10 juillet 2013

Base Documentaire : 02. Cour de cassation

Cour de cassation, première chambre civile

Arrêt du 10 juillet 2013, Madame X.

Pour lire l'arrêt, cliquez ici.

Madame X. reçoit entre 1986 et 1993 plusieurs injections de vaccin contre l'hépatite B, ce renouvellement ayant été justifié par le fait qu'elle ne développait pas d'anticorps.

A partir de la fin 1992, elle s'est plainte de paralysie des mains , de grande fatigue et de troubles sensibles, puis s'est arrêtée de travailler à partir de 1998. Quelques mois plus tard, le diagnostic de sclérose en plaque a été établi.

Elle a saisi la justice contre le fabricant du vaccin, le laboratoire Sanofi. Elle demande au juge du fond l'engagement de la responsabilité de celui-ci et sa condamnation à l'indemniser. Elle est déboutée de sa demande.

En effet, la Cour d'appel de Versailles, dans un arrêt du 5 avril 2012, estime en premier lieu que l'injection du vaccin  est "impliqué "dans l'apparition de la maladie, ce qui suffit d'établir le rattachement entre les deux, selon les critères spécifiques à la responsabilité du fait des produits défectueux, visée aux articles 1386-1 et s. du Code civil. Mais, la Cour d'appel affirme en second lieu que le bénéfice de la vaccination obligatoire contre l'hépatite B a sauvé bien des vies en comparaison des risques au regard de la sclérose en plaques, ce qui justifia l'autorisation donnée par l'Etat de mise sur le marché du vaccin, alors que ces risques étaient connus.

La victime forme un pourvoi devant la première chambre civile de la Cour de cassation, laquelle va casser l'arrêt entrepris, en utilisant comme cas d'ouverture un manque de base légale.

Sur la question du fait générateur, dans la mesure où la victime a obtenu satisfaction dans son argumentation, c'est le défendeur au pourvoi qui critique l'arrêt des juges d'appel.

En effet, le laboratoire pharmaceutique rappelle que l'engagement de la responsabilité du fait d'un produit défectueux nécessite de rapporter la preuve du fait générateur et du lien de causalité. L'incertitude scientifique sur les liens entre ce vaccin et la sclérose en plaque interdit au juge d'avoir recours à des présomptions comme il l'a fait. En écartant l'argument de l'incertitude scientifique, les juges du fond auraient, selon les défendeurs, violé la loi.

La Cour de cassation refuse un tel raisonnement et approuve les juges du fond. En effet, elle relève que ceux-ci ont bien pris acte de "l'impossibilité scientifique de prouver scientifiquement tant le lien de causalité que l'absence de lien entre la sclérose en plaques et la vaccination contre l'hépatite B. Mais les juges ont à juste titre estimé que cela laissait ouvert leur pouvoir de prendre en considération des présomptions, par exemple le nombre d'injection, l'histoire familiale de la patiente, ce qui a constitué des présomptions graves, précises et concordantes, constitutives de la preuve du fait générateur et de la causalité.

Quant à la seconde question, c'est la victime qui critique les juges du fond. En effet, les juges du fond ont estimé que le laboratoire ne devait pas voir sa responsabilité retenue du fait du vaccin défectueux, car la vaccination contre l'hépatite B a apporté plus de biens pour des miliers de personnes, ainsi protégées, qu'elle n'a engendré de risques au titre de la sclérose en plaque. Or, un juge ne peut tenir un tel raisonnement.

La Cour de cassation va suivre la demanderesse au pourvoi sur ce terrain.

En effet, "en se déterminant ainsi, par une considération générale sur le rapport bénéfice/risques de la vaccination", alors que les juges venaient d'admettre la preuve du fait générateur et de la causalité par présomptions établies "au regard de la situation personnelle de Madame X. que des circonstances particulières..." du cas, les juges du fond n'ont pas donné de base légale à sa décision.

L'arrêt de la Cour d'appel est donc cassé.

 

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