17 janvier 2024

Base Documentaire : Doctrine

CATHERINE, Olivier🕴️

📝La spécificité des enquêtes internes pratiquées par les groupes internationaux, in 🕴️M.-A. Frison-Roche et 🕴️M. Boissavy (dir.), 📕Compliance et droits de la défense. Enquête interne - CJIP - CRPC

â–ş RĂ©fĂ©rence complète : O. Catherine, "La spĂ©cificitĂ© des enquĂŞtes internes pratiquĂ©es par les groupes internationaux", in M.-A. Frison-Roche et M. Boissavy (dir.), Compliance et droits de la dĂ©fense. EnquĂŞte interne â€“ CJIP – CRPCJournal of Regulation & Compliance (JoRC) et Dalloz, coll. "RĂ©gulations & Compliance" , 2024, p.141-155.

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đź“•consulter une prĂ©sentation gĂ©nĂ©rale de l'ouvrage, Compliance et droits de la dĂ©fense. EnquĂŞte interne â€“ CIIP â€“ CRPC, dans lequel cet article est publiĂ©

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â–ş RĂ©sumĂ© de l'article (fait par le Journal of Regulation & Compliance - JoRC) : l'article a pour objet de dĂ©crire comment se dĂ©roule une enquĂŞte interne lorsqu'elle est diligentĂ©e dans une entreprise de dimension internationale. Les juristes d'entreprise sont particulièrement rompus Ă  le faire, ayant suivi les Ă©volutions des grandes entreprises, mutations qui impliquent la dynamique d'enquĂŞtes internes globales. 

Pour y procéder, le juriste d'entreprise doit non seulement se muer en "enquêteur" mais encore établir préalablement un programme de conformité légitime et robuste, global et intégrant les particularités locales. Ce référentiel ainsi constitué dans un corpus communs de normes vise notamment le système d'alertes et la conduites des enquêtes internes. Ce dispositif, transparent, doit produire de la confiance dans l'ensemble du groupe.

Les enquĂŞtes sont souvent internationales ou se dĂ©roulent souvent Ă  l'Ă©tranger, le particularisme français tenant Ă  la fragilitĂ© du secret des correspondance avec l'avocat et l'absence de confidentialitĂ© des avis juridiques pouvant mettre en difficultĂ© l'entreprise dans la bonne menĂ©e du dispositif, alors mĂŞme que les règles d'imputabilitĂ© de la responsabilitĂ© pĂ©nale s'assouplissent Ă  l'Ă©gard des groupes. 

L'auteur dĂ©crit ensuite la conduite opĂ©rationnelle des enquĂŞtes internes menĂ©es par un groupe international. 

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🦉Cet article est accessible en texte intégral pour les personnes inscrites aux enseignements de la Professeure Marie-Anne Frison-Roche

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  1. La conduite opérationnelle des enquêtes internes

 

  1. Dans un groupe international, les raisons de mener des investigations sérieuses et robustes sont tout autant culturelles que juridiques (A.). L’organisation de l’enquête interne est d’autant plus importante lorsque plusieurs systèmes juridiques et cultures sont impliqués (B.).

 

  1. Des objectifs pluriels

 

  1. Dans une entreprise internationale faisant de l’éthique la clef de voĂ»te de son modèle d’affaires, l’enquĂŞte interne vise avant tout Ă  crĂ©dibiliser le dispositif de conformitĂ© et Ă  inciter les salariĂ©s et les tiers Ă  faire un usage effectif de la ligne d’alerte en cas de soupçons (on parle de « speak up culture Â»).

 

  1. Un autre objectif consiste à sécuriser le travail d’investigation réalisé et ses conclusions en cas de contentieux, notamment de nature prud’homale lorsque des sanctions disciplinaires – souvent des licenciements – sont prononcées.

 

  1. Enfin, il s’agit de prĂ©venir toute critique ou remise en cause par une autoritĂ© de contrĂ´le (ex. : Agence française anticorruption) ou de poursuite (police, parquet, juge d’instruction) qui pourrait se saisir des faits ayant fait l’objet de l’enquĂŞte interne. La rĂ©alisation d’une enquĂŞte interne solide et sĂ©rieuse facilitera d’ailleurs un Ă©ventuel dĂ©nouement par la voie transactionnelle (deferred prosecution agreement - DNA, convention judiciaire d’intĂ©rĂŞt public, ou Ă©quivalent).

