Ce working paper sert de base à un article avec Dominique d'Ambra paru ultérieusement dans les Mélanges Vallens.
En organisant la "résolution bancaire" et en présentant celle-ci comme une "procédure collective spéciale", le Droit a-t-il le front de poser la question : l'
Par nature, le droit des successions suppose la mortalité des êtres humains. Par nature, le droit des procédures collectives suppose la mortalité des entreprises
La résolution bancaire a été inventée récemment parce que pourraient mourir des opérateurs économiques peu ordinaires et intimes de l’
La Résolution bancaire, si elle ne devait être qu'un espace de procédure collective, en ce qu'elle serait rattachée à des États eux-mêmes "en difficulté" ouvre cette question-là. .
Elle n'est pas seulement technique et dérogatoire comme on la présente à l'envi, elle est encore écartelée entre deux droits communs qui prétendent l'inspirer et combler les lacunes de son organisation. Car les textes étant très bavards à son propos, ils sont donc très lacunaires. La résolution bancaire peut prendre racine dans le Droit des procédures collectives, dont elle serait une espèce particulière. Elle peut aussi être une déclinaison du Droit de la
La prétention de ces deux droits communs à gouverner l'application du droit de la résolution bancaire, les deux rois de cette partie d'échec qui s'est notamment jouée devant la Haute Cour de Londres en 2005, Goldman Sachs étant joueur dans cette partie-là, donnera les solutions techniques prochaines.
Ces solutions techniques pourraient inspirer le droit applicable à d'autres "opérateurs cruciaux" que les banques et venir enrichir le droit de la
Sur l'importation du vocabulaire de "vie" et de "mort" sur les cycles économiques, notamment la "néo-mortalité" des entreprises dans la conception même du droit des procédures collectives : ....
Pour manier les règles juridiques il est indispensable de savoir de quelle branche du droit elles relèvent, sauf à ne jamais savoir à quel principe général se reporter et emprunter lorsqu’une situation concrète nouvelle se présente requérant une solution inédite. Une disposition technique n’est en effet jamais close sur elle-même, elle se rattache à une matière, une branche du droit, qui la colore, lui confère un « esprit » permettant d’anticiper la façon dont elle sera appliquée et prendra vie à l’avenir. C’est pourquoi la notion de « système"
Si un mécanisme juridique s’avère relever par nature de plusieurs branches du droit, il faut en tirer des conséquences avant que les difficultés liées à cette double appartenance n’apparaissent. Ce phénomène de double appartenance caractérise la « résolution bancaire ». A première vue et en décomposant simplement l’expression par paraphrase, la « résolution bancaire » est le mécanisme par lequel la défaillance d’une banque est résolue d’une façon spécifique.
Certes le Législateur a fait une large place au superviseur bancaire y compris dans le droit commun des procédures collectives puisque, par l'article L. 613-27 du Code monétaire et financier, une procédure de droit commun ne peut être ouverte contre une banque qu'après l'avis conforme de l'Autorité de
La « résolution bancaire » relève donc du droit bancaire, personne n’en doute. Dans ce cadre, elle est propre à tous les établissements bancaires et d’autres plus précisément visés par les textes.
Mais ni cette spécificité ni cette mention d’un droit spécial ne suffisent
En effet, le rapport entre le droit spécial et le droit commun implique simplement que là où une disposition spéciale est prévue la disposition générale cesse de s’appliquer
La question pratique apparaît: si une banque défaillante se trouve dans une situation de fait qui n’est régie par aucune disposition spéciale, faudra-t-il considérer que l’organe en charge du dossier confronté à une lacune peut, voire doit, aller chercher une règle du corpus du droit commun des procédures collectives, en ce qu’il contient les principes directeurs ? Peut-on considérer qu’une partie prenante, par exemple un créancier de la banque défaillante, peut saisir le
D’une façon moins immédiatement pressante mais tout aussi ingénieuse, puisque la résolution bancaire ne serait qu’une procédure collective, certes très particulière mais d’une espèce de ce genre-là, l’on pourrait songer à améliorer le genre à partir du genre particulier qu’est la « résolution bancaire » ? En effet, pourquoi ne pas raisonner dans l’autre sens… Penser que ce qui a justifié cette extraction du droit commun pour construire cette procédure spéciale pourrait être opérée de la même façon, non seulement par le Législateur, mais encore par le
Pour l’admettre et pour aller jusque-là, il faut briser le rapport de l’espèce au genre en affirmant que la « résolution bancaire » est plutôt un outil du droit de la
Cela peut être soutenu, mais cela doit être démontré.
