29 septembre 2014
Base Documentaire
Référence complète : Susset, E., De quelques particularités du régime de résolution des groupes transfrontaliers, in Revue de Droit bancaire et financier, LexisNexis, 2014, pp. 106-110.
Les étudiants de Sciences-Po peuvent consulter l'article via le drive dans le dossier " MAFR-Régulation".
29 septembre 2014
Blog
La liberté d'expression est une condition de la société démocratique. C'est pourquoi elle est à la fois un droit de l'homme et un principe constitutionnel. Peu importe que l'opinion ne soit pas "convenable". Il n'en fût pas toujours ainsi et Sade fût emprisonné en raison de ses écrits.
Mais de la même façon, lorsque Jean-Jacques Pauvert, décédé le 27 septembre 2014, publia en 1948 les oeuvres complètes de Sade, que les éditeurs se gardaient de faire, prenant soin d'ôter les passages les plus sulfureux et violents contre les hommes et contre Dieu, Pauvert fût poursuivi et condamné par la justice pénale pour "outrage aux bonnes moeurs".
Dans ce procès qui se déroula à Paris en 1956, André Breton écrivit aux juges pour leur expliquer d'une part que Sade était un moraliste. Était-ce un argument pertinent pour un juge ? D'autre part, il reprit l'argument selon lequel un auteur n'est pas responsable de ceux qui le lisent mal. Est-ce suffisant pour n'être pas responsable ? En troisième part, il insista sur le fait que Pauvert représentait la liberté d'expression. Cela ne suffit pas en première instance, même si le jugement de condamnation fût dans un second temps réformé en appel.
La littérature, qu'incarne aussi André Breton, peut-elle venir à la barre ?
Un procès, comme celui qui se déroula en 1956, aura-t-il lieu aujourd'hui ? Se déroulerait-il de la même façon ?
Enfin, ayons une pensée pour Jean-Jacques Pauvert, grand éditeur, pourchassé pour faire son métier, car il n'y a pas de littérature sans éditeur.
28 septembre 2014
Blog
Qui ne connaît la jurisprudence Baby-Loup ?Sur le moment, chacun s'en est ému, a eu son opinion, a commenté les retournements entre le premier arrêt de la Cour de cassation, l'arrêt de résistance de la Cour d'appel de Paris sur conclusions flambloyantes du Procureur général, l'arrêt contraire et protecteur de la crèche de l'assemblée plénière de la Cour de cassation.Mais aujourd'hui, faute de subventions, la crèche va sans doute fermer. Le conseil municipal de Conflan-Saint-Honorine le dira le 29 mars 2014.
1. Cette fermeture est corrélée au procès. L'association dût changer de commune, en raison de l'affaire. La nouvelle commune n'est pas tenue par les engagements de l'autre.
2. La petite crèche Baby-Loup restera pour toujours célèbre, car dans tous les cours portant sur la laïcité, les étudiants entendront parler d'elle. Elle est entrée au Panthéon du droit.
3. C'est si souvent le cas : Rose Jand'heur et Agnès Blanco , ces deux petites filles d'une dizaine d'années, depuis longtemps disparues ... Savaient-elles, vieilles dames, que leur patronyme, Jand'heur, Blanco, était et serait récité, couché sur des copies, invoqué par les plus grands auteurs ?
A petites filles, grands cas. A petite crèche, grand destin dans le paysage du droit.
26 septembre 2014
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La filiation est un élément fondamental des sociétés.
Il a été démontré en anthropologie que certaines règles étaient fondamentales pour l'équilibre des sociétés. Ainsi en est-il de la prohibition de l'inceste, entre les parents et les enfants, entre les frères et les soeurs.
L'une des raisons pour lesquels le droit prohibe d'une façon absolue les conventions de maternité pour autrui (que certains appellent "G.P.A.") tient au fait que non seulement le bébé est vendu comme une chose, non seulement la mère de celui-ci, la mère qui le porte, est alors une esclave, mais encore tient au fait que si on le permettait, l'on pourrait arriver à valider l'inceste.
