Food for thoughts

July 13, 2015

Blog

Cet article s'insère dans une trilogie, qui vise à comprendre les  deux arrêts rendus par l'Assemblée plénière le 3 juillet 2015.

Un premier article a procédé à une analyse  exégétique des arrêts. Il faut sans doute procéder ainsi  dans un premier temps, un peu scolairement, pour mesurer "le sens, la valeur et la portée" des deux arrêts-miroirs, qui n'ont pas touché expressément la prohibition française des conventions de mère-porteuse mais qui par leur silence ont levé le pont-levis pour laisser entrer les entreprises sur le marché fructueux du matériel humain et de l'engendrement.

Ce deuxième article prend une perspective particulière : celle du "pouvoir" que ces arrêts manifestent. Depuis longtemps, l'expression constitutionnelle d' "autorité judiciaire" est le masque d'un pouvoir, le "pouvoir judiciaire" n'étant pas critiquable en soi dès l'instant qu'il est en équilibre avec le pouvoir législatif.

Un troisième article prendra une perspective plus factuelle et de sociologie judiciaire et institutionnelle!footnote-205. Quand les arrêts sont si laconiques, l'on se rabat sur les textes environnants, comme le "Communiqué de presse nous y invite, mais c'est à l'audience du 19 juin 2015 que tout s'est joué ... Et de cela, que restera-t-il ? L'on nous dit que la procédure est écrite ? Il faut n'avoir pas assisté à cette audience pour le croire.

Restons sur la deuxième perspective, choisie par ce présent article. Les arrêts expriment un étrange pouvoir : les juges s'attribuent le pouvoir de toucher l'une des questions les plus essentielles de notre système juridique, à savoir la filiation. En cela, il se substitue au pouvoir législatif.

Mais alors, tant qu'à faire la loi, la Cour devrait poser une règle générale. Elle préfère demeurer dans la casuistique. Mordiller dans le talon de la filiation. Rendre l'institution aussi faible qu'Achille sans pour autant établir un autre demi-dieu sur lequel notre Droit, toujours à la recherche de sacré peut se construire. Nous voilà dans les sables mouvants de la casuistique. C'est une seconde raison pour que le Législateur intervienne, afin que des principes servent de repères.

A la lecture de ces arrêts, il apparaît donc que les juges se sont appropriés d'une façon indue un pouvoir illégitime, déformant une institution politique établie hors de leur pouvoir et dont ils n'ont que la garde (I), pouvoir dont ils ont en outre fait un usage casuistique, ôté tout repère dans un Droit qui a besoin de repères, à travers des principes (II).

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Voir une conférence faite au sortir de l'audience du 19 juin 2015.

July 7, 2015

Blog

Quand un sujet est à la fois très grave et très disputé, l'on attend du juge à tout le moins qu'il soit clair et net.

Or, les deux arrêts rendus par l'Assemblée plénière le 3 juillet 2015 ne sont pas clairs.

Quand on les lit attentivement, même si l'on met dans le prolongement des écritures disponibles, le rapport du Conseiller, les conclusions du Procureur général, le Communiqué de presse, venant colorer les quelques lignes qui constituent les deux arrêts établis en miroir l'un de l'autre, les arrêts ne sont pas clairs.

Chacun va donc faire dire aux arrêts ce qui sert sa thèse ..., comptant bien que le lecteur ne remonte pas jusqu'aux arrêts eux-mêmes.

Mais relisons le premier arrêt rendu, Monsieur Dominique X. c/ Procureur général près la Cour d'appel de Rennes, arrêt qui devrait être plus explicite, puisqu'il a prononcé une cassation. Mais il n'est pas beaucoup  plus clair que son jumeau.

Ce billet a pour objet de rappeler le contenu de l'arrêt, d'en donner le sens, et de trouver la portée. Le contenu est simple, puisqu'il est si bref. Le sens est déjà plus difficile à trouver, car qui connait la signification de l'expression "discordance entre les mentions et la réalité" ?. Quant à la portée, elle est mystérieuse, puisque bien malin qui pourrait dire si la Cour de cassation a rendu un arrêt d'espèce ou un arrêt de principe.

July 4, 2015

Blog

La question qui était posée à la Cour de cassation était une sorte de bloc qui entame le droit tout entier : lorsque des adultes ont été à l'étranger afin de réaliser une convention de gestation pour autrui, que l'enfant est né, leur a été remis, que l'acte de l'état civil a été établi à l'étranger et qu'ils reviennent en France, peuvent-ils prétendre obtenir la transcription de cet acte civil étranger sur l'acte civil français ?