Autant poser la question à froid. Avant qu’elle ne soit posée à vif à des juges dans des dossiers décisifs. Non seulement pour anticiper d’éventuelles difficultés, par exemple liées à des lacunes dans le dispositif de la résolution bancaire, mais encore pour s’en inspirer dans d’autres situations analogues car d’autres opérateurs ressemblent aux banques, en tant que certaines entreprises sont « cruciales » pour le
Les spécialistes
Il s’agit ici de mettre le mécanisme de « résolution bancaire » non seulement face à ce droit commun-là mais encore face au droit commun de la
Les deux droits communs, procédures collectives et droit de la
Entre les mécanismes visant à éviter la défaillance bancaire (
Cœur technique, la résolution bancaire n’est certes pas le cœur stratégique du triple dispositif, ce cœur stratégique étant logé dans le premier pilier. En effet, si le système de
Ainsi, dans une Union bancaire réussie, le premier pilier serait si performant que le deuxième pilier (résolution bancaire) ne serait jamais activé et le troisième pilier (fond de garantie) serait inutile. De la même façon qu’un
Cette virtualité n’empêche pas que la bonne conception des deuxième et troisième piliers est pourtant essentielle pour la crédibilité mondiale de l’Union bancaire européenne, c’est-à-dire la crédibilité de l’euro, par la démonstration que, d’une part, les fonds de garantie sont effectivement disponibles dans l’hypothèse où une banque s’effondrerait et que, d’autre part, la résolution bancaire est un mécanisme juridiquement maîtrisé le jour où il serait activé par les superviseurs.
Pour anticiper le fonctionnement concret et sûr de la résolution bancaire, il est pertinent de se demander si elle constitue un mécanisme enchâssé dans le droit de la
Son appellation même de « résolution bancaire », premier outil du processus de qualification, n’est pas d'un grand secours. En effet, cette expression, nouvelle, est une simple transcription de la langue anglaise. A étudier la façon dont le mécanisme de résolution bancaire a été mis en place il s’agit d’un moment dans la gestion d’une
L’examen du droit positif permet de confronter la « résolution bancaire » et au droit commun des procédures collectives et au droit commun de la
I. LA « RÉSOLUTION BANCAIRE", PROCÉDURE COLLECTIVE SPÉCIALE OU INSTRUMENT SYSTÉMIQUE DE
De nombreux éléments font penser que la résolution bancaire est une espèce de procédure de défaillance d’une entreprise (A). Mais il apparaît qu’il s’agit avant tout d’un mécanisme de
A. LES ÉLÉMENTS DE QUALIFICATIONS DE LA RÉSOLUTION BANCAIRE COMME PROCÉDURE SPÉCIALE DE DÉFAILLANCE D’UNE ENTREPRISE
Pour affirmer que la résolution bancaire est une procédure collective spéciale, concourent des éléments de texte (1), mais encore des éléments plus substantiels (2). On en est d'autant plus convaincu que le droit de la résolution bancaire a reçu de la part du
1. Les éléments de texte : relation de genre à espèce dans le droit des procédures collectives à travers la lettre des deux corpus
Le Code monétaire et financier exclut le droit des procédures collectives, mais cela signifie que les dispositions spéciales s’appliquent plutôt que les générales, cela n’exclut pas tout droit commun dès l’instant qu’il contient des droits fondamentaux. C’est notamment l’enseignement de la décision rendue par le Conseil constitutionnel le 6 février 2015, qui pose que le pouvoir du superviseur de transférer d’une façon forcée un portefeuille d’
Plus encore, le droit des procédures collectives fait partie du droit économique, constituant sans doute historiquement la première manifestation de celui-ci : il est gouverné par les fins poursuivies. Cette nature téléologique a été posée dans l’article 1er de la loi de 1985 auquel la jurisprudence a donné pleine valeur normative : le
La résolution bancaire est elle-même conçue comme un « instrument » pensé en fonction de sa finalité : la constitution par l'organisme administratif d’une nouvelle banque étant une façon de sauver l’entreprise, tandis que l’apurement du passif est plus finement pris en charge par l’intervention de multiples mécanismes extérieurs. Même méthode donc, voire mêmes fins, puisque la sauvegarde de l’entreprise est le
2. Les éléments communs de fond entre le droit commun des procédures collectives et la résolution bancaire
De la même façon, l’on retrouve dans les deux corpus des soucis non plus analogues mais identiques. En premier lieu, ils partagent le premier souci commun de la prévention des difficultés. L’un des traits marquant de l’évolution du droit des procédures collectives est le souci de prévenir les difficultés de l’entreprise, notamment par l’
La même idée est à l’œuvre dans l’Union bancaire. En effet, dans le droit commun, la défaillance d’une entreprise est traitée par le redressement ou par la liquidation, ce à quoi le législateur a ajouté en 2005 la procédure de sauvegarde. Dans le mécanisme de la résolution, l’optique n’est plus tant un choix mais plutôt un mélange opéré entre les deux branches de l’alternative pour obtenir les deux effets : l’organe de résolution va réunir des actifs pour les céder (bad bank) et en rassembler d’autres pour permettre à l’établissement de poursuivre son activité d’une façon durable et solide (good bank), la liquidation étant l’ultime solution, comme dans le droit commun des procédures collectives.
