10 février 2011

Publications

Publication : monographie dans une publication juridique

The auditor, a crucial player on financial markets

par Marie-Anne Frison-Roche

Référence complète : FRISON-ROCHE, Marie-Anne, The auditor, a crucial player on financial markets, The Journal of Regulation, n°6, January / February 2011, I-1.26, p.470-479.

Cet article est écrit en anglais.

La Commission européenne par un Livre Vert d’octobre 2010 envisage une nouvelle politique de l’audit pour favoriser la stabilité financière. Pour cela, elle dessine le rôle de l’auditeur sur les marchés financiers, allant jusqu’à lui demande de prévenir les investisseurs des risques financiers que présentent les émetteurs. Mais l’auditeur a un rôle de certification des comptes, ce qui doit en être distinguer et cette "attente de marché" doit être satisfaite par d’autres, comme les agences de notation. Cependant, l’auditeur est un agent "crucial", en ce que son action est déterminante pour les investisseurs. Mais il n’est pas pour autant "systémique" et ne s’assimile en rien à une banque, puisque sa défaillance n’entraine pas d’effet domino. En outre, parce qu’il est crucial, l’ouverture forcée du marché de l’audit à plus de concurrence fragiliserait la bonne réalisation de son rôle dans le système. Cela est une nouvelle illustration de l’opposition entre la concurrence et la régulation.

 

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Pièces jointes

L'article souligne que, conformément à la méthode téléologique, familière au droit européen, débutant par les buts pour construire les mécanismes et les organes, le Livre Vert vise à déterminer le rôle de l'auditeur pour en déduire le statut qu'il convient de lui donner. Ce rôle est conçu par la Commission en perspective de l'impératif de stabilité financière, puisque le Livre Vert se situe dans les leçons à tirer de la crise financière.

La Commission insiste sur le fait que, selon ce qu'elle désigne comme les "attentes du marchés", les auditeurs auraient dû et devraient informer sur la réalité de la santé financière d'une entreprise et révéler ainsi les risques que les investisseurs encourent. Mais la délivrance de l’information est avant tout à la charge de l’entreprise et la prise de risque repose sur l’investisseur qui pourra en recueillir les gains, s’il a bien joué. Le rôle de l’auditeur est de contrôler l’image que les comptes donnent de l’entreprise, pas moins (et en cela, l’on peut y voir comme une sorte de tiers ou de juge) mais pas plus. Vouloir davantage serait confondre le rôle de l’auditeur et celui notamment des agences de notation.

La seconde partie de l’article soutient que l’auditeur est « un opérateur asystémique mais crucial » sur les marchés financiers.

Or, le Livre Vert a opéré une analogie entre les auditeurs et les banques, en soutenant qu’ils sont l’un et l’autre des opérateurs systémiques. Or, l’opérateur systémique est celui dans la défaillance entraine la chute du système. Cela est vrai pour une banque mais n’est en rien établi pour les firmes d’audit.

En revanche, parce que l’auditeur certifie les comptes, il joue un rôle déterminant dans le système, qui en fait un « opérateur crucial » (voir sur cette notion, Proposition pour une notion : l’opérateur crucial, cliquez ici).

En cela, le système doit veiller à ce qu’il soit totalement indépendant des dirigeants, particulièrement bien formé, le moins possible victime d’asymétrie d’information, etc.

Or, paradoxalement, le Livre Vert estime que les défaillances des auditeurs dans leur rôle dans le système a pour une cause une concentration excessive du marché de l’audit, limité aux Big Four. La solution alors serait l’ouverture forcée à la concurrence, la lutte, comme en matière banquière, l’effet de taille, les barrières patrimoniales, etc.

Mais, c’est raisonner comme si nous avions affaire à une perspective de libéralisation de secteur tenu par un monopole historique, devant revenir à terme à un jeu concurrentiel ordinaire, alors que la configuration est toute autre puisqu’il s’agit de construire un statut favorisant le fait que les auditeurs assurent bien le rôle qui leur est dévolu dans le marché financier. Or, la compétition concurrentielle va conduire les nouveaux entrants à proposer des services de moindre qualité ou à tout le moins, ils n’auront pas les moyens de proposer de haute qualité.

La solution est donc non pas la concurrence, où tout opérateur est substituable à un autre mais bien, parce que l’auditeur est un opérateur crucial et non ordinaire, la régulation en ce que précisément elle s’oppose à la concurrence (sur cette opposition voir Ambition et efficacité de la régulation économique, cliquez ici). Ainsi, c’est en terme d’organisation professionnelle, de discipline et d’information des investisseurs par une comptabilité fiable qu’il faut penser l’auditeur.

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