CARBONNIER, Jean
Référence complète : CARBONNIER, Jean, La Bible et le droit, in Travaux de l'Institut de Droit et d’Économie comparés, La révélation chrétienne et le droit, Annales de la Faculté de Strasbourg, t.IX, Dalloz, 1961, p.115-129.
Lire le résumé ci-dessous.
Cette intervention vaut à la fois synthèse des articles précédents, correspondant à autant d'interventions composant un colloque de philosophie du droit, qui s'était tenu en 1959 (pour lire la table des matières de l'ouvrage qui restitue le programme, cliquez ici).
Mais se démarquant immédiatement des autres articles qui se demandent si l'ordre juridique garde trace des préceptes religieux ou au contraire prend distance par rapport à eux à travers le principe de laïcité, le doyen Carbonnier déplace la question.
Il suggère que le droit n'est pas réduit à des lois mais prend aussi la forme de jugements, plus intuitifs, plus charismatiques, où l'on pourrait davantage la trace de Dieu que dans la règle. Il montre qu'il existe aussi des lois démoniaques (de l'anti-droit), si le droit peut émaner de Satan, pourquoi ne pourrait-il émaner de Dieu ?
En outre, plutôt que de toujours opposer Bible et droit, pourquoi ne pas percevoir que la Bible doit être le livre de droit des Chrétiens ?
Evoquant d'une façon assez étonnante le "fondamentalisme" et l'usage des préceptes bibliques pendant la seconde guerre mondiale..., Carbonnier reprend tout d'abord l'Ancien Testament. Il a formé un corpus juris, à travers la loi mosaïque, par exemple le repos du 7ième jour.
Mais la Bible a-t-elle été dans son ensemble "reçue" par le droit, comme le droit romain en droit allemand ? On peut le penser au moment de la Réforme, du fait de l'accès direct des protestants au Livre.
La Confession de la Rochelle de 1571 donne à la Loi la valeur d'une règle de vie et ne lui dénie pas par nature toute portée juridique. C'est pourquoi des courants réformistes cherchèrent à unir les règles de vie issues de celà et des règles juridiques analogues. L'auteur évoque de nombreuses discussions entre savants pour déterminer sur tel ou tel points s'il faut reprendre en droit positif des prescriptions de la loi mosaïque.
Puis, Carbonnier soulève l'objection majeure : même si l'on reprend la même règle en droit, elle a été dévitalisée dès l'instant qu'elle n'est plus animée du souffle religieux que lui donne l'Ancien Testament.
Puis, dans une seconde partie de l'article, le doyen Carbonnier examine le Nouveau Testament. Il n'est pas le droit d'un Etat, ce qui rend difficile de soutenir l'hypothèse d'une greffe (comme on pouvait le dire pour le droit mosaïque), mais on y trouve tout de même des prescriptions de conduites précises, c'est-à-dire des règles.
Il n'y aura pas, pas plus que pour l'Ancien Testament, de réception en bloc.
En outre, le Nouveau Testament est centré sur le sermont sur la montagne, qui paraît la négation du droit, en ce qu'il prescrit notamment : "ne juge pas", etc.
Mais dans le Nouveau Testament entre les règles potentiellement juridiques et les règles potentiellement antijuridiques, on peut soutenir qu'il existe une troisième catégorie : les préceptes "charismatiques" que sont les lois d'amour et de grâce.
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