Quant à la procédure commune de sauvegarde, sorte d’anticipation du redressement avant la cessation des paiements, on en retrouve l’esprit dans les dispositions spéciales qui permettent à l’organe administratif de
En deuxième lieu, dans les deux cas il s’agit bien toujours de « plans » qui seront conçus et s’appliqueront par la volonté de la puissance publique, avec les expropriations requises et le même sacrifice des créanciers ordinaires
En troisième lieu, le mécanisme de résolution bancaire est résolument tourné vers l’avenir : il s’agit de trouver une solution pour l’avenir : faire revivre la banque, éviter que le système ne s’écroule. Ainsi, quand une autorité de résolution constate que la défaillance de la filiale d’un groupe est avérée ou prévisible, elle transmet au superviseur, sur une base consolidée, ainsi qu’aux autorités de résolution du collège d’autorités de résolution, la décision relative à la défaillance et les mesures de résolution ou autres mesures d’insolvabilité que l’autorité
Ces analogies, voire ces identités, expliquent que le droit commun des procédures a déjà été activé en cours de résolution bancaire.
3. L’observation d’activation de procédures et raisonnement de droit commun en cours de résolution bancaire
Lorsque la
Pour interpréter la lacune du droit applicable, la Cour anglaise devait en revenir soit au droit commun des procédures collectives, soit au droit commun de la
La Haute Court of Justice de Londres, par son arrêt du 7 août 2015, Goldman Sachs v/ Novo Banco
La Cour de Justice de l'Union europenne (CJUE), qui de la même façon que par son arrêt du 16 juin 2015 a au contraire imposé une interprétation très large des Traités pour justifier l'intervention de la BCE dans le refinancement des dettes souveraines
B. LA RÉSOLUTION BANCAIRE, ÉLÉMENT INDISSOCIABLE DE LA
Les conditions d’ouverture de la Résolution bancaire ne sont pas les mêmes que celle d’une procédure collective. Il faut tout d’abord que soient réunies les conditions du bénéfice d’une procédure collective ordinaire puisqu’il faut que l’établissement ne soit plus viable au regard des conditions de fonds propres exigées pour l’agrément ou que sa défaillance soit avérée ou prévisible et qu’il n’existe aucune perspective raisonnable pour qu’une autre mesure de nature privée n’empêche la défaillance dans un délai raisonnable.
Mais il faut encore que la résolution soit nécessaire dans l’intérêt public pour mieux atteindre un ou plusieurs objectifs de la résolution qu’une procédure d’insolvabilité. A défaut l’établissement est liquidé selon la procédure d’insolvabilité de la procédure nationale.
Ainsi la procédure spéciale vise plus que le droit commun, droit plus « ordinaire » que la première, qui intervient avec la violence de sa restructuration forcée, du refinancement public, des cessions en bloc, etc., parce qu’elle sert davantage et un intérêt supérieur : non plus l’intérêt de la banque, mais l’intérêt du système bancaire, financier et économique dans son entier.
Cela justifie que la mesure de résolution puisse être appliquée à une holding même si elle ne remplit pas les conditions d’ouverture à condition qu’une ou plusieurs de ses filiales les remplissent, que leur défaillance menace le groupe et que la mesure prise à l’égard de la holding soit nécessaire à la résolution des filiales concernées ou de l’ensemble du groupe.
