1 septembre 2022

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 Référence complète : M.-A. Frison-Roche, "Place et rôle des entreprises dans la création et l'effectivité du Droit de la Compliance en cas de crise", in M.-A. Frison-Roche (dir.), Les Buts Monumentaux de la Compliance, coll. "Régulations & Compliance", Journal of Regulation & Compliance (JoRC) et Dalloz, 2022, p. 339-352.

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📝lire l'article  

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🚧lire le document de travail bilingue sur la base duquel cet article a été élaboré, doté de développements supplémentaires, de références techniques et de liens hypertextes

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📕consulter une présentation générale de l'ouvrage, Les Buts Monumentaux de la Compliance, dans lequel cet article est publié

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► Résumé de l'article (fait par le Journal of Regulation & Compliance) : Cette réflexion a un objet très précis : la place des entreprises privées, au regard du thème général qui unit les contributions : "l'épreuve que constitue une crise". La crise constitue une "épreuve", c'est-à-dire qu'elle apporte des preuves. Prenons-là comme telle.

En effet, lors de la crise sanitaire, il apparait que les entreprises ont aidé les Autorités publiques à résister au choc, à endurer et à sortir de la crise. Elles l'ont fait de force mais elles ont aussi pris des initiatives dans ce sens. De cela aussi, il faut tirer des leçons pour la prochaine crise qui viendra. Il est possible que celle-ci soit déjà commencé sous la forme d'une autre crise global et systémique : la crise environnementale. Au regard de ce qu'on a pu observer et de l'évolution du Droit, des normes prises par les Autorités mais aussi par les nouvelles jurisprudences, que pourra-t-on attendre des entreprises face à celle-ci, de gré et de force ? 

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21 juin 2022

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 Référence générale : Frison-Roche, M.-A. La place de l'Intelligence artificielle dans le respect de la Compliance dans l'entreprise : la juste mesure, document de travail, juin 2022. 

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🎤 Ce document de travail a été élaboré pour servir tout d'abord de base à une intervention dans la conférence de la Cour de cassation du 1ier juillet 2022 : L'intelligence artificielle et la gestion des entreprises.

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🎥Regarder la conférence prononcée sur la base de ce document de travail

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📝Il sera également la base à un article.

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 Résumé du document de travail : Du prochaine Règlement européen sur l'intelligence artificielle, la Commission européenne en a une conception assez neutre pour obtenir un consensus entre les Etats membre, tandis que les Régulateurs et certains Etats en ont une conception plus substantielle voulant que la puissance de celle-ci soit utilisée pour protéger les personnes, et contre ses outils eux-mêmes et contre ce qui est une amplification des maux du monde, comme la haine ou la désinformation. C'est le reflet d'une alternative d'une conception de la Compliance.

En premier lieu, la Compliance peut se définir, soit comme des process neutres qui accroissent l'effectivité de ce qui serait l'obligation ou la volonté pour une bonne gestion des entreprises de se soumettre à la totalité des réglementations qui sont applicables à elle-même et toutes les personnes dont elle doit répondre. C'est ce l'on appelle souvent l'obligation de conformité.

Cette conception implique des conséquences pratiques considérables pour l'entreprise qui pour réussir cet "exploit total" devrait alors recourir à des outils d'intelligence artificielle constituant une "solution totale et infaillible", ce qui engendre mécaniquement pour elle l'obligation de "connaitre" toute la "masse réglementaire", de détecter toutes les "non-conformités", de concevoir son rapport au Droit en termes de "risque de non-conformité", pris totalement en charge par la Compliance by Design qui pourrait, sans intervention humaine, éliminer le risque juridique et garantir la "conformité. 

Le "prix juridique" de ce rêve technologique en est très élevé car toutes les prescriptions "réglementaire" vont alors se transformer en obligations de résultat, toute défaillance engendrant responsabilité. Le système probatoire de la Compliance va devenir écrasant pour l'entreprise, tant en termes de charge de preuve, que moyens de preuve, que transferts , sans dispense de preuve. Vont se multiplier des responsabilités objectives pour autrui. Le "droit de la conformité" va multiplier des pénalités systémiques Ex Ante , la frontière avec le Droit pénal étant de moins en moins préservée.

Il est essentiel d'éviter cela, et pour les entreprises, et pour l'Etat de Droit. Pour cela, il faut utiliser l'Intelligence Artificielle à sa juste mesure : elle doit constituer une "aide massive", sans jamais prétendre être une solution totale et infaillible, car c'est l'humain qui doit être au centre et non pas les machines.

Pour cela, il faut adopter une conception substantielle du Droit de la Compliance (et non pas Droit de la conformité). Elle ne vise pas du tout l'ensemble des réglementations applicables et elle n'est pas du tout "neutre", n'ayant en rien une série de process. Cette nouvelle branche du Droit est substantiellement construite sur des buts monumentaux. Ceux-ci sont soit de nature négative (éviter qu'une crise systémique n'arrive, bancaire, financière, sanitaire, climatique, etc.), soit de nature positive (construire un meilleur équilibre, notamment entre les êtres humains, dans l'entreprise et au-delà de celle-ci). 

Dans cette conception qui se manifeste de plus en plus fortement, l'intelligence artificielle trouve sa place, plus modeste. En tant que le Droit de la Compliance est basé sur l'information, l'Intelligence Artificielle est indispensable pour la capter et en faire une première mise en connection, la rendant en état d'analyses successives, notamment de la part d'êtres humains, pour qu'il y ait possibilité de ce qui est l'essentiel : l'engagement de l'entreprise, à la fois par les dirigeants et par tous ceux qui sont "embarqués" par une "culture de Compliance" qui est à la fois construite et commune. 

Cela redonne l'étanchéité requise entre le Droit pénal et ce que l'on peut demander à l'usage mécanique de l'intelligence artificielle, cela remet l'obligation de moyens comme principe. Cela redonne la place centrale au juriste et au Compliance officer , pour que s'articulent la culture de compliance avec la culture d'un secteur et l'identité de l'entreprise elle-même. En effet, la culture de compliance étant indissociable d'une culture de valeurs, la Compliance by design suppose une double technique, à la fois mathématique et de culture juridique. C'est en cela que le Droit européen de la compliance, en ce qu'il est enraciné dans la tradition humaniste européen, est un modèle. 

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🔓lire le document de travail ci-dessous⤵️

Mise à jour : 25 septembre 2021 (Rédaction initiale : 25 mars 2021 )

Publications

 Référence complète : Frison-Roche, M.-A., Instituer l'insécurité juridique comme principe, outil de prévention des crises systémiques catastrophiques totales, document de travail, mars et septembre 2021. 

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 Ce document de travail fait suite à deux précédents documents de travail, réalisés pour le colloque qui s'est tenu à la Cour de cassation le 22 mars 2021.

