8 décembre 2022

Conférences

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► Référence complète : M.-A. Frison-Roche, "La compliance, perspective dynamique pour exprimer la raison d'être des commissaires de justice", in Table-ronde sur "Professions réglementées, ambitions et enjeux", Congrès annuel national des Commissaires de justice, Paris, 8 décembre 2022. 

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lire le programme complet du congrès et 🎥regarder la présentation du colloque par le président du Congrès

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🎥regarder le débat

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présentation de l'intervention : Ce premier congrès annuel national des Commissaires de justice, réunissant pour la première fois la profession réformée, a débuté par un débat de 2 heures animé par une journaliste, débat entre les autres professions, les autorités publiques (Autorité de la concurrence, Chancellerie), ayant pour ma part à y apporter le regard académique :

 

Ce débat fut particulièrement animé et vivant, ne serait-ce qu'en raison de la configuration des lieux, chacun étant placé pour entrer dans un dialogue :

 

🎤 J'y pris la parole en premier pour insister sur le fait que les "professions" sont des structures qui ont un grand avenir, en ce qu'elles s'articulent avec le système économique libéral, qu'elles sont par nature régulées et porteuses de régulation, dans des systèmes qui, pour demeurer libéraux, vont en avoir de plus en plus besoin. Cela est pertinent pour la profession des Commissaires de justice qui procurent de la sécurité, via de l'incontestabilité reposant aussi sur le lien entre celle-ci et les faits, et qui assurent l'effectivité des engagements en gardant le souci du lien social.

 

🎤 J'ai repris la parole lorsque la place de la Compliance fut évoquée. Dépassant l'exigence de "conformité", qui n'est qu'un outil de la Compliance, j'ai montré l'avenir du Droit de la Compliance, notamment dans l'Europe qui associe dynamisme économique, souci des personnes et de l'environnement, et l'alliance que cela implique entre les Autorités politiques et publiques et les entités susceptibles de participer à la concrétisation de ces Buts Monumentaux de la Compliance.

 

📕 Pour aller plus loin :  M.-A. Frison-Roche (dir.), Les buts monumentaux de la compliance, 2022.

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regarder la présentation du colloque par le président du Congrès

22 septembre 2022

Interviews

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 Référence complète : M.-A. Frison-Roche, "Focus sur les Buts Monumentaux de la Compliance", entretien avec Marina Brillié, Dalloz - Actu Étudiants, 22 septembre 2022.

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💬 Lire l'entretien sur le site

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 Présentation de l'entretien par le journal : "Décrire et concevoir ses Buts Monumentaux permet d’anticiper un Droit de la Compliance, toujours plus puissant, encadrant et encadré ». Alors que vient de paraître le livre essentiel pour appréhender ce qui régule et codifie par charte, mais aussi ce qui passe par les accords internationaux et les contrats, pour lutter contre la corruption ou la haine en ligne, comme pour favoriser la protection des données personnelles ou la bonne gestion des risques, nous avons la chance d’interviewer celle qui a proposé cette notion de « buts monumentaux » de la Compliance dès 2016, la coéditrice et directrice scientifique de la série Régulations & Compliance, Marie-Anne Frison-Roche, agrégée des Facultés de Droit, directrice du Journal of Regulation & Compliance (JoRC)."

 Questions posées :

  • Pourquoi définir des buts monumentaux à la Compliance ?
  • Quel pourrait être le rôle du principe de proportionnalité dans la réalisation de ces Buts ?
  • En quoi la concurrence et la Compliance sont-elles liées ?
  • Comment aborder la Compliance sur les territoires européens ?

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6 septembre 2022

Auditions Publiques

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► Référence complète : M.-A. Frison-Roche, "Europe, Compliance et Professions", intervention devant le bureau du Comité de Liaison des Institutions ordinaires (CLIO), 6 septembre 2022.

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Cette présentation d'une quinzaine de minutes a ensuite donné lieu à un échange avec les membres du Bureau du CLIO. 

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► Résumé de la présentation : La perspective ici proposée est de partir non pas du schéma du marché concurrentiel, repris par le Droit de la concurrence, par rapport auxquels les professions et les ordres ont toujours dès le départ et définitivement statut d'exceptions, mais de partir - dans une vision paradoxalement moins juridique et plus concrète - de l'Europe telle qu'elle s'était construite à la fin de la Seconde Guerre mondiale et qu'elle se construit de nouveau.

 

I. LE PROJET POLITIQUE DE L'EUROPE : À COTE DE L'EUROPE DE LA CONCURRENCE, L'EUROPE DE LA RÉGULATION

La Régulation n'est en rien l'exception (qui serait en outre logée au niveau des Etats-membre) du Droit de la concurrence (qui serait en outre logée au niveau du Droit de l'Union), la concurrence écrasant doublement la Régulation, en ce qu'elle serait le seul principe (le principe prévalant sur l'exception) et qu'elle serait au-dessus dans la hiérarchie des normes.

Cela n'est pas vrai. 

Il faut donc partir de l'Europe. 

L’Europe est une idée politique, construite avec des moyens juridiques. C'est ainsi que Monnet l'avait conçu et c'est de nouveau que la Commission européenne la conçoit (voir par exemple ce qu'en dit Thierry Breton). 

Au sortir d'une catastrophe, il s'est agi de construire l'Europe, conçue comme  une communauté d’êtres humains (valeurs communes, groupe social fluide).

Pour cela, il fallait trouver les bons instruments juridiques, pour (re)créer ces valeurs communes : faire que les échanges se réalisent avec des règles juridiques "positives" (CECA, collaborations pour faire des rails) et des règles juridiques « négatif » (abattre les frontières ; prohibition des comportements anticoncurrentiels et prohibition des aides d’Etat, prohibition qui n’existe nulle pas ailleurs).

Puis en premier lier la Commission européenne, la Cour de justice, voire les Etats-membres ont « oublié » la construction positive et on n’a gardé que la construction négative : le vide concurrentiel (qui a des mérites, notamment en ce qu'il exprime la liberté), dont tout devait sortir ; en second lieu, on a pris l’instrument pour le but.

C'est ainsi que le Droit de la concurrence, en tant qu'il est une branche du Droit économique, est entièrement guidé par sa finalité, mais il a pour objet la concurrence : la téléologie a pour objet une fin qui ne lui est pas extérieure, c’est une « tautologie ».

L’Europe a changé, par le choc des crises successives depuis 2008, avec la crise financière et bancaire ; depuis 2020 avec la crise sanitaire ; depuis 2022 avec la crise climatique qui s’annonce.

C'est une opportunité (la crise est aussi une opportunité, parce qu'elle prise les idées de départ, fait de la place pour d'autres). 

La téléologie européenne n’est plus tautologie ; la concurrence y retrouve sa place. Le système demeure celui d'une économie libérale mais la DG Concurrence ne résume plus la Commission européenne : l’Europe – y compris la Commission européenne – n’a plus pour seule fin la concurrence. La crise étant un souci majeur, car l'Europe a compris qu'elle était mortelle, le Droit a pour finalité de permettre à l'Europe de survivre (notamment face à la Chine :  elle a pour fin d’être « durable » : de ne pas disparaître.

Cela a pris notamment forme dans l'Union bancaire, qui a pour but simple d'exclure la disparition de l'Europe.

Mais cela vaut aussi pour l'Europe de la communication des personnes et des biens. Voir par exemple la proposition le 7 juillet 2022 d’aides d’Etat sur les transports pour faire une Europe des transports avec des infrastructures publiques.

Voir aussi la naissance de la « gouvernance-énergie », signant la fin de la suprématie l’esprit de la directive de 2016 sur « l’ouverture à la concurrence » comme seul principe, nouant l'énergie et l'environnement, prolongeant la Régulation par la Supervision, c'est-à-dire avant tout l'Industrie. Or, dans une perspective à ce point concrète, là où il y a de l'industrie il y a des personnes ayant des savoirs-faire : des professionnels

La crise de 2020 accélère la naissance de l’Europe de la Santé ; à partir du vaccin.

La DG Connect exprime volonté de construire un écosystème numérique européen : Europe des données, à la fois marchand, industriel et protecteur des personnes (Digital Markets Act ; Digital Services Act ; Governance Data Act ; Chip Act), initialement construit par le Juge européen (jugement de la CJUE Google Spain 2014).

Dans chaque perspective, il y a la fixation par les Autorités politiques européenne d'un « but monumental », à la fois propre à un secteur mais aussi commun à tous, et tous se regroupent autour d’une volonté proprement européenne : la protection des êtres humains.

 

L'Avenir de l'Europe est ainsi dans l'émergence de l'Europe de la Régulation. 

La question qui se pose alors est : comment atteindre ces Buts ainsi politiquement posés ? 

Car la distance est grande entre la volonté exprimée et la concrétisation de ces buts (affaire de "plan" et de "transition").

 

II. POUR CONSTRUIRE L'EUROPE SOUVERAINE : l'ACTION DES PROFESSIONS, ENTITÉS EN POSITION D'ATTEINDRE LES BUTS MONUMENTAUX 

 

L’Europe de la Régulation, ainsi constituée, est, surtout avec l'enjeu des données (économie de l'information, industrie des données, souveraineté européenne), entre les mains des entreprises et de l'industrie, laquelle ne se pense pas en-dehors des professionnels.

La CJUE appuie le mouvement.

Mais comment la mettre en œuvre :

Le politique (la Commission européenne, les gouvernements nationaux, etc.) va rechercher des alliances, le Droit de la Compliance prolongeant le Droit de la Régulation et mettant en alliance les Autorités publiques (dont l'État n'est qu'un exemple) et les "entités en position de le faire".

Pour les institutions européennes, ces "entités en position d'agir" sont :

  • :
    • Les Etats membres
    • Les entreprises cruciales, les entreprises publiques,
    • Les ordres correspondent à cette définition

 

L'Europe se construit ainsi actuellement et à l’avenir sur deux piliers :  Concurrence d’une part et Régulation et Compliance d’autre part. 

 

  • Ne pas se penser comme une exception (même légitime) au principe de concurrence
  • Se penser comme un opérateur crucial contribuant à l'expression du second pilier de la construction européenne
  • Donner à voir sa contribution structurelle à la construction de l’Europe, telle qu’elle se dessine
  • Proposer son aide dans ce sens

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► pour aller plus loin ⤵️ 

1 septembre 2022

Base Documentaire : Doctrine

 Référence complète : B. Deffains, "L’enjeu économique de compétitivité internationale de la compliance", in M.-A. Frison-Roche (dir.), Les Buts Monumentaux de la Compliance, coll. "Régulations & Compliance", Journal of Regulation & Compliance (JoRC) et Dalloz, 2022, p. 355-366.

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📕consulter une présentation générale de l'ouvrage, Les Buts Monumentaux de la Compliance, dans lequel cet article est publié

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► Résumé de l'article (fait par l'auteur) : La "Compliance", que l'on peut en premier lieu définir comme l'obéissance à la loi est un enjeu pour l'entreprise en ce qu'elle peut choisir comme stratégie de le faire ou de ne pas le faire, en fonction de ce que lui coûte et lui rapporte un tel choix. Ce même choix de l'entendement est offert à l'auteur de la norme, le Législateur ou le Juge, voire le système juridique tout entier en ce qu'il rend plus ou moins coûteux la réglementation, et le respect de celle-ci pour les entreprises. Ainsi lorsque la loi française dite "Vigilance" fut adoptée en 2017 il fut reproché au Parlement français de porter un coup à la "compétitivité internationale" des entreprises françaises". Aujourd'hui, c'est sur son modèle que le Parlement européen demande à la Commission européenne de concevoir ce qui pourrait être une Directive européenne. L'extraterritorialité attachée au Droit de la Compliance, présentée souvent comme une agression économique, est pourtant un effet consubstantiel, à sa volonté de prétendre protéger au-delà des frontières. Dès lors, l'on en revient à une question classique en Économie : quel est le prix de la vertu ?