Les intéressés le prétendent car ils sont allés dans un pays dans lequel une telle convention est admis par le droit qui y est applicable. Le ministère public français s'y oppose car en droit français les conventions de mère-porteuse sont frappées d'une nullité d'ordre public, l'article 16 du Code civil rappelant qu'elles sont contraire à la dignité de la personne.

A travers cette question de transcription, c'est donc des immenses questions posées à la Cour : question  de la dignité de la personne ; question de la distinction des personnes, que l'on peut céder même à titre gratuit, et des choses que l'on peut céder ; question du caractère séparable du non de la personne et du corps ; question de la définition de la filiation ; question de l'existence du droit français par rapport aux autres systèmes juridiques de fait accessibles aux personnes qui voyagent.

Souvent, l'on commente de ce que les juges ont dit. L'on se prépare à ce qu'ils pourraient bien dire.

Mais quand ils ne disent rien ?

Car le drame des deux arrêts rendus le 3 juillets 2015 par l'Assemblée plénière de la Cour de cassation, c'est qu'ils ne disent rien.

Ils visent en tout et pour tout les dispositions qui concernent les mentions de l'état civil établi à l'étranger. ne parlent ni du père, ni de la mère, ni de l'enfant. Se contentent de dire que la GPA est indifférente au sujet.

C'est balayer par prétérition la plus grande question qui fût posée au juge ces dernières années.

Dont-acte que c'était donc pas à lui qu'il fallait la poser.

La France n'a donc pas de pouvoir judiciaire.  Faut-il s'en plaindre ? Oui, si l'on approuve la constitution d'un pouvoir juridictionnel. Oui, plus encore, si l'on approuve  la volonté d'une transformation de la Cour de cassation en Cour suprême, ici contrariée par la Cour elle-même. Oui, plus encore, si cela revient à laisser la France diriger dans ses choix politiques fondamentaux par deux arrêts rendus par une section de la CEDH, au bénéfice des pères, sans aucune considération des mères et des femmes.

Mais de cela, les juges qui ont rédigé les quelques lignes des arrêts du 3 juillet 2015 ont fait comme s'ils n'en avaient pas connaissance.

July 3, 2015

Thesaurus : 02. Cour de cassation

Référence complète : Ass. plén., 3 juillet 2015, M. Dominique X. c/ le procureur général près la Cour d'appel de Rennes., pourv. n°14-21.323, arrêt n°619.

Lire l'arrêt, les conclusions et le rapport mais aussi le communiqué de presse.

Accéder à l'autre arrêt, rendu le même jour sur le même temps.

L'arrêt pose dans un premier attendu que les mentions de l'état civil établi à l'étranger sont transcrites dans l'état civil français "sauf si d'autres actes ou pièces détenues, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité.".

En l'espèce, l'enfant est né à Moscou. L'état civil établi en Russie désigne le français Monsieur Dominique X., comme père, et Madame Kristina Z. ressortissant Z., qui a accouché de l'enfant, comme mère.

Le procureur s'est opposé à la transcription de l'acte sur le registre consulaire du fait de convention de gestation pour autrui.

La Cour d'appel de Rennes, dans son arrêt du 15 avril 2014, l'a suivi.

Monsieur Dominique X. forme un pourvoi.

La Cour de cassation casse l'arrêt.

Elle estime que les juges du fond ont violé les textes car ils n'avaient pas constaté que "l'acte était irrégulier, falsifié ou que les faits qui ont été déclarés ne correspondaient pas à la réalité.".

Le critère est donc désormais celui de la  "qualité" de l'état civil établi à l'étranger.

 

Lire le billet de blog relatif aux incertitudes exégétiques des arrêts rendus.

 

July 3, 2015

Thesaurus : 02. Cour de cassation

July 2, 2015

Interviews

Référence complète : Frison-Roche, M.-A., GPA. Si l'on admet qu'un enfant peut être donné, alors il est traité comme une chose, Interview avec Carole Barjon, L'Obs, 2 juillet 2015.

 

Lire l'interview sur le site du journal L'Obs.

June 25, 2015

Conferences

Aller sur le site de PRMIA.

Lire le programme du colloque.

Lire les slides, support de la conférence.