Le premier avait été conçu et en partie réalisé  longtemps avant sa tenue pour traiter le sujet selon les canons habituels attendus ; 

Le second a été élaboré le veille de sa tenue sur 4 cas car la disparition de mes serveurs en raison d'un incendie, ayant également touché les copies de ceux-ci ne me permettait pas autre chose, les organisateurs m'ayant demandé de maintenir pourtant ma participation, ce dont je les remercie 📎!footnote-2299.

Le présent document de travail a été élaboré après la tenue du colloque afin que les organisateurs de ce colloque, au thème si aventureux, ne pensent pas qu'ils ne pouvaient pas compter sur moi.

Ce document de travail vise à dépasser ces avanies et à opérer la connexion du sujet pour lequel une contribution m'a été demandée (la crise économique) avec le sujet plus général qui me retient par ailleurs : la construction de la nouvelle branche qu'est le Droit de la Compliance, pourquoi le faire et comment le faire. 

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Introduction : Comme à tous, ce sujet de "L'insécurité juridique" me pose difficulté. Parce que,  n'étant pas grand personnage solitaire affrontant l'inconnu, comme tous les autres je voudrais plutôt la sécurité que l'insécurité, et tous les mots qui ne commencent pas par une négation : je voudrais le connu plutôt l'inconnu, je voudrais être comprise qu'incomprise, et ce n'est plus par confort que par urgence morale je voudrais vivre dans un monde juste plutôt que dans un monde injuste. C'est d'ailleurs pour cette dernière raison que je vais affronter l'aventure de l'Insécurité juridique comme principe premier, et non pas comme exception au principe de la Sécurité juridique 📎!footnote-2300

Cet ajout du "in" signale paradoxalement un retranchement : le "in" montre ce qui manque, comme le monde blessé qu'est le monde injuste. Me voilà invitée à traiter un sujet par avance abîmé,  car l'insécurité juridique c'est déjà comme une agression : un monde amputé de sa sécurité, comme c'est désagréable. 

C'est encore plus vrai pour "l'insécurité juridique". En effet, la notion fait face à la "sécurité juridique", cette sorte d'apport spécifique que le Droit offre au monde.   La "sécurité juridique" est aujourd'hui comme un Totem, qui serait indissociable du Tabou de l'Insécurité. Dans le monde juridique épuisé dans lequel nous ne serions plus aptes qu'à proposer quelques notions procédurales, surtout pas de notions substantielles car immédiatement taxées d'être trop politiques 📎!footnote-2277, la "sécurité juridique" qui n'est qu'une notion procédurale en ce qu'elle permet simplement que tout soit prévisible, que demain soit comme aujourd'hui, lequel est d'ailleurs comme était hier, est promue au rang normatif le plus haut. Les travaux abondent, les hymnes  d'approbation sont unanimes.  On ne demanderait plus que cela au système juridique, mais cela on l'exige : le droit serait une procédure qui garantirait la prévisibilité de la réglementation 📎!footnote-2276 et accroîtrait ainsi la solidité des projets  particuliers que nous avons, les uns et des autres et, grâce au pouvoir du Droit de rendre réel ce qu'il assure, nous savons que nos projets pourront tenir demain dans les mêmes termes choisis hier, puisque le Droit nous l'a promis. 

La sécurité juridique, parce que les systèmes juridiques n'auraient plus que cela à offrir, revendiquant par ailleurs leur neutralité et se rejoignant donc sur cette constance, cette cohérence, et cette confiance produites par cette sécurité, est notre nouveau doudou.

A cela, l'on apporte nuances dans les modalités, en soulignant que les circonstances changeantes de la vie exigent un peu de flexibilité, que le pragmatisme et des situations concrètes et particulières  qui sans cesse varient impliquent de prévoir  dès aujourd'hui que demain le contexte aura changé : il faut organiser de la prévisibilité dans le changement. De cela, le Droit souple s'en charge, les lignes directrices étant les nouvelles voies romaines qui nous montreront le chemin. Sécurité et flexibilité, dans un pragmatisme qui voit dans tout principe substantiel un signe de rigidité, voilà notre nouveau mantra. 

L'insécurité juridique est ainsi notre Tabou, dont les admissions justifiées seraient autant d'hommages rendus au Totem de la sécurité juridique, Totem et Tabou se renforçant toujours. Il y aurait donc imperfection du système juridique si l'on haussait l'insécurité au rang de véritable principe. C'est pourquoi lorsqu'on fait l'effort de parler d'insécurité juridique, on semble ne le faire que sur le mode de l'exception : l'insécurité juridique, cela serait ce qu'il est admissible de supporter comme exception légitime au principe de la sécurité juridique 📎!footnote-2275

L'on aura donc tendance à traiter de l'insécurité juridique comme une sorte de principe supportable lorsque quelque chose justifie qu'on porte atteinte au véritable principe premier qu'est la Sécurité juridique. C'est ailleurs ainsi le plus souvent qu'on l'aborde . Ce n'est donc pas le traiter comme un véritable principe, juste comme une exception supportable. 

Voilà pourquoi l'on m'a demandé d'examiner si l'insécurité juridique était supportable, admissible, lorsqu'il y a crise économique. Sans doute parce que lorsqu'il y a crise économique, alors tant pis les principes doivent un peu baisser pavillon et l'on fait avec les moyens du bord en admettant des exceptions, bien qu'avec beaucoup de réticences et de regrets 📎!footnote-2304... Puisque c'est l'hypothèse évoquée, je la suivrai volontiers, et dans un premier temps resterai dans cet enclos-là, mais c'est aller dans l'idée que l'insécurité juridique ne pourrait être qu'une exception faite au principe de la sécurité juridique parce qu'il faut que tout ne change pas vraiment : la crise ne rebat les cartes qu'un temps, le temps de la crise, mais lorsque la crise est passée l'on en revient au normal et à ce qui est bien, à savoir le "vrai principe", celui de la constance et de l'inchangé. Car il n'est supportable de "bafouer" la sécurité juridique qu'un temps 📎!footnote-2303. L'insécurité juridique serait donc ce qui intervient lorsqu'une crise économique s'ouvre afin d'aider à l'efficacité de sa gestion et pour sortir de cette crise. Cela et pas davantage (I).

L'insécurité juridique n'aurait donc qu'un temps, parce que par nature la crise elle-même n'a qu'un temps. La fin de la crise, la fin des problèmes et d'une situation anormale feraient disparaître le principe d'insécurité juridique, lequel serait donc un principe pathologique. 