Pour alimenter un débat ouvert il y a déjà quelques siècles, c'est d'abord du côté des enjeux qu'il faut économiquement faire porter l'analyse. En effet, le Droit de la Compliance, qui non seulement se situe en Ex Ante, pour prévenir, détecter, remédier, réorganiser l'avenir, mais encore prétend affronter des difficultés plus "monumentales" que le Droit classique. Et c'est concrètement en examinant les instruments nouveaux que le Droit a mis en place et offert ou imposé aux entreprises que la question de la compétitivité internationale doit être examinée. Les mécanismes d'information, de secret, de reddition des comptes ou de responsabilité, qui ont un grand effet dans la compétitivité internationale des entreprises et des systèmes, en sont changés et la mesure n'en est pas encore prise.

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1 septembre 2022

Base Documentaire : Doctrine

 Référence complète : J.-Ch. Roda, "Compliance, enquêtes internes et compétitivité internationale : quels risques pour les entreprises françaises (à la lumière du droit antitrust) ?", in M.-A. Frison-Roche (dir.), Les Buts Monumentaux de la Compliance, coll. "Régulations & Compliance", Journal of Regulation & Compliance (JoRC) et Dalloz, 2022, p. 367-380.

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📕consulter une présentation générale de l'ouvrage, Les Buts Monumentaux de la Compliance, dans lequel cet article est publié

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► Résumé de l'article (fait par le Journal of Regulation & Compliance) : L'auteur puise dans le Droit américain et européen de la concurrence pour mesurer si effectivement les enquêtes internes, en tant qu'elles fournissent des éléments factuels, peuvent fournir à des Autorités étrangères et des concurrents, ici américains, des "informations sensibles" (notamment via les programmes de clémences), et à ce titre constituent un handicap concurrentiel. Mais cela s'avère assez difficile alors que des audits de compliance, par exemple au titre du devoir de vigilance, peuvent fournir aux plaideurs américains des informations utiles, puisées dans des pièces internes, notamment les rapports de compliance officers , captables par les procédures de discovery. 

Le Droit français demeure faible face à ces dangers, en raison de son refus de reconnaître un legal privilege concernant ces documents internes, contrairement au Droit américain et l'efficacité conséquente de la discovery dans les procédures internationales, concernant les documents internes, notamment résultant d'enquêtes internes. Des solutions ont été proposées, l'activation d'une nouvelle conception des lois de blocage étant complexe, la perspective d'adopter un legal privilege étant plus efficace, mais il demeurerait l'hypothèse de conflit international de privilege, le Droit américain ayant une conception stricte du legal advice justifiant celui-ci et les juges contrôlant que les entreprises ne le manient pas artificiellement.

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1 septembre 2022

Base Documentaire : Doctrine

 Référence complète : M. Malaurie-Vignal, "Les buts monumentaux du droit du marché. Réflexion sur la méthode", in M.-A. Frison-Roche (dir.), Les Buts Monumentaux de la Compliance, coll. "Régulations & Compliance", Journal of Regulation & Compliance (JoRC) et Dalloz, 2022, p. 85-100.

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📕consulter une présentation générale de l'ouvrage, Les Buts Monumentaux de la Compliance, dans lequel cet article est publié

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► Résumé de l'article (fait par le Journal of Regulation & Compliance):  L'article porte sur le Droit de la concurrence, en ce que celui-ci par méthode doit déterminer ce pour quoi il est constitué afin de fonctionner techniquement. Reprenant les diverses théories économiques et juridiques à ce propos, qui se sont succédées et se sont affrontées l'auteur estime que le but monumental du droit du marché est de développer un environnement économique favorable aux entreprises et aux consommateurs, puis pose la question de savoir s'il pourrait intégrer une dimension éthique et plus largement des considérations non économiques, notamment humanistes. 

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Mise à jour : 1 septembre 2022 (Rédaction initiale : 13 avril 2022 )

Base Documentaire : Doctrine

 Référence complète : N. Sudres, "Gel hydroalcoolique, Covid-19 et compliance. Des insuffisances de la démarche de conformité à l’émergence d’îlots de compliance", in M.-A. Frison-Roche (dir.), Les Buts Monumentaux de la Compliance, coll. "Régulations & Compliance", Journal of Regulation & Compliance (JoRC) et Dalloz, 2022, p. 307-337.

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  Le résumé ci-dessous décrit un article qui fait suite à une intervention dans le colloque Normes publiques et Compliance en temps de crise : les Buts Monumentaux à l'épreuve, coorganisé par le Journal of Regulation & Compliance (JoRC) et la Faculté de Droit de Montpellier. Ce colloque a été conçu par Marie-Anne Frison-Roche, Pascale Idoux, Antoine Oumedjkane et Adrien Tehrani, codirecteurs scientifiques, et s'est déroulé numériquement le 17 mai 2021.

📕Cet article figure dans le titre II de l'ouvrage, consacré à Normes publiques et Compliance en temps de crise : les Buts Monumentaux à l'épreuve.

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📕consulter une présentation générale de l'ouvrage, Les Buts Monumentaux de la Compliance, dans lequel cet article est publié

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► Résumé de l'article (fait par l'auteur): Pendant la crise ouverte par la Covid-19, la gestion de la fabrication, du prix et de la disponibilité du gel hydroalcoolique, produit essentiel dans la lutte contre la transmission de la Covid-19, offre la possibilité de mesurer tout à la fois les limites et les ressources de la compliance.

Alors que la culture de conformité au droit des pratiques anticoncurrentielles était insuffisante à contrer la flambée des prix des gels hydroalcooliques et masques, impliquant le recours à des outils à l’opposé de la compliance (règlementation des prix et réquisition), des mécanismes s’en inspirant ont été mis en place pour traiter d’autres problématiques liées à la disponibilité des biens de première nécessité en période de crise sanitaire.

Reste à savoir si ces dispositifs doivent, pour l’avenir, inspirer la rédaction de véritables normes de compliance.

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Mise à jour : 1 septembre 2022 (Rédaction initiale : 14 octobre 2021 )

Base Documentaire : Doctrine

 Référence complète : L. Rapp, "Conformité, proportionnalité et normativité", in M.-A. Frison-Roche (dir.), Les Buts Monumentaux de la Compliance, coll. "Régulations & Compliance", Journal of Regulation & Compliance (JoRC) et Dalloz, 2022, p. 177-198.

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📕consulter une présentation générale de l'ouvrage, Les Buts Monumentaux de la Compliance, dans lequel cet article est publié

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► Résumé de l'article (fait par l'auteur) : La proportionnalité est à l’exercice de pouvoirs, ce que la subsidiarité est à celui de compétences : un indicateur autant qu’une limite. Elle en détermine l’étendue et en permet le contrôle tout à la fois. Elle fixe la norme, avant d’être elle-même une norme. Ce qui peut expliquer qu’elle relève en principe de l’office du juge et de ses méthodes d’appréciation.

Mais l’étude de son évolution récente montre qu’elle remonte progressivement de l’ex-post à l’ex-ante, ce qui permet d’anticiper qu’elle devienne avant peu un outil efficace des politiques de conformité et une référence normative utile. Les développement de l'article le démontrent, en expliquant comment l’on passe du principe de proportionnalité au contrôle de proportionnalité, du contrôle de proportionnalité au raisonnement proportionnel, du raisonnement proportionnel au contrôle de conformité et pour finir, en une dernière évolution souhaitable, du contrôle de conformité à la nécessaire proportionnalité du contrôle.

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19 août 2022

Compliance : sur le vif

 

 

La revue Business Insider consacre un article à l'information selon Laquelle : Microsoft Insiders say there's a risk of an employee exodus to rivals like Amazon after being "underwhelmed" by long-promised raises".

Le 18 août 2022, le professeur Barak Orbach commente cette information de cette façon : "A practical hypothetical for antitrust enforcers: Say Amazon hires many Microsoft employees. Recent statements and speeches suggest that the agencies might treat such a hiring pattern as a predatory strategy. Shouldn't it be treated as the outcome of competition in labor markets??".

A son tour, le professeur Jean-Christophe Roda remarque à propos de cette suggestion faite dans la perspective du Droit américain : "De l’utilité du droit de la concurrence déloyale (sans avoir à déterminer un hypothétique marché du travail).".

En effet, ce qu'il est convenu d'appeler le "Droit de la concurrence" comporte dans une conception classique d'une part le "Droit de la concurrence déloyale", qui, historiquement issu du Droit civil, sanctionne le comportement d'un opérateur économique au détriment d'un autre et le "Droit des marchés concurrentiels" qui, venu plus tard, vise à préserver la structure concurrentielle des marchés des biens et services.

Ce Droit des marchés concurrentiels, né principalement au XXième siècle, sanctionne les comportements qui abîment les marchés des biens et services, réparent les marchés des dommages nés des comportements anticoncurrentiels (ententes et abus de domination), préviennent la détérioration de la libre concurrence (par le contrôle préventif des concentrations) : il protège la concurrence, il ne protège pas les concurrents. C'est un Droit objectif. La sanction des stratégies dommageables des opérateurs les uns par rapport aux autres n'est pas en tant que telle son objet.

Ainsi le Droit civil sanctionnant la concurrence déloyale est désormais souvent appelé le "petit droit de la concurrence", tandis que le Droit des marchés gouvernés par la Loi économique de l'offre et de la demande, essentiellement pensée par les économistes, est devenu celui qui paraît le seul digne d'être enseigné. C'est souvent lui qui est le seul exposé dans les ouvrages de Droit de la concurrence.

Si Jean-Christophe Roda et moi-même dans la seconde édition du Précis Dalloz de Droit de la concurrence (2022), nous n'avons pas fait cela (pas plus que dans la première édition menée avec Marie-Stéphane Payet), c'est parce que nous pensons à l'inverse qu'il y a une grande unité entre les règles qui sanctionnent les atteintes au marché concurrentiel et les règles qui sanctionnent les atteintes aux droits des opérateurs économiques à ne pas subir des comportements déloyaux de la part de leurs compétiteurs.

Leur articulation donne même pleine efficacité à l'ensemble.

C'est pourquoi l'ouvrage consacre une partie complète au Droit de la concurrence entre concurrents, tel que le Droit français continue de l'appréhender, par le Droit des contrats et par le Droit de la responsabilité pour concurrence déloyale, pouvant ainsi saisir des situations que le Droit des marchés concurrentiels ne peut aisément régler.

En effet l'entreprise est au cœur des marchés, la loyauté de la concurrence est un principe grandissant tandis que l'action des victimes (private enforcement) prend une place de premier plan dans l'effectivité du Droit des marchés concurrentiels (public enforcement).

Or cet exemple américain montre la faiblesse des systèmes qui ne font principalement place qu'aux règles objectives et économiques des Marchés concurrentiels.

À supposer les faits établis, ce dont nous ne savons rien, le commentateur américain se tourne naturellement vers les Autorités publiques en demandant l'application de la théorie de la prédation sur un marché, ici le marché du travail.

L'objet de preuve est double : d'une part, déterminer le marché pertinent, le marché du travail (comme le souligne Jean-Christophe Roda) et d'autre part déterminer la prédation, soit par l'existence de rémunérations promises prédatrices (supposant la preuve objective de rémunérations justes dans un secteur extrêmement compétitif), soit par l'existence de stratégies sur les personnes elles-mêmes (par un glissement d'objet de preuve, vers des preuves subjectives de débauchage).

La charge de preuve est très lourde : non seulement sur les écarts entre les rémunérations qu'une personne peut normalement attendre et la rémunération "excessive" qui aurait été offerte, mais sur la détermination des divers marchés du travail concernés. Etant observé que les relations entre la branche du Droit du travail et la branche du Droit de la concurrence sont plus que difficiles.