L'Europe a reçu le choc de la crise financière d'une façon différente de la façon dont les États-Unis l'ont reçu : les institutions européennes ont entièrement construit une Europe nouvelle : l'Europe Bancaire. De la même façon qu'en 1945 les chefs de guerre avait dit "plus encore la guerre entre nous", en 2009 les responsables européens ont affirmé "plus jamais de défauts bancaires qui compromettent la paix sociale de nos Nations". À partir de cette volonté purement politique, ce qu'il est convenu d'appeler les trois piliers de l'Union bancaire forment un "bloc", même si les dispositifs techniques se déploient successivement et parallèlement. En effet, la "résolution" est un anglicisme qui désigne une prévention de cessation des paiements lorsqu'elle met en risque un établissement financier, perspective qui risque de déclencher l'obligation pour un État de jouer son rôle de garanti en dernier ressort, recourant à la collectivité du groupe social national.

Ainsi, lorsque l'on regarde les textes organisant le mécanisme de résolution bancaire, on est admiratif devant leur précision et la sûreté du mécanisme. Ce "deuxième pilier" a vocation à bien fonctionner.

Mais il faut garder à l'esprit deux éléments, dont on peut douter parfois que ceux qui ont conçu la mécanique les aient eu toujours en tête.

En premier lieu, il s'agit d'un élément d'un puzzle qui est l'Europe, une Europe qui bouge et se reconstruit dans une cascade de crises dans lesquelles les banques et les États sont imbriqués d'une façon inextricable. Or, le droit de la résolution bancaire semble lisser cela. De la même façon, le droit calme et posé de la résolution bancaire semble ne pas faire place à un personnage qui est et sera pourtant déterminant : le juge. Il serait pourtant judicieux d'y penser toujours, même si l'on est astucieux de n'en parler jamais.

June 19, 2015

Conferences

Cette conférence a pour objet de mesurer l'ampleur du choc que la pratique des contrats de maternité de substitution, que l'on désigne souvent par le sigle de "GPA", engendre sur le droit.

Voir les slides, support de la conférence.

Voir la video de la conférence.

 

Le choc est multiple et profond. Il a de quoi nous laisser désemparés.

Dans un premier temps, l'essentiel est d'avoir conscience de l'ampleur de ce choc et de sa nature..

Le contrat de maternité de substitution consiste pour une personne ayant un "projet d'enfant" à d'obtenir le consentement d'une personne ayant les capacités physiologiques de porter un enfant par le biais d'une grossesse à lui donner cet enfant au moment de l'accouchement, cette prestatrice affirmant par le contrat n'être pas la mère de l'enfant remis.

Celui, celle ou ceux à qui est remis l'enfant veulent que le système juridique les établissent comme "parents" de l'enfant, à travers non plus seulement le contrat mais l'état civil, à travers la technique de la filiation.

Ces accords se pratiquent. Leur développement est dû principalement au fait qu'ils rapportent beaucoup d'argent à des entreprises qui se désignent comme des "agences" et mettent en contact des personnes dont elles encouragent un "projet d'enfant" et des femmes dont elles leur apprennent la "richesse" dont elles sont les heureuses dépositaires : le pouvoir d'engendrer des enfants. La mise en contact de ces deux populations, que ces opérateurs économiques transforment en "demandeurs" et en "offreurs", rendent ces agences et leurs prestataires - médecins et avocats - très prospères. Le phénomène se propage, ainsi que les profits.

Le Droit, au sens de la jurisprudence puis de la législation, a récusé ces accords, qualifiés de contraires à la dignité de la femme et de l'enfant. Aujourd'hui, un certain nombre de personnes demandent à ce que le Droit "évolue" et accepte d'associer à ces conventions non plus une nullité absolue mais un principe de licéité, plus ou moins conditionné. Ceux qui s'y opposent sont parfois présentés comme "réactionnaires", comme hostiles à ceux qui se prévalent d'un amour pour l'enfant, comme indifférents à cet enfant, qui est là.

L'essentiel ici n'est pas de trancher dans un sens ou dans l'autre, mais de montrer que cette question particulière touche le Droit dans son essence. C'est pourquoi la question est si importante. Toute femme doit y être sensible, si l'on présume que l'on est plus sensible à la situation des autres femmes, mais c'est tout être humain qui doit y être sensible, car c'est l'idée même de personne qui est ici en jeu. Et d'une façon définitive.

