Le média Gay Times du 30 mars 2016 rapporte le cas suivant, qui sera repris par d'autres médias. Ce cas est présenté par le média comme un cas dramatique pour le pauvre couple victime d'une escroquerie, couple méritant la générosité publique et le secours de l’État du couple commanditaire. A aucun moment l'on ne parle de la situation des trois femmes qui ont été "utilisées" pour obtenir la fabrication simultanée des trois enfants qui sont considérés directement comme les enfants du couple qui a dépensé beaucoup d'argent pour les obtenir et qui s'est fait gruger.
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Un couple marié néozélandaises , les hommes désirant avoir des enfants ensemble, , a décidé de recourir à la technique proposée dans certains pays du "twining" ou du "tripling", le nombre mentionné dépendant du nombre de femmes "utilisées". Le couple a recours à une agence installée à Mexico. Il fût un des derniers à pouvoir bénéficier d'un tel service dans ce pays car depuis le Mexique a, comme beaucoup d'autres États (comme l'Inde, la Thaïlande ou la Malaisie) adopté une législation pour fermer ses frontières à la "GPA internationale" afin de protéger sa population féminine réduite ainsi à être la matière première utilisée comme "gestatrice" pour concrétiser le "désir d'enfant" des personnes plus riches qu'elles.
La pratique du "twining", ici "tripling" consiste à recourir à plusieurs femmes pour obtenir des enfants que l'on présentera pourtant comme des jumeaux, car on aura effacé les mères. Au Mexique, cela est assez aisé, il y a suffisamment de femmes pauvres pour qu'il y a ait profusion.
Comme les agences, les cliniques et les médecins qui proposent cette pratique destituent ces femmes de leur qualité de "mères" par rapport aux enfants qui sortiront de leur ventre, "consentant" par contrat qu'elles n'en sont que les porteuses, ces personnes affirment qu'il s'agit de "jumeaux" : "twins".
En effet, les deux époux, "parents d'intention" fournissent le sperme et recourent au même ovocyte, donné par ailleurs : comme l'ovocyte est fécondé in vitro, les premières multiplications cellulaires se produisent in vitro. Puis, au lieu de réinjecter les embryons obtenus dans le corps d'une seule femme, les techniciens intermédiaires ont recours à plusieurs "ventres" disponibles. Ici trois corps de femmes sont utilisés. Une femme pour fournir les ovocytes, deux femmes chacun portant un embryon chacune en ce qui la concerne jusqu'à la naissance. Ici, l'une ayant porté deux enfants, il en résulte trois enfants. Médecins et juristes complaisants qualifient la pratique de "tripling". Le mot "mère" n'est plus utilisé. Sont obtenus des enfants sans mère.
Comme à la fois contractuellement et dans l'esprit de ceux qui ont payé pour cela, ces femmes ne sont rien, les deux enfants obtenus sont donc des "jumeaux", puisqu'ils ont "tout en commun". C'est pourquoi l'on prétend utiliser ce terme de "twining" ou "tripling", terme que l'article de presse reprend sans que cela semble poser problème, alors même que les enfants n'ont pas en commun la femme qui leur donne naissance.
Le couple paie de multiples frais, aux intermédiaires, à la clinique, à la "donneuse" et aux "porteuses". Mais quand il arrive à Mexico, juste les 48 heures nécessaire pour prendre livraison des enfants et reprendre l'avion en sens retour, l'agence a disparu et les formalités ne sont pas faites. Les liens de filiation ne sont pas établis. Et le Droit reprend sa place : les femmes redeviennent "mères" car c'est la Loi et non le contrat qui en dispose. Pareillement, la nationalité est régie par la Loi et non par le contrat : l'enfant a la nationalité de la mère. Les bébés sont donc mexicains. Les contractants sont donc bloqués au Mexique.
Ils alertent les médias sur leur tristesse et l'escroquerie dont ils sont les victimes, demandant à ce qu'on trouve une solution pour les secourir.
L'efficacité maximale paraissait pourtant atteinte au bénéfice des "parents d'attention", par ceux qui, contre honoraires, servent leur "projet parental" : la solution juridique consisterait à effacer la mère. Mais l'on voit ici que la mère tient l'enfant, lui donne à la fois le jour et le droit applicable. Que peut faire contre cela ceux qui ont versé tant d'argent pour satisfaire leur désir d'enfant sans mère ?
Que va-t-il se passer ?
Les cas d'escroquerie vont se multiplier.
Va-t-on dire que le Droit est "incertain" ? Ou bien qu'il frappe ici ceux qui entrent sur le marché des mères et des enfants ?
Mais les frais médicaux ont été très élevés car l'une des "gestations"
En outre, le couple a tout payé d'avance, notamment tous les frais des démarches que l'agence doit faire pour que les enfants puissent quitter le Mexique et entrer sans difficulté juridique dans le pays du couple qui les ont commandés. L'agence avait bien négocié et proposé de tout centralisé, notamment l'achat du billet d'avoir de retour pour la "famille heureuse", les "parents d'intention" et les trois bébés.