2. L'insertion de la technique de "résolution" dans un dispositif de
Les buts de la résolution bancaire sont d’assurer 'la continuité des fonctions critiques', d’éviter le
L'article L.612-1 du Code monétaire et financier qui décrit les missions de l'ACPR pose bien qu'il s'agit pour elle de "veiller à l'élaboration et à la mise en œuvre des mesures de prévention et de résolution des crises bancaires et financières". Ainsi, ce n'est pas tant la défaillance de la banque qu'il s'agit de "résoudre mais la "
De la même façon, le Conseil d’
Ainsi l'arrêt rendu par la Haute Cour de Londres est critiquable et il convient de tirer des conséquences techniques de la définition de la résolution bancaire comme traitement particulier d'une hypothèse générale, à savoir la défaillance d'un
II. LES CONSÉQUENCES TECHNIQUES DE LA « RÉSOLUTION BANCAIRE », TRAITEMENT D’UNE
Il faut donc redessiner la ligne de partage entre le droit commun des procédures collectives et le traitement d'une défaillance d'une banque qui met en cause la solidité du système économique dans son entier (A). En cela, la résolution bancaire n'est pas si "exceptionnelle". Elle est bien plutôt la pointe avancée de ce qui pourrait être le traitement de la défaillance de tout "opérateur économique crucial" (B).
A. LA LIGNE DE PARTAGE ENTRE DROIT COMMUN DES DÉFAILLANCES ET TRAITEMENT D’UNE DÉFAILLANCE D’UN
Soutenir que la résolution bancaire est avant tout un élément d'une disposition plus vaste de solidité des marchés financiers ne signifie pas que le droit commun des procédures collectives ne s'applique jamais. Cela signifie simplement que celui-ci doit être exclu lorsqu'il contrarie cette finalité de solidité (1) et implique au contraire qu'il est bienvenu lorsqu'il est neutre, voire la renforce (2).
La finalité de la résolution bancaire est la protection présente et future du système bancaire et financier. C'est à ce titre que la directive du 15 mai 2014 a protégé les déposants, évitant ainsi par avance tout effet de panique, dévastateur du système
C'est à ce titre que ceux-ci, créanciers du banquier dépositaire, sont protégés par la garantie des dépôts, la résolution bancaire (deuxième pilier) étant indissociable des autres piliers
Dans le silence des textes, il convient d'exclure tout ce qui serait contraire à ces objectifs. C'est ce pourquoi le droit spécial doit fermer les portes du droit commun, si celui-ci dans le cas considéré doit aboutir à des résultats contraires à ceux recherchés par le droit spécial. C'est pourquoi les textes ont institué le régulateur comme une sorte de "gardien de la porte du droit commun", en ce que c'est l'ACPR qui donne un avis conforme pour que les marches du
Le
2. Admettre le droit commun des procédures collectives lorsqu'il est neutre, voire concourt à la finalité de la résolution bancaire elle-même
La résolution bancaire s'efforce d'être neutre par rapport au droit des procédures collectives. Ainsi les créanciers sont compensés de la même façon, le fond de garantie intervenant au besoin pour combler la différence de traitement entre les deux régimes
Si une technique du droit commun des procédures collectives ne nuit pas à la résolution bancaire, voire sert les finalités de celle-ci, il n’y a pas de raison d’exclure le recours à celle-ci.
Ainsi l’article L. 613-27 du code monétaire et financier admet qu'une procédure de conciliation soit ouverte concernant un établissement par ailleurs apte à faire l'objet d'une résolution à un stade ultérieur. Certes, l'ouverture de la procédure de conciliation suppose l'avis conforme du superviseur mais une fois la procédure ouverte, c'est bien sur le chemin du droit que les parties s'acheminent.
Si d'autres voies existent, des parties pourraient donc les prendre, en avertissant sans doute le superviseur de leurs actions. Ainsi Jean-Luc Vallens a déjà à juste titre affirmé qu'un mandataire ad hoc pouvait être désigné en application du droit commun, en précisant que l'ACPR devait alors être consultée
B. LA RÉSOLUTION BANCAIRE, EXEMPLE DE CE QU’IL CONVIENT DE FAIRE EN CAS DE DÉFAILLANCE SYSTÉMIQUE D’UN
Le terme de « résolution bancaire » est une facilité de langage. Le mécanisme vise non seulement les banques mais encore tous les établissements dont la défaillance et le traitement ordinaire de celle-ci affecteraient le bon fonctionnement du système financier (1). Cela montre que cette technique doit être utilisée pour d'autres "opérateurs cruciaux" (2).