Mais ce n'est pas parce que cette description semble partagée par beaucoup que ses prémisses soient exacts. En effet, la "crise" est-elle si exceptionnelle que ce qui justifie que l'insécurité juridique, qui permet d'aider à sa résolution, le soit aussi ? Si l'on constate plutôt que la crise est non seulement notre "ordinaire", et qu'en plus notre "ordinaire catastrophique" est "prévisible", voire virtuellement déjà là, et qu'en plus dans le futur, ce qui risque d'arriver est une crise catastrophique totale qui pourrait bien être définitive dans ses effets (ce qui enlève à la crise sa nature temporaire et le retour au "vrai principe" également), alors le principe exceptionnel, cantonné dans la crise, doit sortir de l'hypothèse de celle-ci pour venir  pleinement dans le Droit présent afin d'empêcher que se réalise cet ordinaire catastrophique. 

 Oui, regardons vers le futur : ne sont-ce pas de monumentales crises qui sont devant nous ? Et l'enjeu n'est-il pas d'adopter des principes premiers pour qu'elles n'adviennent pas ? S'il en est ainsi, alors l'absence de changement, la constance et le prévisible, c'est-à-dire le principe même de la Sécurité juridique, si choyé, n'est-ce pas ce qui fait obstacle à la prévention de l'advenance des crises économiques qui nous menacent ? Certes c'est sans doute une crise sanitaire et une crise écologique et climatique qui nous sont devant nous, mais de la même façon la crise économique de 2020 n'est elle-même qu'un accessoire de la crise sanitaire mondiale, prémisses de ce qui pourrait arriver.

Si nous sommes dans cette situation mondiale alors, ce n'est pas une conception procédurale des principes qu'il faut retenir, mais une conception politique. De la même façon, dans cette perspective ce n'est pas en terme d'exception, de "principe exceptionnel" mais bien en terme de principe premier qu'il faut penser l'Insécurité juridique, c'est-à-dire en terme d'éveil et d'aventure, car demain pourrait n'être pas du tout comme aujourd'hui. Seul le principe inverse de l' "Insécurité juridique" pourrait alors exprimer la volonté d'y répondre (II). 

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 Lire ci-dessous les développements du document de travail

1

L'incendie d'OVH peut simplement être pris comme un exemple de crise. V. infra 

2

Ce qui occupe la seconde partie de la présente étude 

3

Ainsi le Droit de la Compliance a longtemps été présenté comme une simple procédure d'effectivité des règles, ce qui rassure, plutôt que ce qui est sa définition substantielle, à savoir des "Buts Monumentaux", notamment sociaux et climatiques, qui lui donne toute son ampleur et révèle sa nature profondément politique. V. Frison-Roche, M.-A. ✏️Notes pour une synthèse opérée sur le vif des travaux du colloque : "Les Buts Monumentaux du Droit de la Compliance : radioscopie d'une notion" la notion de Buts Monumentaux du Droit de la Compliance, 2021 ; et voir plus généralement Frison-Roche, M.-A. (dir), 📕 Les Buts Monumentaux de la Compliance, 2022. 

4

Contre cela, Frison-Roche, M.-A., Non, je n'aime pas la réglementation, septembre 2021.

5

Il en est de même du principe de proportionnalité. Mais là aussi il serait adéquat de penser les choses différemment. Voir une démonstration dans ce sens, Frison-Roche, M.-A., 🚧 Définition du principe de la proportionnalité et Définition du Droit de la Compliance, 2021. 

6

Pour une description du choc que la loi déclarant "l'Etat d'urgence sanitaire" fit sur la doctrine juridique, Gelbrat, A. et , Etat d'urgence sanitaire : la doctrine dans tous ses états, 2020.  

7

Ce sont souvent dans ces termes que la doctrine s'exprime. Par exemple 📝Kamgaing, P.-C., Crise sanitaire et procédures judiciaires : étude de droit processuel, 2020, évoquant le fait que le droit processuel est "bafoué". 

15 mai 2021

Publications

 Référence générale : Frison-Roche, M.-A. Place et rôle des entreprises dans la création et l'effectivité du Droit de la Compliance en cas de crise, Document de travail, mai 2021. 

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Ce document de travail a été élaboré pour servir tout d'abord de base à une conférence dans le colloque du 17 mai 2021 : Normes publiques et Compliance en temps de crise : les buts monumentaux à l'épreuve.

Il sera également la base à un article dans l'ouvrage Les Buts Monumentaux de la Compliance, dont la version française est coéditée par le Journal of Regulation & Compliance (JoRC) et Dalloz. 

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 Résumé du document de travail : Cette réflexion a un objet très précis : la place des entreprises privées, au regard du thème général qui unit les contributions : "l'épreuve que constitue une crise". La crise constitue une "épreuve", c'est-à-dire qu'elle apporte des preuves. Prenons-là comme telle.

En effet, lors de la crise sanitaire, il apparait que les entreprises ont aidé les Autorités publiques à résister au choc, à endurer et à sortir de la crise. Elles l'ont fait de force mais elles ont aussi pris des initiatives dans ce sens. De cela aussi, il faut tirer des leçons pour la prochaine crise qui viendra. Il est possible que celle-ci soit déjà commencé sous la forme d'une autre crise global et systémique : la crise environnementale. Au regard de ce qu'on a pu observer et de l'évolution du Droit, des normes prises par les Autorités mais aussi par les nouvelles jurisprudences, que pourra-t-on attendre des entreprises face à celle-ci, de gré et de force ? 

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Lire ci-dessous les développements⤵️.

24 mars 2021

Base Documentaire : Doctrine

Référence complète : Association Droit et Commerce (sous la direction de Marc Ringlé), Le droit des affaires, instrument de gestion et de sortie de crise. Les entreprises à l'épreuve de la pandémie, LGDJ, 2021, 453 p.

 

Lire le sommaire.

25 février 2021

Publications

Référence complète : Frison-Roche, M.-A., La "crise économique", la concevoir et intégrer ouvertement de l'insécurité juridique. Comment la concevoir ? Quel régime juridique concevoir pour une insécurité juridique admise, voire requise ? 

 

Ce document de travail a été élaboré pour servir de base à une intervention : L'avenir de la notion d'insécurité juridique au regard du traitement des situations extraordinaires : crise économique, dans le colloque "Insécurité juridique : émergence d'une notion ?Cour de cassation, 22 mars 2021, Paris. 

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"whatever it takes"!footnote-2054 Mario Draghi, par cette formule visait en 2015 l'objectif de défense de la monnaie européenne, lorsque l'Euro risquait de s'effondrer sous la danse des spéculateurs enrichis de son effondrement. On a  rarement fait formule plus violemment politique et plus fortement normative. Elle a participé à le faire surnommer comme dans le jeu vidéo "Super Mario". La formule a été reprise en 2020 par le Président de la République Française face aux désordres financiers engendrés par la crise sanitaire ayant engendré de semblables calculs!footnote-2055. Elle excède le seul "coût financier"!footnote-2057. Par cette formule, le président de la Banque Centrale Européenne, a posé que la situation de crise économique était telle en Europe que tout pour y mettre fin y serait déployé par l'Institution, sans aucune limite ; que tous ceux qui par leurs comportements, même appuyés sur leurs prérogatives juridiques, en l'espèce les spéculateurs, parce qu'ils détruisaient le système économique et financier, allaient buter sur cela et seraient eux-mêmes balayés par la Banque Centrale car la mission de celle-ci, en ce qu'elle est d'une façon absolue la sauvegarde de l'Euro lui-même, allait prévaloir "quoi qu'il en coûte".

