11 avril 2012

Base Documentaire : 03. Conseil d'Etat

Conseil d'Etat

Arrêt d'Assemblée, n°322326, 11 avril 2012, GISTI et autres

Le Code de la construction et de l'habitation prévoit dans son article L.200-1 "le droit à un logement décent et indépendant", un décret en Conseil d'Etat détaillant les conditions d'application dans lesquelles les personnes peuvent bénéficier de ce "droit au logement".

En effet, ce droit au logement opposable (DALO) ne joue qu'au bénéfice des personnes "résidant d'une façon permanente" en France. La loi laisse à un décret le soin de définir plus précisément ce que signifie être résident permanent.

Ainsi, ce droit au logement opposable (DALO) a  été établi non seulement par la loi (insérant l'article L.200-1 précité), mais encore du décret du 8 septembre 2008, insérant l'article R.300-2 dans le même Code pour fixant les conditions de la permanence de la résidence

Le texte décrétale définit le caractère "permanent" de la résidence en exigeant tout à la fois une durée minimale de 2 ans en France et au mons un renouvellement de carte de séjour, dès l'instant qu'il s'agit de personnes n'ayant pas la nationalité française.

Le décret est attaqué par un recours pour excès de pouvoir devant le Conseil d'Etat. Les requérants sont notamment des associations pour la réinsertion par le logement et le groupement de  soutien des immigrés (GISTI).

Ils soulèvent une non-conformité du décret à la Convention internationale  concernant les travailleurs migrants et une non-conformité au principe constitutionnel d'égalité, puisque les personnes de nationalité non-française et les personnes de nationalité française ne sont pas traitées de la même façon, sans justification puisqu'elles sont dans la même façon en matière de logement.

Le Conseil d'Etat rappelle que "les stipulations d'un traité ou d'un accord régulièrement introduit dans l'ordre juridique interne conformément à l'article 55 de la Constitution peuvent utilement être invoqués à l'appui d'une demande tendant à ce que soit annulé un acte administratif ou écartée l'application d'un loi ou d'un acte administratif incompatible avec la norme juridique qu'elles contiennent, dès lors qu'elles crées des droits dont les particuliers peuvent directement se prévaloir".

Il faut donc, pour qu'il y a contrôle de conformité que le traité international doit doté d'un "effet direct".

En l'espèce, le traité international sur les travailleurs migrants a un effet direct et interdit les discrimination de nationalité. Ainsi, le traité peut être utilement évoqué par les requérants et le décret n'est pas compatible avec celui-ci, en ce qu'il pose des restrictions qui n'existent pas pour les ressortissants français et fait des distinctions injustifiées entre différents titres de séjour.

En outre, le principe constitutionnel d'égalité n'interdit pas au pouvoir réglementaire de traiter différemment des personnes qui sont dans des situations différentes. En l'espèce, la différence de traitement ne se justifie pas par un motif d'intérêt général, ni dans la distinction entre étranger et national, ni dans les distinctions entre les différents titres de séjour.

C'est pourquoi les requérants sont fondés à obtenir l'annulation du décret, et pour non-conformité à la Convention internationale et pour inconstitutionnalité.

Le Conseil d'Etat tempère l'effet rétroactif de l'annulation du décret en limitant l'anéantissement de celui-ci au futur, pour préserver les situations acquises, dans le souci de l'ordre public et des intérêts privés en cause et évitant les conséquences manifestement excessives qu'aurait une annulation rétroactive.

 

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Ainsi le Conseil d'Etat opère en même le contrôle de conventionnalité et le contrôle de constitutionnalité.

 

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Pour lire un commentaire qui aurait voulu que le Conseil d'Etat aille encore plus loin et n'exige pas même que le traité international ait un "effet direct" pour que l'anéantissement de la norme inférieure contraire puisse s'opérer, v. Petites Affiches, 13 septembre 2012, p.7-21.

 

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