Le projet de loi insérant sur le droit français le mariage homosexuel a été voté en première lecture par l'Assemblée Nationale. Il va être discuté par le Sénat. Des femmes, principalement des professeurs, ont écrit ensemble une lettre à chaque sénatrice et sénateur, pour exprimer leur désapprobation. Selon elle, un tel texte est contraire à l'intérêt de l'enfant, le seul critère à considérer, alors le mariage homosexuel aboutit nécessairement à la PMA et à la GPA. L'enfant sera le plus souvent privé du droit de connaître sa filiation et deviendra par ailleurs l'objet d'un marché. Le droit ne doit pas permettre cela.
(Texte de la loi adressée à chaque sénatrice et sénateur)
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« Simone », collectif d’intellectuelles
[Simone.Collectif@gmail.com->mailto:Simone.Collectif@gmail.com]
Lettre aux Sénateurs et Sénatrices de la République française
Paris, le 4 avril 2013
Madame la Sénatrice, Monsieur le Sénateur,
Intellectuelles de nombreuses disciplines, nous souhaitons vous faire part de notre préoccupation quant au projet de loi concernant l’ouverture du mariage aux personnes de même sexe.
Le rapport de la mission sur l’adoption présidée par Jean-Marie Colombani en mars 2008 le rappelait clairement : « il ne peut y avoir un droit à l'adoption d'un enfant : l'adoption ne doit exister que dans l'intérêt de l'enfant et s'inscrire dans une politique de protection de l'enfance ».
Dans le projet de loi, le raisonnement a bel et bien été inversé. L’enfant, de sujet de droit, devient objet de droit : la loi l’institutionnalise. Les droits et l’intérêt supérieur de l’enfant sont ainsi sacrifiés au profit de l’intérêt des adultes – seuls à avoir voix au chapitre – à réaliser leur « projet » d’enfant. Or, un enfant n’est pas un « objet », ni un « projet », mais une personne. Le premier de ses droits est celui à une filiation structurante et comparable à celle des autres enfants.
Imposer à des enfants un état civil déniant la différence des sexes qui a présidé à leur engendrement, cela conduit à poser que le père et la mère sont interchangeables, bannissant la raison et la signification des mots.
Ce contresens fait également d’autres victimes par ricochet : les femmes. Si deux hommes peuvent former un couple parental en adoptant, on peut s’attendre à voir réclamer le recours à la gestation pour autrui (GPA). C’est extrêmement grave. Déjà, la pression s’accentue pour légaliser cette pratique en France ou, à défaut, pour la légitimer à l’étranger. S’ouvriraient alors des trafics en tout genre dont les femmes les plus fragiles socialement sont, partout, les premières victimes.
Quant à l’accès des couples de femmes à la procréation médicalement assistée (PMA), il constituerait un effacement délibéré des origines. Or, ni les nouvelles techniques de procréation ni les innovations juridiques ne doivent aboutir à légitimer la « fabrication » délibérée d’enfants adoptables, pour la seule satisfaction du désir des adultes. Car quoi qu’on en dise, la réalité des chiffres s’impose : la majorité des couples de même sexe ne pourra pas accéder à l’adoption conjointe. Ainsi, ce droit dont on évoque la perspective est un leurre pour conduire vers toutes formes de procréation assistée.
La transformation de l’enfant en objet de droit aboutit à la transformation de celles qui enfantent en « donneuses d’engendrement », selon le mot même de Denis Quinqueton (HES). Cela aliène l’humanité de toutes les femmes, qu’elles soient mères ou non.
D’une façon générale, la loi doit protéger les plus faibles, et non ceux qui parlent le plus fort. Nous comptons sur vous pour vous opposer à ce projet de loi et pour mettre en place des lois permettant une réelle égalité de droits en terme de fiscalité et succession, et pour prévoir des mesures facilitant l'exercice par le beau-parent de son rôle éducatif.
En nous tenant à votre disposition pour vous exposer plus avant notre position, nous vous prions d'agréer, Madame la Sénatrice, Monsieur le Sénateur, l'expression de notre plus haute considération,
Liste de signataires
Éliette Abécassis, écrivain
Nathalie Heinich, sociologue
Nathalie Sarthou-Lajus, philosophe
Alice Ferney, écrivain
Hélène Gisserot, procureure générale honoraire près la Cour des comptes
Marie-Anne Frison-Roche, professeur agrégée des Facultés de Droit
Monette Vacquin, psychanalyste et essayiste
Béatrice Joyeux-Prunel, maître de conférences en histoire de l’art contemporain
Marie Jauffret, mathématicienne
Cécile Hussherr, maître de conférences en littérature comparée
Marie-Bénédicte Vincent, maître de conférences en histoire contemporaine
Véronique Lemoine Cordier, psychologue - psychothérapeute
Claire Masurel-Murray, maître de conférences en anglais
Cécile Bonnand, docteur en physique
Clotilde Fermanian, mathématicienne, professeur des universités
Pauline Bruley, maître de conférences en langue et littérature françaises
Aude Cailliaux, docteur en physico-chimie, engagée dans une structure associative d’aide aux personnes en grande précarité, et particulièrement des femmes
Séverine Blenner-Michel, maître de conférences en histoire et en archivistique contemporaine
Marie-Camille Glorieux, psychopédagogue - psychothérapeute
Béatrice Libori, maître de conférences en droit public
Clémence Guerrand, pianiste, enseignante et concertiste
Marie Bahurel, professeur agrégée de philosophie
Ana-Luana Stoicea-Deram, sociologue, formatrice en politiques sociales
Marie Bresson, enseignante en mathématiques financières
Anne-Sophie Diagora, développeuse de talents
Amélie de Chaisemartin, agrégée de lettres
Laurence Deffayet, historienne
Laurence Bloch, docteur en chimie
Elisabeth Bullier, grammairienne
Chantal Delsol, philosophe, professeur des universités, membre de l’Institut
Agnès Lachaume, agrégée de lettres modernes
Marie-Christine Gillet-Challiol, professeur de philosophie
Hélène Grelier-Deneux, maître de conférences en langue et littérature grecques
Bénédicte Sère, maître de conférences en histoire médiévale
Antoinette Guise Castelnuovo, historienne
Claire Huet, psychologue clinicienne
Catherine Masson, docteur en histoire
Marie-Laure Massei, maître de conférences en anglais
Anne Brière, professeur de lettres
Isabelle Raviolo, philosophe
Madeleine Molin, historienne
Delphine Meunier, agrégée de lettres classiques
Aurélie Monroux, psychologue pour enfants
Bénédicte Peyrelongue, enseignante chercheuse en sciences de gestion
Sophie Poncet, psychologue
Aurélie Pons, agrégée de Lettres modernes
Françoise Prédignac, docteur en physique
Sophie Lesur,psychologue – psychothérapeute,
Anne-Claire Volongo, conservatrice de bibliothèques
Cyndee Royer, professeur d'anglais
Astrid de Vaumas, professeur agrégée de mathématiques
Marion Védrine, professeur agrégée en sciences économiques et sociales
Kim-Loan Tran Van Chau, professeur agrégée de philosophie
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