 

  1. Une gouvernance essentielle

 

  1. La constitution et le mode de fonctionnement de l’équipe d’enquĂŞte interne vont conditionner la qualitĂ© des diligences accomplies et, partant, du traitement de l’alerte. C’est gĂ©nĂ©ralement le directeur de la conformitĂ© (compliance officer) du groupe qui veille au traitement adĂ©quat des alertes reçues ; il se charge parfois lui-mĂŞme des investigations. Dans la plupart des cas, toutefois, il dĂ©lègue la rĂ©alisation de l’enquĂŞte Ă  une ou plusieurs personnes, gĂ©nĂ©ralement un responsable conformitĂ© ou un juriste local, accompagnĂ© le cas Ă©chĂ©ant par un ou plusieurs spĂ©cialistes (RH, fiscalitĂ©, informatique, etc.) en fonction du sujet visĂ©. Ce sera un moyen de s’assurer du traitement de la situation par des experts familiers des règles, pratiques et langues locales mais aussi d’éviter de trop impliquer la maison-mère et de l’exposer Ă  un risque pĂ©nal ou contentieux (Cf. n°16 et 17 supra).

 

  1. Dans les cas les plus complexes ou en l’absence de compĂ©tences disponibles sur place, un cabinet de consultants ou d’avocats peut ĂŞtre mandatĂ©. Le recours Ă  des avocats locaux permet dans de nombreux pays de disposer des garanties offertes par le secret professionnel, notamment dans les situations les plus sensibles. Les consultants (audit comptable, financier ou fiscal, IT forensic, etc.) sont frĂ©quemment engagĂ©s par l’avocat retenu afin d’étendre le secret professionnel Ă  leurs travaux. Compte tenu de la faiblesse et de la complexitĂ© du secret des correspondances et de l’absence lancinante de confidentialitĂ© accordĂ©e aux juristes d’entreprise en France[13], les conditions de transmission des travaux des conseils Ă©trangers au siège français doivent faire l’objet d’un traitement appropriĂ© : les pièces sensibles sont parfois traitĂ©es et conservĂ©es localement, au bĂ©nĂ©fice des juristes et avocats Ă©trangers... et donc au dĂ©triment de leurs homologues tricolores !

 

  1. Les principes du contradictoire et de loyautĂ© conduisent Ă  Ă©viter la constitution de « jurys Â» plĂ©thoriques pour interroger tĂ©moins et personnes mises en cause : mieux vaut limiter les participants aux auditions Ă  deux ou trois personnes (ex. : conformitĂ© et RH), dont au moins un ressortissant de la rĂ©gion concernĂ©e, qui rĂ©digeront conjointement un compte rendu.

 

  1. Enfin, si nombreux sont les groupes internationaux Ă  avoir mis en place des comitĂ©s Ă©thique ou compliance pour administrer leurs programmes de conformitĂ©, le praticien doit prendre en compte la jurisprudence rĂ©cente[14] et Ă©viter qu’un tel comitĂ© ne puisse ĂŞtre considĂ©rĂ© comme un « organe Â» susceptible d’engager la responsabilitĂ© pĂ©nale de la maison mère Ă  l’occasion de difficultĂ©s rencontrĂ©es au sein de filiales, notamment Ă  l’étranger. En matière de conformitĂ©, les chausse-trappes sont nombreuses et « le mieux Â» est dĂ©cidĂ©ment « l’ennemi du bien Â» …

 

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[1] L’auteur tient à remercier Sarah Grange pour sa contribution aux recherches et précise ne pas avoir fait appel à des solutions d’intelligence artificielle.

[3] CEDH, 16 décembre 1992, Niemietz c. Allemagne, n° 13710/88. Cf. aussi CEDH, 6 décembre 2012, Michaud c. France, n° 12323/11, /§ 117 et 118.

[4] CEDH, 2 juillet 2015, Vinci Construction et GTM Génie Civil et Services c. France, n° 60567/10 et 63629/10.

[5] Cass. crim. 24 avril 2013, n°12-80.331 ; Bull. crim. n°102 ; D. 2014. 311, chron. B. Laurent, C. Roth, G. Barbier et P. Labrousse ; ibid. 893, obs. D. Ferrier.

[6] Loi n° 2021-1729 du 22 décembre 2021 pour la confiance dans l'institution judiciaire.

[7]  Guide pratique AFA/PNF relatif aux enquĂŞtes internes anticorruption, 14 mars 2023.

[8] RĂ©solution du Conseil de l’Ordre relative au « Guide pratique sur les enquĂŞtes internes anticorruption Â», 13 avril 2023 (https://www.avocatparis.org/actualites/guide-pratique-sur-les-enquetes-anticorruption). Thomas Baudesson, Guide pratique sur les enquĂŞtes internes anticorruption et droits de la dĂ©fense : l'AFA et le PNF persistent et signent, Revue internationale de la compliance et de l'Ă©thique des affaires, n°3, juin 2023.

[9] Cass. crim., 26 janvier 2022, F-D, n° 17-87.359.

[11] Cass. crim. 16 juin 2021, F-P, n° 20-83.098. Voir aussi Cass. crim. 23 mai 2023, F-D, n° 22-83.516 ; Les groupes de sociĂ©tĂ©s et la responsabilitĂ© pĂ©nale des personnes morales, M. Pariente, Rev. sociĂ©tĂ©s 1993.247.

[13] V. supra n°10 à 16.

[14] V. supra n°16 et 17.

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