Ainsi, lorsque les arrêts du 26 juin 2014 de la CEDH condamnèrent la France pour ne pas prendre en considération le lien entre l'enfant issu d'une "GPA" faite à l'étranger, le professeur de droit Muriel Fabre-Magnan affirma que le droit fondamental de la filiation était si heurté que l'on pouvait craindre dans un choc en retour la levée de la prohibition de l'inceste.
Trois mois après, le conseil d'éthique propose en Allemagne de lever la prohibition juridique de l'inceste entre frère et soeur. Ce n'est pas la solution technique qui est bouleversante, mais la motivation. En effet, le Conseil estime qu'il ne convient pas de sanctionner ainsi deux "adultes consentants" qui s'aiment.
Le consentement serait donc seul maître à bord.
Le marché, qui ne fonctionne que sur l'ajustement des consentements et ne connaît que cela, a gagné pour être le seul modèle de référence. Le marché devient le modèle de la société même.
Qu'en aurait dit Claude Lévi-Strauss ?
25 septembre 2014
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J'écoutais la radio dans le taxi en sortant de mon cours.
Les journalistes parlent sur toutes les ondes ce qui serait un "arrêt" rendu par la Cour de cassation. Celui-ci aurait admis l'efficacité en France de la procréation médicalement assistée (P.M.A.), lorsque l'une des femmes d'un couple lesbien l'a réalisée à l'étranger, sa conjointe voulant procéder par la suite à l'adoption de l'enfant.
Les journalistes affirment que l'arrêt est justifié par "l'intérêt supérieur de l'enfant" et qu'il "tire les conséquences de la loi du 17 mai 2013". Les journalistes expliquent que l'arrêt est conforme au Code civil et aux engagements internationaux de la France.
Cela suffit à écarter la prohibition du droit français de recourir à la P.M.A. par convenance, sans constat d'une stérilité médicalement constatée.
Rentrée à mon bureau, j'écoute les médias sur lesquels l'information repasse en boucle et je vais chercher le document.
Il ne s'agit en rien d'un arrêt, mais de deux avis, que les journalistes n'ont pas lus. En revanche, ils ont lu le "communiqué" que la Cour a diffusé dans toutes les salles de rédaction, qui exprime la philosophie de ce qui est présenté comme une décision. C'est de ce communiqué qu'est tirée cette sorte d' "auto-commentaire" que la Cour fait de ses avis, pourtant si laconiques, selon lequel sa position est conforme au droit interne et international de l'adoption.
En revanche, les deux avis, qui se réduisent à une phrase, ne contiennent aucune discussion et ne développent aucun motivation. Dans l'unique phrase, il est posé : il suffit désormais que le droit de l'adoption soit respecté et que l'intérêt de l'enfant ne soit pas contrarié pour que le non-respect du droit français par la pratique des adultes ne fasse pas obstacle à l'établissement de la filiation de l'enfant.
Par un simple avis, à peine motivé, la Cour anéantit et la loi et sa propre jurisprudence.
Sous l'Ancien Régime, l'on connaissait les arrêts de règlement. Nous connaissons désormais les "avis de règlements".
Lire les avis de la Cour de cassation du 22 septembre 2014
Lire les conclusions de l'avocat général.
23 septembre 2014
Enseignements : Grandes Questions du Droit, Semestre d'Automne 2014
Le droit constitutionnel fût longtemps considéré, et l'est encore parfois, comme une branche du droit public. Aujourd'hui, il est au coeur du système juridique et irradie celui-ci, reflétant par ailleurs la substance du droit international. Dès lors, la Constitution n'est plus tant "en haut" du système juridique, conception formelle du droit, qu'en son "coeur", dans une conception plus substantielle.
Dès lors que la Constitution prend de l'importance, son gardien devient puissant. Plus les contours de la Constitution s'étendent et plus le gardien de la Constitution a de la matière pour exprimer la norme constitutionnelle, qui pose l'équilibre des pouvoirs, les modes d'exercice des pouvoirs et les libertés et droits fondamentaux. Or, le bloc de constitutionnalité n'a cessé d'accroître sa dimension, à travers le préambule de la Constitution de 1958, la Déclaration de 1789 et les Principes Fondamentaux des Lois de la République.
