Jan. 13, 2003

Thesaurus : 01. Conseil constitutionnel

Conseil constitutionnel

Décision du 13 janvier 2003 relative à la loi relative aux salaires, au temps de travail et au développement de l'emploi

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Le Conseil constitutionnel est ici saisi d’un recours de contrôle a priori à propos de la loi relative au temps de travail et au développement de l’emploi. Les requérants estiment que la loi votée mais non encore promulguée porte atteinte à la liberté contractuelle. Dans son considérant n°4, le conseil pose que le législateur ne saurait porter aux contrats légalement conclus une atteinte qui ne soit justifiée par un motif d’intérêt général suffisant sans méconnaitre les exigences résultant des articles 4 et 16 de la déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789.

Après avoir ainsi constitutionnalisé l’intangibilité des contrats du fait de leur force obligatoire, qui s’impose ainsi non seulement aux parties mais au législateur, le Conseil examine la loi qui lui est soumise. L’article 16 de celle-ci prévoit, à la lumière des débats parlementaires, que les accords collectifs qui n’étaient pas conformes à la législation applicable lors de leur signature mais seraient conformes à la loi déférée, seront de ce seul fait insusceptible d’être contestés devant les juges.

Le Conseil estime que la présente loi ne confère donc pas d’autres effets que ceux voulus par les signataires des accords collectifs antérieurs eux-mêmes ; il n’y a pas à proprement parler d’extension d’accords et qu’à cette condition, le grief manque en fait, ce qui rend sans objet le grief d’anti-constitutionnalité.

L’essentielle de cette décision est que le Conseil, comme le fit la jurisprudence classique à propos de l’autonomie de la volonté tire du principe de « liberté contractuelle » d’autres principes fondamentaux qu’il estime lui être sous-jacent. En effet au sens strict la liberté contractuelle implique seulement le droit pour les parties de ne pas contracter, de contracter, de choisir avec qui contracter et quoi contracter. C’est faire un pas supplémentaire que de considérer que l’impossibilité pour le législateur de porter atteinte aux contrats conclus autrement que par un motif d’intérêt général est un principe secondaire de la liberté contractuelle. Cela ne va pas de soi. D’ordinaire, il est usuel de rattacher la règle, dans la théorie générale de l’application de la loi dans le temps à la théorie secondaire de la survie de la situation contractuelle.

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Ce changement de fondement ici observé dans la décision du 13 janvier 2003, mettant donc au centre la liberté contractuelle, montre que celle-ci a un niveau élevé dans l’ordre constitutionnel.

Le droit constitutionnel français n’en est pourtant pas au niveau du droit constitutionnel nord-américain, dans lequel la Cour suprême a construit sur la liberté contractuelle, l’ensemble de droits constitutionnels fondamentaux. Cela tient sans doute au fait que les sociétés anglo-nord-américaines sont davantage contractualistes que les nôtres.

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