Lorsqu'on achète des enfants et qu'on les achète par lot, en ayant recours à trois femmes (donneuse d'ovocyte et gestatrices), il faut avoir les moyens. Or, le couple en question n'en a pas beaucoup. C'est en tout cas ce qu'explique aujourd'hui ce couple qui s'estime victime. La "sophistique de la GPA" consiste aussi à convaincre, non seulement de l'innocence des enfants (qui ne doivent pas "payer pour la faute des adultes), mais encore désormais de "l'innocence" des acheteurs
Tout l'article porte donc sur les "victimes innocentes, flouées et "désespérées" que sont ... les ceux qui achètent les femmes, leurs ovocytes et leurs capacités de reproduction pour obtenir par avance leurs enfants, engendrés à seule fin qu'ils leur soient "cédés".
En effet, l'un des époux explique à la télévision néozélandaise qu'ils n'ont plus d'argents d'avance et qu'ils ne savent plus que faire, car ils ne peuvent pas rester plus longtemps à Mexico. Ils sont "désespérés". Il "faut leur venir en aide". Eux et "leurs adorables trois petits bébés.
En effet, comme d'usage dans la pratique de la GPA internationale, ils ont pris l'avion pour prendre livraison des enfants à Mexico, prendre les documents nécessaires et rentrer chez eux "en famille" avec les bébés délivrés.
Mais lorsqu'ils sont arrivés, l'agence de mères-porteuses avait disparu, et tout l'argent versé par avance également, notamment celui pour les billets de retour. Il ne reste plus rien. Comment repartir ? D'ailleurs, aucune formalité n'a été faite et les enfants ne semblent pas être rattachés à eux. Ils ont donc un problème juridique, à savoir la nationalité des enfants et leur lien de filiation, et un problème financier, car ils doivent acheter les billets d'avion et rester sur place pour régler ce problème imprévu (puisque les agences d'ordinaire offrent un "package", comprenant la question déjà réglée de la filiation, les billets, etc.), résolution juridique qui en elle-même représente un coût inattendu. Il leur faudra peut-être trouver un avocat ... Peut-être saisir la justice ...
En effet, le Droit mexicain considère lui, comme la grande majorité des Droits nationaux que les femmes, qui ne sont peut-être rien dans l'esprit du couple et des intermédiaires, sont les mères des enfants
Les époux se présentent donc comme des "victimes" d'une agence qui a profité d'un "désir d'enfant" qu'ils considèrent comme "légitime", bien heureux d'avoir réussi à déclencher ces grossesses à temps, avant que le Législateur mexicain n'arrive à protéger sa population contre la vampirisation dont les femmes font aujourd'hui l'objet.
Que se passe-t-il maintenant que l'agence n'est plus là pour faire sortir les enfants si chèrement obtenus et que le couple n'a plus d'argent pour obtenir éventuellement les services d'un autre prestataire et faire valoir d'éventuels "droits à la parentalité" ou autres arguments juridiques contre la position que l’État mexicain a vocation à prendre ?
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L'on pourrait penser que ces enfants fabriqués, tiraillés entre l’âpreté du désir d'argent de l'agence qui avait trouvé trois femmes pour les faire advenir et le désir d'enfant transformé en droit absolu, pourraient - en application de la Loi - être remis à l'adoption.
L'article ne le suggère pas.
Sans doute parce que l'article ne parle que l'argent.
Des difficulté d'argent du couple qui a commandé ses enfants présentés comme "triplés" alors que les femmes n'ont pas de rapport entre elles.
De l'importance des sommes d'argent que le couple a versé à l'agence.
De la malhonnêteté financière de l'agence qui a menti au couple et l'a escroqué, ne délivrant pas la prestation promise, c'est-à-dire le rapatriement effectif des enfants au domicile des commanditaires dans le pays de ceux, et disparaissant avec l'argent .
Du commerce des ovocytes, des mères et des enfants, l'article n'en parle jamais.
Les tribunaux français ont déjà été confrontés à un cas analogue
Parce que l'article du Gay Times ne parle que d'argent, il trouve bien plutôt ce qui lui semble être la solution du cas ... dans l'argent : la solution serait donc dans un fund raising qui va permettre au couple en question de séjourner à Mexico, de payer son hôtel, de payer sans doute un avocat, lequel est toujours présent dans ce type de cas. Le couple affirme qu'en l'espèce les avocats qui s'étaient chargés de leurs intérêts les avaient escroqués... Il faut encore remplir les formalités que l'agence aurait dû faire, obtenir les passeports, payer 5 billets d'avion et repartir avec les enfants fabriqués pour eux chez eux en quittant le Mexique au plus vite.