Le Droit est en effet heurté par ces pratiques de conventions "mère-porteuse" dont les bénéficiaires exigent du droit qu'il leur attache pleine efficacité. Le choc s'opère de six façons. Six façons qui le remettent en cause d'une façon fondamentale.

Et le Droit peut y répondre de deux manières, qui va déterminer l'avenir des femmes et des enfants.

May 23, 2015

Conferences

Les Conférences Ernest se déroulent à l'École Normale Supérieure, rue d'Ulm à Paris.

Elles portent sur des thèmes très variées, chaque orateur exposant pendant 1/4 d'heure un thème tout à la fois fondamental et d'actualité. Une discussion s'en suit avec un public varié. L'ensemble est filmé et diffusé ensuite sur Internet.

Regarder la vidéo de la conférence.

Consulter les slides, support de la conférence.

Le thème choisi ici avec les étudiants de l'École Normale Supérieur sont les Enjeux juridiques de la GPA.

Il est d'actualité en ce qu'une pratique d'accords s'est développée pour que des femmes fertiles portent des enfants et les remettent à la naissance à une ou deux personnes ayant "l'intention" d'être parents, ceux-ci estimant que cela doit suffire pour générer une filiation, tandis que par contrat celle qui a porté l'enfant s'efface et déclare n'être pas la mère de l'enfant remis.

La nouveauté est le sentiment par certains, parmi ceux qui le pratiquent, parmi ceux qui observent la pratique, du caractère acceptable de cette façon d'avoir des enfants, le désir de leur avoir, la volonté d'en prendre soin, suffisant. C'est alors le système juridique, en ce qu'il attache une nullité absolue aux conventions de mère-porteuse, qui met en esclavage la mère et traite l'enfant cédé comme une chose, qui serait réactionnaire, non-conforme aux intérêts de l'enfant. Entre la pratique et le droit, cela ne serait plus aux pratiques d'être sanctionnées, cela serait au système juridique d'être rénové car ce serait lui qui serait critiquable.

Cette question est très actuelle : les procès sont en cours. L'opinion publique commence à s'émouvoir et cherche à comprendre non seulement ce qui se passe mais plus encore à mesurer qui est vraiment en danger dans cette généralisation.

C'est au nom du Droit que cette pratique est sanctionnée par la nullité des conventions, notamment par la loi et les cours constitutionnelles. C'est au nom des Droits, et des Droits de l'homme qui plus est, que certains veulent une évolution, notamment la Cour européenne des droits de l'homme.

Est-ce un sujet limité ? Peut-on évoluer doucement et ponctuellement ? Ou bien céder un peu, c'est céder tout, dans la mesure où dans son principe même les conventions de maternité de substitution, supposent une disponibilité des corps des femmes et des enfants qui ne supportent pas des demies-mesures et qui n'appellent qu'un rejet en bloc ?

En tout cas, cela n'est pas une "petite affaire", une affaire de famille et de couple amoureux qui donnera une bonne éducation à un enfant choyé. C'est le Droit lui-même qui est sommé de revenir sur ce qui est à la base du droit occidental , soit pour défendre ses fondements, soit pour en changer :  l'articulation entre le Droit et le fait (une pratique est un fait), l'articulation entre la Personne et les choses (la Personne humaine est son corps, qui n'est pas une chose distante et disponible).

May 20, 2015

Thesaurus : 02. Cour de cassation

La chambre criminelle de la cour de cassation a précisé la portée qu'elle donne à la décision du 18 mars 2015 rendue par le Conseil constitutionnel, EADS.

Un prévenu ne peut plus être condamné, sur le fondement de l' article L. 465 1 du Code monétaire et financier , pour des faits identiques à ceux pour lesquels la commission des sanctions de l'AMF avait antérieurement statué à son encontre de manière définitive sur le fondement de l'article L. 621 15 du même Code.

Quand bien même le juge pénal aurait, comme en l'espèce, fait application en matière de délit boursier des dispositions de l' article L. 621 16 du Code monétaire et financier permettant d'imputer la sanction pécuniaire prononcée par la commission des sanctions de l'AMF sur le montant de l'amende pénale, faisant ainsi application du principe de proportionnalité rappelée alors par le Conseil constitutionnel dans sa décision du 29 juillet 1989 sur la loi relative à la sécurité et à la transparence du marché financier, le principe ne bis in idem fera désormais obstacle à ce que le juge pénal puisse prononcer une quelconque sanction après un décision définitive de condamnation prononcée du chef du manquement boursier correspondant.