A un moment, le maître se lève. Si la position royale est la position assise lorsque, pondéré, il écoute et juge, c'est en se levant qu'il montre son acceptation d'être aussi le maître parce qu'il est en charge de plus et qu'il fera usage de tout pour gagner. 

A situation financière exceptionnelle, tous les moyens de politique monétaire sont donc bons. C'est ce qui fût dit. Sans aucune limite. Et ce ne n'est pas un principe comme celui de la sécurité juridique, ayant permis à des personnes de jouer de leurs droits, par exemple celui de spéculer, d'engranger par avance des prérogatives sur la situation de demain, qui aurait pu empêcher cette puissance de jure permettant de sauver l'Europe. Car à prendre littéralement la formule, même si c'est au prix des droits acquis et des règles précédemment posées qu'il aurait valu payer, s'il avait valu faire page blanche pour en écrire de toutes nouvelles pour sauver l'Europe, la plume de Draghi les aurait tracées sans s'arrêter à cela. Ainsi, par une telle formule c'est par la Grande Porte, celle de la crise économique et financière, que l'insécurité juridique est entrée dans le Droit. 

Dans le cas de la crise de 2008, la parole suffît puisque la perspective d'une intervention sans limite du pouvoir monétaire sans limite de la Banque centrale fit  que les agissements spéculatifs dévastateurs ne déferlèrent pas. Avoir levé la règle de Droit en ce qu'elle suppose la limite en affirmant qu'il y aurait prévalence absolue du but, suffît donc en Ex Ante pour que la crise ultime ne s'ouvre pas. Cet épisode, digne d'Homère, suffit à éclairer l'insécurité juridique par une de ses dimensions lorsqu'elle est non seulement admissible mais requise : elle peut constituer un acte héroïque. 

Dans une telle perspective, plutôt que de laisser l'insécurité juridique dans l'ombre ce qui ne serait qu'une sorte d'imperfection (parce que l'insécurité juridique ne serait donc que l'imperfection de la sécurité juridique), par l'idée par le "légalisme" devrait avoir des limites, que "le Droit n'est pas tout" et qu'il faudrait savoir "fermer les yeux"..., il faudrait plutôt assumer de dire que certaines circonstances il faut dire haut et fort, c'est-à-dire le dire de jure , l'insécurité juridique est légitime, licite, conforme à la hiérarchie des normes juridiques. 

En cela, dessiner le concept positif de l'insécurité juridique (ce qui ne peut que plaire aux hégéliens), accroît la sécurité juridique : ainsi cela permet d'associer aux hypothèses d'insécurité juridique un régime juridique plus clair. En effet, plutôt que de mettre sous le tapis le Droit, ce qui explique bien des tensions entre le Conseil constitutionnel et le Conseil d'Etat d'une part et le Législateur et le Gouvernement d'autre part concernant "l'Etat d'urgence", l'on pourrait disposer des conditions dans lesquelles l'insécurité juridique permet d'écarter ou de limiter des règles.

Il est posé comme hypothèse qu'à l'avenir une certaine doser d'insécurité juridique pourrait être ouvertement admise : cela serait donc juridiquement conçu, le Droit gagnant toujours avancer à visage découvert. Même si l'on apprécie la "flexibilité" du Droit, il est toujours dangereux en Droit d'affirmer appliquer des règles tout en ne les appliquant pas. 

L'idée proposée est donc que dans des "situations extraordinaires", l'insécurité juridique serait une dimension, voire un principe admissible. Et développant ce premier point il est proposé que l'hypothèse d'une "crise économique" justifie une dimension, voire un principe d' "insécurité juridique".

Mais cette première affirmation est à éprouver. En effet, une crise économique, notion qu'il convient de définir, si elle doit avoir un effet si majeur de retournement, est-elle une "situation" si extraordinaire que cela ?

En outre, pour traiter cette situation extraordinaire que constitue une "crise économique", quelle  dose d'insécurité juridique serait juridiquement admissible, voire pourrait être juridiquement revendiquée ? Voire pourrait-on concevoir un renversement de principe qui conduirait le Droit applicable à une crise économique sous l'égide de l'insécurité juridique ?

Dans un tel cas, la question qui se pose alors est de déterminer les conditions et les critères de la sortie de la crise économique, voire de déterminer les éléments de perspective d'une crise économique, qui pourrait justifier par avance l'admission d'injection d'insécurité juridique. Le Droit a avant tout maîtriser sur le temps futur. 

2

En amont, sur la mise en perspective de l'affirmation d'Emmanuel Macron du 12 mars 2020 par rapport à l'affirmation de Mario Draghi  : Laurent, R., Les Echos, 13 mars 2020, qui estime que le Pouvoir politique prend distance par rapport à la formulation choisie le matin même par Christine Lagarde, mais on peut aussi estimer qu'un chef d'Etat n'a jamais la même position face à une crise que celle d'un Banquier central (voir aussi la formule utilisée par la présidente de la Commission européenne le 10 mars, qui se réfère à l'usage de "tous les outils disponibles"). En aval, sur l'explicitation de la formule, Emmanuel Macron qui lie crise sanitaire, crise économique et crise politique, 31 janvier 2021. 

3

Pour une perspective plus simplement financière, qui s'exprime du coup par une autre formule : Whatever it costs, v. Benassy- Quéré, A., What ever it costs, how much is it? 27 février 2021. 

20 octobre 2020

Base Documentaire : Doctrine

Référence complète, Kamgaing, P.-C., Crise sanitaire et procédures judiciaires : étude de droit processuel, Revue Trimestrielle de Droit Economique, 2020, p.324 s.

24 avril 2020

Publications

This interview was conducted in French with Olivia Dufour, for an article published in French in the digital publication Actualité Juridique.

Its subject is  the confrontation between the current health crisis situation and the Compliance Law. 

 

Summary. After defining Compliance Law, distinguishing the procedural and poor definition and the substantial and rich definition, the starting point is to admit the aporia: the type of health crisis caused by Covid-19 will be renewed and it is imperative to prevent it, even to manage it, then to organize the crisis exit. Public Authorities are legitimate to do so, but because this type of crisis being global and the State being consubstantially linked to borders, States are hardly powerful. Their traditional International Law shows their  limits in this current crisis and one cannot hope that this configulration will improve radically.

In contrast, some companies and markets, notably the financial markets, are global. But the markets are not legitimate to carry out such missions and counting on the generosity of certain large companies is far too fragile in front of the "monumental goal" that is the prevention of the next health crisis, crisis which must never happen.

How to get out of this aporia?

