est la sienne et qu'elle n'est pas à la disposition d'autrui. J'ai pensé à De minimis. Il raconte que la justice déjà a voulu la lui prendre.

En effet, la justice a voulu la plus prendre. Monsieur Dupont est vendeur de boutons. C'est pour en vendre qu'il entre en contact avec une victime du voleur. Il en vend peu parce qu'il ne sait pas très bien vendre. On a du charisme ou on n'en a pas. 

Immédiatement reconnu, il est déféré au tribunal. Le juge le confronte à toutes les victimes. 

Formellement les victimes le reconnaissent, formellement les victimes ne le reconnaissent pas. On lui met des lunettes, ou des moustaches, ou des cheveux gris : les victimes commencent à se disputer entre elles.... Mais si c'est absolument ! Mais non ce n'est absolument pas lui !

Et là, sa jeune collègue le sauve de la prison dans laquelle le juge veut l'envoyer en intervenant et en faisant un faux témoignage, affirmant que le jour du délit, ils étaient ensemble, que d'ailleurs ils sont ensemble... Et c'est ainsi qu'il échappe à la prison.

Par la suite, lorsque l'insignifiant, celui qui vit et qui est aimé, rencontre celui qui a de la prestance, c'est-à-dire celui qui est vide et n'a rien, le premier voudra la vie de l'autre. C'est si beau la grande vie, et Louis Jouvet porte si beau la queue-de-pie.

 

N'est-ce pas un merveilleux film, Copie conforme ?

 

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9 avril 2023

droit illustré

► Référence complète : M.-A. Frison-Roche., "Une représentation du Droit des internements abusifs sur le ton de la comédie : 𝑯𝒂𝒓𝒗𝒆𝒚", billet avril 2023.

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En 1950 sort un film présenté comme une comédie : Harvey.

Ce film est proprement prodigieux. Son objet paraît être un lapin blanc, celui-ci est moins préoccupé que l'autre de son retard, sauf qu'il accompagne depuis l'enfance un homme qui paraît lui aussi en décalage avec la bonne société dans laquelle il vit.

Joué admirablement par James Stewart, je personnage principal est un homme de 42 ans (42, chiffre magique en mathématiques...) qui avait tout pour lui : intelligent, il avait fait ses études à Yales et jouit de la considération d'autrui car il est le plus charmant des convives. Il vit dans une des plus belles maisons de sa petite ville car c'est à lui que sa grand-mère a tout légué. Il y accueille sa sœur et la fille de celle-ci.

Sa nature le pousse à aller dans des cafés où il boit des martinis et en offre à toutes les personnes qu'il rencontre et qu'il invite chez lui à un "dîner informel", affirmant que l'hôte sera accueilli avec grand plaisir par la maisonnée, discours tenu par exemple un homme qui vient de sortir de prison ou un manœuvre qui travaille toute la journée sur des chantiers. Il le fait selon le protocole, en donnant sa business card, en précisant à chaque fois à son interlocuteur, quel que soit celui-ci, qu'il ne faut pas utiliser ce numéro de téléphone, trop ancien, mais celui-là.

Il prétend être toujours accompagné d'Harvey, qui serait un lapin blanc d'un mètre 90, à qui il offre le deuxième martini et avec lequel il discute depuis l'enfance. Harvey serait un pooka, créature qui est ce que l'on veut.

Sa sœur décide de le faire interner. S'en suivent des péripéties, des scènes burlesques et touchantes, des drames et des affrontements. Le personnage et son double les traversent avec grâce et une grande amabilité.

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De ce film magnifique, l'on peut avoir une vision sociologique, puisque les autres personnages stigmatisent le comportement du personnage, estimant qu'il doit être mis hors de la société grâce à un internement d'office car il boit trop de martinis et fréquente des personnes qui ne sont pas de la bonne soirée, comme des ouvriers du bâtiment, ce qui est présentée par sa sœur comme une preuve incontestable de folie.

L'on peut en avoir aussi une vision philosophique, puisque le personnage accepte toujours de discuter avec quiconque, notamment avec les médecins, puisqu'il raconte que sa mère lui expliqua quand il était petit que l'on pouvait être à la fois intelligent et aimable mais que s'il fallait choisir alors il convenait être aimable et paraître imbécile. Il avait choisi de suivre ce sage conseil de sa mère, dont il gardait ainsi le souvenir.

L'on peut en avoir encore une vision psychologique, le film projetant sur les murs l'ombre du lapin protecteur et aimable, ne laissant pas boire en solitaire, double de soi-même. Le lapin est d'ailleurs également vu par la sœur du personnage, endeuillée comme lui, tandis que les uns après les autres, le directeur de l'asile psychiatrique recherche la compagnie de la projection qui lui permet d'exprimer son désir de partir ailleurs, le personnage l'aidant à formuler cela, comme celui-ci aide tous ceux qu'il croise à trouver leur chemin, finit par le trouver, tandis que l'infirmier cherchant la définition du pooka dans le dictionnaire trouve une description dans un texte écrit qui se met à s'adresser directement à lui.

Quel beau film. Chacun se dit : il suffit donc de s'arrêter un instant et je rencontrerai ce grand sage qui me donnera le savoir et je trouverai mon chemin vers la vie heureuse.

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Mais privilégions une vision juridique de ce film extraordinaire.

Il s'agit d'une famille qui veut faire internet un de ses membres, contre la volonté de celui-ci.

Pour cela, la sœur trouve des preuves, qui sont simplement ce qu'elle considère son excentricité, qui nuit à l'entrée de sa propre fille dans le monde. Mais avant tout, elle demande à un grand "ami de la famille" : un "Juge", qui va rédiger le document pour ce faire. Celui-ci est tout prêt à le faire.

Les rebondissements font que c'est elle qui est internée, plongée dans un bain glacé, forcée de prendre des médicaments destinés à l'assommer, n'arrivant à s'en sortir que grâce au personnage principal qui prend toujours soin de tous. C'est donc celui qu'elle voulait faire interner abusivement qui la sauve de l'internement abusifs.

Dès son retour à la maison, elle décide de faire un procès au directeur de l'établissement médical et à ses médicaux, et appelle pour cela ce même personnage du "juge". Il faut donc comprendre que dans ce conte juge et avocat sont les deux faces d'une même idée qu'est le Droit. Puisque le juge à la fois conseille, explique la règle, défend, poursuit et condamne. Quand on disserte sur le non-cumul des fonctions, repensons à ce film. 

Pour éviter la faillite de l'établissement médical qui peut s'en suivre, les médecins, qui maintenant considèrent que la sœur est la folle et le personnage principal celui qui est la personne saine d'esprit, font mille grâce à celui-ci pour le séduire et le convaincre du bien-fondé de leurs actions, lui proposant des cadeaux, tandis que celui-ci continue de leur donner sa carte de visite et de leur inviter à un "dîner informel".