Or, Jean-Christophe Roda fait observer que dans le Droit de la concurrence déloyale, ce cas est prévu. En effet, issu du Droit de la responsabilité, vieille branche du Droit, celle-là même dont on peut aujourd'hui attendre beaucoup car du fait de sa généralité elle est la mieux placée pour appréhender les situations nouvelles, la jurisprudence a élaboré des sortes de cas d'ouverture de responsabilités, en allégeant les charges de preuve.

Un des cas d'ouverture de responsabilité pour concurrence déloyale est précisément celle du débauchage massif de salariés par une entreprise chez l'un de ses concurrents. Pour obtenir la condamnation de l'auteur d'un tel comportement, il n'est besoin ni de déterminer un marché pertinent, ni de démontrer le caractère disproportionné des avantages proposés, ni même de démontrer que l'entreprise victime n'a pas pu survivre à la désorganisation qu'elle a de ce fait endurée.

Ainsi la Chambre commerciale de la Cour de cassation, par son arrêt du 23 juin 2021, Société Sud-Ouest déchets industriels c/Société Eiffage Energie systèmes - clemessy services, (n°19-21.911) a posé : "Une société ayant eu un rôle actif dans le débauchage d'une grande partie des salariés d’un service d’un concurrent et ayant désorganisé ce service a été jugée coupable de concurrence déloyale, peu important que ce concurrent ait reconstitué ses effectifs rapidement.".

Face à ces lions que sont Microsoft et Amazon, l'on a souvent besoin du petit Rat de la concurrence déloyale.

 

 

6 juillet 2022

Base Documentaire : Doctrine

 Référence complète : C. Lemaire & F. Martucci (dir.), Liber Amicorum Laurence Idot. Concurrence et Europe, vol. I, préf. C. Lemaire & F. Martucci, avant-propos B. Lasserre, Concurrences, 2022, 500 p.

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📗lire la 4ième de couverture

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📗lire la table des matières

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► Résumé de l'ouvrage (fait par l'éditeur) : "La carrière de Mme le Professeur Laurence Idot appelle un hommage. Sa pensée a mûri le droit de la concurrence, tant par ses écrits que ses enseignements ou son activité à l'Autorité de la concurrence. Aucun de ses anciens collègues ou étudiants n'est resté insensible à sa finesse d'esprit et sa personnalité exceptionnelle. L'impact de sa pensée, de son enseignement et de ses consultations justifie que, dans la plus pure tradition universitaire, des Mélanges lui soient dédiés.

Théoricienne confrontée à la réalité des dossiers, Laurence Idot a marqué la recherche par son analyse fine et habile des interactions entre le droit de la concurrence, le droit de l'Union européenne, et le droit de l'arbitrage et le droit international. A l'heure du développement des recours à l'arbitrage international et de la croissance du droit européen de la concurrence, ses écrits et sa compréhension du droit conservent leur actualité.

L'originalité du parcours du Professeur Idot tient aux chemins qu'elle a tracés dans des droits en développement : le droit européen d'un côté, le droit de la concurrence de l'autre - auxquels elle a chacun consacré une revue. Les destins de Concurrence et Europe sont désormais entremêlés.".

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📝lire l'article de Marie-Anne Frison-Roche : "L'appui du Droit de la Compliance pour la maîtrise quotidienne du Droit de la concurrence"

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6 juillet 2022

Base Documentaire : Doctrine

 Référence complète : L. d'Avout, "L'arbitrabilité sous condition : réflexions au départ de l'antitrust", in C. Lemaire & F. Martucci (dir.), Liber Amicorum Laurence Idot. Concurrence et Europe, vol. I, préf. C. Lemaire & F. Martucci, avant-propos B. Lasserre, Concurrences, 2022, pp. 177-192

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► Résumé de l'article (fait par l'auteur) : "À travers l'arbitrabilité, l'on répond en principe de façon binaire à la question de l'admissibilité du règlement privatisé d'un litige. Ce concept juridique permet-il également de restreindre les marges de manœuvre des arbitres internationaux dans l'exercice de leur mission juridictionnelle, par une admission de l'arbitrage subordonnée au respect d'un régime juridique donné (loi étatique, convention internationale, etc.) ? Une réponse positive peut être formulée dans certains cas, moyennant l'étude des liens entre la règle d'arbitrabilité et le contrôle étatique subséquent des sentences arbitrales. Lorsque le contrôle de compatibilité des sentences est effectué non seulement au regard de principes mais aussi de certaines règles internationalement impératives, telles celles du droit de la concurrence, l'on peut conclure en amont à la subordination de l'arbitrabilité du litige au respect de ces règles. Une corrélation ou un lien causal, apparaît ainsi (ou est susceptible d'apparaître), dans certains secteurs économiques sensibles, entre la définition par les collectivités publiques des litiges susceptibles d'être arbitrés, l'encadrement consécutif de la mission du juge privé choisi par les parties et le contrôle, ultérieur par les juges étatiques, de l'admissibilité du produit de cette justice privée. Ce lien causal exprime une arbitrabilité de type conditionnel qui, loin de fragiliser le règlement privatisé des litiges internationaux, oeuvre au contraire à l'insertion cohérente de l'arbitrage dans le système plus général du contentieux transnational.".

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🦉Cet article est accessible en texte intégral pour les personnes inscrites aux enseignements de la Professeure Marie-Anne Frison-Roche

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6 juillet 2022

Publications

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 Référence complète : M.-A. Frison-Roche, "L'appui du Droit de la Compliance pour la maîtrise quotidienne du Droit de la concurrence", in C. Lemaire & F. Martucci (dir.), Liber Amicorum Laurence Idot. Concurrence et Europe, vol. I, préf. C. Lemaire & F. Martucci, avant-propos B. Lasserre, Concurrences, 2022, pp. 369-374

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 Résumé de l'article : Le Droit de la concurrence est devenu si énorme et « réglementaire » qu’on finirait par renoncer à vouloir le saisir dans son ensemble, préférant devenir spécialiste de l’une de ses parties. Cela serait perdre de vue la raison simple et forte qui unit l’ensemble et lui donne son souffle :liberté.

Liberté éprouvée par la personne dans son action économique quotidienne, liberté gardée par le Droit de la concurrence, revenant toujours à son principe : la libre concurrence. Raison pour laquelle l’Union européenne fait grande place à la concurrence. Pour la rendre et la garder effective, la « politique de la concurrence » s’articule au Droit de la concurrence mais si autorités et juges ne font pas reproche aux entreprises leur puissance, ils ne s’appuient pas sur celle-ci.

Pour ce faire, il faut alors être épaulé par le Droit de la Compliance, qui incite fortement les entreprises à agir pour l’effectivité et la promotion des principes concurrentiels. Le Droit de la concurrence glisse ainsi de l’Ex Post vers l’Ex Ante, les engagements des entreprises conduisant celles-ci à cesser d’être passives et punies pour devenir des acteurs convaincus et eux-mêmes pédagogues. De quoi plaire à une grande professeure de Droit de la concurrence, à laquelle hommage est ici rendu. 

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📗lire la table des matières des Mélanges

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🚧lire le document de travail bilingue sur la base duquel cet article a été élaboré, doté de développements supplémentaires, de références techniques et de liens hypertextes

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📝lire l'article

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28 juin 2022

Compliance : sur le vif

Référence complète : Frison-Roche, M.-A., S'associer structurellement pour atteindre un But Monumentale. Equilibre entre Concurrence et Compliance : l'entente bienvenue entre deux opérateurs dominants pour réduire l'émission des gaz à effet de serre, 28 juin 2022.

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L'Autorité néerlandaise de la concurrence, l' Authority for Consumers and Markets, a exprimé le 27 juin 2022 une "opinion" concernant deux opérateurs énergétiques très puissants, Shell et TotalEnergie, décidés à collaborer pour réduire la pollution, parce que les effets négatifs de cette restriction de concurrence engendrée par cette entente sont moindres que les effets positifs de réduction d'émission de gaz à effet de serre, leur contribution à la lutte contre le déséquilibre climatique justifiant ainsi cette collaboration.

Au-delà de l'analyse précise de la situation, l'Autorité présente ainsi sa décision : "Following an assessment of their plans, the Netherlands Authority for Consumers and Markets (ACM) has decided to allow competitors Shell and TotalEnergies to collaborate in the storage of CO2 in empty natural-gas fields in the North Sea. By transporting CO2 through pipes and storing it in old gas fields, this greenhouse gas will not be released into the atmosphere. This initiative thus helps realize the climate objectives. As cooperation is necessary for getting this initiative off the ground and for realizing the climate benefits, the slight restriction of competition between Shell and TotalEnergies is not that harmful. The benefits for customers of both companies and for society as a whole exceed the negative effects of that restriction.".

L'Autorité n'hésite donc pas à affirmer que les entreprises peuvent s'entendre structurellement car cela est bénéfique pour les deux entreprises, bénéfiquespour les consommateurs et bénéfique pour le groupe social.

C'est surtout le dernier point qui est important.

Cette décision illustre l'évolution du rapport entre le Droit de la Concurrence et le Droit de la Compliance. Nous sommes bien loin de la façon dont on présente encore souvent ces deux branches du Droit, notamment dans ce que serait la Compliance pour le Droit de la Concurrence, à savoir un moyen d'accroître l'effectivité le Droit de la Concurrence (I). L'évolution de plus en plus forte donne aux entreprises le pouvoir, parce qu'elles en ont l'obligation d'atteindre le "but monumental" de faire quelque chose en matière climatique, par exemple d'inventer ensemble des structures bénéfiques à l'équilibre climatique : ce qui relève alors du Droit de la Compliance, lequel n'accroît pas le Droit de la Concurrence (puisque la Compliance légitime les ententes) mais vient se mettre en équilibre face au Droit de la Concurrence (II). En cela, le Droit de la Compliance est le prolongement du Droit de la Régulation, comme lui Ex Ante (les entreprises demandent en Ex Ante la validation de leur structure collaborative, et cela en dehors de tout secteur (III). L'avenir est donc au Droit de la Compliance, pilier de ces nouveaux équilibres.

 

I. LE RAPPORT TRADITIONNELLEMENT PRESENTÉ ENTRE DROIT DE LA CONCURRENCE ET DROIT DE LA COMPLIANCE

Lorsqu'on consulte le droit souple disponible, notamment celui émis par les Autorités de concurrence, par exemple le nouveau "document-cadre" publié par l'Autorité de la concurrence une première fois le 11 octobre 2021 puis une seconde fois, sous une forme définitive, le 24 mai 2022 : Document-cadre du 24 mai 2022 sur les programmes de conformité aux règles de concurrence.

Ce document débute ainsi : "La conformité, terme désormais bien ancré dans la pratique (également sous son nom anglais de « compliance ») désigne à la fois un processus et un objectif. L’objectif de la conformité consiste, pour une entreprise, à défendre des valeurs et encourager des comportements vertueux pour pleinement respecter les règles, notamment de concurrence. C’est une démarche éthique qui favorise un fonctionnement concurrentiel libre et non faussé de l’économie et permet pour les entreprises une gestion optimisée des risques, qu’ils soient financiers ou réputationnels. Le terme conformité renvoie, également, à un processus interne mis en place de façon permanente au sein même des entreprises, qui s’appuie notamment sur les « programmes de conformité ». La conformité désigne, à cet égard, les actions internes mises en place qui visent à diffuser la culture de concurrence, à assurer le respect des règles et la responsabilisation des acteurs économiques en faveur d’une concurrence basée sur les mérites. Les programmes de conformité s’appliquent aussi bien à prévenir les risques d’infraction aux règles de concurrence qu’à détecter les infractions éventuelles et à y remédier. Ils sont, en outre, amenés à évoluer au gré des besoins et des changements intervenus. La conformité combine, ainsi, trois composantes : préventive, curative et évolutive. ".