By Compliance Law, basis of, in a literal and strong sense, the "Law of the Future". 

We need to be inspired by the Banking and Financial Compliance Law. Designed in the United States after the 1929 crisis to tend towards the "monumental goal" of the absence of a new devastating crisis in the country and the world,  this set of new legal mechanisms gave duty and power of supervision, regulation and compliance to market authorities and central bankers. These are independent of governments but in constant contact with them. Today, they claim to have as first priority the fight against climate change. Now and for the future, they must also be given the responsibility and the powers to prevent a global health disaster, similar to a global ecological disaster, similar to a global financial disaster. This does not require a modification of the texts because their mandate consists in fighting instability. Stability must become a primary legal principle, of which the fight against monetary instability was only a first example. By the new use that central banks must make of it by preventing and managing health crises, Compliance Law will ensure that the future will be not catastrophic.

16 janvier 2020

Base Documentaire : Doctrine

Référence complète: Bolton, P., Desprez, L.A, Pereira da Silva, F., Samama, F., Swartzman, The green swan: central banking and financial stability in the age of climate change, Banque des Règlements Internationaux, Janvier 2020.

Lire l'ouvrage (disponible en format numérique)

Accéder à l'analyse de l'ouvrage réalisé par la Banque de France, le mettant en corrélation avec la crise sanitairer du Coronavirus

Lire le document de travail élaboré par Amundi à propos de l'ouvrage

 

Résumé (fait par les auteurs) :

"Climate change poses new challenges to central banks, regulators and supervisors. This book reviews ways of addressing these new risks within central banks’ financial stability mandate. However, integrating climate-related risk analysis into financial stability monitoring is particularly challenging because of the radical uncertainty associated with a physical, social and economic phenomenon that is constantly changing and involves complex dynamics and chain reactions. Traditional backward-looking risk assessments and existing climate-economic models cannot anticipate accurately enough the form that climate-related risks will take. These include what we call “green swan” risks: potentially extremely financially disruptive events that could be behind the next systemic financial crisis. Central banks have a role to play in avoiding such an outcome, including by seeking to improve their understanding of climaterelated risks through the development of forward-looking scenario-based analysis. But central banks alone cannot mitigate climate change. This complex collective action problem requires coordinating actions among many players including governments, the private sector, civil society and the international community. Central banks can therefore have an additional role to play in helping coordinate the measures to fight climate change. Those include climate mitigation policies such as carbon pricing, the integration of sustainability into financial practices and accounting frameworks, the search for appropriate policy mixes, and the development of new financial mechanisms at the international level. All these actions will be complex to coordinate and could have significant redistributive consequences that should be adequately handled, yet they are essential to preserve long-term financial (and price) stability in the age of climate change."

 

17 juillet 2019

Base Documentaire : Doctrine

Référence complète: Roda, J.-Ch., La crise du droit antitrust in Mélanges en l'honneur de Jacques Mestre, coll. Mélanges, LGDJ-Lextenso, 2019, pp. 839-854.

 

Les étudiants de Sciences Po ont accès à l'article via le Drive de Sciences po dans le dossier MAFR - Regulation & Compliance

20 juin 2019

Publications

Référence complète : Frison-Roche, M.-A., Analyse des blockchains au regard des usages qu'elles peuvent remplir et des fonctions que les officiers ministériels doivent assurer, in Revue Défrenois, Lextenso, n°25, 20 juin 2019, pp. 23-29.

 

Résumé : La blockchain est une technologie qui n'est pas, en soir, bonne ou mauvaise. Elle est plus ou moins adaptée aux fonctions qu'elle est apte à remplir. Ce qu'il faut ensuite confronter aux fonctions que l'État a dévolues aux officiers ministériels. Or, autant les fonctions de conservation et de duplication des actes gagnent à être transférées et développées dans cette technologie, autant la fonction d'élaboration des instrumentums ne peut être assumée que par des officiers ministériels auxquels l'État demande de vérifier la correspondance entre les mentions des instrumentums et la réalité des négotiums, ce que seuls des êtres humains peuvent mener et ce qu'aucune machine ne peut faire.

 

Lire l'article.

 

Lire le document de travail ayant servi de base à l'article publié, document de travail bilingue comprenant des notes de bas de page, des références techniques et de liens hypertextes.

Mise à jour : 27 mai 2019 (Rédaction initiale : 13 mai 2019 )

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Ce document de travail a été fait en premier lieu pour servir de support à la participation à la conférence  L'officier ministériel est-il soluble dans la blockchain ? , qui s'est tenu au "Club du Droit" , au Conseil supérieur du Notariat le 14 mai 2019.

Consulter la présentation générale de la conférence.

Puis sous une forme approfondie, il sert de base à l'article publié dans la Revue Defrénois.

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Introduction et résumé.

L'analyse technique de la confrontation entre l'outil que constitue la blockchain!footnote-1594 et les fonctions que doivent assurer les "officiers ministériels"!footnote-1542, doit permettre de déduire l'usage que les officiers ministériels ont vocation à faire des blockchains.

Pour cela, il est nécessaire de garder à l'esprit cette distinction si simple : la blockchain est un outil, une chose, un dispositif mécanique, un ensemble d'algorithmes, une mécanique renvoyant à des capacités mathématiques basées sur la maîtrise et le maniement des chiffres et des cryptages, tandis que l'officier ministériel est un être humain.

Cela renvoie à la distinction que le système juridique occidental, qu'il soit de Civil Law ou de Common Law, pose comme summa divisio : la distinction entre les êtres humains et les choses. Cette distinction première est formulée pour que l'on ne traite pas les êtres humains comme des choses, impossibilité produite puisqu'ils sont qualifiés de "personnes"!footnote-1584. Il ne s'agit pas d'une idée naturelle, car si l'occasion se présente nous serions bien enclins à traiter l'autre être humain comme une chose.  Cela serait à la fois si agréable et si efficace : la tendance en est naturelle à la fois à titre individuel (agrément) et pour le système (efficacité).

Mais le Droit, dans son premier principe qui oppose la "personne" et les "choses", rendant les choses disponibles à la personne et la personne indisponible, s'y oppose, afin d'empecher celui qui n'aurait les moyens d'être un loup pour l'autre. Locke a soutenu que c'est la ratio legis de la société. Cette raison de nature politique implique que cette distinction entre la personne et les choses demeure très claire. Aujourd'hui, l'on tente à tout instant de nous la faire oublier. 

Pour que cette distinction essentielle demeure effective, non seulement il ne faut pas que l'on imagine des êtres humains comme des choses (réduites à leur corps, par exemple, ou réduites à des actes mécaniques de consommation!footnote-1543), ainsi qu'est  notamment décrit et dénoncé par Alain Supiot dans ses ouvrages successifs!footnote-1582, mais il ne faut pas non plus que,  notamment par un vocabulaire imaginé, l'on représente des choses comme agissant comme des personnes, alors qu'il ne s'agit que d'outils.