Effectivement, une campagne sur le Net dans ce sens a été lancée et a déjà permis de rassembler de l'argent pour que (je cite) les choses puissent être remises en ordre et que cette belle famille nouvelle puisse revenir à la maison en sécurité : "Grace Nixon, a friend of the couple, has sent up a crowd funding campaign at givealittle.co.nz, with the hope that the generosity of others could bring all five Beards back home. Grace wrote on the crowd funder page: “We now hope that with your help they can move things along and get their beautiful new family home to the safety of New Zealand.” The campaign has so far raised $12,500, thanks to the backing of 303 people.".
Cette "belle famille" est ainsi composée d'enfants qui n'auraient jamais eu de mère. Juste une donneuse et des porteuses. Laissées loin derrière, pour que cette belle famille nouvelle revienne vite "en sécurité" dans leur pays.
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Mais l'argent ne peut pas tout acheter, notamment pas le Droit. Quand on croit que le Droit existe, c'est ce que l'on croit.
Pourtant, commentant ce cas, un fonctionnaire du pays du couple commanditaire souligne : “Their situation is typical of many international surrogacy cases. They can be highly complicated, involving other countries’ laws and procedures and involve a high degree of uncertainty.”.
Ce qui est ici qualifié d' "incertitude" est tout simplement le fait que ceux qui paient pour obtenir la fabrication d'enfants qu'on va, contre des honoraires élevés, leur désigner comme étant leur propre enfant en effaçant purement et simplement la mère, produisant ainsi des enfants sans mère, heurtent le droit le plus fondamental de l'enfant : le droit humain de n'être pas une chose, le droit d'être une personne dont on ne peut ainsi disposer, le droit d'avoir une mère (ici aucun des enfants n'aurait de mère). Et le fonctionnaire interrogé sur le cas rassure le couple en disant qu'il va tout faire pour que les deux époux puissent au plus vite "adopter" les enfants acquis à si haut prix.
Ce que les agences ne font pas, par ce que l'on pourrait appeler un manque de professionnalisme (ici une escroquerie), cela serait donc à l’État de le faire : l'adoption, moyen juridique utilisé non plus comme le Droit l'a conçu c'est-à-dire trouver des parents à des enfants qui sont là, mais aider au bon fonctionnement un marché des enfants à produire, lorsqu'il y a défaillance d'un prestataire
Mais les entreprises qui veulent construire le marché et l'industrie de l'humain se heurtent au Droit.
Pour affaiblir celui-ci, elles désignent comme "incertitudes juridiques" ce qui est le rempart construit par le Droit pour protéger les enfants. Elles désignent comme une sorte de faille du Droit ce qui est au contraire sa force. Elles demande une évolution radicale du Droit sous couvert d'un perfectionnement technique, ici un accroissement de sa "sécurité juridique" : ici l'adoption ex post d'enfants par des adultes qui ont payé pour qu'ils soient fabriqués sur mesure à seule fin qu'ils deviennent "leurs enfants".
Cela n'est en rien la fin d'une insécurité juridique, cela serait l'abandon de ce qu'est la filiation, lien premier entre l'enfant et la mère, et l'installation d'un marché des femmes et des enfants.
Ce cas montre que lorsque sont fabriqués sciemment des "enfants sans mère", ce qui aboutit à des enfants fabriqués à partir du corps de trois femmes différentes. Mary Shelley avait imaginé cela.
Les agences ont beau jeu de faire des profits sur ce désir fou d'enfants sans mère. Ce désir réduit à l'état de matières premières les femmes, moyen de fabrication, et réduit les enfants à être des produits fabriqués, sommés de correspondre au désir que les adultes qui ont payé ont de leur venue.
Le Droit n'est pas "incertain", il est au contraire ce qui peut arrêter la démesure du désir égoïste, dont on peut ici l'illustration entre l'agence et ses clients, les deux s'entredévorant.
Personne ne parlant jamais ni dans les interviews ni dans l'article des trois femmes, ni de ces trois enfants sans mère.
Sur la manipulation du langage, notamment par le remplacement du terme exact de "grossesse" par celui, pourtant réservé aux animaux, de "gestation", v. Abécassis, E. et Frison-Roche, M.-A., Les mots ne pas le dire, 2016.
Sur cette sophistique de l'innocence, v. Frison-Roche, M.-A., 2016.
Il en est ainsi du Droit français, qui pose que l'enfant a pour mère la femme du ventre duquel il naît.
Ce n'est pas le contrat, la seule puissance des volontés des individus, qui peut désigner la "mère" ou les "parents" de l'enfant. Ce n'est pas l'intention qui fait la filiation, laquelle est une institution majeure des sociétés et non un élément à la disposition des négociations bilatérales, lesquelles sont régies par la puissance des parties en présence.
V. par ex. Frison-Roche, M.-A., L'ordre public économique, 2015.
Sur le fait que le juge, confronté à ces cas difficiles, doit trouver une solution, v. Frison-Roche, M.-A., ... 2016.
Le texte du jugement n'est pas encore disponible. On en connait pour l'instant la teneur qu'à travers les échos n'en a donné la presse.
Sur la distinction fondamentale entre la GPA et l'adoption : Frison-Roche, M.-A.,
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