1. L'aptitude d'une entreprise à bénéficier de la "résolution" suivant l'effet sensible sur le bon fonctionnement du système bancaire et financier
Les textes applicables ne visent pas que les banques. Le système est même particulièrement fin et complexe
Mais l'on peut alors appliquer ce mécanisme média, puisqu'on ne sauve l'opérateur que pour sauver préventivement le système, à d'autres opérateurs que celui du système bancaire, financier ou assurantiel.
2. Envisager l’extension du modèle de la résolution aux « opérateurs cruciaux »
S'est dégagé un droit commun de la
Pourquoi ne pas aller plus loin en leur appliquant le mécanisme de la résolution si l'
Il faut en effet considérer qu'une entreprise est un "
L'on pourrait leur transposer bien des mécanismes, pour l'instant limités au
Dès lors, l'on pourrait aller plus loin. La question de la "faillite des personnes publiques", voire de la faillite des États, pour l'instant pudiquement recouverte du mouchoir de la puissance monétaire des États, est aujourd'hui laissée au pouvoir de la BCE de refinancer les dettes souveraines dont la Cour de Justice a bien voulu admettre par son arrêt du 16 juin 2015
___
Conclusion
Par cette évolution, le Droit a-t-il le front de poser la question : l'
Par nature, le droit des successions suppose la mortalité des êtres humains. Par nature, le droit des procédures collectives suppose la mortalité des entreprises
Lumhann, N., La notion de système,
Douaoui-Chamseddine, M., Droit commun des entreprises en difficulté et droit des défaillances bancaires et financières : convergences et influences, 2014 ;
V. infra.
Elle relèvent du droit français, en tant qu’elles sont régies par la Loi de séparation des activités bancaires et de régulation du 23 juillet 2013 qui a transformé l’Autorité de contrôle prudentiel (ACP) en Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR). Elles sont aussi visées en tant qu’elles développent leurs activités sur la zone euro, en cela régies par l’Union bancaire, dont l’un des « piliers » est constituée par ce mécanisme de résolution, tous les établissements bancaires relevant du contrôle de la Banque Centrale Européenne (à vérifier)
V. par ex. la présentation générale Roussel Galle Ph. et Douaoui-Chamseddine, M., Les défaillances bancaires et financières : un droit spécial ?, 2014.
Références générales ....
Sur le cas Banco Espirito Santo, v. infra.
Par ex. Prüm, A., Le nouveau cadre européen du traitement des faillites bancaires à vol d'oiseau, 2014.
Vallens, J.-L., La défaillance des établissements de crédit le recours au juge, 2014 : "Une fois la procédure administrative ouverte, l'autorité judiciaire n'est pas totalement écartée, mais il s'agit alors d'un rôle d'appui". Et l'auteur de citer de nombreux cas, expressément visés par le Code monétaire et financier ou non, où le juge sera compétent pour statuer alors même qu'une "résolution" est en train d'être opérée par les soins de l'ordre administratif.
Vallens, J.-L., La défaillance des établissements de crédit le recours au juge, 2014 : "Une fois la procédure administrative ouverte, l'autorité judiciaire n'est pas totalement écartée, mais il s'agit alors d'un rôle d'appui". Et l'auteur de citer de nombreux cas, expressément visés par le Code monétaire et financier ou non, où le juge sera compétent pour statuer alors même qu'une "résolution" est en train d'être opérée par les soins de l'ordre administratif.
La « leçon » qui est tirée des crises que l’Europe a observées puis subies à partir de 2008 est que les États, garants en dernier ressort, ne doivent plus être des payeurs automatiques et impuissants, encourageant l’aléa moral : c’est pourquoi le Droit offre désormais aux banques centrales ce pouvoir extraordinaire de résolution, leur permettant de « résoudre » notamment de démanteler l’établissement bancaire pour le faire renaître en servant au mieux les intérêts divergents dont la satisfaction est compromise et la sauvegarde urgente.
S’inspirant des travaux alors européens en cours, le législateur français a adopté précocement la Loi de séparation et de régulation des activités bancaires du 23 juillet 2013<; Cette loi a transformé l’Autorité de Contrôle Prudentiel (ACP) en Autorité de Contrôle Prudentiel et de Résolution (ACPR). La loi lui confie le « pouvoir de résolution » sur les banques, les établissements financiers et les compagnies d’assurances. Par avance, elle l’a rendue apte à jouer le rôle que lui attribuera par la suite le système européen par le Règlement du 13 juillet 2014.