Or la technologie nous représente de plus en plus des choses à formes et à réactions anthromophormiques, à travers des robots qui nous "parlent", des machines "intelligentes", des algorithmes qui "apprennent", etc. Le succès économique des promoteurs de machines, et autres robots à forme humaine, des solutions mécaniques présentées comme "intelligentes" repose sur l'oubli de la distinction de la personne et des choses. Nous pourrions alors acheter des machines qui nous aiment, qui nous apprennent, qui nous éduquent, qui soient nos maîtres. Ainsi l'aphorisme des promoteurs de ce que l'on appelle d'une façon imagée "l'intelligence artificielle", "The code is Law" (le code binaire de la formule mathétique est la loi, tout doit être automatique, la réglementation devant suivre sans troubler cette automaticité) aura balayé le précepte de Portalis : "Les lois sont faites pour les hommes et non les hommes pour les lois". 

Il est certes possible d'effacer cettte distinction entre la personne et les choses de notre système de pensée, puisqu'il ne s'agit ni d'une distinction naturelle ni d'une distinction évidente. La difficulté est qu'elle est la base du Droit occidental!footnote-1583 et qu'il y a de fortes raisons de la conserver car c'est ce qui protége l'être humain faible contre l'injustice, ce qui lui permet de participer à l'ordre général et à l'organisation de la société, d'éviter un ordre construit sur un pur rapport de force, lequel ne peut que conduire à de la violence.

C'est cet arrière-plan là qui se joue dans l'insertion des blockchains et autres technologies, en ce qu'elles impliquent de concevoir d'une autre manière la façon dont les différentes professions doivent exercer aujourd'hui leurs fonctions. Si ces outils sont conformes à ces fonctions, voire les améliorent, les professionnels doivent les accueillir sans réserve, voire participer directement à leur développement. Si ces outils ne sont pas aptes à remplir certaines fonctions confiées à ces professionnels, et qu'il s'avère que ces fonctions sont nécessaires, voire essentiels, alors il faut a fortiori veiller à ce que, par inadvertance ou malignité, ces fonctions-là ne sont insérés dans une blockchain, dont la capacité de conservation et de fiabilité n'équivaut en rien à une capacité de penser. Une machine ne pense pas.

C'est pourquoi il faut partir des fonctions, en distinguer la fonction technique de conservation des actes,  la fonction technique de duplication des actes et la fonction d'élaboration des actes qui ne peut se réduire à cela (I).

Il apparaît qu'à supposer la fiabilité de conservation et duplication acquise, dès l'instant qu'il y a une part d'élaboration dans l'acte, une intervention humaine doit avoir lieu car une machine est inapte à effectuer les vérifications nécéssaire. L'on retrouve ici la distinction entre le negotium retranscrit, cette retranscription n'étant jamais mécanique, et l'instrumentum lui-même qui, scindé de ce qui l'a fait naître peut être soumis à des technologies duplicatives et de conservation à ce point efficaces que les notions d'original et de copie pourraient être remises en question en raison de la fiabilité de la blockchain (II).

Ainsi la blockchain est une technologie efficace sur les instrumentums comme actes scindés des negotiums , ce qui est une révolution profonde. Mais cette technologie ne peut en rien  garantir la correspondance entre le negotium et l'instrumental. La fiabilité ainsi apportée dans la conservation, la disponibilité et la duplication à l'infini des instrumentums, est non seulement extrêmement utile mais ne contredit en rien l'office des officiers ministériels. Cette fiabilité technologique justifie que les officiers ministériels l'intègrent et la favorisent. Mais la fonction de ceux-ci ne se limite pas à être des conservateurs et des duplicateurs. Nous ne passons pas du moine copiste à la blockchain. Leur principal office est de vérifier l'exactitude des mentions de l'instrumentum par rapport à la réalité du negotium.Cette assurance d'exactitude par rapport à la réalité est si précieuse dans une économie de marché !footnote-1585. L'officier ministériel le fait en tant qu'être humain, tandis qu'une machine ne peut ni vérifier cette correspondance, ni conseiller les parties - notamment pas la partie faible dans le negotium.  Or, le Droit a pour fonction de protéger les personnes. C'est une des raisons fondamentales pour laquelle il a opposé la "personne", toujours considérée dans sa singularité, et les choses, catégorie dont les machines doivent continuer de relever. C'est pourquoi l’État - qui n'a jamais ignoré l'efficacité des techniques de "décentralisation" - s'est décentralisé dans son office et son pouvoir via dans des officiers ministériels, afin qu'ils dressent d'une façon autonome des actes qui racontent ce qui s'est passé (instrumentum), l'acte correspondant à la réalité objective des transactions (leur objet) aussi bien qu'à leur réalité subjective (consentement). Si l'on choisit de ne plus confier cela à des êtres humains porteurs de cette fonction-là, pour laquelle une machine est inapte, cela serait un choix politique (III).

Cela serait le choix d'un marché très liquide et sans sécurité :sans intermédiaire, sans coût en ex ante, sans garantie, sans considération du long terme. Pourquoi pas. Cela produit des économies immédiates, comme le fait toute désintermédiation. Cela fut fait par le Droit américain, notamment pour les prêts immobiliers, recopiés par quiconque sans vérification, puis retranscrits et découpés des millions de fois dans des subprimes. Le réajustement entre ce qui est marqué sur le titre et ce qui est la réalité des choses s'opère sur le long terme, en ex post, par une crise, qui restaure les informations.  Elle arriva en 2008. Pour l'instant, ce choix politique n'est pas fait par le Droit européen, le souci de sécurité dans le lien d'exactitude entre les biens, les volontés, et les titres qui en parlent (éboration des actes) est préféré. Cela tient au fait que l'Europe a été le principal payeur de la crise financière née aux Etats-Unis et que l'Europe distingue l'aptitude humaine et l'aptitude mécanique. 

Une fois que cette distinction est clairement opérée, parce que l'élaboration d'un acte doit être faite par l'officier ministériel, être humain investi par l’État de la charge particulière d’assurer l'exactitude des mentions de l'acte avec la réalité des personnes, des volontés, des obligations et des biens, il est d'autant plus opportun que les officiers ministériels s'organisent pour développer la technologie des blockchains. En effet, une fois que cet acte élaboré d'une façon fiable, et méritant à ce titre d'être authentique, en raison du continuum entre élaboration, conservation et duplication, parce que c'est aux officiers ministériels d'élaborer les actes les plus incontestablement fiables, c'est à eux de se doter des moyens technologiques de les conserver et de dupliquer efficacement (IV). 

1

Sur les différents types de blockchains, publiques, privées, mixtes, et les différents standards en compétition, v. par ex. l'exposé qu'en fait Dominique Legeais, Blockchain et crypto-actifs : état des lieux, RTD. com, 2018, p.754 et s.