Tout juriste au fait du Droit des internements abusifs regardera plusieurs fois Harvey, histoire qui, elle finit bien, le ton de la comédie doit être préservé, sans qu'il soit besoin qu'un Législateur n'intervienne pour établir une loi anti-cadeaux ou conférer des droits spécifiques aux personnes victimes de telles situations.

Non dans les films il n'est pas besoin de Droit. Depardon n'a pas encore donné à avoir son terrible documentaire sur la façon dont le Droit sur les internements d'office est appliqué : 12 jours

On va juste voir en famille un film si amusant : Harvey.

 

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12 mars 2023

droit illustré

Le Droit se prête si bien au cinéma au travers de ces deux personnages spectaculaires que sont le juge et l'avocat, et leur sorte d'accessoire sans lesquels ils n'existeraient pas que sont le coupable, l'innocent, la victime, le voleur, etc. Des branches du Droit!footnote-2827, le pénal y est le plus chatoyant et l'on retrouve peu de notaires ou de tous les autres personnages que l'étudiant en Droit apprend à connaître.

Et précisément les professeurs de Droit qui enseignent cette immense matière sont presque absents des films. Le peu qu'ils y sont représentés est donc d'autant plus précieux.

Ainsi le film Just Causesorti en 1995, met en scène comme personnage principal, interprété par Sean Connery, Paul Amstrong, dans une histoire à rebondissements autour d'un jeune homme noir qui attend son exécution après sa condamnation pour avoir assassiner une petite fille atrocement, ce qu'il nie.

Sa grand-mère vient à une conférence où le professeur défend une position par principe hostile à la peine de mort, soulignant ce qu'il estime être la barbarie de l'électrocution, le nombre d'innocents exécutés et le pourcentage de noirs victimes d'erreurs judiciaires, débattant avec un collègue qui défend la peine de mort au nom des victimes ayant subi des atrocités.

L'on ne le revoit plus dans cette activité-là, où son titre de "professeur" lui est toujours donné, puisqu'il accepte le cas et commence alors pour lui une série d'aventures et de mésaventures.

Mais la représentation du professeur de droit est la suivante :

1. L'on comprend par la suite qu'il exerce à Harvard, qu'il a jadis aussi pratiqué, mais que depuis 25 ans il ne le fait plus. Il veut d'ailleurs refuser de prendre le cas car il considère qu'il ne "connait plus la réalité".

2. L'opposition est toujours faite entre lui, si savant dans les livres (qu'il se garde de citer) mais si ignorant des faits, en général et en particulier, le cas s'étant déroulé dans une petite ville du Sud des Etats-Unis.

 

L'on retrouve dans ce film l'idée commune que les professeurs de droit sont des sortes d'ânes savants, inaptes à comprendre vraiment ce qu'est la vie, par exemple qui sont les meurtriers et qui sont les victimes, qualifications pour lesquelles du sens commun est préférable (incarné par une institutrice) mais dont il est dépourvu, de par sa science juridique et de par sa classe sociale.

 

L'on retrouve ici sous ce personnage du "professeur de droit" la question du savant, ici le savant en droit, à comprendre les situations, à les reconstituer et à les qualifier, l'idée - fortement américaine - semblant être que l'enfermement dans un amphithéatre, ne sortant que pour faire des conférences tranchées, ne rendant peu apte.

1

Voir cependant à propos du Droit de la famille, M.-A. Frison-Roche, ...,

30 septembre 2022

Compliance : sur le vif

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► Référence complète : M.-A. Frison-Roche, "Youporn. La question est : comment appliquer les textes ? Pour arriver à quelque chose", Newsletter MAFR Law, Compliance, Regulation, 30 septembre 2022.

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Dans l'actualité, l'on peut suivre deux évènements qui ont trait à l'efficacité des législations, mise en question sur un même objet industriel : la pornographie.

Le premier événement est ponctuel : l'on peut lire le rapport du Sénat sur l'industrie pornographique, publié en septembre 2022, Porno : l'enfer du décor, bon titre, moins austère que les titres des classiques rapports parlementaires, rapport très documenté et très engagé, qui dresse un constat terrifiant de l'industrie pornographique et demande une action immédiate, de tous. Notamment le rapport demande à ce que "enfin" (le "enfin" est dans le titrage du bloc de recommandations à ce propos) l'interdiction d'accès des mineurs aux prestations pornographiques soit effective.

Le second événement se déroule dans le temps : l'on peut suivre l'action des Autorités de supervision et judiciaires à l'encontre de sites pornographiques pour obtenir que ceux-ci contrôlent effectivement l'âge des internautes qui accèdent aux sites et ne contentent pas d'une déclaration de ceux-ci, cliquant sur le bouton affirmant qu'ils sont majeurs.

Il s'agit donc bien du même objet.

I. UN CONSTAT FAIT ET REFAIT : UNE DIFFICULTÉ EXTREME DE MISE EN OEUVRE

Le phénomène de la pornographie a fait l'objet de multiples études, issues de diverses disciplines.

On s'accorde à admettre que dans sa pratique les conditions de son exercice sont d'une part le plus souvent atroces pour les personnes qui y sont enrôlées, et sont d'autre part dommageables pour les spectateurs, de plus en plus souvent des enfants, pornographie et violence s'alimentant.

Contre cela, les institutions publiques peinent, le rapport rappelant les chiffres accablants de l'échec des politiques publiques au secours des personnes dites "actrices", aussi bien qu'à l'égard des spectateurs, puisque tout le monde "consent", les relais d'éducation (parents, écoles, médias) fonctionnant mal.

Le rapport du Sénat demande donc une mobilisation de l'Etat, comme dans une guerre contre un fléau, une politique d'éducation tous azimuts, des parents actifs, une politique publique d'ensemble pour veiller à ce que ces excès, qui sont en réalité l'ordinaire, soient le plus possibles détectés et prévenus.

Revenons d'une façon plus modeste à l'état du Droit positif, exposé clairement dans le rapport et qu'il ne s'agit pas de remettre en cause dans ses principes.

 

II. L'ETAT DU DROIT : LA LICÉITE ET DE PRINCIPE ET L'INTERDICTION PÉNALE DE L'ACCES AUX MINEURS : UN PROBLEME EX ANTE DE RÉGULATION DU NUMÉRIQUE

L'état du Droit est clair. La pornographie est licite. De la même façon que la prostitution est licite.

L'on peut en penser ce que l'on veut et en débattre, et de l'un et de l'autre (car la pornographie est de fait liée à la prostitution comme elle est liée à la violence) mais en l'état du Droit positif il s'agit d'une activité licite.

Le Droit pénal interdit certaines pratiques, soit d'une façon générale qui peuvent plus particulièrement se retrouver dans la pornographie, comme certains types de violences, comme la torture, soit d'une façon spécifique.

C'est à ce titre que d'une façon très précise le Code pénal, dans son article 227-24, réécrit en 2020 pour l'adopter à l'espace numérique, non seulement interdit pénalement l'accès des mineurs aux sites pornographiques mais obligent les sites à contrôler effectivement l'âge des internautes.

