10 juin 2005

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Publication : participation dans une publication juridique collective

Les résistances mécaniques du système juridique français à accueillir la class action : obstacles et compatibilités, in Les class actions devant le juge français : rêve ou cauchemar"

par Marie-Anne Frison-Roche

Référence complète : FRISON-ROCHE, Marie-Anne, Les résistances mécaniques du système juridique français à accueillir la class action : obstacles et compatibilités, in Les class actions devant le juge français : rêve ou cauchemar, numéro spécial Petites Affiches, 10 juin 2005, pp.22-28.

A supposer qu'il soit socialement et économiquement opportun et efficace d'importer la "class action" en France, une telle adoption semble rencontrer de nombreux obstacles juridiques, essentiellement des principes procéduraux. Certes, le mécanisme ne heurte pas l'article 5 car cela fait longtemps que l'on admet la puissance du juge et il ne jugerait pas abstraitement mais pour un groupe ouvert, ce qui est différent. Ensuite, le principe de l'effet relatif de la chose jugée devrait être ménagée, c'est-à-dire que même dans un système d'opt out, le jugement ne serait opposable que pour celui qui s'en prévaut. En outre, l'adage "nul ne plaide par procureur" ne vaut pas, car la dissociation entre intérêt et qualité, ici réalisé, est possible, dès l'instant qu'elle est l'oeuvre de la loi. Enfin, le contradictoire doit être respectée, c'est pourquoi la class action ne devrait concerner que le contentieux objectif et non le contentieux subjectif.

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N.B. : cet article a été publié avant l'adoption par le droit français de l'action collective par la loi du 14 mars 2014 relative à la consommation (dite "Loi Hamon).

La class action  est certes confrontée à toutes les difficultés que rencontre le droit comparé, c'est-à-dire la question de savoir si les instruments étrangers ne sont pas, indirectement ou par équivalence, installés en France,notamment par la médiatisation des contentieux.

Plus techniquement, la prohibition des arrêts de règlements peut sembler arrêter l'importation de la class action . Mais l'interdiction pour le juge de faire la loi, inscrite dans l'article 5 du Code civil, a depuis fait long jeu et l'arrêt rendu sur une action de groupe n'est pas abstrait, il vise un groupe ouvert de personnes, hypothèses différente.

De la même façon et d'une façon plus problématique, la class action  heurte la relativité de la chose jugée, règle procédurale autonome de la prohibition des arrêts de règlements.Il devient alors impératif que, même dans le système de opt out, la personne ne soit liée par le jugement que si elle le revendique elle-même, et qu'elle demeure maîtresse de se défendre contre un jugement qui serait préjudiciable à sa propre situation, ses droits de la défense ne pouvant être amoindris par un jugement à la procédure précédente de la quelle elle n'aurait pas participé.

Avançant plus encore dans les principes de la procédure et dans un deuxième temps de l'analyse, il faut confronter la class action au droit d'action. En effet, on a souvent à l'action de groupe l'adage selon lequel "nul ne plaide par procureur". Mais une "classe" n'est pas une institution, c'est un découplage entre l'intérêt, qui est celui de chacun des membre, et la qualité, qui est celle du représentan de la classe. Ce représentant n'aurait d'ailleurs, comme c'est le cas pour le ministère public, que la qualité, sans avoir l'intérêt. L'efficacité est la justification du découplage car les droits subjectifs des personnes particulières sont ainsi assurés d'une meilleure effectivité. Bien sûr, celle la loi dispose la puissance juridique requise pour dissocier qualité à agir et intérêt à agir, même si la procédure est d'ordinaire de compétence infra-légale.

Enfin, dans une troisième approche, la class action  doit être confrontée aux droits de la défense et au principe du contradictoire. C'est l'obstacle le plus sérieux. Mais, si l'on se réfère davantage à l'esprit de l'article 6 CEDH, tel qu'il contamine aujourd'hui les droits constitutionnels, la class action  est le moyen de restaurer l'égalité des armes entre des victimes souvent atomisées et individuellement faibles en elles-mêmes et affaiblies par le dommage subi.

Cependant, parce que la class action se justifie en tant qu'elle permet la restauration de la légalité (comme le contentieux pénal justifie la présence équivalente du ministère public dans la procédure), il conviendrait de restreindre la class action aux contentieux objectifs, car en outre les contentieux subjectifs mettent en cause des arguments propres aux personnes en cause dans les effets du jugements, lesquelles en l'espèce n'auraient pas été précise dans la procédure, ce qui consitue une violation du principe du contradictoire, principe constitutionnel.

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