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Sur la confrontation déjà faite dans l'analyse économique de la "régulation" et la fonction notariale, v. Frison-Roche, M.-A., Le notariat, profession confortée par la loi dite "Macron" comme essentiellement fiduciaire, 2016. 

LE NOTARIA PROFESSION ESSENTIELLEMENT FIDUCIAIRE, IN "L'OUVERTURE À LA CONCURRENCE"

4

Anders, G., notamment dans son ouvrage central L'obsolescence de l'homme (1956)présentant l'être humain réduit à l'état de "machine désirante" par une société de pure et simple consommation. Le souci qu'il en a comme philosophe rejoint le souci qu'en avait Jacque Ellul, comme juriste, s'inquiétant de la "société technicienne" (...). Or, les machines correspondent aujourd'hui au dessin que ces auteurs du milieu du XXième siècle en faisaient. De la même façon, Alain Supiot rapporte à Kafka le souci du "machinisme" dans le fonctionnement des institutions humaines (....) ; il ne fait notamment dans son analyse de Kafka comme "artiste de la Loi" (2019).

5

Par exemple Supiot, A., La gouvernance par les nombres, 2015 ; Mondialisation ou globalisation ? Les leçons de Simone Weil, 2019 ; Le droit au XXIème siècle : droit, technique et écoumène (dernière leçon au Collège de France, 22 mai 2019).

Sur cette idée folle et dévastatrice qu'il faut faire davantage confiance aux machines qu'il ne faut faire confiance aux êtres humains, ce qui justifierait donc de "mécaniser" les autres humains, idée folle reprise le plus souvent par les auteurs avec entrain, v. par ex. Caprioli, E.A., La blockchain ou la confiance dans la technologie, JCP 2016. 672, n° 3. 

7

Frison-Roche, M.-A., L'acte authentique, acte de marché, 2010. 

2 novembre 2016

Base Documentaire : Doctrine

Référence complète : Cohen, E., Aides d'État, résolution bancaire et assouplissement quantitatif, Revue Concurrences, n°4-2016, pp. 1-3.

 

 

Les étudiants Sciences Po peuvent consulter l'article via le drive, dossier " MAFR - Régulation & Compliance "

17 juin 2011

Publications

Référence complète : FRISON-ROCHE, Marie-Anne, L’utilité du notariat face à des marchés menacés par la crise, Droit & Patrimoine, Lamy, n°204, juin 2011, p.38-42.

 

Il faut appliquer la technique du "coût/avantage » pour mesure son utilité lorsque des marchés sont menacés par la crise. En effet, s’il y a des défaillances de marché, par exemple par la financiarisation de ceux-ci, ils ne peuvent plus supporter des risques qui s’avèrent systémiques. Or, l’incertitude des propriété" et la chaine d’engagements inconsidérés constituent des risques systémiques. Le notariat s’avère utile en ce qu’il produit des actes authentiques, actes normatifs produisant de l’incontestabilité, c’est-à-dire de la sécurité réduisant les risques sur les marchés. En outre, par ces diligences et l’organisation disciplinaire de la profession, le notaire assure la plus juste coïncidence entre le negotium et l’instrumentum, ce qui garantit ou restaure sur les marchés la confiance, qui en est le bien commun.

Accéder à l'article.

 

Lire le résumé de l'article ci-dessous.

2 mars 2011

Base Documentaire : Doctrine

Paru en 2011, ce numéro thématique porte sur "La supervision" au regard du risque systémique, tandis que le précédent portait sur "La régulation" au regard de ce même thème.

Il en ressort, pour éviter la prochaine crise, la volonté d'étendre la supervision, notamment aux "non-banques", comme les compagnies d'assurance, et de la renforcer, notamment quant aux moyens de contrôle, de surveillance et de sanction des Autorités de supervision.

6 octobre 2010

Conférences

Référence complète : FRISON-ROCHE, Marie-Anne, Le notaire présente-t-il une utilité lorsque des marchés sont menacés par la crise ?, in Prévention des crises : règles, contrôle, transparence, 6 octobre 2010 Marrakech, Maroc.

Consulter le programme.

 

Le Congrès International du Notariat consacre son XXVIièm congrès au thème de la prévention des crises, en s’attachant plus particulièrement à ce que peut représenter aujourd’hui l’acte authentique sur les marchés.

A ce titre, la contribution vise à démontrer l’adéquation de l’acte authentique, en tant qu’il dispense les agents économiques de la preuve, et s’accorde ainsi au marché, la sécurité étant apportée à celui-ci par l’intermédiation notariale, le notaire en devenant en matière immobilière le régulateur qui s’assure que la fiction sur laquelle repose l’incontestabilité de l’acte authentique, n’est pourtant pas en trop distorsion avec la réalité.

23 septembre 2009

Conférences

Référence complète : FRISON-ROCHE, Marie-Anne, Que peut faire le droit quand les marchés financiers sont en crise ?, Université de Montréal, 23 septembre 2009, Montréal, Canada.

18 mars 2009

Enseignements : Direction de thèses

 

► Référence : Frison-Roche, M.-A., direction de la de la thèse de Vincent Catillon, Le droit et le risque financier , Université Paris-Dauphine  ,  soutenue en 2009.

 

25 janvier 2005

Publications

► Référence complète : M.-A. Frison-Roche (dir.), Les risques de régulation, Coll. "Droit et économie de la régulation", vol. 3, Presse de Sciences Po / Dalloz, 2005, 327 p.
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Résumé de l'ouvrage : Cet ouvrage correspond au troisième volume de la collection consacrée au « droit et économie de la régulation », crée par Marie-Anne Frison-Roche. Ce volume fait suite à un premier qui était consacré aux questions de légitimité et à un deuxième portant sur les règles et les pouvoirs. Il sera suivi par trois autres volumes, le volume 4 étant consacré aux engagements, le volume 5 étant consacré aux responsabilités, et le volume 6 ayant trait à la régulation de la santé.

 

Cet ouvrage sur la crise, édité en 2005, c'est-à-dire deux ans avant les premiers événements de la crise financière mondiale, a pour ambition de restituer non pas tant les risques qui sont l’objet d’une régulation, par exemple les risques financiers ou les risques écologiques, mais de poser que la régulation elle-même est source de risque. En effet, la régulation peut être incertaine, les régulateurs peuvent commettre des erreurs, il peut même y avoir des fautes de régulation, de sorte que c’est de la régulation que sort la crise. S’articule alors un cercle vicieux entre les risques inhérents aux systèmes régulés, puisque c’est leur présence qui justifie l’appareillage régulatoire, et les risques de régulation, de nature différente, souvent de nature scientifique ou institutionnelle, qui fait que la régulation, loin d’éteindre les risques, les embrase.