L'on peut en penser ce que l'on veut et en débattre mais c'est l'état du Droit positif.

Le Droit dans sa construction n'est pas remis en cause : tout est question de mise en oeuvre. Non seulement l'industrie pornographique explose, faisant désormais partie de la vie quotidienne, mais les dispositions pénales de contrôle de l'âge n'ont pas d'effectivité.

C'est donc un enjeu de compliance, à un double titre : en premier lieu, parce qu'en la matière une fois que les enfants ont consommé le mal systémique que constitue la représentation des femmes comme produits à consommer sans modération les sanctions ne sont plus guère le sujet, le sujet relevant donc avant tout de l'Ex Ante, de la prévention et de la détection, donc d'outils de Compliance ; en deuxième lieu, parce qu'il s'agit d'une industrie qui prospère désormais sur des plateformes, plateformes numériques sur lesquelles l'Autorité de régulation qu'est l'Arcom doit exercer effectivement son pouvoir de supervision, pour que l'espace numérique soit "civilisé", la question de la pornographie rejoignant alors la question de la haine ou de la désinformation dans l'espace virtuel, lesquels reposent sur l'action des opérateurs eux-mêmes, en interaction avec le Régulateur.

🔴mafrSe tenir bien dans l'espace numérique, 2020.

Ici, concernant la pornographie, le Législateur d'une part, le régulateur et le juge d'autre part, ne réagissent pas de la même façon. Mais tous se soucient de l'effectivité du texte, ce qui est effectivement le seul sujet, sauf à se détester tous les uns les autres.

III LA DEMANDE DU LÉGISLATEUR: ACCROITRE LES POUVOIRS DE SANCTION ET L'ÉDUCATION

Dans le rapport du Sénat, le bloc de recommandations sur cette question a pour titre : Appliquer enfin la loi sur interdiction d'accès des mineurs et protéger la jeunesse.

Les recommandations qui en découlent sont les suivantes :

Recommandation n° 11 : Assermenter les agents de l’Arcom afin de leur permettre de constater eux-mêmes les infractions des sites pornographiques accessibles aux mineurs. Recommandation n° 12 : Confier à l’Arcom la possibilité de prononcer des sanctions administratives, aux montants dissuasifs, à l’encontre des sites pornographiques accessibles aux mineurs. Recommandation n° 13 : Imposer aux sites pornographiques l’affichage d’un écran noir tant que l’âge de l’internaute n’a pas été vérifié. Recommandation n° 14 : Définir, dans les lignes directrices de l’Arcom, des critères exigeants d’évaluation des solutions techniques de vérification de l’âge. Recommandation n° 15 : Imposer le développement de dispositifs de vérification d’âge ayant vocation à servir d’intermédiaire entre l’internaute et les sites consultés, avec un système de double anonymat comme proposé par le PEReN et la CNIL. Recommandation n° 16 : Établir un processus de certification et d’évaluation indépendant des dispositifs de vérification d’âge. Recommandation n° 17 : Activer par défaut le contrôle parental, lorsqu’un abonnement téléphonique est souscrit pour l’usage d’un mineur. Recommandation n° 18 : Mener une campagne de communication autour des dispositifs de contrôle parental.

N'accordant pas crédit à l'autorégulation et à l'éthique des plateformes qui sont des "tubes" à contenus pornographiques qui déversent sur la population des flots d'images de ce type à partir de localisations consistant des paradis réglementaires, le Sénat propose plutôt de donner plus de force juridique au Régulateur et aux parents.

L'on retrouve tous les mécanismes déjà déployés en Régulation bancaire et financière, secteur où les outils de la Compliance sont le plus achevés et dans lequel l'on puise car il constitue le modèle pour l'instant le plus achevé.

La difficulté est sans doute que l'effet réputationnel, qui joue très fortement sur les opérateurs bancaires, a peu d'emprise sur les entreprises qui gère les sites pornographiques. C'est donc vers la contrainte que l'on se tourne : puissance des agents de l'autorité, pouvoir de sanction, écran noir. L'on sait que la faiblesse d'un législateur se mesure aussi au fait qu'il augmente les pouvoirs et la répression sur le papier. Mais la critique est aisée et il est difficile pour le Législateur d'en rester au constat et armer un Régulateur est toujours bienvenu car à l'heure où le contrôle des contenus par les opérateurs numériques, supervisés par le régulateur public, est le principe du Digital Services Act , il serait paradoxal que cette catégorie de sites, légaux mais systémiquement dommageables, ne soient pas dans cette logique générale.

Or, cette logique générale implique par ailleurs une collaboration active entre le Régulateur et le Juge.

Celle-ci permet que l'on passe d'un Droit, notamment pénal, qui soit non seulement "effectif", mais qui soit "efficace", c'est-à-dire qui soit non seulement appliqué mais encore produise les effets pour l'obtention desquels il a été adopté.

C'est ce qui est en cours.

 

IV. L'ACTION EN COURS DU REGULATEUR ET DU JUGE : TROUVER LE DISPOSITIF TECHNIQUE ADEQUAT

Il y a plusieurs mois, le président de l'Arcom a fait des injonctions, très motivées, à des sites à contenus pornographiques pour qu'ils respectent le Droit pénal et contrôlent l'âge des internautes qui accèdent à leur site, faute de quoi, en application des textes, le juge judiciaire sera saisi.

Par exemple dans sa décision du 7 avril 2022, le président a fait injonction à la société gérant le site youporn de respecter la loi, l'Autorité ayant constaté qu'il suffisait à l'internaute de cliquer sur une affirmation de non-minorité, ce qui ne suffit pas pour respecter l'article 227-24 du Code pénal précité en mettant en place des technologies efficaces. 15 jours étaient laissés pour ce faire.

🔴mafr, 💬 L'efficacité de la compliance illustrée par l'affaire Youporn, entretien avec Olivia Dufour, 21 juin 2022.

Les sociétés enjointes ont répondu qu'en fait elles ne possédaient pas la technologie pour y procéder, qu'elles ne savaient pas comment dépasser le système actuel d'autodéclaration par l'internaute de son âge et qu'en droit la loi sur la protection des données personnelles leur interdisait l'usage des technologies efficaces disponibles. Ainsi, la technologie les bloque, ce qu'elles regrettent tandis que le Droit bloque le Droit, ce dont elles ne sauraient répondre.

L'injonction de l'Arcom étant infructueuse, car si l'obligation de contrôle de l'âge est une obligation de moyens, cela ne peut justifier une fin de non-recevoir, celle-ci a indiqué par un communiqué du 7 septembre 2022 que le Président de l'Arcom avait saisi le président du Tribunal judiciaire de Paris pour que l'accès à ces sites soit fermé par les soins des fournisseurs d'accès aux internautes relevant du Droit applicable.