Pour l'Autorité de la concurrence, la "conformité" ou "compliance" (les deux termes étant pour elles synonyme, juste une question de traduction) est donc une sorte de voie d'exécution en Ex Ante : un moyen d'effectivité des règles de concurrence qui, plutôt que de prendre la forme de sanction Ex Post des violations commises par les entreprises, prend la forme Ex Ante d'une culture de concurrence développée par les entreprises elles-mêmes qui évitent, par divers moyens et pour diverses raisons, de commettre les manquements.

Dès lors, la Compliance fait totalement corps avec le Droit de la Concurrence ; c'est une sorte d'appendice, et rien de plus. Un peu comme l'on voyait il y a longtemps la procédure, "servante" des branches de Droit "substantielles" (c'est-à-dire nobles), comme le Droit public, le Droit des obligations, etc., chacune se reflétant dans son outil d'effectivité : le Droit public dans le Contentieux administratif, le Droit civil dans la Procédure civile, etc. Depuis quelques décennies, l'on ne pense plus ainsi.

En dehors même du fait que les branches du Droit qui donne aux règles leur effectivité, c'est-à-dire les procédures, sont depuis longtemps devenues autonomes, ont même été regroupées dans le "Droit processuel", le Droit de la Compliance est lui-même une branche du Droit qui n'est pas un ensemble de procédures d'effectivité : il est une branche du Droit substantiel.

Et il poursuit des buts qui lui sont propres.

C'est pourquoi il peut ne pas poursuivre les mêmes buts que le Droit de la Concurrence. Il vient alors non pas accroître par sa puissance la branche du Droit à laquelle il s'articule (ici les principes du Droit de la concurrence), mais au contraire équilibrer ces principes en confiant aux entreprises d'autres buts à atteindre.

🔴M.A. Frison-Roche, Droit de la concurrence et Droit de la compliance, 2018.

Les buts du Droit de la Compliance ne sont pas les mêmes que les buts du Droit de la Concurrence. Ils sont beaucoup plus ambitieux. Il y a notamment le climat. Si une Autorité de concurrence admet de prendre en considération la lutte effective contre la perspective de crise climatique catastrophique, alors elle intègre la logique du Droit de la Compliance, et notamment son premier principe qui est l'inverse du principe du Droit de la concurrence : l'impératif de s'allier avec d'autres dans la durée pour atteindre ce but.

La décision de l'Autorité de concurrence est exemplaire de cela. Elle valide par avance une infrastructure.

 

II. L'ENTENTE ENTRE DES ENTREPRISES POUR ATTEINDRE LE BUT MONUMENTAL DE L'ACTION CLIMATIQUE, VALIDÉE EX ANTE, EN ÉQUILIBRE DES PRINCIPES DU DROIT DE LA CONCURRENCE

Les 2 entreprises créent ensemble une activité qui est décrite et appréciée par l'Autorité en ces termes : "Shell and TotalEnergies wish to store CO2 in empty North Sea gas fields on a large scale. This is part of the Aramis project, in which the government, Gasunie and Energie Beheer Nederland work together with Shell and TotalEnergies in order to build a high-capacity trunkline that connects to empty gas fields, among other activities. Carbon capture and storage helps reduce CO2 emissions of businesses located in the Netherlands that, at the moment, still have few alternatives. Major investments are needed since it concerns a high-capacity trunkline and a new, innovative method. In order to get the project off the ground, Shell and TotalEnergies need to offer the CO2 storage together, and therefore jointly set the price with an eye to putting the first ±20% of the trunkline’s capacity into operation. For the remaining 80%, no collective agreements will be made. Shell and TotalEnergies compete with one another. Collaborations between two competitors may negatively affect price, quality, and innovation, but that effect can be offset by certain benefits that a collaboration has for the customers of those businesses and for society as a whole. That is why the parties have asked ACM for informal guidance about whether their collaboration is compatible with the competition rules that offer an exemption to the prohibition to restrict competition if, in short, the benefits outweigh the costs.".

Ainsi, plutôt que faire les investissements conjoints en infrastructures, de faire fonctionner celles-ci et d'attendre une poursuite devant l'Autorité de concurrence pour entente en plaidant pour éviter la sanction le bénéfice social produit par cette collaboration dans cette infrastructure commune à travers la technique probatoire dite du "bilan", charge probatoire dont on connait la lourdeur et l'aléa, les autorités de concurrence prenant peu en considération ce bilan, souvent jugée trop politique et trop peu étayée économiquement (sur le droit positif, v. M.-A. Frison-Roche et J.-C. Roda, Précis Dalloz, Droit de la concurrence, 2022, n°452 et s.), les entreprises ont entrepris une démarche en Ex Ante.

Mais surtout les exemptions individuelles délivrées formellement au nom du Droit de la concurrence, telles que la Commission européenne le conçoit dans ses lignes directrices du 27 avril 2004 excluent de la mise en balance des considérations non-économiques et l'absence de prise en considération du souci climatique a été particulièrement critiquée.

L'on a pu ainsi anticiper la présente décision de l'Autorité néerlandaise de concurrence (M.-A. Frison-Roche et J.-C. Roda, Précis Dalloz, Droit de la concurrence, préc., n°454), du fait de la décision dite Shell rendue le 26 mai 2021 sur le terrain de la responsabilité civile par le Tribunal de La Haye.

 

III. LE DROIT DE LA COMPLIANCE, UN DROIT DE LA REGULATION A-SECTORIEL NE REQUERANT QU'UNE SUPERVISION

En effet et précisément, dans cet arrêt du 26 mai 2021, le Tribunal de La Haye a refusé de considérer que constituait une concurrence déloyale le fait d'imposer à Shell une obligation de réduire des émissions de CO2, même si cela freine sa croissance et que ses compétiteurs sur le marché du pétrole et du gaz n'y sont pas soumis car "l'intérêt servi par l'obligation de réduction l'emporte sur les intérêts commerciaux du groupe Shell...".

Le groupe Shell a donc une obligation d'action pour atteindre un intérêt qui le dépasse : un but monumental climatique, qui engendre à sa charge une Responsabilité Ex Ante.

🔴M.A. Frison-Roche, La Responsabilité Ex Ante, pilier du Droit de la Compliance, 2022.

Puisque le Droit de la Compliance impose aux entreprises de telles responsabilités, exige d'elles qu'elles prennent en charge de telles ambitions, détectent et préviennent de telles catastrophiques, alors implicitement, il leur confère les pouvoirs nécessaires pour le faire.

Cela serait inconcevable que les entreprises, obligées d'agir pour le climat, n'ont seulement n'aient pas le pouvoir de le faire, mais encore se voient interdire de le faire, par exemple par le Droit de la Concurrence. Cela est une conséquence directe du Principe de Proportionnalité, qui est au cœur du Droit de la compliance : l'entreprise ne doit certes pas avoir plus de pouvoir qu'il n'est nécessaire pour qu'elle atteigne le but qui lui est assigné, mais elle doit avoir tous les pouvoirs qui lui sont nécessaires pour cela.

🔴M.-A. Frison-Roche, Définition du Principe de proportionnalité et définition du Droit de la Compliance, in Les buts monumentaux de la Compliance, 2022

🔴M.-A. Frison-Roche, Concevoir le Pouvoir, 2021

Le Droit de la Compliance apparaît ici nettement puisqu'indépendamment des lignes directrices de 2004 de la Commission européenne qui n'admettent qu'un bilan concurrentiel, l'Autorité de concurrence prend ici directement appui sur l'initiative des entreprises qui s'associent structurellement pour atteindre un but climatique d'intérêt général.

En cela, et en Ex Ante, les entreprises mettent au point une infrastructure qui dans la durée va certes aller contre les principes de concurrence mais va tendre vers le But Monumental dont elles sont chargées, et pour Shell cette charge repose expressément sur elle puisque par ailleurs une juridiction le lui a expressément rappelé en refusant justement de faire jouer à son bénéfice la protection du Droit de la concurrence déloyale !

Ainsi, le Droit de la Compliance est ici illustré en ce qu'il est le prolongement du Droit de la Régulation.

🔴M.A. Frison-Roche, Du Droit de la Régulation au Droit de la Compliance, in Régulation, Supervision, Compliance, 2017

Ce mouvement va se renforcer, le Droit de la Compliance se plaçant au centre du Droit économique, laissant aux entreprises le soin, l'obligation, le pouvoir, de prendre des initiatives à long terme pour viser des buts d'intérêt général global, sous la supervision Ex Ante puis en continu des Autorités publiques.

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1 juin 2022

Compliance : sur le vif

24 mai 2022

Base Documentaire : Soft Law

► Référence complète : Autorité de la concurrence (ADLC), Document-cadre du 24 mai 2022 sur les programmes de conformité aux règles de concurrence, 2022.

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► Lire le document-cadre.

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2 avril 2022

Compliance : sur le vif

23 mars 2022

Publications

► Référence complète : M.-A. Frison-Roche & J.-Ch. Roda, Droit de la concurrence, Dalloz, coll. "Précis", 2ième éd., 2022, 842 p.

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► Cette deuxième édition fait suite à la première édition écrite avec Marie-Stéphane Payet.

📝lire l'avant-propos écrit en dédicace à Marie-Stéphane

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📕lire la 4ième de couverture de l'ouvrage

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📕lire la table des matières de l'ouvrage

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► Résumé de l'ouvrage : Même si les réformes se succèdent et les bouleversements sont incessants, de fait (numérique) ou politiques (appréhension des investissements étrangers, controverses relatives aux objectifs), le cadre du droit de la concurrence est stable, le droit français et le droit européen étant en harmonie. A la fois droit des marchés concurrentiels et droit des relations entre acteurs économiques, le droit de la concurrence allie ces deux perspectives. Son ancienneté et son homogénéité accroissent sa capacité à trouver des solutions. L'ouvrage restitue la cohérence et la force du droit de la concurrence qui, ainsi éclairé, est plus aisé à maitriser et à anticiper.

La première partie expose donc les blocs de règles qui « protègent les marchés concurrentiels », à travers des mécanismes de plus en plus ex ante, non seulement le contrôle des concentrations mais encore le contrôle de la puissance d'achat menant à une gouvernance des marchés par des autorités travaillant ensemble, tandis que les sanctions des comportements anticoncurrentiels restaurent les marchés détériorés par les abus.

La deuxième partie expose les blocs de règles qui « rééquilibrent les relations économiques ». Les outils utilisés sont souvent plus anciens, le maniement n'en est pas moins innovant.

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📝lire le compte-rendu fait de l'ouvrage par le professeur Walid Chaiehloudj dans la revue Concurrences

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27 février 2022

Compliance : sur le vif

28 novembre 2021

Compliance : sur le vif

4 novembre 2021

Base Documentaire

► Référence complète : Marty, F., L'apport des programmes de conformité à la compétitivité internationale : une perspective concurrentielle, in Frison-Roche, M.-A. (dir.), Les buts monumentaux de la Compliance, collection "Régulations & Compliance", Journal of Regulation & Compliance (JoRC) et Dalloz, à paraître.

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► Résumé de l'article : L'auteur prend les programmes de conformité adoptées par les entreprises, tels que visés par le document-cadre publié le 11 octobre 2021 par l'Autorité de la concurrence, pour examiner tout d'abord comment les entreprises utilisent ces programmes pour se prémunir contre la perspective de sanctions, pour lutter elle-même contre des incitations criminelles produites notamment par des incitations de performances financières, les programmes de conformité participant au management du "risque juridique", liant notamment conformité et programme de clémence.

Puis l'auteur décrit la façon dont ces programmes de conformité concurrentielle sont utilisés d'une façon plus dynamique par l'entreprise pour accroître sa compétitivité de l'entreprise, celle-ci accueillant au sein de sa gouvernance une fonction de régulation que l'autorité publique lui a répliquée, allant au-delà de l'autorégulation pour atteindre efficacement des Buts grâce à cette Régulation déléguée. . 

