Mise à jour : 4 septembre 2012 (Rédaction initiale : 4 septembre 2012 )

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Le 4 septembre 2012, la Commissaire européenne à la Justice rencontre les membres du Gouvernement français

par Marie-Anne Frison-Roche

La Commission européenne est un organe collégial, chaque Commissaire prenant part au vote. L'on peut considérer qu'à côté de tous les autres Commissaires, dont la mission est principalement économique, le Commissaire européen à la Justice se distingue en ce qu'il s'affirme comme étant en charge des droits fondamentaux. En cela, il a du mal à exister, dès l'instant que l'on voudrait encore définir l'Europe comme un marché. C'est pourquoi le Commissaire Viviane Reding vient à Paris le 4 septembre 2012 pour expliquer que l'Europe n'est pas qu'un marché. Cela signifie que la justice n'est pas qu'un produit.

La Commissaire à la Justice de la Commission européenne, dont elle est par ailleurs vice-présidente, Viviane Reding, vient à Paris les 3 et 4 septembre rencontrer le Gouvernement français.

Elle a d'ores et déja accordé un Interview au journal Le Monde  le 1ier septembre 2012.

Elle y renouvelle sa position en ce qui concerne la Roumanie. Elle écrit que l'on doit continue, au nom des droits fondamentaux dont elle assure la protection, à protester contre le "putsch parlementaire" qui a eu lieu cet été dans ce pays.

Sur la perspective de l'entrée de la Roumanie dans l'espace Schengen, elle écrit : "La question essentielle est de savoir si l'Etat de droit roumain peut nous rendre confiant... Pour ma part, je ne serais pas surprise si les Etats décidaient de ne pas y intégrer tout de suite la Roumanie".

Elle renouvelle ses critiques concernant la Hongrie, constatant que les protestation de l'Europe ont "permis d'éviter le pire".

Elle estime que cela démontre que "l'Europe ne se résume pas à un grand marché. C'est surtout un continent où les hommes et les femmes doivent être assurés du respect de leurs droits. La crise a montré que nous avons besoin d'un ministre des finances européen, mais un jour nous aurons peut-être besoin d'un ministre de la justice aussi...

Elle indique que concernant les Roms des travaux ont commencé depuis la fin août entre ses services et des experts français pour que la France "modifie sa stratégie d'intégration".

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La Roumanie a réagi violemment aux déclaration de Madame la Commissaire, en ce qu'elle a lié un report de son intégration dans l'espace Schengen et les questions de justice, alors que le pays a rempli les conditions requises par l'Europe, qui ne visent pas celles-ci.

 

En effet, cela pose trois questions :

  • Pour l'instant, en réalité, l'Europe reste un "grand marché" et dire le contraire, c'est exprimer un souhaite et non une réalité. Donc, l'imposer à un pays, c'est lui imposer un futur, donc faire un acte politique. Or, la Commission européenne, et encore moins un Commissaire seul, ne peut le faire.

 

  • Mais le fait que l'Europe ne soit qu'un grand marché est son problème même... C'est donc le serpent qui se mord la queue.

 

  • Plus fondamentalement et classiquement, quelle est la source de légitimité d'un système politique ? C'est d'ordinaire la volonté du Peuple exprimée par le Parlement. En s'autorisant à parler de "putsch parlementaire" pour mettre par dessus cette légitimité des décisions parlementaires le respect des droits fondamentaux, Viviane Reding se réfère implicitement à une autre échelle de valeurs, à savoir une appréciation non pas par les émetteurs de la norme (le Parlement) mais par la substance de la norme (les droits). 

 

  • En cela, elle exprime une conception plus actuelle du droit, notamment du droit constitutionnel. Dans cette perspective effectivement, la question de la légitimité de celui qui émet la norme devient secondaire. Et cela peut être un simple Commissaire européen...

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