Le Régulateur demande donc au Juge, pour ces sites et les sites-miroirs qu'ils fabriqueraient que ceux-ci ne soient plus accessibles à partir du territoire français ou par leurs adresses situées sur le territoire, que les internautes soient automatiquement redirigés vers une page d’information expliquant la raison de ce blocage.

Le Juge judiciaire n'a pas rejeté la demande de l'Arcom, mais n'a pas non plus pour l'instant condamné les sites à subir une telle mise en place.

On peut penser qu'il l'a fait car il ne suffit pas de dire que l'on ne sait pas faire pour se soustraire au Droit pénal, mais s'il n'a pas condamné immédiatement les plateformes c'est aussi parce que l'allégation des défendeurs était "vraisemblable" : il est vrai que technologiquement le contrôle de l'âge pose difficulté, le Droit de la Compliance pouvant obliger des opérateurs cruciaux à inventer des technologies adéquates mais cela est sans doute difficile à mettre en place, demande peut-être du temps, tandis que le droit des données à caractère personnel est lui-aussi protégé par le Droit de la Compliance.

Le Juge judiciaire n'a pas pour autant rien fait, renvoyant tout le monde car quand il est saisi, il doit trouver une solution, surtout s'il partage le souci de l'effectivité des textes.

Par une décision du 6 septembre 2022, le Juge judiciaire a ordonné une rencontre de tous dans la perspective de médiation. Ce n'est pas donner tort au Régulateur, ce n'est pas donner tort aux sites.

En effet, lorsqu'il est possible que tous aient raison en ce qui les concerne : lorsque la question est une question de fait, parce que l'enjeu est avant l'application en fait des textes pour l'instant peu appliqués, qui pourraient l'être si l'on trouve de fait des technologies qui n'entravent pas une activité licite mais qui rendent effectifs et efficaces des textes qui ne doivent pas rester lettre morte, dans un monde ici entièrement numérique, la solution d'une discussion est une voie qui peut être fructueuse.

Compliance et Médiation, en raison de la technicité et de l'ampleur systémique des cas, est une perspective heureuse, car le Droit est un art pratique et que, tout particulièrement en Droit de la Compliance, l'efficacité des textes par des mesures Ex Ante, ici les technologies, est un souci premier, l'ensemble devant toujours se dérouler non seulement en conformité mais dans le respect au sens le plus fort du terme de l'Autorité de Régulation, du Juge et de la Loi pénale.

 

1 septembre 2022

Base Documentaire : Doctrine

 Référence complète : R.-O. Maistre, "Quels buts fondamentaux pour le régulateur dans un paysage audiovisuel et numérique en pleine mutation ?", in M.-A. Frison-Roche (dir.), Les Buts Monumentaux de la Compliance, coll. "Régulations & Compliance", Journal of Regulation & Compliance (JoRC) et Dalloz, 2022, p.47-54.

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📕consulter une présentation générale de l'ouvrage, Les Buts Monumentaux de la Compliance, dans lequel cet article est publié

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🎥lire la présentation de l'entretien mené entre Marie-Anne Frison-Roche et Roch-Olivier Maistre à partir de cet article en décembre 2023 

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► Résumé de l'article (fait par le Journal of Regulation & Compliance) :  Depuis la loi de 1982 qui a mis fin au monopole d'État sur l'audiovisuel, le paysage a profondément évolué et s'est diversifié. Au regard de la multitude d'acteurs qui y sont désormais implantés, l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom) doit veiller à l'équilibre économique du secteur et au respect du pluralisme, dans l’intérêt des publics. Les responsabilités sociétales croissantes des médias audiovisuels et des nouveaux acteurs numériques ont multiplié les "Buts monumentaux" sur lesquels l'Arcom  veille.

Ses compétences se sont progressivement étendues à la sphère numérique et les lois successives concernant ses missions visent de nouveaux objectifs, notamment en matière de protection des mineurs, de lutte contre la haine en ligne ou contre la désinformation. L'émergence d'un nouveau modèle européen de régulation permet de donner corps à ces buts supplémentaires, le régulateur adoptant une perspective systémique et faisant appel à des outils de droit souple pour remplir ses nouvelles missions.  

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19 juin 2022

droit illustré

► Référence complète : Frison-Roche, M.-A., Phil Spector : Avant tout une fiction ..., qui raconte par les noms et dates précises la préparation du procès de Phil Spector, 2022

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Qui connait l'histoire et l'industrie de la musique connait Phil Spector, celui qui dans les années 60 fut le plus grand producteur de disques, innova, lança et gagna des fortunes. Puis, il disparut parce que dans un système qui se nourrit de modes l'on disparait aussi ; il resta avec ses souvenirs et son argent. C'est plutôt sous l'angle d'un procès retentissant que les médias lui redonnèrent la couverture, puisqu'il fut poursuivi pour le meurtre d'une actrice. Proclamant d'une façon spectaculaire son innocence, il fût reconnu coupable par le jury et finit sa vie en prison. Lorsqu'il mourut en 2021 en prison à plus de 80 ans, ruiné et seul, la presse titra ainsi : "savez-vous que Phil Spector a été interprété au cinéma par Al Pacino ?". 

Car dans l'autre monde qu'est non plus le monde des amateurs de musique mais le monde des amateurs de cinéma, de Phil Spector, l'on n'avait pas entendu parler. Ainsi du film qui sortit en 2013, qui retrace semble-t-il pas à pas les quelques jours précédant sa comparution devant le tribunal, ceux qui admirent celui qui est qualifié de "légende" n'ont pas entendu parlé. Et sans doute les cinéphiles ne connaissent pas cette personne. 

Il faut dire que le film débute par cet avertissement : "ce film est une pure fiction qui n'a aucun rapport avec des faits qui se seraient déroulés". Et pourtant le titre même du film est : Phil Spector , c'est-à-dire un titre réduit à l'identification de la personne, pour que nul ne s'y trompe. Les noms sont exacts, les dates aussi, les faits allégués sont reproduits, les lieux également. Les perruques qu'il portait, notamment celle qu'il choisit, ainsi que l'habit, au bouton près, de mettre pour le jour où le procès s'ouvrit.

Pourquoi avoir fait cela ?

Sans doute pour ne pas avoir d'ennui, dans une affaire où la personne concernée fut condamnée pour un meurtre alors qu'il affirmait avoir été témoin d'un suicide. En effet, des personnes avaient par exemple menacé Helen Mirren de s'opposer à l'attribution de toute récompense pour jouer dans un film pour présenter d'une "façon sympathique" un personnage diabolique... L'avantage d'une fiction est qu'on rend moins de compte des personnages qui ne vivraient que sur l'écran....

Pour pouvoir aussi ajouter autant de scènes que l'on veut où le personnage, désormais "de fiction" que serait ce Phil Spector qui n'aurait donc aucun compte à rendre à Phil Spector, peut apparaître dans toute sa démesure et sa rage, notamment contre la justice et la société.