 

 

Il est alors possible de parler d’organizational crime[22] quand bien même les objectifs du système d’incitations n’étaient orientés que vers la recherche de performance et non vers un encouragement à enfreindre les règles[23]. Il convient en effet d’articuler les notions de responsabilité individuelle (des personnes physiques) et de responsabilité collective (des personnes morales). Le cadre qui commet une pratique anticoncurrentielle peut agir de son propre chef et dans son propre intérêt mais il peut également le faire dans le cadre de la structure incitative mise en place par la firme. Comme l’a indiqué la Cour Suprême américaine dans son arrêt Dotterweich : « la seule façon pour une entreprise d’agir, c’est à travers les individus qui agissent pour son compte[24] ».

 

La décentralisation induit des risques spécifiques en matière de supervision mais également en termes de divergence des cultures professionnelles, notamment dans des groupes multinationaux. La culture de concurrence peut s’avérer hétérogène d’une division à l’autre. Des évaluations divergentes des risques liés à l’absence de conformité peuvent conduire à des rises de risques excessives de la part de certains décideurs. Il s’agit également de relever qu’une firme décentralisée et active sur plusieurs marchés fait face à des sanctions potentiellement croissantes au titre du facteur aggravant qu’est la réitération des pratiques. Dans le cadre du communiqué « sanctions » de l’Autorité de concurrence publié en juillet 2021, ce facteur peut conduire à une augmentation du montant de base de la sanction de 15 à 50%.

 

La réponse à ce risque est d’une triple nature : la révision des modes de récompenses et d’évaluation de la performance par la firme elle-même, un contrôle interne adéquat pour détecter des comportements collectivement nuisibles et enfin l’existence d’un ensemble de sanctions individuelles tant internes (contrat de travail) qu’externes (poursuites des personnes physiques, sanctions sous forme d’interdictions professionnelles comme dans certains champs de régulation).

 

La conformité peut tout d’abord jouer comme un remède comportemental dans le cadre d’un contentieux concurrentiel.

 

Il n’est pas acquis que l’existence d’un programme de conformité puisse jouer comme un facteur permettant de réduire une sanction concurrentielle[25], ne serait-ce en ce que la constatation d’une infraction montre la faible effectivité du programme[26]. Pour autant, la mise en place d’un programme de clémence peut participer, si une procédure est ouverte, du recours à une procédure de transaction[27]. L’attrait de cette procédure, qui a remplacé l’ancienne non contestation des griefs, est de donner une certitude à la firme mise en cause quant à la fourchette de la sanction pécuniaire qui lui sera appliquée. Cette relative certitude a une forte importance pour le management des firmes et leurs actionnaires. En effet, bien que l’Autorité publie des lignes directrices quant à sa méthode de fixation des sanctions pécuniaires, il ne s’agit en rien d’un barème donnant une indication précise du montant encouru[28]. Une firme qui doit rendre compte aux marchés financiers et en premier lieu à ses actionnaires du risque encouru a donc un intérêt significatif d’opter pour une procédure de transaction pour délivrer une information financière plus fiable et donc éviter les effets d’une éventuelle « prime de risque » que pourraient exiger les investisseurs[29].

 

Si la mise en place d’un programme de conformité peut jouer dans des procédures transactionnelles (transaction, engagements), l’existence d’un programme de conformité ne semble pas être de nature à jouer comme un facteur aggravant dans le calcul d’une sanction pécuniaire. Il n’est fait nulle mention à ce point dans le communiqué sur les amendes de la Commission européenne de 2006. Les lignes directrices de l’Autorité de la concurrence ne mentionnent pas ce point tant pour leur version de 2011 que pour celle de 2021.

B-      La conformité contrainte par les investisseurs. Un investissement en réputation ou en minimisation du risque pour l’actionnaire

 

Il s’agit ici de s’interroger sur les coûts de la non-conformité. Un premier coût est lié à la sanction pécuniaire que peut prononcer l’Autorité de la concurrence[30]. La sanction administrative à laquelle s’expose une entreprise qui s’est engagée s’inscrit dans une nette hausse depuis la mise en place du Règlement 1/2003. La directive ECN+ a sensiblement aggravé ces sanctions[31], notamment dès lors par exemple qu’une éventuelle entente utilise une association professionnelle pour mettre  en œuvre ses activités[32].  L’entreprise fait de surcroît face à des risques accrus d’action de suite en dommages et intérêts au civil[33]. Rappelons enfin qu’une sanction concurrentielle peut s’accompagner d’injonctions comportementales obligeant la firme condamnée (ou la firme qui opterait pour une procédure d’engagements) de revoir les termes de ses contrats et donc de renégocier avec ses contreparties en situation de faiblesse.

 

Les coûts potentiels liés à une infraction aux règles de concurrence peuvent également avoir une traduction directe sur les personnes physiques. Dans le cas français, l’article L.420-6 du code de commerce prévoit des peines pouvant aller jusqu’à quatre ans d’emprisonnement et 75 000 euros d’amende pour « les personnes physiques ayant pris frauduleusement une part personnelle et déterminante dans la conception, l’organisation ou la mise en œuvre de pratiques anticoncurrentielles ». Cette ressource juridique, héritage de l’article 419 du code pénal[34] (relatif au délit d’accaparement[35]) n’est guère fréquemment utilisée mais son aspect dissuasif fait écho à l’expérience des Etats pour lesquels subsiste une criminalisation des pratiques anticoncurrentielles[36].

 

Cependant, d’autres coûts liés à une infraction – ou ne serait-ce qu’à une procédure engagée par une autorité de concurrence – doivent être mis en exergue.

 

Un premier très direct tient aux coûts liés à la défense[37]. Comme cela a pu être documenté dans le cas états-unien, la mise en œuvre de l’approche par les effets (dite approche plus économique) fait peser un coût significatif sur les acteurs économiques dont la surface de marché est la plus faible ou la situation financière la plus précaire, ce qui pose un problème en termes de capacité d’exercice des droits de la défense[38].

 

Un deuxième effet tient à un divertissement de l’attention du management. La défense est très chronophage et peut dans certains cas paralyser les dirigeants de la firme. Le cas de Microsoft engagé dans de nombreux contentieux concurrentiels entre la fin des années 1990 et la première décennie de notre siècle a pu être cité en exemple. La firme a manqué certains virages technologiques, notamment l’Internet mobile, peut-être dans la mesure où elle ne pouvait pas être aussi attentive aux opportunités de marché que ses concurrentes[39]. Il convient également de prendre en considération le temps induit pour les équipes des firmes mises en cause par les réponses et les éléments statistiques et factuels à apporter aux autorités de concurrence dans le cadre d’une procédure contradictoire[40].

 

Un troisième effet, et non le moindre, tient à l’impact réputationnel pour la firme. Ce dernier se décline en impact sur l’image de la firme auprès des consommateurs et en impact sur les investisseurs. Ces derniers peuvent être tout d’abord affectés en ce qu’une procédure ouverte sur la base des règles de concurrence (pour ne pas parler d’une sanction) nuit à l’image de marque de la firme. Les dimensions éthiques et sociétalement responsables des investissements peuvent être un premier problème. Un second problème tient à l’anticipation de l’impact des coûts liés à la défense et des éventuelles sanctions sur la valeur du titre. En effet, si on adopte l’hypothèse d’efficience des marchés financiers, la valeur d’un titre reflète les flux de ressources qu’il est possible d’en attendre dans le futur. L’annonce d’une procédure concurrentielle a donc un effet direct et immédiat sur le cours de bourse[41]. Il est par exemple possible de citer l’étude d’évènement réalisée par Aguzzoni, Langus et Motta qui montre que l’annonce d’une visite d’entreprise a un effet sur le cours négatif à hauteur de 2,2%[42]. Plus l’incertitude sur le montant de la sanction est fort, plus les investisseurs appliqueront une décote sur le titre. Pour limiter cette prime de risque tant en montant qu’en durée d’application, les firmes ont un intérêt direct à s’engager dans des procédures transactionnelles et à mettre en œuvre des procédures de détection et de remédiation interne pour éviter ces effets.

 

Un quatrième effet doit être considérer : celui de la perte d’opportunités. Une éventuelle condamnation peut priver la firme de l’accès à certains marchés publics. De la même certains partenaires commerciaux potentiels, également soumis à des exigences de conduite responsable, peuvent être réticents à s’engager avec une compagnie dont l’image auprès des investisseurs est écornée. Ces facteurs peuvent être de nature à accroître les coûts futurs de l’entreprise ou de réduire sa capacité à réaliser des gains de productivité.

 

II - L’effectivité des programmes de conformité et les effets en termes de compétitivité

 

Il convient de revenir sur une distinction très ancienne mais qui demeure pertinente : celle de la séparation du management et de la propriété des firmes. Remontant aux travaux de Berle et Means au début des années 1930[43], cette question du contrôle induit un possible désalignement des intérêts entre cadres exécutifs des entreprises et actionnaires. L’inscription dans le temps de la procédure concurrentielle et le fait que la sanction pèse sur les actionnaires peut conduire à une logique de relation principal – agent particulièrement préjudiciable pour l’actionnaire. Au-delà des mécanismes incitatifs permettant d’aligner les intérêts (participation, stock-options, etc…), des dispositifs de sensibilisation mais également de contrôle internes sont nécessaires. Il s’agit non seulement de prévenir des infractions mais aussi de les détecter et de pouvoir prendre les mesures nécessaires pour limiter les conséquences pour la firme. Pour être crédible auprès des managers, le programme de conformité doit être porté par les dirigeants[44] et être intégré à l’ensemble des outils de coporate governance.

 

A-     Des programmes effectifs ?

 

La question de l’effectivité des programmes de conformité doit être saisie en regard de la double nature individuelle et collective de la question. Au niveau de l’individu, le choix d’une action conforme ou non conforme aux règles de concurrence peut dépendre de plusieurs facteurs. Parmi ces derniers nous pourrions citer l’intérêt individuel perçu, l’adhésion aux valeurs ou aux normes de comportement d’une communauté professionnelle donnée ou encore la méconnaissance des règles. L’information délivrée dans le cadre des formations délivrées dans le programme de conformité peut résoudre les difficultés se rattachant à ce dernier point. De la même façon, la diffusion d’une culture de conformité peut faire évoluer les conventions adoptées par les cadres. La résolution de la première difficulté citée est peut-être moins évidente. Auprès de cadres animés par une rationalité substantielle (ou d’un raisonnement de type 1), une information sur les règles de concurrence et un système d’incitations internes adaptées peuvent modifier le comportement. La connaissance de la probabilité de détection et de la sanction encourue peut avoir un effet dissuasif d’autant plus fort que la « menace » externe se double d’une menace interne[45]. Le programme de conformité peut, comme nous allons le voir infra, accroît la probabilité de détection (la firme jouit d’une meilleure information que le régulateur) et conduit à de nouvelles sanctions pesant sur les perspectives de rémunération des agents. Pour autant, ce raisonnement est-il applicable à des cadres court-termistes ou animés par une rationalité limitée[46] ? C’est le problème de décisions qui relèvent plus d’une logique de type 2, propre à une convention, que d’une logique de type 1, relevant d’un calcul, selon les catégories construites par Daniel Kahneman dans Thinking, Fast and Slow[47].

 

Toujours est-il que c’est bien sur cette logique incitative que repose la conformité.  En effet, la logique incitative des programmes de conformité est d’autant plus renforcée sur le principe par la directive ECN+ que celle-ci renforce les gains liés au bénéfice d’un programme de clémence, à la fois pour les entreprises et pour les personnes physiques. Comme le relève l’Autorité de la concurrence dans son document cadre sur la clémence : « […] l’incitation pour les entreprises à mettre à jour d’éventuelles ententes secrètes est encore renforcée puisqu’une immunité , ou une réduction, de sanction pénale peut également être obtenue, sous condition, par les personnes physiques appartenant au personnel de l’entreprise qui a la première formé une demande de clémence[48] ».