En effet, si la dimension de l’établissement le requiert, la résolution bancaire sera conçue par un organe appuyé sur la Banque Centrale Européenne, le Conseil de Résolution Unique. Celui-ci va élaborer un plan de résolution, qui sera adopté par la Commission Européenne et mis en œuvre par le superviseur national, en France l’ACPR.
Bonhomme, R., La préservation du droit au paiement de certains créanciers, 2014 : "Sommes-nous très loin de la philosophie des procédures collectives ? L'esprit de sacrifice est toujours présent" (p.72).
Trois conditions sont nécessaires pour qu’une procédure de résolution soit déclenchée : la défaillance de l’établissement doit être avérée ou prévisible, il n’existe aucune perspective raisonnable qu’une autre mesure de nature privée empêche la défaillance dans un délai raisonnable, la résolution est nécessaire dans l’intérêt public. Cette dernière condition sera remplie quand la résolution est nécessaire pour atteindre, par des moyens proportionnés, un ou plusieurs objectifs prévus alors que la procédure de droit commun ne le permettrait pas. Si cette condition n’est pas remplie l’établissement est liquidé selon la procédure d’insolvabilité de la procédure nationale. Mais cette procédure ne peut être ouverte qu’à l’initiative ou avec l’accord de l’autorité de résolution. La loi a dû aménager la cohabitation des organes des procédures de droit commun et des organes désignés par l’ACPR. En effet, selon l’article L. 613-28 du Code monétaire et financier l’autorité de contrôle peut nommer un administrateur provisoire qui est investi de larges pouvoirs qui réduisent ceux accordés à l’administrateur nommé par le tribunal : l’administrateur désigné par l’ACPR a le pouvoir de gestion et de représentation de l’établissement tandis que l’administrateur judiciaire surveille les opérations de gestion. De même, en cas de liquidation judiciaire, le liquidateur nommé par l’ACPR coexiste avec le liquidateur judiciaire. L’article 613-29 du code répartit les compétences : le liquidateur judiciaire vérifie les créances tandis que le mandataire désigné par l’ACPR procède à l'inventaire des actifs, aux opérations de liquidation ainsi qu'aux licenciements.
High Court of Justice of London, 7 août 2015, ....
V. infra.
La directive 2014/59/UE du 15 mai 2014 a voulu protéger les déposants les plus modestes. Il s’agit d’éviter les retraits massifs à l’annonce des difficultés de l’établissement dépositaire avec le risque de contagion sur le secteur bancaire. En cas de liquidation judiciaire, alors que les créanciers seront traités en principe selon le droit commun, les déposants ordinaires bénéficieront de l’intervention du Fonds de garantie des dépôts et de résolution, jusqu’à un plafond de 100 000 euros. Leur sort est régi par les articles L. 312-4 à L.312-18 du code monétaire et financier. La directive 2014/49/UE oblige les Etats à mettre en place un niveau d’indemnisation supérieur en cas de rentrée exceptionnelle dans des cas très précis. Sont ainsi couverts : les comptes dépôts, les comptes courants, les comptes épargne.
Pour les créances entrant pour tout ou partie dans le champ d’intervention du fonds, la loi accorde une dispense de déclaration de la créance aux bénéficiaires de cette intervention. Le fonds informe les déposants et le mandataire judiciaire du montant des créances exclues du champ d'intervention et indique à chaque déposant les modalités de déclaration de ces créances auprès du mandataire judiciaire. Il lui précise également que le montant des créances entrant en tout ou partie dans son champ d'intervention, y compris la partie excédant le plafond d'indemnisation relatif au mécanisme de garantie applicable, n'a pas à être déclaré au représentant des créanciers.
Le mandataire judiciaire établit les relevés de toutes les créances. Ces relevés doivent être mentionnés par le juge commissaire, déposés au greffe du tribunal de commerce et faire l'objet d'une mesure de publicité. En cas de contestation, le déposant saisit à peine de forclusion le tribunal dans un délai de deux mois à compter de l'accomplissement de la mesure de publicité. Le délai d’indemnisation est actuellement en principe de vingt jours.