Cela permet au spectateur de voir tout le travail de l'avocate, Linda Kenney Baden, interprétée par Helen Mirren :

L'on peut par exemple y voir les cross-examinations simulés par lesquelles l'avocat prépare le client ou bien, à l'intérieur même du cabinet, la façon dont à tour de rôle les avocats endossent la thèse de l'adversaire. 

Dans toutes ces scènes qui furent, dans la "réalité", si théâtrales dans ce procès hors-normes autour d'une personnalité hors-norme, prévenir dans ce film présenté par tous comme une biographie que tout cela ne serait que "fiction" nous montre en tant cas les effets de miroir qu'il existe toujours entre les procès et les films autour de la réalité et le récit qui en est fait.

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16 juin 2022

droit illustré

 

► Référence complète : M.-A. Frison-Roche., "Archétypes de l'avocat dessinés par Coppola dans𝑻𝒉𝒆 𝒓𝒂𝒊𝒏𝒎𝒂𝒌𝒆𝒓", 2022.

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Les films peuvent décrire la réalité à travers des archétypes. C'est ce cas dans The rainmaker (L'idéaliste dans sa version française), film de Francis Ford Coppola, sorti en 1997.

Dans ce film relatant un procès entre une assurée contre sa compagnie d'assurance ayant refusé en premier lieu de prendre en charge une opération coûteuse qui aurait pu, selon elle, sauvé la vie de son fils, puis ayant refusé en second lieu de reconnaître qu'il y avait lieu à réparation pour cela, deux avocats s'affrontent dans le procès en responsabilité civile qui s'en suit, le fils étant décédé et 10 millions de dommages et intérêts ayant été demandés : l'avocat de l'assurée (joué par Matt Damon) est pauvre, seul, inexpérimenté, assez peu savant en droit et imprégné du seul de la justice ; l'avocat de la compagnie d'assurances (joué pa Jon Voight) est riche, au cœur d'une équipe, expérimenté, très savant en droit et avant tout maître des règles de droit.

Comme on s'en doute, beaucoup de films américains étaient construits sur cette trame, le jury donnera satisfaction à la demanderesse, les dommages et intérêts punitifs montant à 50 millions, tandis qu'une série de class action s'annoncent et que l'entreprise se met sous le bénéfice du Chapter 11.

Dans la réalité, les avocats ne correspondent sans doute ni à l'un ni l'autre. D'ailleurs à la fin du film le héros parfait se demande si, ou quand, il deviendra le méchant... En effet, Coppola a adressé plutôt deux archétypes : car l'avocat doit certes avoir le sens de la justice mais c'est avec des règles juridiques techniques qu'il le fait. Il doit défendre selon qui a raison, mais il doit aussi défendre celui qui a tort. Il doit défendre pour rien celui qui n'a pas d'argent, mais il doit bâtir une entreprise.

D'ailleurs à la fin du film le jeune homme se demande si, ou quand, il deviendra l'autre. En effet, Coppola ne décrit jamais qu'un seul personnage, en grossissant et en séparant ses traits et ses tensions : l'avocat.

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27 avril 2021

droit illustré

Des universitaires ont fait une étude sur la façon dont les personnes qui travaillent dans des banques d'affaire se tuent au travail.

La mort d'un stagiaire de 21 ans, ayant travaillé trois jours sans dormir, dans la banque Goldman Sachs, les témoignages des jeunes expliquant qu'ils travaillent sans discontinuer, a sans doute contribué à des témoignages, relayés dans la presse, spécialisée ou généraliste, mais également des études universitaires.

En effet, deux universitaires ont publié une recherche non plus sur les règles applicables au sein des banques d'affaires, lesquelles ont pris des mesures pour contraindre leurs employés et leurs stagiaires (puisque la victime était stagiaire) à se reposer le dimanche mais sur les trajets à partir des données accessibles par les compagnies de taxis.

Il en résulte que la réaction des personnes n'a pas été de se reposer : elle a été d'accroître le temps quotidien de travail, de partir encore plus tard après la tombée de la nuit.

La recherche montre que ce phénomène s'accroît pendant l'été, c'est-à-dire précisément lorsque les personnes qui travaillent sont davantage des stagiaires, c'est-à-dire ceux qui veulent "faire leurs preuves" : Comme les auteurs le disent : "Cette analyse, menée avec mon ex-collègue de doctorat de la Aalto University School of Business (Finlande), montre que, lorsque les banques ont mis en place des politiques de travail sans samedi, cela a incité les employés à travailler tard le soir en semaine pour compenser. Ces résultats sont plus marqués pendant les semaines de stages d’été, lorsque les banques d’investissement emploient un grand nombre d’étudiants désireux de faire leurs preuves en travaillant dur.".

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Reprenons la série Industry .

Un expert a montré tous les points sur lesquels elle ne correspond pas à la "réalité", sur tel ou tel point. 

Le cinéma est la réalité-même pas dans la reconstitution de tel ou tel point, il la reproduit en jetant sur l'écran ce qui est l'idée qui se meut dans les faits.

Cette série débute par la mort d'un trader, mort de travail.

Elle raconte exactement la vie, comment la qualifier..., disons "la vie de dingue" de ceux qui travaillent là.

C'est à peine supportable à regarder.

Elle est en tout cas exactement la mise en image de ce que disent ces deux universitaires. 

 

 

21 avril 2021

Publications

Référence complète : Frison-Roche, M.-A., Questionnaire de Proust, in Droit & Littérature, n°5, p.37-38, Lextenso, 2021.

Le thème retenu pour ce volume annuel est Proust

 

Lire. 

 

Sa trace sur LinkedIn. 

 

 

Mise à jour : 6 février 2021 (Rédaction initiale : 17 décembre 2020 )

Conférences

Référence : Frison-Roche, M.-A., Personnage du "Juge Unique" dans le procès pour s'amuser Procès de Denis Mazeaud. 

Initiative des étudiants de Denis Mazeaud et plus particulièrement de l'Association Les As d'Assas. 

Il faut bien se mettre à 6 ou 7, pour tenter de mettre en difficulté l'As des As qu'est Denis Mazeaud...

L'ensemble des mises en accusation par les uns et les autres puis contre chaque réquisitoire la défense par Denis Mazeaud de Denis Mazeaud (qui n'a pas voulu d'avocat) a lieu de 16h30 à 17h15.

Membres de la Cour, avant que l'accusé - qui ne connaissait rien de son dossier ni des juges qui lui avaient été préparés - rien :

Marie-Anne Frison-Roche, présidente et juge unique

Jean-Sébastien Borghetti, professeur à Paris 2

Pierre Seydoux, directeur honoraire du Recueil Dalloz

 

 

Lire plus d'informations sur le site de l'Association. 

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Dans un procès pour rire contre Denis, que chacun des accusateurs prit soin de peindre en noir pour qu'il en voit de toutes les couleurs afin de mieux rayonner comme il me mérite, ma place était la plus facile.