April 23, 2015

Publications

Référence complète : Frison-Roche, M.-A., La Cour de justice de l'Union européenne, juge de la Banque centrale européenne, D.2015, 23 avril 2015.

Le pouvoir de la BCE de soutenir indirectement les Etats-membres est en cause devant la Cour de Justice de l'Union européenne. On sait que celle-ci n'y verra pas de contrariété avec les traités européens fondateurs, car la Cour ferait s'effondrer l'Europe, mais par ses conclusions l'Avocat général a déjà montré que les juges avaient barre sur le Banquier central.

Le système Check and Balance arrive en Europe.

Lire l'article.

April 16, 2015

Organization of scientific events

Il s'agit d'une conférence-débat de Madame Christiane Taubira, Ministre de la Justice, garde des Sceaux

Lire le compte-rendu fait par le Ministère de la justice.

Lire l'article de Marie-Anne Frison-Roche, faisant suite : Les lignes de force de la réforme du droit français des contrats.

Cette conférence-débat a eu lieu à Sciences po (Paris), le 16 avril 2015, de 17h à 19h.

Son thème porte sur La réforme du droit des contrats.

La participation était sur invitation.

17h00 : Accueil et mot de bienvenue par Frédéric Mion, directeur de Sciences Po

17h05 : Présentation de la réforme du droit des contrats par Christiane Taubira, ministre de la justice, Garde des Sceaux

17h25 : Débat entre Christiane Taubira et deux dirigeants  d’entreprise

-          Rémi Cléro, Président Directeur Général d'Amore Pacific Europe

-          Jean-Marc Janaillac, Président Directeur Général de Transdev

 

18h00 : Débat entre Christiane Taubira et les étudiants

Modération des débats par Marie-Anne Frison-Roche, professeur de droit à Sciences po.

 

 

April 5, 2015

Publications

Droit et Marché à première vue ne sont pas sur le même plan, l'un étant une construction, une invention humaine, l'autre étant des marchés. Mais depuis le XVIIIième en Europe, l'on a pareillement institué, donc inventé le "Marché".

Ces deux institutions ont un rapport dialectique, puisque c'est par le droit que le Marché a été construit. La puissance des institutions dépend de ceux qui les construisent mais surtout de la foi de ceux qui les contemplent. Or, si le Droit a construit le Marché, aujourd'hui la foi se tourne vers le Marché et la croyance d'une loi qui lui sera proche et naturelle le rend universel, transportant avec lui sa "petite loi" juridique qu'est le contrat et le juge qui y est inclus, l'arbitre.

Plus encore, parce tout cela n'est qu'affaires humaines et donc affaires de pouvoir, la place de l'Institution qui fût celle de la puissance, tirée de sa source, par exemple le Peuple Constituant, est en train de descendre en-dessous de ce qui est là, c'est-à-dire le fait. En effet, que peut-on contre un fait ? Seul Dieu, et donc une Assemblée parlementaire par exemple qu'il est aisé de destituer, peut prétendre lutter contre un fait. Or, le Marché est aujourd'hui présenté comme un fait, tandis que ce qui le gouvernent seraient des phénomènes naturels, comme l'attraction entre l'offre et la demande, le fait d'offre ce qui attire, le fait de demander ce que l'on désire. Dès lors, seul Dieu, souvent brandi avec grande violence, peut prétendre encore dire quelque chose contre cela.

Aujourd'hui, Droit et Marché sont face à face. Curieusement les juristes sont assez taisant, peut-être sidérés de la destitution du Droit. Mais c'est la question de la Loi première qui est en jeu. Dans l'esprit occidental, depuis la pensée grecque l'on a pensé le sujet et la personne comme étant première, c'est-à-dire posée sans condition. Si on pose comme loi première l'efficacité de la rencontre des offres et des demandes, le monde a changé. Un monde sans Personne, avec des êtres humains plus ou moins attrayant, plus ou moins demanding , le monde des puissances ayant remplacé le monde de la volonté égale de tous. La technique devient la préoccupation première. Le droit qui était "art pratique" et les lois faites pour l'homme, devient une technique et les juristes se devront alors d'être neutres.

Depuis quelques décennies, Droit et Marché sont donc face-à-face (I), mais le Marché semble en passe de dominer parce qu'il est en train de quitter le statut inférieur d'institution pour accéder à celui, universel, de fait (II). L'enjeu devient alors de mesurer les effets d'une telle évolution et de déterminer, si le Droit devait s'effacer, quelles normes viendrait le remplacer (III). 