V. supra.
L’idée est de favoriser la distribution des crédits en facilitant leur mobilisation et de renforcer la concurrence. En profitent les porteurs d’obligations foncières et les porteurs d’obligations de financement de l’habitat. Les créances bénéficiant de ce privilège sont les crédits immobiliers assortis de garanties de premier rang, hypothèque ou sûreté immobilière, cautionnement d’établissement de crédit ou d’assurance, auxquels il faut ajouter les prêts à des personnes publiques, mobilisés ou consentis par la société de crédit foncier. Le transfert à la société de crédit foncier (SCF) mobilisatrice des contrats de prêts hypothécaires n’est pas affecté par la procédure collective des établissements prêteurs, cédants. En cas de défaillance de la SFC, les porteurs d’obligations foncières bénéficient d’un paiement à l’échéance contractuelle, ils ne subissent ni les effets de la suspension des poursuites, ni les délais d’un plan, et les actifs de la SFC leur sont réservés par priorité. Ils sont dispensés de déclarer leur créance, la déclaration est faite pour leur compte par le contrôleur spécifique. Ils priment tous les autres créanciers sur les actifs de la SFC. Pour les porteurs de billets de mobilisation de crédits immobiliers, les transferts des droits et sûretés ne sont pas affectés par la procédure collective de l’établissement de crédit prêteur, le porteur du billet pourra agir contre le débiteur cédé et échappera à la procédure de concours. Les obligations émises par les sociétés de financement de l'habitat bénéficient du même privilège de paiement que les obligations foncières.
En cas de transfert partiel des droits, actifs, et engagements de l’établissement et d’application du renflouement interne, les créanciers dont les créances n’ont pas été transférées et ceux dont les créances ont été dépréciées ou converties en fonds propres reçoivent en contrepartie de leurs créances un montant au moins égal à celui qu’ils auraient reçus si l’établissement avait été liquidé dans le cadre d’une procédure normale d’insolvabilité. Une valorisation est effectuée après l’exécution du transfert partiel par un expert indépendant ou par l’autorité responsable de la procédure normale d’insolvabilité donnant lieu à la liquidation de l’établissement. Si les créanciers visés ont reçu moins que ce qu’ils auraient eu dans le cadre d’une procédure ordinaire de liquidation, ils ont droit à la différence de la part du fonds de résolution.
Vallens, J.-L., La défaillance des établissements de crédit et le recours au juge, 2014, p.91 ; v. aussi dans le même sens G Bourdeaux, Le traitement judiciaire des institutions financières en difficulté, 2014, p.83.
Pour que l’établissement fasse l’objet d’une « résolution », à son bénéfice ou à son détriment, au bénéfice ou au détriment des personnes qui sont affectées par sa défaillance, il faut tout d’abord qu’il relève d’un État qui est membre de la zone euro.
Il est vrai que d’autres États de l’Union européenne peuvent conclure un protocole avec la BCE pour participer à l’Union bancaire et en bénéficier. L’on peut penser que les États dont les établissements bancaires et financiers opèrent en euros y ont intérêt.
Même si l’Etat membre de l’Union européenne n’y procède pas, ou s’il n’appartient pas à l’Union européenne, dès l’instant que ses établissements interviennent sur l’euro, l’Etat peut avoir intérêt à décalquer les trois piliers et à organiser dans son droit interne une « résolution » pour ne pas subir un désavantage compétitif.
Dans ce mécanisme de « greffe », bien connu en droit comparé[11], il ne s’agit pas tant d’emprunter mais plutôt de tirer les conséquences de l’unité du marché. C’est cette même unité systémique qui peut justifier l’extension du mécanisme de résolution à d’autres opérateurs que ceux expressément visés.
En effet, le mécanisme européen de résolution a à première vue un domaine assez limité, effet-retour de l’article 127.6 du Traité de fonctionnement de l’Union Européenne (TFUE) qui restreint le pouvoir de la BCE à « des missions spécifiques ayant trait aux politiques en matière de contrôle prudentiel des établissements de crédit et autres établissements financiers, à l'exception des entreprises d'assurances. ». C’est pour cela que le plan de résolution n’est que dessiné par le Conseil de Résolution appuyé sur elle, son adoption étant faite par la Commission européenne.
Mais qui cela trompe-t-il ? La BCE est si ce n’est toute-puissante à tout le moins très « écoutée » dans cet univers de « droit souple », dans laquelle la résolution de la banque Santi Santo s’est faite alors même que les textes de droit européen étaient encore en discussion.