 

Pour autant, deux risques doivent être mis en exergue. Un premier risque est une dénaturation du programme de conformité qui conduirait à combiner surveillance interne et maintien d’un système incitatif biaisé. Bien qu’informé par l’entreprise sur les enjeux de la conformité, le cadre serait toujours incité à opter pour des stratégies non vertueuses pour satisfaire aux objectifs qui lui sont donnés. Ils joueraient alors le rôle de fusibles bien commodes pour la firme. La dérive ne serait qu’individuelle et non collective. Un second risque serait que mieux informés des règles, des mécanismes de détection et des standards de preuve, un cadre risquophile s’engage d’autant plus dans des pratiques anticoncurrentielles. L’illusion du contrôle jouerait alors.

 

Il serait possible de considérer que les programmes de conformité se heurtent aux mêmes limites que celles fréquemment attribuées aux logiques d’autorégulation. Il serait possible de considérer que ceux-ci se limitent à des déclarations unilatérales dépourvues d’effectivité et conduisant à une « sous-application » des règles[49]. Cependant, l’autorégulation peut être plus efficace que la régulation externe dès lors qu’elle dispose d’informations plus fiables et accessibles plus rapidement et que les firmes ont un intérêt bien compris à la mettre en œuvre de façon diligente[50]. En d’autres termes, l’efficacité de l’autorégulation est d’autant plus efficace que la menace de la régulation externe est forte tant en termes de probabilité de détection des comportements délinquants que de risques de sanctions. Il en est de même pour les programmes de conformité.

 

Le document cadre publié par l’Autorité de la concurrence le 11 octobre 2021 reflète la nature incitative de la mise en place et de la mise en œuvre effective par les firmes de programme de conformité dans une perspective d’intérêt individuel bien compris. Si l’adhésion à la norme concurrentielle au travers de la diffusion d’une culture de concurrence est l’une des finalités des programmes de conformité, ces derniers jouent également un rôle en matière de responsabilisation des parties prenantes. L’objectif d’un programme de conformité ne doit pas seulement résider en une fin préventive (éviter la commission d’infraction) mais également en des fins curatives. Le programme doit permettre de détecter et de remédier à d’éventuelles pratiques illicites. Le lien entre le programme de conformité et les programmes de clémence[51] mis en place par les autorités chargées des règles de concurrence apparaît ici. La politique de conformité peut permettre de détecter en interne des pratiques anticoncurrentielles, d’y mettre un terme et d’activer ces programmes pour bénéficier d’une immunité en termes de sanction concurrentielle[52].

 

A cet égard, la conformité peut être saisie non seulement comme une information interne quant aux règles de concurrence applicables à la firme mais également comme un outil participant à la gouvernance de la firme elle-même. En premier lieu, le programme de conformité doit s’adapter à chaque firme. Il doit tenir compte des risques qui lui sont propres mais également de l’évolution de sa position sur le marché[53]. En deuxième lieu, le programme de conformité doit s’ajuster aux évolutions du cadre législatif, à la pratique décisionnelle et même aux communications et autres production des autorités relevant du droit souple. En troisième lieu, le programme de conformité doit s’appuyer sur des procédures internes de contrôle et d’alertes effectives[54].

 

B - Seulement une réplication des règles externes dans les procédures des firmes ou un outil de pilotage et de recherche de compétitivité ?

 

De tels dispositifs sont essentiels pour que le programme de conformité ne soit pas qu’une déclaration sans effet ou une simple communication d’entreprise. Ils n’en induisent pas moins la mise en place d’un mécanisme de régulation déléguée ou un mécanisme de régulation procédurale[55]. Celles-ci peuvent s’envisager de deux façons[56].

 

Dans une première, il s’agit d’une double relation « principal – agent », avec l’actionnaire jouant le rôle d’un principal délégué[57]. En situation d’information imparfaite par rapport à l’actionnaire, le « régulateur » lui transfère une obligation de résultat[58]. Il peut contrôler l’agent à moindre coût et peut – en dernier lieu – prévenir la réalisation du dommage. Il peut également le détecter plus rapidement et y remédier avec plus de célérité. A ce titre, le renforcement des sanctions est une condition préalable pour le développement de programmes de conformité de la part des firmes. Un second facteur d’incitation est lié au développement de textes de droit souple mettant en exergue les intérêts de la conformité pour les entreprises et insistant sur les bénéfices attendus en termes de limitation de risque de sanction (logique préventive) et de limitation de leurs montants si les procédures de contrôle associés au programme de conformité permettaient de les mettre à jour (logique curative).

 

Dans une seconde, il s’agit d’une procéduralisation de la régulation. Sa mise en œuvre effective passe par la transposition de la règle au sein des règles de gestion de l’entreprise. La logique est celle d’une légalisation des règles internes des entreprises[59].

 

Le document cadre de l’Autorité de la concurrence reprend cette logique : la conformité est appelée à se décliner dans le règlement intérieur des entreprises et à trouver des traductions dans des clauses des contrats de travail (§32). Il s’agit à la fois de pouvoir recueillir et dûment traiter des éventuelles alertes[60] et de mettre en place une procédure de sanction interne. La conformité en matière de concurrence joue à ce titre un rôle de prévention des dommages et de limitation de leur ampleur. L’accroissement des sanctions encourues et le développement des logiques de conformité peuvent alors se saisir dans la logique développée par Coglianese et Kagan[61], lesquels pensent la mise en œuvre de la régulation comme une combinaison de logiques « légale » (agonistique, verticale) et « sociétale » (coopérative, horizontale).

 

Pour autant la conformité n’est pas qu’un coût, une prime qui viserait à limiter un risque de sinistre. Au-delà de son coût[62], elle peut être source de gains d’efficacité[63].

 

 

La logique de conformité peut s’avérer un facteur de compétitivité à long terme pour les entreprises, notamment dans une dimension internationale, en ce qu’elle permet de crédibiliser les engagements en termes de responsabilité sociétales tant vis-à-vis des consommateurs que des actionnaires et qu’elle permet de sécuriser les décisions des investisseurs. Il s’agit d’un côté de prévenir des phénomènes de type consumer backlash et de l’autre de conforter les anticipations des investisseurs vis-à-vis des titres de la société, si celle-ci est cotée, ou des acquéreurs si la firme fait l’objet d’un projet de fusion-acquisition. L’absence d’un programme de conformité et d’un éventuel programme de clémence peuvent exposer les acheteurs d’une entreprise à un risque financier et réputationnel majeur si l’entreprise cible est impliquée dans une pratique anticoncurrentielle. Evoluant dans une situation d’information incomplète et asymétrique dans ses opérations de due diligence préalables à la transaction, l’acquéreur risque tout d’abord de valoriser excessivement la cible (sa profitabilité pouvant être liée à son comportement délinquant) et ensuite de s’exposer au paiement des sanctions administratives et des réparations au civil. La conformité en sécurisant les actionnaires et plus généralement les parties prenantes de la firme permet de consolider les anticipations et de prévenir d’éventuelles primes de risque.

 

Comme le relevait une étude commandée en 2008 par le Conseil de la concurrence sur les programmes de conformité[64], ces derniers se sont en partie développés dans le cas français grâce à l’internationalisation de nos groupes et à des prises de participations d’investisseurs étrangers dans leur capital. D’une part, les risques pour les entreprises étrangères étaient plus élevés qu’en France et celles-ci étaient plus sensibilisées aux effets réputationnels. D’autre part, la dénonciation d’irrégularités internes par les firmes mêmes n’avaient pas une connotation aussi négative qu’elle avait en France. Un groupe multinational doit, dans une situation marquée par la portée extraterritoriale de certaines lois nationales[65], se conformer aux règles nationales qui sont les plus exigeantes et ce pour l’ensemble de ses filiales.

 

 

Au final, le programme de conformité peut conduire la firme à répliquer en interne les procédures de détection des pratiques anticoncurrentielles mises en place par les autorités de concurrence[66]. Le meilleur accès aux données dont dispose la firme peut faciliter l’utilisation des outils de balayage des données (screening) en vue de détecter des configurations de prix anormales susceptibles de traduire des ententes anticoncurrentielles ou des pratiques de corruption[67]. Des dispositifs de protection des lanceurs d’alerte internes, voire des procédures internes de clémence, peuvent permettre de mettre un terme plus rapide aux pratiques contraires aux règles de concurrence. Ce sont donc tous les instruments des autorités de concurrence que la firme peut répliquer dans ces règles internes pour détecter en amont les risques de conformité concurrentielle et activer les ressources mises à sa disposition par les règles de concurrence[68]. Le programme de conformité conduit non seulement la mise en œuvre de dispositifs d’incitations et de sanctions internes inspirés des outils des autorités de concurrence mais également au développement d’audits et de procédures de contrôle reprenant leur modèle[69]. Il s’agit non seulement de répliquer en internes les outils de surveillance des marchés utilisés par les régulateurs mais également de lancer des visites surprises de telle ou telle filiale ou direction de type mock dawn raids[70].

 

Comme le souligne l’Autorité dans son document-cadre d’octobre 2021, les programmes de conformité n’ont pas qu’un effet ex-ante (prévention) mais un possible ex-post (curation). En permettant une détection interne en amont des pratiques questionnables, ils rendent possibles la mise en œuvre d’actions permettant d’y mettre un terme. Le sens d’un programme de conformité ne se limite à la diffusion d’une culture de concurrence ou à une information donnée aux cadres de l’entreprises, il doit également s’exprimer au travers de procédures de contrôle interne.

 

A ce titre, la conformité pousse à l’adoption de programmes internes de détection des pratiques anticoncurrentielles même s’ils sont coûteux à court terme pour les firmes. Ils permettent cependant une meilleure performance à long terme en limitant d’éventuelles primes de risques prises par les investisseurs et les partenaires commerciaux et conduisent au point de vue collectif à une prévention plus efficace de ces pratiques que si elle était menée par les seuls pouvoirs publics.

 

La conformité ne doit cependant pas être réduite à une seule finalité utilitariste, fût-elle individuelle ou collective. Un programme conformité ne doit pas être conçu dans les eaux glacées du calcul égoïste ou être écrit avec de l’acide cynique, pour reprendre des termes utilisés dans d’autres contexte par Karl Marx[71] ou Oliver Wendell Holmes[72] mais qui recouvraient également le fait que le calcul économique rationnel ne pouvait à lui seul résumer la vie sociale. Les stratégies des firmes ne peuvent être considérées selon le seul angle du marché. Leur performance de long terme dépend également de leurs capacités à intégrer des pressions sociales qui peuvent trouver une traduction dans les règles de droit mais également dans les attentes des parties prenantes. Il ne s’agit pas seulement de prévenir un risque de coûts futurs mais de rester « en phase » avec les aspirations sociales et de contribuer aux buts monumentaux que se donne la société. La conformité dépasse la stratégie de marché ou la garantie du respect de la régulation[73]. Elle ne revient pas seulement à créer (ou à préserver) de la valeur mais à porter des valeurs qui sont les meilleures garantes de la capacité de la firme à rester compétitive sur le long terme.

 

[1] Une première version de ce texte a été présenté dans le cadre du colloque Effectivité de la compliance et compétitivité internationale organisé à l’Université Paris 2 Panthéon-Assas dans le cadre du cycle de colloques sur Les Buts Monumentaux de la Compliance organisé par Marie-Anne Frison-Roche.

Ses actes seront publiés en 2022 sous la direction de Marie-Anne Frison-Roche.

Frison-Roche, M.-A. (dir.), (2022), Les Buts Monumentaux de la Compliance, série "Régulations & Compliance", Journal of Regulation & Compliance (JoRC) et Dalloz.

