Conseil constitutionnel
La décision du Conseil constitutionnel du 16 juillet 1971 relative à la loi sur la liberté d'association est avant tout connue parce qu'elle a intégré le préambule de la Constitution de 1958 dans le "bloc de constitutionnalité", c'est-à-dire dans ce qui est l'objet d'un contrôle de constitutionnalité par le Conseil constitutionnel.
Ce faisant, la Déclaration des droits de l'Homme et du Citoyen de 1789, qui n'est visée que dans ce Préambule, faisait dans son entrée dans le droit constitutionnel.
D'une part, cette décision accrut considérablement le pouvoir du Conseil constitutionnel et d'autre part transforma celui-ci en gardien des libertés et libertés fondamentaux, du fait de la norme de référence (la Déclaration des droits de l'Homme de 1789) à l'aune de laquelle les lois sont appréciées.
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Les rédacteurs des textes devraient toujours conserver à l’esprit le fait que la langue juridique est par essence normative. On peut l'observer à travers l’article 1384, al. 1 du Code civil, simple délicatesse littéraire pour les codificateurs, que, par l’arrêt Jand’heur, la Cour de cassation transforma en 1930 en socle de la responsabilité civile. Il en fut de même pour la Constitution de 1958.
En effet, ses rédacteurs avaient à l’esprit en rédigeant un préambule d’expliquer l’histoire au terme de laquelle le texte avait été élaboré. Ainsi le « préambule » n’était qu’une sorte d’introduction dissertative. Il suffît au Conseil constitutionnel, désireux d’accroître l’amplitude de son pouvoir et sans que le pouvoir constituant soit sollicité de décider que le préambule avait valeur normative.
Il le fit par la décision du 16 juillet 1971 relative à la loi sur la liberté d’association, intégrant notamment ainsi dans le "bloc de constitutionnalité" la Déclaration des droits de l’homme de 1789 et l’ensemble des articles que celle-ci contient.
En outre, non seulement cette décision modifie l’ampleur du pouvoir du Conseil constitutionnel, ce qui fut observé immédiatement mais cela en déplaça le centre de gravité. En effet, alors que de nombreuses dispositions de la Constitution ont pour l’objet l’organisation des pouvoirs publics et les relations entre eux, les textes du préambule ont pour objet principal des libertés publiques et des droits fondamentaux.
Le Conseil constitutionnel commençait alors à devenir le gardien de ces libertés et de ces droits subjectifs naturels. Par cette évolution prétorienne dans le contrôle a priori, le terrain se préparait pour l’émergence ultérieure du contrôle de constitutionnalité a posteriori par la loi constitutionnelle du 23 juillet 2008, entièrement centrée sur les libertés et droits fondamentaux.
Une Cour suprême était en train de naître.
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