10 août 2004

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Publication : participation dans une publication juridique collective

Principes du droit des sociétés et prudence de gouvernement, in "Liber Amicorum Guy Horsmans"

par Marie-Anne Frison-Roche

Référence complète : FRISON-ROCHE, Marie-Anne, Principes du droit des sociétés et prudence de gouvernement, in Liber Amicorum Guy Horsmans, éd. Bruylant, 2004, pp.461-470.

Traditionnellement, le bon gouvernement des sociétés était laissé à la loi naturelle de la prudence patrimoniale, car si le dirigeant est associé, la gestion l'entrainant dans la fortune ou la ruine de l'action sociale, il sera de ce fait prudent. La financiarisation de l'économie, la dislocation entre actionnariat et direction, l'imagination juridique et financière, ont fait perdre cette naturelle loi. Tentent de la rendre ces artefacts que sont l'éthique ou la transparence. Plus encore, la procédure entre dans la société, à travers les droits de réponse, d'information, de préparer ses arguments. Comme Habermas le montra pour l'espace politique, l'espace des affaires se replie aujourd'hui sur une légitime procédurale.

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Dans sa conception libérale, le droit limite le pouvoir en conservant aux individus l'espace de leur liberté, en supposant qu'ils connaissant leurs intérêts propres, qu'ils font les servir, et que cela-même constitue la limite de leur pouvoir, la limitation du pouvoir étant ce pour quoi est fait le droit.

Lorsqu'il s'agit de gouverner les sociétés, le raisonnement classique a consisté à s'en remettre à la prudence patrimoniale. En effet, la personne ne va pas nuire à ses intérêts financiers. Dès lors, il faut mais il suffit que le dirigeant social soit associé pour que, étant entraîné dans la fortune ou dans la ruine de la gestion, il soit sage dans celle-ci. La loi naturelle de la prudence suffit à le tenir. Cette conception ploutocratique du pouvoir fonde dans la société commerciale le lien entre le droit de vote et l'ampleur de la détention du capital. On observe d'ailleurs que les sociétés que l'on désigne comme des sociétés "patrimoniales de famille" soient gérées plus sagement, efficacement et sur le long terme que les autres.

Mais la financiarisation de l'économie a eu raison de cette logique patrimoniale. L'assise patrimoniale n'est plus accessible et il est si aisé d'acquérir le pouvoir si en payer le prix. L'alliance de l'imagination du droit et de la finance y pourvoit.

Il faut donc regarder d'autres modes, cette fois-ci artificiels, pour que les sociétés soient gouvernées sagement. Il pourra s'agir de l'éthique ou de la transparence, l'ensemble s'accompagnant d'une forte pénalisation.

En outre, la procédure pénètre dans la société, non seulement les droits de la défense au profit du dirigeant que l'on songe à révoquer mais encore l'organisation de débat et les droits à l'information, qui finissent à faire ressembler la vie sociétaire à un procès permanent. La légitimité du pouvoir devient procédural. Habermas l'avait démontré pour la vie politique. Cela est désormais acquis pour la vie des affaires.

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