1 juillet 2011

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Publication : article dans une publication collective non-juridique

Les autorités administratives indépendantes : distorsion ou réforme de l'Etat ?, in "Quelles réformes pour sauver l'Etat ?"

par Marie-Anne Frison-Roche

Référence complète : FRISON-ROCHE, Marie-Anne, Les autorités administratives indépendantes : distorsion ou réforme de l'État ?, in BETBEZE, Jean-Paul et COEURE, Benoît (dir.), Quelles réformes pour sauver l'État ? , Les cahiers du Cercle des économistes, PUF/Descartes & Cie, 2011, p.125-130.

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Les Autorités Administratives Indépendantes (AAI) sont violemment contraires à la tradition française car, là où un pays anglo-nord-américain y voit un moyen de traiter des externalités négatives, la France y voit un abandon de l’unicité de l’intérêt général. Si elles existent désormais, ce serait sous une double contrainte : l’Europe qui l’exigea juridiquement, la mondialisation qui y poussa économiquement, les marchés étant plus vastes et plus mobiles que les Etats. Les AAI ne seraient qu’un mal nécessaire, dont le progrès serait de s’en débarrasser ? Non, car elles constituent au contraire un moyen efficace pour la France d’exister encore dans les processus de décisions qui régulent la mondialisation économique.

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Les Autorités Administratives Indépendantes (AAI) ont du mal à s'adapter au système étatique français, alors même que les administrations sont très puissantes aux États-Unis. La question n'est donc pas économique, car les pays anglo-saxons ont développé autant, si ce n'est plus, des administrations, pour prendre en charge les externalités négatives ; c'est une question philosophique. En effet, pour un esprit français, l'État n'est pas un mode optimal d'organisation, en concurrence avec d'autre, c'est un être supérieur qui incarne l'intérêt supérieur, l'intérêt général, et ses agents, les fonctionnaires, avec lui, alors que les agents du marché ne servent qu'un intérêt inférieur, le leur. Cette dimension philosophique, explique que les mêmes organisations soient admises là-bas et non aussi.

Ainsi, les AAI sont violemment contraires à la tradition française, car par nature elles se détachent du coeur régalien. Elles ont été créées par contrainte et par ce qui est ressenti comme une sorte d'accident de l'histoire qu'est l'Europe. Une autre contrainte est venue de la mondialisation, car les États sont enfermés dans leur frontière alors que l'objet sur lequel ils exercent leur pouvoir normatif, les marchés, sont plus étendus et mobiles qu'eux. Les AAI peuvent y allier car elles se mettent en réseaux, étant internalisées dans les marchés.

Faut-il donc juste y voir un mal nécessaire ? Cela explique que le Parlement français soit sans cesse tenté de limiter leurs pouvoirs ou de les supprimer, par un rejet de l'Europe, du marché et de la mondialisation, qui les englobe.

Non.

Si la France veut encore exister à l'international, les AAI devant de plus en plus collaborer avec le Quai d'Orsay, c'est par les réseaux de régulateurs et des banquiers centraux qu'elle le fera et continuer d'exister dans le monde.

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