14 janvier 2013

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Publication : monographie dans une publication juridique

Principe d'impartialité et droit d'auto-saisine de celui qui juge

par Marie-Anne Frison-Roche

Référence complète : FRISON-ROCHE, Marie-Anne, Principe d'impartialité et droit d'auto-saisine de celui qui juge, D.2013, chron., p.28-33.

 

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Lire la décision du Conseil constitution du 7 décembre 2012, Société Pyrénées et autres.

Lire le résumé de l'article ci-dessous.

Pièces jointes

Après avoir rappelé que le Conseil constitutionnel rend depuis longtemps des "grandes Décisions" et que celle du 7 décembre 2012, Société Pyrénées et autres en est une puisqu'elle pose qu'on ne peut être juge et partie, l'article établit dans une première partie le sens de la décision avant d'en mesurer la portée dans une seconde partie, au regard des grands principes de la procédure et du droit.

Ainsi, il est enfin interdit de cumuler la fonction d'agir et la fonction de juger. Le Conseil pose donc le principe du non-cumul entre le droit d'action et le pouvoir de juger.

Pourtant, comme la Cour de cassation, qui avait transmis la Question prioritaire de constitutionnalité, n'aime pas la notion de "droit d'action", le Conseil comme elle préfère utilise la notion de "faculté d'introduire une instance, qui se réfère davantage à un pouvoir, faisant balance avec le pouvoir de juger, conception traditionnelle des choses.

Mais cela n'a pas d'importance car ce qui fait que l'on est partie vient du fait qu'en ouvrant l'instance, la personne concernée (ici le débiteur objet de la procédure de redressement judiciaire) "voit" le tribunal "comme" une partie. Ainsi, c'est l'apparence qui fait la partie. Le raisonnement est celui de la Cour européenne des droits de l'homme.

 

Le fondement à l'affirmation d'un tel non-cumul et non seulement l'impartialité, principe constitutionnel mais encore la garantie des droits, ici ceux du débiteur. L'article 16 de la Déclaration de 1789 dispose que sans garantie des droits, il n'y a pas "point de Constitution". 

C'est à la fois le plus simple et le plus fort. 

 

Une fois le sens exposé, il convient de mesurer la portée d'une telle décision de principe.

L'essentiel réside dans le considérant n°4 de la décision. 

En effet, l'on peut considérer, lu à la lettre, que s'il ne s'agit pas d'une procédure de sanction, alors a contrario des garanties procédurales peuvent justifier par exception le cumul du pouvoir d'agir et du pouvoir de juger (ces garanties procédurales ne pouvant être que la séparation fonctionnelle au sein de l'organe considéré).

Mais symétriquement s'il s'agit d'une procédure de sanction, alors rien ne peut justifier le cumul de deux pouvoirs antagonistes, celui que tient qui ouvre l'instance, celui qui clôt l'instance par le jugement, celui qui prend parti en l'ouvrant celui qui prend parti en jugeant.

Dès lors, dès l'instant qu'il s'agit d'une procédure de sanction, la séparation fonctionnelle, telle qu'on l'observe dans maintes autorités administratives indépendantes, ne suffit pas à justifier le cumul.

L'enjeu se déplace alors puisqu'il s'agit de savoir si, dans telle ou telle procédure, nous sommes ou non dans une procédure de sanction.

On mesure ici encore une fois que le critère est européen, puisqu'il est celui de la summa divisio entre matière civile et matière pénale.

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