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► Référence complète : M.-A. Frison-Roche, 🚧Le Contrat, instrument de Compliance : la clause efficacement stipulée engendrant une obligation pour une plateforme de contrôler les contenus : Com., 15 janvier 2025, Société Générale c/ DStorage, document de travail, mars 2025.
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► Résumé du document de travail : L'arrêt du 15 janvier 2025 rendu par la Chambre commerciale, économique et financière de la Cour de cassation , apporte une solution au contrôle des contenus dans l'espace numérique. En effet, il résout ce qui apparaît l'aporie si souvent soulignée, voire revendiquée, à savoir l'impossibilité d'élaborer une technologie efficace de contrôle. Pour ce faire, la Cour s'abstrait des lois applicables et se réfère au contrat monétique passé entre la banque et la plateforme, contenant une clause de vigilance sur les contenus illicite, articulée à une clause de résiliation. Elle estime que cette clause a pleine efficacité. Cette solution, si simple et si forte, peut contribuer très fortement à réguler l'espace numérique, si les banques le veulent, car quelles plateformes peut se passer de services monétiques fiables ?
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Dans son arrêt du 15 janvier 2025, la Chambre commerciale, économique et financière de la Cour de cassation, arrêt de section mais arrêt rendu sous la présidence du Premier Président de la Cour de cassation lui-même, la question posée est celle de l'effectivité du contrôle des contenus publiés dans l'espace numérique.
C'est un sujet majeur de nature politique car si l'on ne parvient pas à contrôler les contenus qui se diffuent dans cet espace dans lequel nous vivons désormais, ce dont les libertariens peuvent se réjouir, l'on peut penser que les droits subjectifs les plus élémentaires, comme le droit à la vie privée ou les droits de propriétés intellectuelles n'existeront plus, et que le système démocratique lui-même est en grand danger, maintenant et à l'avenir.
Mais à supposer que l'on admette que sur le terrain des principes l'on admette que le Principe de Régulation vienne s'articuler avec le Principe de Liberté, ce qui est admis en Droit de l'Union européenne, ce qui est désormais moins acquis en Droit américain, une aporie semble entraver la volonté législative d'obtenir un contrôle des contenus en raison de l'impossibilité technologique d'opérer celle-ci.
En effet, une plateforme met à disposition des contenus librement postés par des internautes et mis à disposition d'autres internautes, la plateforme permettant la rencontre des uns et des autres : de fait des contenus piratés, les offreurs de ceux-ci relevant de systèmes juridiques lointains. Chacun connait l'économie de ce peer-to-peer, qui repose sur la violation des droits de propriété intellectuelle. Sans la violation des droits des auteurs, des éditeurs, des producteurs, cette activité de plateforme n'existerait pas. Les appels des régulateurs à respecter "l'offre légale" sont souvent vains. Les sanctions sont assez peu efficaces, car les personnes concernées sont souvent situées dans des paradis réglementaires et, de nature Ex Post, elles tardent tant à venir.
Mais le talon d'Achille de cette technologie est la grande importance dans le business model de ces plateformes de recourir à un système de paiement par carte bancaire, leur permettant de proposer des services payant d'accès ou correspondant à des prestations complémentaires après un premier accès gratuit. Car les plateformes n'offrent pas ce service par amour de l'Art. Il faut donc que des banques offre un "service monétique" permettant aux consommateurs de payer. Notamment parce que ceux-ci sont soucieux de leur données bancaires, ceux-ci favorisent les techniques de paiement en lignes proposées par des établissements eux-mêmes solides.
Comme la Société Générale. Or, en l'espèce, la Société Générale avait inséré dans le contrat de prestation une clause obligeant la plateforme à contrôler la licéité des contenus échangés. Preuve lui ayant été apportée par les producteurs de contenus de la violation des firmes, la banque a donc résilié le contrat.
La plateforme a saisi les tribunaux en alléguant qu'il s'agit d'une résiliation abusive et en demandant la restauration du service de paiement en ligne, ainsi que l'attribution de dommages et intérêts. La plateforme critique en effet le rejet qui fut fait par la Cour d'appel de sa demande, le pourvoi affirmant qu'on ne peut lui reprocher une faute, justifiant une résiliation que "lorsqu'il s'abstient de mettre en oeuvre des mesures techniques appropriées qu'il est permis d'attendre d'un opérateur normalement diligent dans sa situation pour contrer de manière crédible et efficace les utilisations illicites de ce service". Or, les juges du fond auraient exigé de la plateforme la preuve de la mise en place de mesures techniques pour protéger le droit d'auteur, alors qu'ils avaient relevé la survenance de la résiliation alors que la seule mesure curative légalement attendue de la plateforme pour n'être pas fautive consistait à bloquer l'accès et non pas encore à mettre en place les mesures techniques, selon les termes de la loi "Confiance dans l'Economie numérique".
Mais la Cour de cassation répond par ce qu'il faut considérer comme un attendu de principe : "L'article 6,I, de la loi ... du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique..., n'a ni pour objet ni pour effet de priver les signataires d'un contrat monétique auquel est partie un hébergeur de la faculté de stipuler que celui-ci est tenu à une obligation de surveillance des informations qu'il stocke ou publie, et de sanctionner la méconnaissance de cette obligation par la résiliation du contrat".
Par cet attendu, la Cour écarte l'effet de la loi sur le comportement attendu de la plateforme : il faut mais il suffit qu'une stipulation l'a contrainte à assurer la licéité des contenus qui y circule. L'ampleur de cette stipulation, expressément qualifiée de "stipulation de surveillance" sur toutes les informations que la plateforme "stocke ou publie" et la violence de sa conséquence à savoir la résiliation du contrat, se suffit.
Cela est une parfaite illustration de "L'Obligation de Compliance" dans son mécanisme d' "Obligation sur Obligation vaut". En effet, là où la loi assujettit, le contrat peut reprendre la règle transformant alors l'entreprise, ici la plateforme, en débitrice. La responsabilité à laquelle l'entreprise est exposée est non plus délictuelle mais contractuelle.
🧱𝐦𝐚𝐟𝐫, 📝Obligation sur Obligation vaut, in 𝐦𝐚𝐟𝐫 (dir.), 📕L'obligation de compliance, 2025.
Plus encore, le contrat, notamment par l'autonomie de la volonté des parties, peut choisir d'alourdir les obligations d'une partie. Au point d'aller contre la règle légale de l'irresponsabilité des hébergeurs. Au point d'y attacher une résiliation.
La portée de cet arrêt est très grande et cela explique la présidence de cette formation de section par le Premier Président de la Cour de cassation.
En effet, si tous les contrats monétiques insèrent une telle clause de vigilance renforcée, à laquelle est associée une clause de résiliation, alors la question du contrôle des contenus aura considérablement progressé de fait.
🧱𝐦𝐚𝐟𝐫, 📝La loi, la Compliance, le Contrat et le Juge : place et alliance, 2023.
Elle l'aurait fait d'autant plus que ce qui est efficace pour la lutte contre la violation systémique des droits de propriété intellectuelle l'est également pour la lutte contre l'accès des mineurs à des contenus pornographiques, offerts par des plateformes dans des conditions juridiques, technologiquement et monétiques identiques.
Voilà un parfait exemple de l'alliance entre le Droit de la Compliance, et de sa pointe avancée qu'est la Vigilance, et du Droit des contrats.
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