March 20, 2015

Publications

Le 18 mars 2015, Conseil constitutionnel a rendu sur QPC la décision M. John L.. et autres, que chacun va appeler "la décision EADS".

Il est clair que le cumul de poursuite à la fois pour manquement d'initié et pour délit d'initié est déclaré non-conforme à la Constitution. Enfin.

La question pertinente est celle de la portée de la décision.

La lecture de la décision montre que sa portée est considérable. En effet, la jurisprudence jusqu'ici, Conseil d'Etat et Conseil constitutionnel confondus, affirmaient per se  qu'une sanction administrative ete qu'une sanction pénale n'ont pas la même nature.

Or, dans la Décision EADS, c'est fini : le Conseil constate que délit d'initié et manquement d'initié ont la même nature. Dès lors, le cumul n'est pas possible.

Il va falloir pour tous les autres cas, devant toutes les autres Autorités de concurrence et de régulation, examiner si la sanction administrative et la sanction pénale ont de fait la même nature ou non. Au cas par cas.

Le droit a donc changé le 18 mars 2015. Le Conseil constitutionnel montre que l'efficacité, socle de ces mécanismes de cumul, n'est pas tout et que les principes de procédure, par exemple non bis in idem, dès l'instant qu'il y a identité de nature, prévalent.

Accéder à l'article de presse.

Voir ci-dessous les liens pertinents vers les décisions et institutions citées citées.

March 4, 2015

Thesaurus : Doctrine

 

Référence complète : M. Mekki, L. Cadiet et C. Grimaldi (dir.), La preuve : regards croisé, Dalloz, coll. "Thèmes et commentaires", 2015. 
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Feb. 17, 2015

Blog

À affaire célèbre, arrêt fameux.

Rendu le 17 février 2015, l'arrêt de la Cour d'appel de Paris dans ce qu'il est convenu d'appeler "l'affaire Tapie" était très attendu.

On se souvient que la sentence arbitrale du 7 juillet 2008 a estimé que lors de la cession des titres de la société Adidas, le Crédit Lyonnais avait commis des fautes dans le conseil qu'il devait au vendeur, le groupe Tapie, octroyant en conséquence une indemnisation à celui-ci pour un montant élevé.

Le CDR, structure privée de defeasance adossée à l'EPFR, structure de l'État, avait tenté plusieurs types de recours contre la sentence, dont un recours en révision. Pour réussir, celui-ci doit s'appuyer sur des "éléments nouveaux et déterminants". En outre, s'il s'agit d'un arbitrage interne (et non pas d'un arbitrage international), la Cour d'appel de Paris si elle accueille une telle voie de recours peut décider de se substituer au Tribunal arbitral et connaître de l'affaire au fond.

Le reste de l'arrêt peut paraître factuel, le dossier civil étant largement alimenté par le dossier pénal, puisque désormais une instance pénale en cours n'oblige plus le juge civile à suspendre le cours du procès qui se déroule devant lui et lui permet au contraire de puiser dans le premier dossier .

L'on se demande ainsi si l'on ait enfin à la fin de l'histoire. Ainsi en est-il de l'obligation ou non de Bernard Tapie de rembourser immédiatement les fonds reçus. Sans doute, puisque les parties sont remises en l'état du fait de la rétractation de la sentence. Dès lors, il lui faut bien rendre ce qu'il est censé n'avoir jamais reçu. Mais parce que l'arrêt ne lui ordonne pas expressément, ne va-t-il pas opposer une inertie contraignant les demandeurs à soit solliciter de la Cour une interprétation de son arrêt soit aller devant le juge de l'exécution ?

Mais l'arrêt contient également une discussion juridique de fond. En effet, suivant que l'arbitrage est "interne" ou "international", les règles de droit changent. C'est pourquoi les parties se sont beaucoup disputées à ce propos. La Cour d'appel de Paris choisit de qualifier l'arbitrage d' "arbitrage interne" : bien joué, puisque cela lui permet de trancher le litige au fond après avoir rétracté la sentence au titre de l'action en révision.

Mais la qualification est un art juridique contrôlée par la Cour de cassation. Après une longue évolution jurisprudentielle, le Code de procédure civile a fini par qualifier l'arbitrage international par l'objet sur lequel il porte : un "intérêt du commerce international". Est-ce le cas en l'espèce ?