Etant juge, et juge unique (juge unique, juge inique), j'ai pu encore plus le traiter mal, sans plus de ménagement que les autres.

J'ai pu ainsi rappelé afin que nul n'ignore ses méfaits que lors du concours d'agrégation que nous passâmes ensemble, concurrents donc, il y avait un troisième candidat (hors de la cause ici, heureusement pour lui..., en la personne de Rémy Cabrillac....), au lieu de suivre la règle implicite de "chacun pour soi et si tu perds je gagne", nous avons tous trois fait à trois la Leçon de 24 heures de chacun. 

C'est ainsi que Denis commit le méfait de m'apporter tous son talent à cette leçon-là, où le théâtre a plus sa place que dans la Leçon de spécialité. L'on raconte qu'à cette leçon-là j'ai eu une note astronomique ... Denis, Denis, quelle idée d'apporter aux concurrents tout son talent ... C'est très mal de ne pas jouer la "loi du marché des idées" ...

D'ailleurs pour sa défense (très faible, vous pourrez en juger), Denis affirma que c'est bien pour ça qu'on l'appelle "Mazeaud" et qu'à la réflexion dans l'effet de couple que nous avions formé alors et continuons à faire, c'est bien "Sado" que je mériterai de porter ...

D'ailleurs cela me rappela que le thème que le hasard avait choisi pour moi, et donc pour nous trois (Denis, Rémy et moi-même) pour tordre le cou à cette leçon de 24h heures était : L'autorité. 

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Regarder le montage video qui en a été fait par les As d'Assas.

 

20 janvier 2021

Aventures de l'Ogre Compliance

► Référence complète : Piana, E. et Utho, P., Henry, Beau Fifi et l'Ogre Compliance, coll. "Les Aventures de l'Ogre Compliance", 2020, The Journal of Regulation & Compliance (JoRC), 2021, 67 p.

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🛒 cette collection est utilisée dans les structures pour diffuser une culture de compliance. Pour plus d'information, contacter le Journal of Regulation & Compliance!footnote-2818

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📚 Cet ouvrage est le premier de la collection créée par Marie-Anne Frison-Roche au sein du Journal of Regulation & Compliance (JoRC)

📘Le livre en anglais est sous presse. 

📙📒 📗Les traductions en espagnol, allemand, portugais et italien sont en cours

📚Les prochains volumes paraitront dans les mois à venir.  L'aventure de l'Epervier Vigilance est sous presse : L'Epervier Vigilance et le pays au nom oublié

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► Présentation de la collection : Sous la direction du professeur Marie-Anne Frison-Roche, le Journal of Regulation & Compliance (JoRC) publie de l’information technique sur le Droit économique, de la Régulation et de la Compliance. Parce que cette matière paraît souvent inaccessible, réservée aux spécialistes, mais aussi très ennuyeuse ! Marie-Anne Frison-Roche lance une collection : Les Aventures de l’Ogre Compliance.

Même un enfant peut y comprendre la lutte contre la corruption, le lancement d’alerte, les conflits d’intérêts, la gouvernance de l’espace digital, la protection de l’environnement, les techniques de règlements des différends. Mais pour cela, il faut affronter le terrible Ogre Compliance… Peut-être Beau Fifi viendra-t-il à l’aide du lecteur de tout âge ?

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► Présentation de l'ouvrage par sa quatrième de couverture :  

Tout le monde a peur de l’Ogre Compliance !

Il est énorme, il crie, il menace et l’on ne comprend rien à ce qu’il dit.

Il arrive ! Il entre et va bientôt enfermer Henry dans une cage !

Peut-être toutes les souris cachées sous le tapis peuvent-elles protéger le petit Henry ?

Henry a très peur. Jusqu’au jour où il rencontre le merveilleux Beau Fifi.

À partir de ce jour-là, Henry ne s’ennuie plus. Il fabriquera des jouets encore plus beaux, il ira se promener à travers le monde.

Mais si, en chemin, Henry rencontre le crapaud doré Corruption, que lui dira-t-il ?

► Les articles publiées :  

au regard de son innovation pédagogique :

📝​lire dans Actu-Juridique "Les aventures de l'ogre Compliance, ou le droit expliqué sous forme de conte"

► au regard de son intimité entre le Droit et la Littérature :

📝 la revue Droit et Littérature a publié dans son numéro 2021 un premier article sur l'idée même de la collection ; un second article paraîtra dans le numéro suivant sur le premier ouvrage. 

 au regard de son apport dans le Droit économique :

Dans sa version anglaise à paraître, l'ouvrage a été nominé en 2021 par la revue Concurrences dans ses Antitrust Compliance Awards au titre de son caractère innovant.    

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🎥 Regarder l'émission "Le Big-Bang du Droit de la Compliance",  présentant la naissance et l'évolution future du Droit de la Compliance à travers les personnages des Aventures de l'Ogre Compliance

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► Quelques réactions personnelles à ce premier ouvrage de la Collection des Aventures de l'Ogre Compliance

💬 "Je me glisse avec discrétion et réagis tout de suite, avant tous les autres, car c'est bien moi qu'il faut croire ! Moi, Crapaud Doré Corruption, je vous assure bien qu'il est tout à fait inutile de lire ce livre ! Il n'a aucun intérêt ! Je vous invite plutôt à boire avec moi, - c'est ma tournée, j''ai plaisir à vous inviter, c'est "free lunch", je vous offre ce que vous voulez, vous m'êtes si sympathique ! - ,  et nous parlerons des tracas de la journée, des moyens simples de les alléger, croyez-moi bien, je suis votre ami. Ne perdez pas votre temps à lire ce bouquin (à quoi ça sert les livres ...), venez donc plutôt me voir ..."

 

Lire quand même ci-dessous d'autres réactions car peut-être ne faut-il pas croire le Crapaud Doré Corruption : 🔻

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anouk.leguillou@mafr.fr   

01.53.59.98.31

3 novembre 2020

droit illustré

Dans un article du 3 novembre du site The Conversationest remis en lumière la valeur de l'exemplaire annoté par le juge qui eût à connaître du cas "The Lady Chatterley's Lover" : les pages de l'ouvrage sont recouverts d'annotations du juge, Mr Lawrence Byrne, qui présida le Tribunal saisi en raison du caractère "obscène" de ce livre.

Comme quoi l'aspect juridique l'emporte sur l'aspect littéraire, c'est le département de Droit et non de Littérature de l'Université de Bristol qui acquit en 2019 "l'exemplaire du juge

Le Tribunal avait été saisi sur le fondement de la loi Obscene Publication Act de 1959.

Cette loi définit  l'obscénité si les effets de la publication, pris dans son ensemble, sont de nature à dépraver ou à corrompre les personnes susceptibles de la lire, la voir ou l'entendre ("its effect, taken as a whole, was such as to tend to deprave and corrupt persons who were likely to read, see or hear it"), ce qui constitue un "publishing offence" et justifie notamment la saisie de la publication, sauf à démontrer l'intérêt public ("public good defence") justifiant la publication “in the interests of science, literature, art or learning, or of other objects of general concern”. 

