article paru dans la Newsletter MAFR Law, Compliance, Regulation
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► Référence complète : M.-A. Frison-Roche, ""Juge modeste" ou "check and balance" :alternative aux Etats-Unis, alternative en France", Newsletter MAFR Law, Compliance, Regulation, 5 octobre 2025..
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► Résumé de l'article : Les décisions récentes, voire prochaines, de la Cour suprême des Etats-Unis montrent que le système politique américain qui fût basé sur le principe non-écrit du Check and Balance, demandant aux Juges de constituer un Pouvoir faisant face aux deux autres pourrait être remplacé par un système politique basé sur le principe d'un "juge modeste" mettant en application les décisions prises par le pouvoir exécutif fédérale. Ils auraient alors changé de Constitution.
En Europe occidentale, il est possible que soit abandonnée la lettre constitutionnelle qui pose que les juges ne sont pas un pouvoir autonome face aux deux autres pouvoirs et que soit adopté au nom d'un principe non-écrit, l'Etat de Droit, sa transformation en Pouvoir autonome faisant face au pouvoir exécutif à part entière. Le chemin serait exactement inverse. Nous aurions alors changé de Constitution.
Cela est concevable, il y a beaucoup d'argument dans ce sens.
Il faut alors le dire. Et en tirer toutes les conséquences.
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📧lire l'article publié le 5 octobre 2025 dans la Newsletter MAFR - Law, Compliance, Regulation ⤵️
Le journal britannique The Economist utilise un outil algorithmique qu'il a fait construire pour son seul usage il y a quelques mois : à partir des précédentes décisions de la Cour suprême des Etats-Unis et des opinions exprimées par les juges, il prend les cas soumis à cette Cour pour anticiper ce que l'outil pense être la solution qui sera rendue dans celui-ci et dans celui-là.
Le journal anticipe les effets futurs des décisions de justice futures sur la politique et économe américaines et le reste du monde.
Mais l'article publié le 3 octobre 2025 est plus ample.
Il a pour titre : The new SCOTUS term will reshape America’s constitution.
Son sous-titre est : If the justice do not check an overmighty president, the coutry will suffer
L'article replace en effet les décisions que la Cour suprême va devoir rendre dans deux "théories", opposées, qui sont la base même du système politique américain (I). L'on peut penser que c'est d'une autre façon et dans d'autres termes, la même chose qui est en train de se passer en Europe continentale, notamment en France (II). Peut-être en sens inverse (III).
I. CHECK AND BALANCE V/ JUGE MODESTE
The Economist rappelle que le principe du Check and Balance n'est pas écrit dans la Constitution américaine. Il est né de la jurisprudence de la Cour. L'on pourra ajouter qu'il est aussi né du fait qu'il est enseigné partout aux étudiants, à la population, aux enfants.
Ce principe, sorti de ce qu'a dit la Cour, qui avait de bonnes lectures, pose que le judiciaire est un pouvoir qui fait face en équilibre aux deux autres pouvoirs, mais surtout au pouvoir exécutif, pour que l'ambition du judiciaire puisse arrêter l'ambition de l'exécutif.
C'est pourquoi, à raison, l'article pose que les Etats-Unis ont une Constitution non-écrite. L'on pourra dire la même chose de la France si par exemple le Conseil, ou la façon dont on raconte la Constitution, l'on pose, avec d'autres mots, quel'équilibre des pouvoirs est celle d'un pouvoir juridictionnel égal aux autres, selon un Check and Balanc appelé autrement.
De l'analyse algorithmique, il ressort que certaines décisions à venir de la Cour suprême des Etats-Unis semblent continuer à maintenir cette "régle non-écrite" du Check and Balance, tandis que d'autres semblent exécuter purement et simplement la volonté exprimée par le chef de l'Etat fédéral, Donald Trump.
C'est alors la "théorie du juge modeste" qui est appliquée. Souvent évoquée par le Juge Scalia, rappelant les pères fondateurs, elle pose que le juge doit respecter le pouvoir politique, y compris le pouvoir politique des Etats fédérés, et ne peut se mettre au même niveau que lui. Autant dire que cette théorie dénie le principe même du Check and Balance.
Elle conduisit la Cour suprême à abandonner la jurisprudence Roe v/Wade par sa décision Dobbs v. Jackson Women’s Health Organization du 24 juin 2022, décision qui bien au-delà du droit à l'avortement est avant tout un abandon du pouvoir de la Cour sur l'édiction et le contrôle de droits constitutionnels fédéraux s'imposant aux autres pouvoirs.
C'est donc l'idée même de Constitution qui est en jeu. Elle va se jouer dans les mois qui vient. Trump joue la partie depuis longtemps, ayant nommé les juges pour tenter ce renversement. Nous sommes spectateurs. Il n'est pas acquis que la Cour redevienne "modeste", c'est-à-dire d'elle-même laisse le pays n'être plus gouverné que par le seul pouvoir exécutit.
II. JUGE FONCTIONNAIRE V/ JUGE MAITRE DE L'ETAT DE DROIT
La France a davantage écrit sa Constitution puisque le texte de celle-ci pose que les juridictions constitue une "autorité". Mais souvent cela n'est pas ainsi que l'on raconte aux étudiants et aux enfants la Constitution. Les récits engloutissent souvent les textes.
Le Premier Président Guy Canivet affirmait que les juges étaient des "fonctionnaires", c'est-à-dire que le juge était là pour appliquer à des cas particuliers les ordres du législateur et de l'exécutif. Ces propos du membre du Conseil constitutionnel, ancien président de la Cour de cassation, dont chacun sait le grand juge qu'il est, étaient émis pour provoquer mais cela ne suscitait pas l'émoi.
Le juge français était donc "modeste". L'article 5 du Code civil n'a pas bougé, la lettre de la Constitution non plus.
Aujourd'hui l'on affirme que le juge est l'expression de l'Etat de Droit, ce qui est vrai aussi.
Cela relève d'un principe non-écrit, que l'on trouve dans les jurisprudences, et les plus hautes, notamment celle de la Cour de justice de l'Union européenne qui pose que celle-ci est construite sur l'Etat de Droit et que la Cour en est le gardien.
Nous serions donc en train de changer de Constitution, de passer à une Constitution non-écrite où le juridictionnel serait un pouvoir, ayant remplacé l'autorité, faisant face aux deux autres pouvoirs.
Pourquoi pas, il y a beaucoup d'arguments pour justifier cela.
Il faut simplement acter que nous aurions changé de Constitution.
III. UN MOUVEMENT INVERSE AUX ETATS-UNIS ET EN EUROPE OCCIDENTALE
L'Histoire peut aller dans ces deux sens.
Ils sont inverses.
Aux Etats-Unis, la Constitution était construite sur le principe du pouvoir judiciaire placé dans un système politique non-écrit de Check and Balance. Par la volonté présente de la Cour, le système politique pourrait changer pour un système hiérarchisé où le juge, devenu modeste, se place dans un système où il concrétie la volonté politique du Gouvernement fédérale;
En France et en Europe continentale, la Constitution avait posé expressément le principe d'un système judiciaire n'ayant pas de pouvoir politique. Par la volonté présente des juridictions européennes et françaises, un pouvoir judiciaie pourrait s'édicter pour défendre l'Etat de Droit face à un Gouvernement, l'ambition de l'un limitant l'ambition de l'autre.
Pourquoi pas.
Mais il faut le dire, en tirer toutes les conséquences.
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