 

Feb. 17, 2015

Interviews

L'arrêt de la Cour d'appel de Paris, saisie d'un recours en révision, est attendu pour le début de l'après-midi.

Le recours en annulation de la sentence arbitrale prononcée en faveur de Bernard Tapie contre le CDR a été rejeté par un arrêt précédant de la Cour d'appel, du fait d'une prescription de l'action.

Le recours en révision pourrait être déclaré recevable du fait d' "éléments nouveaux", condition de recevabilité de ce type de recours.

Ces "éléments nouveaux" pourraient être puisés par le juge civil (ici la Cour d'appel de Paris) dans le dossier en cours d'instruction par les magistrats dans l'instance pénale par ailleurs en cours.

Si l'action en révision est déclarée recevable, ce qui est un premier point, l'enjeu crucial est alors le suivant.

Soit, et c'est une question de fond, l'article est qualifié par la Cour d'appel de Paris, d' "arbitrage interne", ce qui autorise la Cour de statuer au fond sur le litige qui oppose depuis des années le groupe Tapie au Crédit Lyonnais. Mais cette qualification n'est en rien acquise.

En effet, le Code de procédure civile et la jurisprudence qualifie d' "arbitrage international" tout arbitrage qui met en cause les "intérêts du commerce international". Or, les titres cédés (les titres de la société Adidas) ne sont pas français. Les sociétés qui ont été utilisées pour le montage ne sont pas françaises. Seul le contrat de mandat donné à la banque ramène à des intérêts de droit français. Cela peut-il suffire à rendre l'arbitrage de "droit interne" ?

Si cela ne l'était pas, et beaucoup en doute, alors si les éléments sont suffisants pour ouvrir une révision qui anéantit la première procédure d'arbitrage, parce que l'arbitrage serait de nature internationale, la Cour d'appel de Paris ne pourrait pas pour autant statuer sur le fond.

Il faudrait alors que le Tribunal de commerce de Paris désigne de nouveaux arbitres. Une demande en ce sens a déjà été formée devant lui. Il a pour l'instant sursis à statuer.

Sauf à ce que la Cour d'appel de Paris, par exemple pour la bonne administration de la justice, pour des raisons d'ordre public économique, pour la protection de la place arbitrale de Paris, décide d'évoquer l'affaire, selon les principes généraux de la procédure. Pourquoi pas.

Feb. 6, 2015

Thesaurus : 01. Conseil constitutionnel

Full reference: Conseil constitutionnel, 6th of February 2015, Société Mutuelle des transports assurance, Decision n° 2014-449 QPC

Read the decision (in French)

Jan. 30, 2015

Teachings : Participation à des jurys de thèses

► Référence  : Frison-Roche, M.-A., rapporteure et membre du jury de la thèse de Wilfried Bigenwald, La responsabilité des ordres professionnels du fait de leurs membres : fondement et régimeUniversité Aix-Marseille III,  30 janvier 2015. 

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Le travail de thèse a été débutée sous la direction de Christian Atias et poursuivi sous la direction de Frédéric Rouvière

Résumé de la thèse : La thèse a pour principal objectif d'imaginer que sur le seul fondement du principe général de la responsabilité du fait d'autrui, selon l'article 1384, al.1 du Code civil, un ordre professionnel pourrait être responsabilité du fait des fautes commises par ses membres au détriment de leurs clients.

Ainsi, non seulement la situation de ces clients en serait renforcée par un mécanisme s'apparentant à une garantie, par une responsabilité de second rang, mais encore la responsabilité de l'ordre inciterait celui-ci à exercer sur ses membres une discipline qui doit s'accroître, une action de formation, etc., qui donnera à l'ordre toute la place qui doit prendre à l'avenir.

► Autres membres du jury :   

  • Lombard, F., S., professeure l’Université d'Avignon, rapporteur
  • Ricci, J.-Cl, professeur l’Université Université Aix-Marseille III, directeur de la thèse ; 
  • Rouvière, F., professeur à l’Université Université Aix-Marseille III, directeur de la thèse; 
  • Robert, J.-H., professeur à l'Université Panthéon-Assas (Paris II), directeur de l'Institut de criminologie. 

 

► Lire le résumé et la table des matières  de la  thèse

 

Au terme de la soutenance, le candidat a obtenu le titre de docteur en droit. 

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Jan. 20, 2015

Thesaurus : Doctrine

Référence complète : MARTUCCI, Francesco, Programme OMT de la BCE : voici venu le temps des juges, Revue Banque, n°779-780, janvier 2015, p.60-62.