L'article raconte que dans ce procès, constituant la première application de cette loi, la Couronne affirmait que le livre était "obscène" et appela à la barre un témoin,  tandis que l'éditeur affirmait que la qualité artistique de l'oeuvre excluait toute condamnation, s'appuyant donc sur "the interests of literature" et appela à la barre 35 personnalités, notamment des auteur et des universitaires, pour se prévaloir des mérites littéraires du livre. .Le jury acquitta l'éditeur. 

 

L'Exemplaire du Juge ou l'Exemplaire de l'épouse du Juge ?

Le juge et les jurés peuvent lire le livre (avec interdiction de l'emporter chez eux le soir...) tel que certains purent le lire dès les années 40...

Il apparaît que des exemplaires de l'ouvrage furent distribués au juge et aux jurées et qu'en ce qui concerne l'exemplaire du Juge, c'est l'épouse de celui-ci qui a rédigé les différentes notes manuscrites insérées dans l'ouvrage, le couple travaillant ensemble, à tel point qu'il convient de parler plutôt de "l'exemplaire de Lady Byrne".

Après le procès qui a eu lieu en 1960, la famille du juge Byrne a vendu aux enchères l'exemplaire du Juge en 1993, puis en 2018 à un acheteur américain, ce à quoi le Royaume-Uni s'opposa par un "temporary export deferral", tandis que l'Université de Bristol manifestait son intention d'acquérir l'exemplaire du Juge. 

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21 septembre 2020

droit illustré

Cette illustration d'une question juridique a été publiée dans la Newsletter MAFR - Law, Regulation & Compliance du 21 septembre 2020 sur LinkedIn.

 

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21 septembre 2020

Newsletter MAFR - Law, Compliance, Regulation

Référence complète: Frison-Roche, M.-A., Régulation, Compliance et Cinéma: apprendre à propos de la régulation d'internet grâce à la série "criminels" (​Regulation, Compliance & Cinema: learning about Internet Regulation with the series "Criminals"​), Newsletter MAFR - Law, Compliance, Regulation, 21 septembre 2020

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Résumé de la news: 

L'épisode 3 de la saison 2 de la version britannique de la série "Criminals" met en scène le personnage de Danielle. Danielle est un mère de famille qui a décidé de partir à la recherche de pédophiles agissant sur les réseaux sociaux en vue de les piéger et de révéler au monde leurs agissements. Danielle met en avant l'efficacité de son action contrairement à celle de la police et de la justice qu'elle juge improductive. Dans l'épisode, Danielle est accusé par la police de diffamation. Alors que les policiers tentent d'expliquer à Danielle l'importance d'utiliser une procédure régulière respectueuse de l'Etat de droit visant à prouver ses accusations, celle-ci fait de l'efficacité son seul principe. Selon elle, ses méthodes obtiennent des résultats (contrairement à celles de la police qui respectent les procédures) et ceux qu'elles accusent d'être des pédophiles ne méritent pas de droits à se défendre.

On peut retenir trois leçons de l'histoire de Danielle:

  1. Si le Droit de la Compliance n'était qu'un simple processus d'application mécanique des règles de droit, alors l'Etat de droit n'aurait aucun droit de cité face au principe d'efficacité. Or, si le Droit de la Compliance est défini par ses "buts monumentaux" et que le respect de l'Etat de droit est érigé en "but monumental", alors efficacité et respect de l'Etat de droit deviennent compatibles et congruents. 
  2. L'espace numérique se doit d'être discipliné par des entreprises numériques cruciales supervisées par des autorités publiques, comme c'est le cas en France et en Allemagne pour les discours de haine et les fausses informations. 
  3. Le Droit de la Compliance, et le Droit en règle générale, doivent se montrer pédagogues envers les individus comme Danielle qui ne comprennent pas en quoi leur comportement peut être répréhensible contrairement à ce qu'ils s'imaginent. 

19 août 2020

Newsletter MAFR - Law, Compliance, Regulation

Référence complète: Frison-Roche, M.-A., L'impartialité des régulateurs et le contrôle des contenus: le cas des "Infidèles" (Regulators'​ Impartiality and contents control: "Les infidèles"​ case), Newsletter MAFR - Law, Compliance, Regulation, 19 août 2020

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Pour aller plus loin, lire le chapitre de l'ouvrage Les outils de la Compliance: "La prégnance géographique des outils de la Compliance" ouvert par un chapitre introductif de Jean-Baptiste Racine

 

Résumé de la news

L'impartialité du régulateur est un des principes les plus importants du Droit de la Régulation et de la Compliance. Cependant, cette impartialité peut s'avérer difficile à mettre en oeuvre lorsque l'objet de régulation comporte une forte dimension morale.

En août 2020, diverses associations religieuses ont saisi le Conseil National de Régulation de l'Audiovisuel sénégalais (CNRA) pour demander l'interdiction de la diffusion à la télévision du film "Les infidèles" narrant l'histoire d'une femme mariée aux multiples amants. 

Tout d'abord, le régulateur distingue les séquences pouvant nuire aux identités culturelles et religieuses des séquences choquantes ou pouvant porter atteinte à la dignité de la personne. Ensuite, il demande la suppression des scènes jugées indécentes et obscènes ainsi que les scènes susceptibles de nuire aux différentes identités culturelles et religieuses, interdit la diffusion du film à la télévision avant 22h30, demande la modification de la bande-annonce et enfin requiert l'insertion d'un pictogramme portant l'inscription "interdit au moins de 16 ans" lors de la diffusion. Le CNRA se juge compétent pour réguler le contenu des téléfilms de manière à préserver les identités culturelles au regard de la loi du 4 janvier 2006 fixant sa mission. 

En 2012, une polémique similaire avait entouré, en France, la diffusion d'un film différent mais du même nom. Cependant, l'objet et le contexte étaient très différents puisque le film était diffusé au cinéma et non à la télévision, qu'il présentait des hommes infidèles et non des femmes infidèles, qu'il avait une vocation humoristique et non sociologique, que le régulateur compétent n'était pas un organe administratif mais un organe professionnel et que le pays de diffusion n'était pas le même. Ici, seule l'affiche avait due être modifiée.

Ainsi, une régulation impartiale doit cependant prendre en compte les "identités culturelles locales". 

28 mai 2020

Publications

Référence complète: Frison-Roche, M.-A., L'impossible unicité juridique de la catégorie des "lanceurs d'alertes", in Chacornac, J. (dir.), Lanceurs d'alertes, regards comparatistes, Publications du Centre français de droit comparé, mai 2020, Volume 21, p.13-31. 

 

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Lire la présentation générale de l'ouvrage dans lequel l'article a été publié.

 

Lire le document de travail bilingue ayant servi de base au présent article.