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C’est pourquoi en préalable l’ouvrage débute par une contribution d’économiste qui étudie l’hypothèse d’une « crise de régulation ». Les auteurs soulignent notamment que si le risque est inhérent au secteur, la régulation n’est pas de soi une activité risquée, c’est sa défaillance qui crée le risque. Dès lors, l’intervention du régulateur est problématique, car il peut éteindre la crise ou bien parce qu’il en est la source et ne se reprend pas, la faire perdurer ou l’accroître. Le régulateur n’a pas à poursuivre un objectif de risque 0 du secteur mais doit l’encadrer par sa capacité d’engagement propre et de la responsabilité des opérateurs. Le régulateur doit recevoir des incitations adaptées et ne pas être victime de capture tandis que l’Etat doit veiller à un design institutionnel efficace pour garantir l’indépendance du régulateur. Dans ce même préalable, une contribution de science politique montre que la crise est intime du politique, en ce qu’il fait vaciller celui-ci, la menace de la crise étant gérée par le politique d’une façon préventive. L’enjeu politique est de déterminer celui qui a le pouvoir de désigner ce qui constitue la menace. Dans la mesure où cette simple menace pourrait entraver la liberté, c’est à l’individu de la transformer en prescription et non pas à la loi, la transparence étant un moyen suffisant de gestion politique des crises. Enfin le risque est politique, il est logique qu’il figure dans la constitution qui fonde celui-ci.

La première partie de l’ouvrage porte sur les risques de systèmes, à travers l’hypothèse de la « crise générale ». Il y est démontré que dans le secteur bancaire et financier, il y a une articulation très forte entre régulation et crise puisqu’en la matière, la régulation a pour objet la prévention puis la gestion et la sortie des crises. L’auteur insiste sur le fait que sans doute, dans d’autres secteurs, notamment industriels, certaines entreprises ont une taille et une action si déterminante pour leur secteur, que le risque systémique existe pareillement et qu’une régulation analogue devrait être considérée. Dans le secteur énergétique, l’exemple gardé à l’esprit de chacun de la « crise californienne » est étudié pour démontrer qu’elle ait été causée par les défaillances de réformes concurrentielles de l’électricité qui furent opérées et du mauvais ajustement avec les autres régulations, notamment environnementales, ainsi qu’avec les comportements sociaux (gestion de la chaleur et de la climatisation). La crise californienne est donc bien une crise de régulation. Le risque sanitaire est lui aussi un objet de régulation car la sécurité des aliments, par le mécanisme des chaines des chaines de distribution, les contaminations, les interactions entre l’agriculture, l’alimentation et la santé, font qu’une régulation globale est nécessaire. Une trop grande fragmentation de ces régulations ou le fait qu’elles soient organisées d’une façon très différente pour ces divers objets pourtant intimement lié constitue un risque de régulation.

C’est pourquoi la contribution suivante met en valeur que d’une façon générale la régulation doit être utilisée comme mode de prévention des crises. Puisque la régulation se définit comme de la concurrence à laquelle s’ajoute autre chose, cette « autre chose » peut être le risque. Mais les risques sont extrêmement divers suivant qu’il s’agit de finance, de santé ou d’électricité, le risque de régulation pouvant provenir de l’hétérogénéité du risque. Dès lors, faut-il simplement utiliser la régulation pour prévenir le risque, Alors que la régulation se soucie certes de l’équilibre vis-à-vis de la concurrence mais n’intègre pas la très forte incertitude qui caractérise le risque. C’est ainsi que la transparence de la régulation ne suffit sans doute pas et qu’il convient de préférer le très puissant principe de communication qui soutient le principe de précaution. Mais l’on peut aussi demander au régulateur de prendre en charge cette gestion des risques, si l’Autorité de régulation est l’institution la plus adéquate pour le faire. Or, l’indépendance qui la caractérise n’est pas centrale dans la prévention des risques et la multiplicité des régulateurs contrarie la centralisation de l’information, ce qui constitue un risque. La contribution suivante, économique, étudie le moment de la sortie de crise, moment particulièrement risqué quel que soit le secteur dont il s’agit.

La contribution souligne que le nombre de crises de la régulation a augmenté, peut-être parce que nous sommes en transition entre deux types de système économique et qu’en outre, le fonctionnement court-termiste dans les régulations crée des risques, notamment à travers les conflits d’intérêts.  Il peut y avoir risque lorsqu’une régulation a été mise en place, en considération des circonstances qui changent, par exemple la transformation radicale de l’entreprise dominante qui oblige l’adaptation de la régulation que le régulateur ne peut seul infléchir. D’une façon plus générale, il y a crise de régulation quand le régulateur n’arrive plus à satisfaire toutes les missions contraignantes qui lui sont imposées. La perspective de crise du secteur ou de la régulation ayant un effet incitatif sur les opérateurs, le régulateur doit s’adapter, faute de quoi il entre en crise. L’essentiel demeure la capacité d’engagement du régulateur, de l’Etat et de la société même à travers la crise, ce qui en conséquence fait demeurer stables les comportements des opérateurs. Il n’est pas inconcevable si le régulateur est dépassé et ne peut plus imposer le respect des engagements, ni à lui-même ni à autrui, de prévoir une sorte de « Haute Autorité de la régulation » qui le suppléerait en cas de crise, pour protéger le politique des groupes de pression et imposer le respect des engagements.

La deuxième partie du volume porte sur un risque particulier de la régulation, qui est l’incohérence. Le volume met en lumière la réponse à ce risque qui doit être l’ « interrégulation ». Elle vise à montre que pour appréhender les risques de systèmes les institutions, avec plus ou moins de systèmes, se mettent elles-mêmes en "interrégulation". Pour l'instant, elles le font relativement peu, d'une part parce qu'elles sont bloquées par le caractère clos que sont les différents systèmes juridiques, construits sur le territoire et non pas sur le risque qui est relativement indépendant de celui-ci, et d'autre part parce que la conscience de la nécessité et de l'efficacité de l'interrégulation est encore faible. Pour l'instant, cela relève encore quasiment de "l'hypothèse", pour traduire quelques réalités éparses, plutôt procédurales, voire simplement factuelles entre régulateurs ou entre juges, assez peu encore intersectorielles. 

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📝Lire la 4ième de couverture.

📝Lire le sommaire.

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Accéder aux présentations des 3 articles de Marie-Anne Frison-Roche dans cet ouvrage :

 📝 L’hypothèse de l’interrégulation.

📝L’office de règlement des différends, entre régulation et juridiction,

📝Arbitrage et droit de la régulation.

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20 octobre 2003

Organisation de manifestations scientifiques

Référence complète : FRISON-ROCHE, Marie-Anne (dir.), Régulation, risque et crise, Forum de la Régulation, 20 octobre 2003.

11 mai 2000

Conférences

Référence complète : FRISON-ROCHE, Marie-Anne, "Synthèse" in Le droit et la sécurité, Aix-en-Provence, 11 et 12 mai 2000, Marseille.