16 septembre 2015

Conférences

Les conséquences régulatoire d’un monde repensé à partir de la notion de « données », in "Internet, espace d'interrégulations"

par Marie-Anne Frison-Roche

Le Journal of Regulation consacre un colloque au thème Internet, espace d'interrégulation.

Lire la présentation générale du colloque et son programme détaillé.

Le colloque a été suivi d'un ouvrage publié par les Éditions Dalloz, dans la Série Régulations, dirigée par Marie-Anne Frison-Roche.

Lire la présentation de l'ouvrage qui a résulté de cette journée, et des articles qui ont résulté de la conférence.

Lire le working paper sur lequel s'appuie la conférence.

Consulter les slides utilisés pour la conférence.

Après avoir souligné que la notion même de "donnée" est incertaine et relève bien plutôt et paradoxalement du construit, la première perspective consiste à tirer les conséquences régulatoires du fait que ce que l'on désigne souvent comme "l'objet" de la donnée (la personne, l'entreprise pour la donnée financière, l'économie pour le rating, etc.), n'est que sa source, son "sous-jacent", la donnée étant fabriquée par une entreprise, son objet étant l'usage pour lequel la donnée est destinée.  La donnée est autonome de son sous-jacent, est mise en masses affectées, prend une valeur économique en fonction des désirs qu'en ont ses utilisateurs, devient disponible hors du temps et de l'espace dans le numérique. Cela implique une interrégulation spécifique.

Mais la donnée est aussi le Janus du numérique, car nouvel or noir, pur instrument financier, par nature immatérielle, la donnée conserve aussi la trace des personnes, soit le sous-jacent qu'on voudrait protéger, que l'on voudrait indissociable, soit la structure que l'on voudrait légitimement attaquer par le mécanisme nouveau de la compliance.  Cette double-face de la donnée entraîne des chocs de régulations dans Internet.

Dans une seconde perspective, il est souligné que tout Internet ramène vers l'internaute, dans lequel l'on verrait volontiers "Le Grand Interrégulateur". Mais est-ce si adéquat, légitime et efficace ? Le "consentement" auquel renvoie l'interrégulation assurée par l'internaute lui-même fait naître le doute. En revanche, sous le vocable déplacé de "droit à l'oubli" se dissimule une arme très efficace qui peut frapper ceux qui accaparent les données dans une économie numérique qui semble bien se constituer dans un mécanisme anté-marché, c'est-à-dire dans une régression qui pulvérise l'autorégulation marchande elle-même pour remplacer les actes juridiques d'échange par des actes juridiques conjonctifs, que pour l'instant le Droit et la Régulation ont bien du mal à appréhender, faute des qualifications juridiques pour ce faire.

Le "droit à l'oubli" requalifié à travers la catégorie des actes conjonctifs serait un premier pas pour satisfaire un objectif de la régulation, protégeant à la fois la protection de l'innovation et la protection des personnes, dans un futur toujours ouvert et que nulle puissance économique ou politique ne peut s'approprier.

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