28 octobre 2014
Enseignements : Grandes Questions du Droit, Semestre d'Automne 2014
Enseignement : Grandes Questions du Droit
par Marie-Anne Frison-Roche
Le Code civil de 1804 a présenté le contrat comme un mode de transmission de la propriété. Le XIXième siècle en a fait l'instrument majeur de deux volontés particulières qui s'accordent. En cela, l'individu montre son autonomie et sa puissance par son aptitude à s'engager. Aujourd'hui, le contrat est davantage l'expression juridique du marché. Mais les deux sont l'expression d'une vision libérale du monde, dans lequel les agents atomisés rentrent dans des relations bilatérales, dont l'addition fait le bonheur de tous.
Ainsi ressort la définition subjective du contrat comme rencontre de deux volontés qui échangent leurs consentements. Dès lors, l'essentiel tient dans la rencontre des consentements et dans la qualité de ceux-ci, qui doivent être libres et non-viciés. La puissance de l'autonomie de la volonté fait que si les consentements ont cette qualité, alors le contrat est juste et qu'il est inutile de prévoir une vigilance juridique pour veiller à l'équilibre des prestations. En outre, le contrat répond aussi à une définition objective, étant le double neutre et préalable d'une opération économique, définition qui monte en puissance. Ainsi, le droit est davantage attentif à l'exécution du contrat, à son inexécution et aux responsabilités contractuelles. Les deux définitions, subjectifs et objectives, mais toujours individualistes, ne cessent de se renforcer, soit à travers les libertés fondamentales, soit à travers le droit économiques.
Cela engendre l'alliance paradoxale de la toute-puissance de la volonté individuelle et l'instrumentalisation massive des comportements. Le contrat devient le modèle de l'action et remplace les formes traditionnelles d'organisation et d'action de groupe. Cela est également vrai pour l'action publique, le procès, la famille ou l'intimité.
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Doctrine :
- AYNES, Laurent, Mauvaise foi et prérogative contractuelle, 2011,
- DIDIER, Paul, Brèves notes sur le contrat-organisation, 1999,
- FRISON-ROCHE, Marie-Anne, Remarques sur la distinction entre la volonté et le consentement en droit des contrats, 1995
- FRISON-ROCHE, Marie-Anne, Volonté et obligation, 2000,
- FRISON-ROCHE, Marie-Anne, Contrat, concurrence, régulation, 2004,
- FRISON-ROCHE, Marie-Anne, Une famille à sa main, 2014
- FRYDMAN, Benoît, Négociation ou marchandage ? De l’éthique de la discussion au droit de la négociation, 1996,
- GOLDMANN, Berthold, Frontières du droit et "lex mercatoria", 1964
- MULON, Elodie, Forme et force des accords en matière familiale, 2011,
- PERES, Cécile, Anéantissement du contrat et restitutions sous l’emprise de l’effectivité des droits fondamentaux, 2010,
- SUPIOT, Alain, Les deux visages de la contractualisation : déconstruction du Droit et renaissance féodale,2007.
Textes :
Jurisprudence:
- Civ.,6 mars 1878, commune de Pélissanne c./ marquis de Galliffet, affaire dite du Canal de Craponne (refus d’admettre l’imprévision comme cause de nullité des contrats) ;
- Cons. Const., 13 janvier 2000, loi relative à la réduction négociée du temps de travail (valeur constitutionnelle de la liberté contractuelle) ;
- Com., 15 février 2000 (annulation par référence à "l’économie du contrat) ;
- Civ. 1ère, 3 avril 2002 (définition de la violence économique comme exploitation abusive d'une situation de dépendance économique pour en tirer profit) ;
- Civ. 1ère, 13 mai 2003 (application de la réticence dolosive dans un mécanisme triangulaire de cautionnement bancaire) ,
- Cons. Const., 13 janvier 2003, loi relative aux salaires, au temps de travail et au développement de l’emploi (valeur constitutionnelle de la force obligatoire du contrat) ;
- Ch. Mixte, 17 mai 2013, (interdépendance objective de deux contrats, rendant inefficace une clause affirmant l'indépendance des contrats).
- Com. 8 avril 2014, Musée National des Arts Asiatiques - Guimet
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Les Grandes Questions pouvant aussi être abordées non plus en synthèse mais par de multiples questions, cette leçon en ouvre un certain nombre, qu'il est loisible d'approfondir, suivant l'intérêt que l'on a pour l'une ou l'autre.
En ouvrant une question particulière par un clic sur son intitulé, on accède à un développement pour chacun d'elles, des accès à du droit positif - textes et jurisprudences, rapports administratifs, discours, ainsi qu'à des travaux de doctrine présentés.
On peut ainsi, dans le cheminement de cette leçon, se poser les question suivante :
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