 

Consulter la présentation de la conférence, "Les lanceurs d'alertes : glose", notamment les slides, lors du colloque organisé par la Centre français du droit comparé le 23 novembre 2018 sous la direction de Jérôme Chacornac

 

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Introduction de l'article

"Les lanceurs d'alerte". Voilà bien une expression nouvelle. Qui remporte un plein succès. A peine entendue une fois, on l'entend partout...

Un thème non pas de cours ou de contrôle de connaissances, mais plutôt un sujet de conversation quotidienne. Car c'est chaque jour qu'on nous en parle, en termes plus ou moins gracieux. Par exemple le Président Donald Trump le 1ier octobre 2019 a déclaré à la presse "vouloir interroger" le lanceur d'alerte qui l'aurait illégitimement dénoncé et n'aurait pas, selon lui, le droit de dissimuler son identité, preuve en cela selon lui du caractère mensonger de ses affirmations à son encontre, tandis que l'avocat de celui-ci indique le 6 octobre 2019 qu'il ne parle pas au nom d'un seul lanceur d'alerte ainsi pris à partie mais d'une pluralité de personnes ayant donné des informations à l'encontre du Président des Etats-Unis. Même les scénaristes les plus imaginatifs n'auraient pas écrit des rebondissements aussi brutaux ni  aussi rapides. Spectateurs, on attend le prochain épisode, espérant secrètement l'escalade. 

Et justement si l'on va au cinéma,  c'est encore d'un lanceur d'alerte dont on nous raconte le dévouement et le succès, voire le drame, au bénéfice de la société globale, et notamment de la démocratie, puisque les secrets sont combattus au bénéfice de la vérité. Ainsi, The Secret Man désigne Mark Felt comme le premier lanceur d'alerte. Revenant  vers ce que l'on présente souvent comme étant un média plus "sérieux"!footnote-1391, l'on écoute France-Culture et voilà encore conté le récit  d'une historienne ayant travaillé comme archiviste sur des événements que le pouvoir politique aurait voulu tenir cachés en détruisant éventuellement leurs traces mais que son métier conduisit à conserver : la voilà expressément présentée aux auditeurs studieux comme un "lanceur d'alerte" .... Tandis que la même radio tente de retrouver celui qui pourrait bien être, comme dans une sorte de concours le "premier des lanceurs d'alerte" !footnote-1727?.... Cette réécriture de l’Histoire peut se défendre car finalement que firent d'autre Voltaire pour Calas, ou Zola pour Dreyfus ? 

C'est aussi un sujet de discussion législative puisqu'aux Etats-Unis la loi Dodd-Frank  de 2010 a inséré dans la loi de 1934 qui instaura la Securities & Exchanges Commission un dispositif complet de rétribution et de rémunération des lanceurs d'alerte, tandis qu'après avoir élaboré en 2012 des lignes souples mais directrices à ce propos!footnote-1698, la Commission européenne a le 20 novembre 2018 publié le texte de ce qui deviendra une Directive ayant pour objet de donner un statut européen  unifié au personnage, dans le dispositif progressivement élaboré pour protéger celui qui a été présenté en 2018 comme celui "ne peut pas être puni pour avoir fait ce qui est juste".

En Europe, la Directive  tout d'abord approuvée par une Résolution du Parlement  européen le 16 avril 2019 sur la protection des personnes dénonçant des infractions au Droit de l'Union  puis adoptée le 7 octobre 2019 (Directive du Parlement européen et du Conseil de l'Union européenne sur la protection des personnes qui signalent des violations du droit de l’Union, intitulé différent on le notera, devra être transposée dans les deux prochaines années dans les législations des Etats-Membres. L'objet n'en est pas général, puisque seules les "violations du Droit de l'Union" sont visées mais le personnage du "lanceur d'alerte" quant à lui est plus globalement visé : il est "entier"!footnote-1699.

Bref, le lanceur d'alerte est une vedette!footnote-1390.  Une sorte de personnage historique, couvert de coups et de gloire, allant de Voltaire à Snowden, l'un comme l'autre trouvant à s'incarner sur les écrans!footnote-1681 ....,

Consacré par la loi, qui lui associe un régime juridique de protection à tel point que, tel une tunique de Nessus, c'est ce régime juridique qui va définir le personnage et non l'inverse.  Lorsqu'on lit la loi du 9 décembre 2016 relative à la transparence à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique, dite "Sapin 2", l'on remarque que le Législateur fait grand cas de ce personnage, puisqu'il lui consacre son chapitre II !footnote-1682  : "De la protection des lanceurs d'alerte", et que c'est par sa protection même qu'il lui ouvre formellement et à grands battants la porte du Droit. 

Mais pourquoi un pluriel ? Certes quand on lit les considérants de la Directive communautaire du 7 octobre 2019 sur la protection des lanceurs d'alerte!footnote-1702, il ne s'agit que d'une énumération de tous les sujets à propos desquels il est une bonne idée de les protéger, ce qui incite donc à ne voir dans ce pluriel que l'indice de cette liste non limitative des sujets dont il est de bon aloi qu'on nous alerte, signe de l'absence de définition de qui doit nous alerte. La lecture de la loi française dite "Sapin 2" rend moins sévère mais plus perplexe. En effet, de cette pluralité visée par le titre du chapitre consacré aux "lanceurs d'alerte", il n'est plus question dans la suite de la loi, dans la définition même qui suit, l'article 6 qui ouvre ce chapitre consacré aux "lanceurs d'alerte" offrant au lecteur immédiatement un singulier puisqu'il débute ainsi : "Un!footnote-1684 lanceur d'alerte est une personne ...". Nulle mention de diversité. L'art de l'écriture législatif aurait pourtant même requis que l'article qualificatif ne soit pas seulement singulier mais qu'il ne soit pas encore indéfini. Stendhal s'il avait encore daigné avoir la Loi pour livre de chevet aurait voulu trouver comme début de chapitre une phrase comme : "Le!footnote-1683 lanceur d'alerte est une personne ...".

Ainsi semblent se contredire au sein de la loi "Sapin 2 le titre même qui présente le personnage, en ce qu'il utilise un pluriel défini (les) tandis que l'article de définition qui le présente est au singulier indéfini (un)....

Voilà une première raison pour ne plus avancer que d'une façon très prudente, dans ce "pas à pas" que constitue une lecture au mot à mot : une glose. Celle-ci consiste à prendre au pied de la lettre l'expression-même. La seconde raison de ce choix technique est que la glose convient bien à une introduction d'ouvrage collectif, permettant ainsi à des développements plus ciblés de prendre place dans d'autres contributions, sur les techniques, les difficultés et les limites de cette protection, ou sur l'historique de celle-ci, ou les raisons de la venue dans le Droit français de ces lanceurs d'alerte et la façon dont ils se développent, ou non, ailleurs. 

Je vais donc me contenter de reprendre à la lettre cette expression déjà juridique : Les (I) lanceurs (II) d'alerte (III).