[2] Les programmes de conformité se sont initialement développés dans le domaine de la régulation bancaire et financière. La mise en œuvre de ces derniers a notamment été accélérée aux Etats-Unis par la loi Sarbanes-Oxley (Public Company Accounting Reform and Investor Protection Act) du 30 juillet 2002, promulguée à la suite de l’affaire Enron, notamment pour protéger les intérêts des actionnaires par rapport aux pratiques délictuelles que pourraient mettre en œuvre les dirigeants des firmes mais également pour « établir un lien systématiques entre les buts de politique publique (policer le marché) et la gouvernance interne des entreprises ».

Du Marais B., (2015), « Compliance et conformité », in Bazex M., Eckert G., Lanneau R., Le Berre C., du Marais B. et Sée A., eds., Dictionnaire des régulations 2016, pp.191-201, p.192.

[3] Autorité de la concurrence, (2021), « Document cadre du 11 octobre 2021 sur les programmes de conformité aux règles de concurrence ».

[4] A ce titre, la conformité s’inscrit dans les débats sur l’effectivité et sur l’efficacité de la réglementation. Cette dernière peut être saisie à la fois au regard de l’atteinte de ses buts ou en termes d’impacts sociaux mais également en termes procéduraux.

Voir à ce propos Ayres I. and Braithwaite J., (1992), Responsive Regulation. Transcending the Deregulation Debate, Oxford University Press.

[5] Marty F., Kirat T., Bouthinon-Dumas H. et Rezaee A., (2020), « La crise de la régulation par la sanction ex post : les nouvelles voies de la régulation financière, de la crise des subprimes au trading haute fréquence », Droit et Société, 104, 2020/1, pp.71-88.

[6] Boulu-Reshef B. et Monnier-Schlumberger C., (2019), « Lutte contre les cartels : comment dissuader les têtes brûlées ? », Revue Economique, 70, 2019-6, pp.1187-1199.

[7] Bach D. and Bruce Allen D., (2010), “What Every CEO Needs to Know About Nonmarket Strategy”, MIT Sloan Management Review, 51(3), Spring, pp.41-48.

[8] Becker G., (1968), “Crime and Punishment: An Economic Approach”, Journal of Political Economy, 76, pp.169-217.

Voir également : Polinsky A.M. and Shavell S., (2000), “The Economic Theory of the Public Enforcement of the Law”, Journal of Economic Litterature, 38, pp.45-76.

[9] Fleckinger P., Lafay T. et Monnier C., (2013), « Rémunération des dirigeants et risque de fraude d’entreprise », Revue Economique, 64(3), pp.457-467.

[10] Hüschelrath K., (2010), “Competition Law Compliance Programmes: Motivation, Design and Implementation”, Competition Law, pp.481-506.

[11]  Stucke M., (2011), “Am I a Price-Fixer? A Behavioral Analysis of Cartels”, in Beaton-Wells C. and Ezrachi A., eds, Criminalizing Cartels: A Critical Interdisciplinary Study of an International Movement, Hart Publishing, ch.12

[12] Combe E. et Monnier-Schlumberger C., (2016), « Cartels et comportements des managers : Analyse et implications pour les politiques publiques », Revue Economique, 2016-HS1, pp.95-109, p.99.

[13] Cohen J., Ding Y., Lesage C. and Stolowy H., (2010), “Corporate Fraud and Managers Behavior: Evidence from the Press”, Journal of Business Ethics, 95(2), pp.271-315.

[14] Roquilly C., (2010), « Intel, dix ans après : le mythe de la compliance revisité ? », Concurrences, 2-2010, pp.50-56.

[15] Commission européenne, cas AT.39850 Container Shipping, 7 juillet 2016.

[16] Tan D., Chapple L. and Walsh K., (2017), “Corporate Fraud Culture: Re-Examining the Corporate Governance and Performance Relation”, Accounting & Finance, 57, pp.597-620.

[17] Cet esprit de corps est d’autant plus effectif que les cadres impliqués se caractérisent par une forte homogénéité (en termes sociaux, culturels, scolaires, …) et qu’ils interagissent depuis longtemps.

Armstrong M. and Huck S., (2014), “Behavioral Economics and Antitrust”, in D. Blair and Sokol D., eds, The Oxford Handbook of International Antitrust Economics, volume 1, Oxford University Press, pp.205-228.

[18] Ce point plaide pour une mise en œuvre du programme de conformité au plus haut niveau de la direction de la firme pour témoigner de l’implication de sa direction générale et légitimer par ce biais la convention sur laquelle le programme de conformité s’appuie.

[19] Bilz K. and Nadler J., (2014), “Law, Moral Attitudes, and Behavioral Change”, in Zamir E. and Teichman D., eds., Behavioral Economics and the Law, Oxford University Press, pp.241-267.

[20] Voir sur ces points : Combe E. et Monnier-Schlumberger C., (2016), « Cartels et comportements des managers : Analyse et implications pour les politiques publiques », Revue Economique, 2016-HS1, pp.95-109.

[21] Combe E. and Monnier C., (2011), “Fines against Hard Core Cartels in Europe: The Myth of Over enforcement”, Antitrust Bulletin, 56(2), pp.235-275.

[22] Reurink A., (2016), “‘White-Collar’ Crime: The Concept and its Potential for the Analysis of Financial Crime”, European Journal of Sociology, 57(3), pp.399 et s.

[23] Certains contentieux américains ont conduit à souligner dans le domaine de la régulation bancaire que certaines entreprises pourraient développer une culture de non-conformité en vidant le programme de compliance de sa substance, ne serait-ce que pour en réduire les coûts.

Voir Garrett B.L., (2016), « Le délinquant d’entreprise comme bouc émissaire », Revue Internationale de Droit Economique, 2016-2, tome XXX, pp.239-279, p.264.

[24] U.S. v. Dotterweich, 320 U.S., 277, 1943. Cité par Garrett B.L., (2016), Ibid.

[25] Claudel E., (2012), « Document cadre du 10 février 2012 sur les programmes de conformité aux règles de concurrence », Revue Trimestrielle de Droit Commercial, pp.312 et s.

[26] A l’inverse, les organizational sentencing guidelines américaines (§ 8D1.1) de 2014 considèrent que l’existence d’un tel programme peut être retenue comme une circonstance atténuante.

[27] Article L.464-2. III du code de commerce.

[28] Les sanctions concurrentielles sont déterminées en fonctions des circonstances propres à chaque espèce et doivent de surcroît respecter une exigence d’individualisation. Comme le note l’Autorité dans son communiqué du 30 juillet 2021 sur les sanctions : « Il n’est donc ni possible, ni souhaitable, tant du point de vue de l’Autorité que dans l’intérêt des entreprises et des associations d’entreprises concernées, de concevoir un barème automatique permettant de prévoir par avance le montant précis des sanons encourues »

Autorité de la concurrence, (2021), « Communiqué relatif à la méthode de détermination des sanctions pécuniaires », 30 juillet, §13.

[29] Bougette P., Bouthinon-Dumas H. et Marty F., (2016), « La prévisibilité et la négociabilité des sanctions en droit de la concurrence. Réflexions à partir du cas Orange et de la procédure de transaction introduite par la Loi Macron », Orizzonti del Diritto Commerciale, n°2-2016, art. 51, http://images.rivistaodc.eu/f/articoli/51_articolo_QsSmi_ORIZZONTI.pdf

[30] Bouthinon-Dumas H. et Marty F., (2014), « Evaluer et manager le risque de sanctions pécuniaires prononcées par les autorités de régulation », Management & Avenir, n°74, décembre, pp.175-189.

[31] Directive n°2019/1 du 11 décembre 2018 visant à doter les autorités de concurrence des Etats membres des moyens de mettre en œuvre plus efficacement les règles de concurrence et à garantir le bon fonctionnement du marché intérieur ; directive transposée en droit interne par l’ordonnance n°2021-649 du 26 mai 2021.

[32] Développer

[33] L.481-1 du code de commerce

[34] « Tous ceux :

1° Qui, par des faits faux ou calomnieux semés sciemment dans le public, par des offres jetées sur le marché à dessein de troubler les cours, par des suroffres faites aux prix que demanderaient les vendeurs eux-mêmes, par des voies ou moyens frauduleux quelconques ;

2° Ou qui, en exerçant ou tentant d'exercer, soit individuellement, soit par réunion ou coalition, une action sur le marché dans le but de se procurer un gain qui ne serait pas le résultat du jeu naturel de l'offre et de la demande.

Auront, directement, ou par personne interposée, opéré ou tenté d'opérer la hausse ou la baisse artificielle du prix des denrées ou marchandises ou des effets publics ou privés,

Seront punis d'un emprisonnement de deux mois à deux ans et d'une amende de 7.200 F à 360.000 F ».

[35] Bouloc B., (2005), « La sanction judiciaire des pratiques anticoncurrentielles par la voie pénale », Les Petites Affiches, 20 janv., n° PA200501402, p. 11.

[36] Wils W., (2006), “Is Criminalization of EU Competition Law the Answer?”, World Competition, volume 28, Issue 2, pp. 117-159, https://kluwerlawonline.com/journalarticle/World+Competition/28.2/WOCO2005010

[37] Pour l’affaire Airtours / First Choice liée à une opération de concentration, au début des années 2000, les frais engagés par les deux entreprises étaient déjà évalués à plus de deux millions d’euros.

Neven D., (2005), « Competition economics and antitrust in Europe”

[38] Chopra R. and Khan L., (2020), « The Case for “Unfair Methods of Competition” Rulemaking », Chicago Law Review, vol. 87, pp. 357-379.

[39] Voir sur ce point l’interview de Bill Gates, New York Times DealBook Conference – 11/6/2019. https://www.youtube.com/watch?v=ZMMZ1Qzr1ag&t=1307s

Microsoft aurait selon son ancien PDG été trop focalisé sur sa défense pour identifier le potentiel d’Android qu’il n’a pas racheté alors qu’il avait la possibilité de le faire avant Google.

[40] Hüschelrath K., (2010), op. cit., p.485.

[41] Pour une analyse générale de l’impact des procédures engagés par les autorités de régulation sur la valeur boursière des entreprises mises en cause, voir

Thierry Kirat and Amir Rezaee, (2019), « How Stock Markets React to Regulatory Sanctions? Evidence from France », Applied Economics, 51 (60), pp. 1-9.

[42] Aguzzoni L., Langus G. and Motta M., (2013), “The effect of antitrust investigations and fines on the firm valuation”, Journal of Industrial Economics, 61(2), pp. 290-338.

[43] La maîtrise des risques liés à cette déconnexion passe par l’utilisation des outils de la gouvernance d’entreprises (surveillance, alignement des intérêts par des mécanismes incitatifs, etc…).

Jensen M. and Meckling W., (1976), “Theory of the Firm: Managerial Behaviour, Agency Costs and Ownership Structure”, Journal of Financial Economics, 3(4), pp.305-360.

[44] Bergam H. and Sokol D., (2015), “The Air Cargo Cartel: A Study in Compliance and Detection”, in Beaton-Wells C. and Tran C., ed., Anti-Cartel Enforcement in a Contemporary Age: The Leniency Religion, Hart Publishing.

[45] La menace externe est une dimension clé pour les discussions relatives aux risques de sur-enforcement ou de sous-enforcement des règles de concurrence. Si la probabilité de détection est forte, le montant de la sanction encourue peut être maintenue à des niveaux raisonnables ce qui permet à la fois de limiter les coûts potentiels des faux-positifs et de garantir une certaine proportionnalité des peines. En renforçant de façon significative les risques de détection et en ajoutant aux sanctions des régulateurs extérieurs des sanctions internes, les programmes de conformité peuvent apporter une réponse partielle mais importante à ces deux enjeux.

[46] Boulu-Reshef, B. and Monnier-Schlumberger, C. (2019). Lutte contre les cartels : comment dissuader les têtes brûlées ?. Revue économique, 70, 1187-1199.

[47] Kahneman D., (2011), Thinking Fast and Slow, Farrar, Straus and Giroux, ed., 499p.