De la même façon, les entreprises d’assurances et tous les établissements financiers de petites tailles relèvent du seul organe de résolution nationale. Mais là aussi la puissance de doctrine européenne sera très forte.
Frison-Roche, M.-A., ....
Frison-Roche, M.-A., Le droit de la compliance, D.2016, ...
Frison-Roche, M.-A., La notion d'opérateur cruciale, 2010 ; Réguler les opérateurs cruciaux ....
La technique du "testament" peut être ainsi décrite : Pour que la « résolution » puisse se passer au mieux, il faut que l’instant de la mort ait été préparé que l’on puisse dire efficacement « la banque est morte, vive la banque ! ». C’est pourquoi la technique des « testaments » a été mise en place : les établissements de crédit doivent élaborer et tenir à jour des plans de redressement « indiquant les mesures que prendrait l’établissement ou le groupe, dans différents scénarios, pour gérer les problèmes de liquidités, réunir des capitaux ou réduire les risques encourus »[12]. Ces plans ont pour objectif de prévoir les mesures devant être prises en cas de détérioration significative de la situation financière de l’établissement ou du groupe pour rétablir la viabilité et la solidité financière. La directive distingue plan de l’établissement et plan du groupe. Les plans sont conçus par l’établissement ou la société mère pour les groupes et contrôlés par l’autorité compétente.
Ces plans de résolution, dont l’élaboration est également imposée pour l’établissement et pour le groupe, doivent identifier les scénarios possibles, même en cas de crise systémique, les mesures à mettre en place et les financements destinés à les exécuter. Ils déterminent la manière dont les fonctions critiques et les activités fondamentales pourraient être juridiquement et économiquement séparées des autres fonctions et activités pour assurer leur continuité en cas de défaillance de l’établissement. Ils décrivent les mesures à prendre pour diminuer ou supprimer les obstacles à la possibilité de résolution de l’établissement ou du groupe. Des règles sont proposées pour aider et encadrer le support financier intragroupe. Les plans sont élaborés par l’autorité de résolution de l’établissement après consultation de l’autorité compétente et des autorités de résolution des Etats membres où se trouvent des succursales d’importance significative. Pour les groupes transnationaux le plan est fait par l’autorité de résolution au niveau du groupe avec les autorités de résolution des Etats membres qui ont élaboré un plan de résolution particulier à la filiale établie sur leur territoire. En cas de désaccord entre les autorités de résolution, l’Autorité bancaire européenne (ABE) peut être saisie pour trancher la question. Si ces obstacles sont détectés l’établissement doit proposer à l’autorité un plan pour y remédier. La directive prévoit que l’autorité peut recommander de se séparer de certains actifs, de limiter ou interrompre certaines activités, exiger que l’établissement modifie ses structures juridiques et opérationnelles pour faire en sorte que ses fonctions critiques puissent être juridiquement et économiquement séparées des autres fonctions pour l’application des instruments de résolution, exiger d’une entreprise mère qu’elle crée une holding financière... L’article 27 de la directive du 15 mai 2014[13] prévoit les conditions d’une intervention précoce : si un établissement enfreint ou est susceptible, dans un proche avenir, d’enfreindre les exigences des règlement des 26 juin 2013 et 15 mai 2014 et des directives des 23 juin 2013 et 15 mai 2014 (2014/65 UE) en raison, entre autres, d’une dégradation rapide de sa situation, les États membres doivent veiller à ce que les autorités compétentes puissent prendre un certain nombre de mesure. Il s’agit de la restructuration de la dette conformément au plan de redressement, l’application des mesures du plan ou l’actualisation du plan de redressement, l’élaboration d’un plan d’action pour régler les problèmes avec un calendrier pour son application, la convocation d’une réunion des actionnaires de l’établissement, la soumission de certaines décisions aux actionnaires pour adoption, la révocation des membres du conseil d’administration et de la direction générale, de recueillir toutes les informations nécessaires en vue d’actualiser le plan de résolution et de préparer la résolution définitive.
D.2015, 1320, 17 juillet 2015, obs. E. AUtier, , p.2145 obs. H. Synvet ; JCP 2015, p.814, obs. Th. Bonneau ; Europe 2015, Repères 7, obs. D. Simon.
V. aussi Frison-Roche, M.-A., ..., D. 2015, ....
Sur l'importation du vocabulaire de "vie" et de "mort" sur les cycles économiques, notamment la "néo-mortalité" des entreprises dans la conception même du droit des procédures collectives : ....
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