DAVID, Marion🕴️
► Référence complète : M. David, "Combinaison des CRPC et des CJIP : le cas particulier des affaires de fraude fiscale", in M.-A. Frison-Roche & M. Boissavy (dir.), Compliance et Droits de la défense - Enquête interne, CIIP, CRPC, Journal of Regulation & Compliance (JoRC) et Dalloz, coll. "Régulations & Compliance", à paraître.
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📕consulter une présentation générale de l'ouvrage, Compliance et Droits de la défense. Enquête interne - CJIP - CRPC, dans lequel cet article est publié
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► Résumé de l'article (fait par le Journal of Regulation & Compliance - JoRC) : L'auteure rappelle que le recours à la CJIP ou à la CRPC n'est possible à propos des faits de fraude fiscale que depuis une loi de 2018 et que l'une et l'autre sont très utilisées, recours encouragé par les pouvoirs publics.
La CRPC est plutôt utilisée pour les cas simples de fraudes commises par des personnes physiques, tandis que la CJIP concerne davantage des cas complexes renvoyant à des schémas mis au point par des entreprises, soit pour elles-mêmes, soit pour des tiers (les banques et les gestionnaires de fond étant ici directement concernées). Cette complexité justifie d'ailleurs souvent que l'enquête pénale soit menée parallèlement à la négociation de la CJIP.
Les procédures y sont caractéristiques en ce que l'administration fiscale mène elle-aussi une procédure, la personne physique ou morale se voyant appliquer des qualifications qui peuvent être différentes dans deux procédures qui n'ont pas la même temporalité. Si l'administration a déjà rassemblé des éléments d'enquêtes, voire a déjà réalisé un contrôle et éventuellement opéré un redressement avant la transmission du dossier au parquet, ce qui a un effet sur l'enquête pénale au regard des "éléments déjà établis par l'administration fiscale". Réciproquement, lorsque l'enquête préliminaire ou l'information judiciaire s'achèvent, si la procédure fiscale n'est pas achevée, fait l'objet d'un recours ou a donné lieu à une transaction, la même influence s'opère. La dualité des ordres de juridictions complique les mécanismes.
Les enjeux concernent tout d'abord la qualification, puisque la fraude fiscale peut être qualifiée de la même façon par l'administration fiscale et par l'autorité pénale, comme le montre le cas Google, entreprise qui a dans le même temps contesté en 2015 devant le juge administratif le redressement fiscal opéré par l'administration fiscale soutenant devant le juge le caractère bien-fondé de son comportement, et conclu en 2019 avec le Parquet national financier une CJIP pour des faits susceptibles d'être pénalement qualifiés de fraude fiscale. L'auteure en conclut que face à cette différence de raisonnement de l'administration fiscale et des autorités pénales, il convient que celles-ci discutent entre elles, aidées par des avocats maîtrisant et le droit fiscal et le droit pénale.
Les enjeux concernent ensuite le montant et la durée des amendes, notamment l'amende d'intérêt public qui tient compte des "avantages tirés des manquements", ici les impôts éludés. La circulaire du 4 octobre 2021 préconise que la CJIP donne lieu à un règlement global et coordonnées des procédures fiscales et pénales.
L'auteure souligne l'efficacité de la CRPC et la CJIP en matière de fraude fiscale, notamment parce qu'actuellement le recours à ces deux techniques suppose que le contribuable ait payé ses impôts et les redressements dont il a pu être l'objet.
En outre la proportionnalité de l'amende pr est respectée puisque le montant global des sanctions éventuellement prononcées ne dépasse pas le montant le plus élevé de l’une des sanctions encourues. C'est pourquoi l’amende proposée en cas de CRPC tient compte des pénalités encourues au niveau fiscal, généralement 80% des impôts redressés. De la même façon, en matière de CJIP, le plafond d’amende d’intérêt public est déterminé par le montant le plus élevé entre 30% du chiffre d’affaires annuel moyen des trois dernières années et les pénalités de 80%, plafond duquel seront retranchées les pénalités réellement acquittées par l’entreprise.
L'auteure remarque qu'en matière de fraude fiscale la CRPC reste moins favorable que la CJIP, en ce que la CRPC demeure une procédure longue durant laquelle le contribuable n'est pas fixé sur son sort et au terme de laquelle il peut subir des peines complémentaires. La CJIP peut être une bonne solution pour l'entreprise, qui peut parallèlement contester la procédure administrative de redressement ou inciter celle-ci à transiger, l'autorité judicaire jouant ainsi comme le ferait un arbitre entre les deux, poussant l'entreprise à négocier avec l'administration et poussant l'administration à transiger.
La diminution de l'amende de la CJIP pour autodénonciation et en cas de régularisation spontanée auprès de l'administration fiscale favorise l'efficacité du système. La technique fiscale du rescrit rejoint d'ailleurs celle du programme de mise en conformité, l'entreprise s'engageant pour des comportements futurs, dont l'administration fiscale pourrait lui donner acte et lui garantir l'absence de sanction.
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