Ainsi, le Conseil constitutionnel, gardien exclusif de la Constitution, a évolué dans son emprise sur la Constitution, notamment par la réforme constitutionnelle du 23 juillet 2008, qui superposa un contrôle a posteriori au contrôle a priori , à travers la Question prioritaire de constitutionnalité (Q.P.C.). En revanche, sa composition n'a pas changé, pas plus que sa façon de rédiger les décisions, ce qui peut poser problème, si l'on finissait par voir dans le Conseil une sorte de "cour suprême".
En outre, au fil du temps, le Conseil constitutionnel a élaboré un corpus de règles et principes constitutionnels. Il a élaboré des principes constitutionnels fondamentaux, qui sont souvent le reflet de principes élaborés par le Conseil d'État, comme le principe d'égalité ou le principe d'impartialité. Il développe de plus en plus des libertés et droits à portée générale, comme le droit de propriété ou la liberté contractuelle.
En cela, le droit constitutionnel participe au mouvement général de subjectivisation du système juridique français, le rapprochant du droit anglo-saxon. En outre, l'État devient de plus en plus un justiciable. Certains y voit dès lors un "gouvernement des juges".
21 septembre 2014
Blog
Spontanément, on répond "oui".
Car quand on regarde sa bibliothèque de droit, composée en grande partie de livres à couverture rouge et de livres à couverture bleue, ceux que l'on manie quand on est étudiant, ce qui forme notre esprit. Or, le Droit constitutionnel est un livre à couverture bleue (collection "Droit public" de Dalloz). Alors, n'allons pas chercher plus loin : le droit constitutionnel appartient au droit public.
Nous avons un autre indice, tout aussi solide. L'Université se compose de professeurs de droit public et de professeur de droit privé. A l'agrégation de droit public, le droit constitutionnel est au programme. A l'agrégation de droit privé et de sciences criminelles, il ne l'est pas.
Ainsi, pourquoi même poser la question ?
C'est pour ne pas l'avoir posée que le droit français, aveugle sur lui-même, est malhabile à percevoir et à manier le fait que le droit constitutionnel dépasse aujourd'hui très largement le droit public. Parce qu'il a aussi pour objet, peut-être pour coeur, les droits fondamentaux. Par exemple en matière de procédure, notamment de procédure pénale.
Mais celle-ci relève de l'agrégation de droit privé. Pourquoi l'on croyait que le droit constitutionnel était inséré dans le droit public, dont il constituerait une branche.
Ciel ! Faudrait-il recommencer nos études ?
16 septembre 2014
Enseignements : Grandes Questions du Droit, Semestre d'Automne 2014
Le droit n'est pas une technique neutre. Sa valeur tient dans ce qu'il n'est pas disponible à la force, quelle que forme que prenne cette forme, physique, politique ou économique. Mais la première valeur du droit est d'affirmer sa neutralité par rapport à des valeurs qu'il considère comme du cercle des individus, comme l'est aujourd'hui la religion. Ainsi, à la fois l'Etat est laïc, mais il protège dans le même les libertés religieuses.
Dans le même esprit, le droit tout à la fois ne s'immisce pas dans les choix individuels et n'impose pas des convictions aux individus, tandis qu'il assure l'effectivité de la vie privée ou la liberté d'expression, les libertés étant premières par rapport aux droits fondamentaux, mais à un moment cette valeur de neutralité et de tolérance s'arrête devant l'ordre public.
Pourtant, le droit est imprégné de valeurs. Tout d'abord, intrinsèquement, le droit a de la "valeur", non seulement économiquement parlant s'il est "performant", mais également parce qu'il est construit sur des valeurs qui lui sont propres, comme les droits de la défense, le droit au juge, ou d'une façon tautologique, le "droit au droit". Il est aussi perméable à des valeurs extrinsèques, comme des valeurs morales, des valeurs sociales, des valeurs économiques.
L'évolution de notre société fait que l'on semble prôner le relativisme des premières, la considération des deuxièmes et la suprématie des troisièmes.
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