12 décembre 1986

Base Documentaire : 02. Cour de cassation

Cour de cassation, assemblée plénière

Arrêt du 12 décembre 1986, Pelletier

Les contrats proposés à des personnes sont dits "mixtes", en ce que celles-ci versent régulièrement de l'argent. Si lorsque le contrat arrive à son terme la personne est encore en vie, alors un capital est versée à celle-ci. Si la personne décéde avant que le contrat n'arrive à son terme alors, alors le capital qui a été ainsi constitué  par le souscripteur revient à la personne désignée par le contrat.
 
Ce type est appelée une "assurance vie-décès".

Dans cette affaire un homme marié signe un tel contrat, très courant, auprès du GAN, en 1967, et se désigne lui-même comme bénéficiaire ou, en cas de décès, son épouse. Mais en 1977, le même jour, il retire le maximum qu'il peut du capital qu'il avait remis à l'assureur et substitue à son épouse les enfants mineurs. Un mois après, il décède.

La succession s'ouvre.

L'épouse estime que le capital est demeuré dans le patrimoine du défunt et qu'en fonction du droit des régimes matrimoniaux, elle doit percevoir la moitié de ce capital.

Les enfants soutiennent qu'il s'agit non pas d'un capital épargné, ce qui le ferait entrer en communauté au bénéfice des deux époux, mais bien d'un contrat d'assurance. Or, le bénéficiaire d'un contrat d'assurance dont le bénéficiaire est librement désigné par le souscripteur seul. Ici, les bénéficiaires étaient au moment du décès de celui-ci les enfants et non l'épouse.

La question essentielle qui se posait à la Cour de cassation était donc de savoir si un contrat d'assurance vie-décès est un contrat d'épargne (ce qui interdit un changement de bénéficiaire sans l'accord du conjoint) ou un contrat d'assurance (ce qui permet un changement de bénéficiaire par la seule volonté du souscripteur).

L'enjeu est considérable, du fait que ce contrat est très courant et que si l'espèce telle qu'on la rencontre ici est assez peu courante, en revanche, le régime fiscal n'est pas du tout le même en 1986 suivant qu'on retient la qualification de produit d'épargne ou de produit d'assurance.

La Cour de cassation, par son arrêt d'Assemblée plénière , très laconiquement, dit qu'il convient d'appliquer l'article L 132-12 du Code des assurances qui permet au souscripteur d'un contrat d'assurance de désigner des bénéficiaires d'un contrat d'assurance-vie, lesquels ne sont pas soumis au droit des successions.
 
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Cet arrêt a été très contesté.
On mesure que l'enjeu est essentiellement fiscal.
La sécurité juridique n'a pas été pour autant satisfaite.
En effet, la Cour de cassation, par un arrêt de la Première chambre civile du 31 mars 1992, Praslicka va adopter la solution adverse. Mais comme elle le fera dans une situation de divorce et non pas de décès, l'on n'a pas la certitude d'un revirement ou non.

Il faudra attendre une simple réponse ministérielle, faite à un député le 26 juin 2010, la "réponse Bacquet", pour que chacun s'en tienne à ce qu'avait "dit" un ministre (la "doctrine DSK"), à savoir la neutralité fiscale du mécanisme, le bénéficiaire n'ayant rien à payer quelle que soit la qualification retenue pour le mécanisme, ce qui laisse du coup la question de droit civil au second plan.
 
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