[48] Autorité de la concurrence, octobre 2021, §13.

[49] Basés sur des règles d’origines privées, propres à la firme, communes à une branche ou issues d’instances de certifications, ainsi que sur des textes de droit souple, les programmes de conformité peuvent apparaître, peut-être à tort, comme dotés d’une moindre effectivité que les dispositions relevant du droit de la régulation.

[50] Cusumano M. A., Gawer A., Yoffie D. B., (2021), “Can self-regulation save digital platforms?”, Industrial and Corporate Change, pp.1-27, https://doi.org/10.1093/icc/dtab052

[51] Article L.462-2 (IV) du code de commerce. La clémence permet à une entreprise de bénéficier d’une exonération totale ou partielle de sanctions dès lors qu’elle permet de détecter et de sanctionner les membres d’une entente dont elle a fait partie. En termes économique, la clémence exploite l’instabilité intrinsèque des accords de cartels. Elle vise à favoriser l’enclenchement d’une course à la dénonciation entre les firmes participantes. Le mécanisme est d’autant plus efficace qu’il permet de différencier le plus significativement possible les situations de sortie entre la première firme à dénoncer le cartel et les autres. L’enjeu est alors d’autant plus significatif que les actions de suite au civil représentent un risque financier élevé.

[52] Le lien avec les deals de justice américain peut être tracé. Dans ce cadre, la coopération de l’entreprise suppose également la mise en œuvre d’enquêtes internes (ou le paiement d’enquêteurs extérieurs) pour déterminer les fautes individuelles. Voir également la contribution d’Antoine Gaudemet dans ce volume.

[53] Une entreprise qui devient dominante voit sa responsabilité s’approfondir et une firme qui évolue sur un marché de plus en plus oligopolistique doit veiller à ce que son comportement ne soit pas de nature à faciliter l’émergence d’un équilibre de collusion tacite. Pour autant, comme l’a rappelé la cour d’appel de Paris « un simple parallélisme de comportements ne suffit pas à démontrer l'existence d'une entente anticoncurrentielle. Il peut […] être le fait de concurrents prenant des décisions autonomes, sur le fondement d'informations accessibles à tous, et selon une rationalité économique propre » (30 septembre 2021, 20/078467). La logique de la conformité n’empêche en rien l’entreprise de se comporter comme un acteur de marché avisé.

[54] Autorité de la concurrence, document cadre du 11 octobre 2021, §31.

[55] Black J., (2013), “Seeing, Knowing, and Regulating Financial Markets: Moving the Framework from the Economic to the Social”, LSE Law, Society and Economy Working Papers, 24

[56] Kirat T. and Marty F., (2015), “The regulatory practice of the French Financial Regulator, 2006-2011. From substantive to procedural financial regulation?”, Journal of Governance and Regulation, 4(4), pp.441-450.

[57] Voir dans le cas américain, la doctrine du respondant superior qui rend les entreprises responsables des actes illégaux que pourraient commettre leurs dirigeants et cadres.

Brickey K.F., (1982), “Corporate Criminal Accountability: A Brief History and an Observation”, Washington University Law Quarterly, 60(2), pp. 393-423.

En droit interne, la logique pourrait revenir à une délégation de pouvoir administrative, à ceci près qu’un programme de conformité peut y ajouter des éléments d’autorégulation le conduisant à être un outil de management de la firme et non pas seulement une réplication de la régulation dans les règles internes à la firme.

Voir sur ce point, du Marais B., (2015), op.cit., p.198.

[58] L’absence de mécanisme de contrôle effectif est sanctionné.

[59] Pistor K., (2013), “Towards a Legal Theory of Finance”, Journal of Comparative Economics, vol.41, pp.315-330.

[60] Traduction interne d’un dispositif de whistleblowing. Il est d’ailleurs à relever qu’il est plus intéressant pour la firme de mettre en place des dispositifs internes en faveur des lanceurs d’alerte que de risquer que ces derniers n’utilisent les dispositifs externes.

Schmidt M., (2005), « Whistleblowing’ Regulation and Accounting Standards Enforcement in Germany and Europe - An Economic Perspective », International Review of Law and Economics, Volume 25.

Cette question, ainsi que celle de l’éventuelle rémunération des lanceurs d’alerte, a occupé une place importante en novembre 2021 dans le cadre de la transposition en droit interne de la directive européenne du 23 octobre 2019 sur la protection du lanceur d'alerte.

[61] Coglianese C. and Kagan R.A., (2007), Regulation and Regulatory Process, Ashgate.

[62] Aubert C., Rey P. and Kovacic W., (2006), “The Impact of Leniency Programs on Cartels”, International Journal of Industrial Organization, 24(6), pp.1241-1266.

[63] La question peut être reliée à celle plus générale de l’attractivité économique du droit ou de l’impact de la qualité du cadre réglementaire sur l’attractivité d’une place juridique pour les investisseurs. La qualité peut à la fois être vue comme une source de surcoûts, pénalisante dans une logique de concurrence par les prix, ou comme une source de sécurité additionnelle pour les investisseurs. Voir notamment sur le premier angle, celui d’une conformité allant à l’encontre de la compétitivité internationale, les travaux de Luigi Zingales sur l’impact de la loi Sarbanes-Oxley.

Zingales L., (2007), “Is the U.S. Capital Market Losing its Competitive Edge?”, ECGI - Finance Working Paper, n°192/2007.

[64] Europe Economics, (2008), Etat des lieux et perspectives des programmes de conformité, étude réalisée pour le Conseil de la concurrence, septembre, https://www.autoritedelaconcurrence.fr/sites/default/files/2019-05/etude-programmes-conformite-2008.pdf

[65] Bonnecarrère P., (2018), Extraterritorialité des sanctions américaines, Rapport d’information de la Commission des affaires européennes du Sénat, n°17, octobre.

[66] Hüschelrath K., (2010), op. cit., p.492.

[67] Ces méthodes sont utilisées dans le domaine de la détection des cartels dans les marchés publics (notamment s’ils fonctionnent sur le base de mécanismes d’offres de couverture). Elles peuvent notamment s’appuyer sur les ressources offertes par l’intelligence artificielle pour prédire des configurations « anormales » à partir de l’analyse de grandes bases des données. Ces mêmes méthodes basées sur l’apprentissage machine ont été appliquées pour détecter des cas de favoritisme dans l’attribution de marchés publics par des collectivités territoriales.

De Marcellis-Warin N., Marty F. et Warin T., (2021), « Vers un virage algorithmique de la lutte anticartels ?

Explicabilité et redevabilité à l’aube des algorithmes de surveillance », Ethique Publique, à paraître.

[68] Pour une application aux secteurs financiers et bancaires, voir :

Bouthinon-Dumas H., (2017), « La quête de l’effectivité dans la régulation financière à travers les sanctions dissuasives et la conformité », Revue Internationale des Services Financiers, 2, pp.23-27

Teller M., (2015), « Les fonctions de la procédure en droit bancaire et financier », Revue Internationale de Droit Economique, 4-2015, pp.503-512.

[69] Hüschelrath K., (2010), op. cit., p.495.

[70] Voir la contribution de Jean-Christophe Roda dans cet ouvrage.

[71] Voir Vioulac J., (2014), « Dans les eaux glacées du calcul égoïste », Esprit, n° 3-4, pp. 132-136

[72] Holmes O.W., (1897), “The Path of the Law,” Yale Law Journal, vol.10, pp. 457 et s.

[73] Frison-Roche M.A., (2018), « Le droit de la compliance au-delà du droit de la régulation », Recueil Dalloz, Dalloz, pp.1561 et s.

20 octobre 2021

Publications

 Référence complète : Frison-Roche, M.-A., L'appui du Droit de la Compliance pour la maîtrise quotidienne du Droit de la Concurrence, document de travail, octobre 2021.

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 Ce document de travail a été élaboré pour servir de base à une contribution aux Mélanges offerts à Laurence Idot, parus en juillet 2022.

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 Résumé du document de travail : Le Droit de la concurrence est devenu si énorme et « réglementaire » qu’on finirait par renoncer à vouloir le saisir dans son ensemble, préférant devenir spécialiste de l’une de ses parties. Cela serait perdre de vue la raison simple et forte qui unit l’ensemble et lui donne son souffle : la liberté. Liberté éprouvée par la personne dans son action économique quotidienne, liberté gardée par le Droit de la concurrence, revenant toujours à son principe : la libre concurrence. Raison pour laquelle l’Union européenne fait grande place à la concurrence. Pour la rendre et la garder effective, la « politique de la concurrence » s’articule au Droit de la concurrence mais si autorités et juges ne font pas reproche aux entreprises leur puissance, ils ne s’appuient pas sur celle-ci. Pour ce faire, il faut alors être épaulé par le Droit de la Compliance, qui incite fortement les entreprises à agir pour l’effectivité et la promotion des principes concurrentiels. Le Droit de la concurrence glisse ainsi de l’Ex Post vers l’Ex Ante, les engagements des entreprises conduisant celles-ci à cesser d’être passives et punies pour devenir des acteurs convaincus et eux-mêmes pédagogues. De quoi plaire à une grande professeure de Droit de la concurrence, à laquelle hommage est ici rendu. 

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Lire le document de travail ci-dessous

10 octobre 2021

Compliance : sur le vif

16 septembre 2021

Base Documentaire : Doctrine

 Référence complète : Malaurie, M., Monumental goals of Market Law. Reflection on the method in Frison-Roche, M.-A. (ed.), Compliance Monumental Goals, series "Compliance & Regulation", Journal of Regulation & Compliance (JoRC) et Bruylant, à paraître.

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► Résumé de cet article (done par the JoRC editor):  The analysis done by this article is about Competition Law, and the methodology needed to be adopted for the technical functioning of this branch of Law. Taking up the various economic and legal theories on this subject, conceptions which have succeeded and clashed, the author develops that the monumental goal of Market Law is to develop an economic environment favorable to businesses and consumers, then asks the question if it could integrate an ethical dimension and more broadly non-economic considerations, in particular humanistic ones.

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📘 consulter la présentation de l'ouvrage, Compliance Monumental Goals, dans lequel l'article est publié

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15 septembre 2021

Publications

► Référence complète: Frison-Roche, M.-A., Le Droit de la concurrence : des choix politiques pour son état futur (rapport de synthèse), in Claudel, E. (dir.), Le Droit de la concurrence dans tous ses états, Numéro spécial, Gaz. Pal. , 15 sept. 2021.

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📅 Cet article fait suite au colloque de l'Association Droit & Commerce qui s'est tenu à Deauville les 25 et 26 juin 2021.

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✏️  Il se base sur les notes qui y furent prises sur le vif pour établir le rapport de synthèse qui y fût prononcé.

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Résumé de l'article : L’ensemble de ces contributions sur « Le droit de la concurrence dans tous ses états » a fait ressortir les choix qui s’offrent pour ce qui pourrait être demain cette branche du droit : choix de nature politique entre diverses définitions possibles du droit de la concurrence.

En méthode, l’essentiel est que cette définition soit claire. Pour cela, cette définition doit reposer sur un principe et que le but poursuivi par le droit de la concurrence soit simple, afin que dans un second temps le droit de la concurrence s’articule aisément d’une part avec d’autres branches du droit (par les soins du juge, notamment), d’autre part avec des « politiques », comme la « politique de la concurrence », puis d’autres politiques (par les soins des autorités politiques, notamment européennes).

En substance, deux conceptions de principe s’opposent : soit le droit de la concurrence voudra s’approprier les buts d’autres branches, comme ceux du droit de la régulation et de la compliance, soit il aura la modestie de rester ancré dans sa définition comme droit du marché.

Voilà la croisée des chemins où nous sommes.

 

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23 juillet 2021

Publications

Référence complète: Frison-Roche, M.-A., Programme de mise en conformité (Compliance), Dictionnaire de droit de la concurrence, Concurrences, Art. N° 12345, 2021

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