Les étudiants de Sciences Po peuvent accéder au texte de l'article par le Drive de Sciences Po (dossier MAFR, Régulation)

 

Dans cet article publié avant que ne soit connues les conclusions déposées par l'avocat général, l'auteur affirmé que la question préjudicielle posée par le Tribunal constitutionnel allemande est une question "existentielle" pour la monnaie européenne et pour la zone euro. En effet, le programme d'achat de titres souverains sur les marchés secondaires (OMT) est, contrairement au programme de soutien précédent (SMP) présenté par le président de la BCE comme pouvant être "illimité".

L'auteur souligne que lorsqu'on lit la décision par laquelle le Tribunal constitutionnel allemande a renvoyé la question préjudicielle à la CJUE, on y perçoit sa propre conception, à savoir la non-conformité du programme OMT au traité de fonctionnement de l'Union européenne (TFUE), sauf à interpréter ce programme de façon très restrictive, notamment par la renonciation à son caractère "illimité" (ce qui revient à lui ôter sa puissance même ...).

Plus encore, le Tribunal constitutionnel allemand considère que si la CJUE ne le suivait pas, alors elle porterait atteinte à "l'identité constitutionnelle" de l'Allemagne (ce que l'auteur de l'article conteste, notamment au nom de la hiérarchie des normes).

L'auteur de l'article évoque plusieurs positions possibles de la CJUE (la dernière correspondant à celle suggérée par la suite par l'avocat général).

Jan. 14, 2015

Blog

Oublions un instant l'objet même de l'arrêt AZF et limitons la lecture à la question procédurale tranchée par l'arrêt rendu par la chambre criminelle de la Cour de cassation le 13 janvier 2015.

Celui-ci est très remarquable et mérite pleine approbation en ce qu'il affirme l'obligation des juges de respecter l'impartialité de l'institution juridictionnelle, mise à mal si les personnes qui ont à faire à elle peuvent établir un "doute objectif" concernant l'impartialité d'un juge.

A travers cette affirmation, c'est un jeu de présomptions, la principale étant la présomption de l'impartialité du juge, que la Cour de cassation établit, mettant en juste mesure les charges et les objets de preuve en la matière.

Lire ci-dessous un commentaire développé de l'arrêt.

 

 

 

Dec. 19, 2014

Thesaurus : Doctrine

Référence  générale : Gasbaoui, J., Normes comptables et droit privé - Analyse juridique des documents comptables , coll. " Institut de droit des affaires", éd. Presses universitaires d'Aix-Marseille, Paris, 2014, 504 p.

 

Lire la table des matières.

Lire la quatrième de couverture.

 

Cet ouvrage a été publié à la suite d'une thèse soutenue par l'auteur en 2012.

 

Lire le résumé ci-dessous :

Dec. 17, 2014

Thesaurus : 02. Cour de cassation

Dec. 17, 2014

Thesaurus : 02. Cour de cassation

Dec. 1, 2014

Publications

Full reference: Frison-Roche, M.A., Généralités sur le principe du contradictoire. Étude de droit processuel, coll. "Anthologie du Droit", LGDJ - Lextenso éditions, 2014, 221 p.

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Republished from Généralités sur le principe du contradictoire », Étude de droit processuel, Th. Paris II, 1988. 

This book is the publication of a thèse d'Etat (French official thesis) written under the direction of Jean Foyer and defended in the Panthéon-Assas University (Paris II) face to a jury made up among others of François Terré, René Chapus, Gérard Cornu, Geneviève Viney. 

The main idea is to defend that the principle of contradictory is a simple and fundamental principle, without which there is no Law. It is the reason it is obvious to study it as in civil procedure as in criminal, administrative or arbitrary procedures, to take back a "Procedural Law" perspective conceived by Motulsky. Indeed, without a judge listening without having already decided the facts and Law versions that presents who's the situation will be affected by the decision that the judge will make, there is no rule of Law. 

The main beneficiary of the principle of contradictory, it is not really the person, and it is in this that the contradictory is detached from the rights of the defense, it is the judge. Indeed, emphasizing contradictory versions of Law and facts which collide in front of him or her, the judge perceives more exactly and more fairly the world and the use of Law that he or she should favor. Thus, Law is better used. In this, we can consider that the principle of contradictory is consubstantial to Law.

Read the summary (in French)

Read the introduction (in French)

Read the table of contents (in French)